Daniel: "Contre le baptême par effusion" - Une épître de l’Archevêque Nicéphore de Slovanie et de Chersonèse
Une épître de l’Archevêque Nicéphore de Slovanie et de Chersonèse (1)

A cause de mon rand, je suis obligé de surveiller toutes choses et de vérifier que toute chose soit entièrement préservée et nullement altérée. En premier, j’attire votre attention sur le Saint Baptême, qui est la porte de tous les mystères, le début de notre salut, l’absolution du péché et la réconciliation avec Dieu. Il est le don de l’adoption car dans le baptême, nous devenons les enfants de Dieu et les héritiers du Christ, revêtant le Christ notre Seigneur, selon mot de l’apôtre Paul : « Vous tous qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu le Christ ». Sans cela, le baptême est impossible. « Amen, amen, je vous le dis, si l’homme ne naît pas d’eau et d’Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu » (Jean 3 :5)

Au sujet du saint mystère, je dois attirer l’attention sur ceci :

1° Le mot lui-même et le nom de ce mystère, dans le langage initialement utilisé par les apôtres divinement illuminés afin de nous communiquer la bonne nouvelle de l’Evangile, signifie en réalité immersion et non effusion ou aspersion.

2° Le premier à instituer le baptême –le Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, entra dans le fleuve Jourdain, et s’étant immergé, fut baptisé

3° L’apôtre Philippe entra dans l’eau avec l’eunuque pour le baptiser « Et ils entrèrent dans l’eau, aussi bien Philippe que l’Eunuque, et il le baptisa » (Actes 8,38)

4° L’Eglise orthodoxe, selon la tradition apostolique, a toujours baptisé par immersion. Ceci est vu dans le 7e canon du Second concile œcuménique qui parle d’immersion ; dans le seconde homélie concernant la réalisation des mystères par Saint Cyrille de Jérusalem, il est clairement écrit : « vous avez confessé la confession salvifique, et vous étant immergés trois fois dans l’eau, vous en êtes ressortis », et dans les mots de Saint Basile le Grand : « Le grand mystère du baptême est accompli par trois immersions et le même nombre d’invocations »

5° L’immersion dans l’eau, et de façon plus spécifique la triple immersion, et aussi le fait de sortir à trois reprises de l’eau ne fut pas institué de façon arbitraire ou accidentelle, mais à l’image de la Résurrection du Christ le troisième jour ». « L’eau », dit le bienheureux Basile, « a la signification symbolique de la mort, et accepte le corps comme en un cercueil ». Comment alors, figurons-nous nous-mêmes Celui Qui est descendu dans l’Hadès, imitant Son ensevelissement par le baptême ? Les corps de ceux qui sont baptisés dans l’eau sont enterrés, dans un certain sens. En conséquence, le baptême représente mystiquement la mise des côtés des soucis du corps, selon les mots de l’Apôtre : « Et c'est en lui que vous avez été circoncis d'une circoncision que la main n'a pas faite, mais de la circoncision de Christ, qui consiste dans le dépouillement du corps de la chair» (Colossiens 2 :11) Saint Cyrille, dans son commentaire de ces mots déclare : « Ainsi, avec l’aide de ces signes, vous avez figuré les trois jours au tombeau du Christ car, de même que notre Sauveur fut au cœur de la terre trois jours et trois nuits, lors de votre première sortie, vous symbolisez le premier jour de Son séjour sous terre, et par votre immersion, vous symbolisiez la nuit. Car, de même que celui qui marche dans la nuit ne voit rien, et celui qui marche durant le jour le fait dans la lumière, de même étant immergé dans l’eau vous ne voyiez rien, et étant sortis de l’eau, vous voyez tout comme en plein jour . Vous étiez à la fois mort et ensuit nés. Ainsi, l’eau salvifique était à la fois un cercueil et une mère. Quoique nous ne mourrions pas réellement, ni ne soyons enterrés, ni ne soyons cloués sur la croix, mais ne faisions que simuler cela symboliquement, nous parvenons néanmoins au salut »

6° L’Eglise orthodoxe, depuis les premiers temps, baptise par une triple immersion et émersion de l’eau. Les Grecs, les Arabes, les Bulgares, les Serbes baptisent de cette façon. Ainsi fait-on dans l’Eglise de Russie. Chacune de ces églises a un vase dans lequel est immergé l’enfant nu avec l’invocation de la Sainte Trinité. Il n’y a aucun doute que cette pratique du baptême des enfants étaient la même en Petite Russie. Le Saint Prince Vladimir, qui vécut et régna à Kiev, accepta la foi et les rites ecclésiastiques des Grecs, qui alors et jusqu’à aujourd’hui, baptisent par l’immersion. Ne semble-t-il pas étrange que ceux qui furent enseignés par les Grecs et baptisés par les Grecs à présent ne baptisent pas par immersion ?

Ceci dit, je suppose que la pratique du baptême par effusion débuta à Kiev puis se répandit en Petite Russie.

Un tel éloignement de la pratique originelle vint du temps où les uniates prirent le pouvoir sur la métropole de Kiev. Dans l’Eglise romaine, jusqu’au 12e siècle ou mieux dit, jusqu’à la fin du 13e siècle, le baptême par immersion était pratiqué. Mais alors, ils se mirent à baptiser pas uniquement par effusion mais aussi par aspersion. En conséquence, les Petit-russes sont les seules orthodoxes sont le seule peuple orthodoxe qui a remplacé l’immersion par l’effusion. Ceci a donné un motif aux schismatiques de nous accuser de négliger la tradition apostolique, qui est préservée sans changement dans toute l’église orthodoxe. Ils nous accusent de suivre l’exemple des papistes qui, avec de nombreuses suppressions incorrectes, ont eu l’audace d’altérer le Saint Baptême. Le divin apôtre Paul loua les Corinthiens pour leur fidélité à la tradition avec les mots suivants : "Je vous loue, [mes frères], de ce que vous vous souvenez de moi à tous égards, et de ce que vous retenez mes instructions telles que je vous les ai données." (I Cor. 11:2). Il invite les Thessaloniciens à conserver les traditions : "Dès lors, frères, tenez bon, gardez fermement les traditions que vous avez apprises de nous, de vive voix ou par lettre." ( 2 Thess. 2:15).

La méthode de la triple immersion est en effet une tradition apostolique, à laquelle l’Eglise orthodoxe adhère fermement depuis les temps apostoliques jusqu’à nos jours. Saint Basile indique plutôt clairement le danger qui existe à exclure du mystère du Saint Baptême toute chose qui nous a été léguée : « Il y a tribulation quand quelqu’un meurt sans baptême, ou quand quelque chose dans le mystère du baptême tel qu’il nous a été transmis est omis ».

Comment est-il possible que nous fassions des omissions dans quelque chose d’une telle importance ? Pourquoi ne conservons-nous pas cette sainte et apostolique tradition (à savoir le baptême par triple immersion), comme il est gardé dans toute l’église orthodoxe ? Quelle raison, quelle excuse pouvons-nous donner pour expliquer pourquoi ce mystère est accompli différemment par nous ? Pourquoi n’est-il pas réalisé tel qu’il nous fut transmis par les apôtres, tel qu’il fut enseigné par les saints pères, tel que l’entière Eglise orthodoxe l’a toujours accompli jusqu’à nos jours ? Peut-être certains vont dire qu'’l est dangereux d’immerger les nouveaux nés dans l’eau. Mais une telle excuse est à rapprocher de celle au sujet de laquelle le prophète royale [ Note du traducteur : il s’agit du roi David] pria : “N’incline pas mon cœur à des paroles perverses, pour donner de mauvaises raisons à mes péchés ». Les vies de Son Altesse Royale, l’Empereur et Grand Prince Paul Petrovitch et de ses enfants royaux sont très précieuses. Cependant, sans hésitation et avec la grâce de Dieu, ils furent baptisés par triple immersion dans un vase profond, ce que j’ai vu de mes propres yeux dans l’église impériale. Si un tel exemple ne suffit pas, il y a celui des innombrables enfants de par le monde entier, que l’Eglise baptise chaque jour, ou mieux dit, chaque heure, par triple immersion sans aucun danger pour leur vie. Cela devrait suffire. Enfin, si quelqu’un venait à dire que l’eau froide en hiver pourrait être dangereuse pour la santé de l’enfant, il doit savoir qu’il n’y a pas de loi qui affirme que l’eau utilisée pour le baptême doit être cold ou presque glacée. Il est possible d’utiliser de l’eau à la température de la pièce, qui n’est pas aussi froide que celle qu’on trouve dehors [ …]».

Je voudrais faire quelques remarques additionnelles toutes personnelles dans la foulée de ce texte.

La majeure partie des explications pour la non immersion que j’ai entendues ne tenaient véritablement pas.
J’ai en effet entendu parler de risque de noyade. Sans commentaire…

Comme je l’ai déjà signalé, la taille du baptisé n’est pas un obstacle à la triple immersion. Toute paroisse peut anticiper le fait qu’elle ait à procéder un jour à un baptême d’adulte ou d’adolescent ou d’enfant assez grand. Par ailleurs, s’agissant de baptême qui sont en général prévu à l’avance, il est possible de faire les démarches en avance pour se procurer ce matériel. Les solutions existent en France. Les témoins de Jéhovah qui pratiquent un baptême par une seule immersion trouvent des solutions par le biais de sorte de grandes bassines en plastique. Leur coût n’est pas insurmontable. En Afrique, cela est aussi assez courant d’après les photos que j’ai vues. Si les Africains ont les moyens de s’en procurer… pourquoi pas en Europe ? Une fois le baptême accompli, la bassine est vidée, manuellement, ou avec une minipompe (pour les plus perfectionnés) et rangée dans un coin. J’ai vu de telles choses dans une paroisse en Russie qui ne roulait pas sur l’or et dans deux paroisses en France.

Je confirme également que la non pratique de la triple immersion est un des angles d’attaque préféré des orthodoxes traditionnalistes (églises des catacombes en Russie, vieux-calendéristes etc) à l’égard des églises officielles. Comme quoi, les choses ont peu changé. Cela contribue à troubler les fidèles car les contestataires sont très rigoureux, procèdent par triple immersion alors que la majeure partie des cas d’aspersion ou d’effusion ne sont pas justifiés par des impératifs pressants.

Concernant la symbolique, le théologien grec Constantin Oikonomos (2) (1780-1857) déclare la chose suivante : « Le premier [le baptisé par immersion] est enterré tel un défunt dans une tombe » et « se lève », « à l’imitation du Seigneur ». Le second [celui qui est baptisé par effusion] « quand l’eau est versé sur lui, est debout » et « ne descend ni ne ressurgit comme s’il s’agissait du tombeau ». Le premier « avec son propre corps dépeint les trois jours au tombeau et la résurrection ». Le dernier « ne dépeint pas du tout le mystère » vu qu’il ne participe pas à l’événement réel. Et par l’aspersion, il passe par « un étrange et non naturel … ensevelissement ». Le premier « a la tombe […] dans laquelle[…] il descend ». Le second porte la tombe comme si elle pendait au-dessus de sa tête, et de là descendait à ses pieds. Et qu’est-ce qui pourrait être plus contrefait que cela ? »

Concernant le caractère valable des baptêmes qui n’ont pas été donné par triple immersion, on note cette phrase de Saint Basile citée par l’évêque ukrainien : « Il y a tribulation quand quelqu’un meurt sans baptême, ou quand quelque chose dans le mystère du baptême tel qu’il nous a été transmis est omis ».
Ce n’est pas un cas isolé car il semble que l’Eglise ait vu les baptêmes autres que par triple immersion de façon douteuse. Je cite le Père George Métallinos dans son livre « I confess one baptism » qui parle du baptême par effusion donné à des personnes alitées, et donc pour une bonne raison

« En dépit de cela l’Eglise a toujours regardé avec scepticisme les personnes qui avaient reçu un tel baptême et ainsi, si elles se rétablissaient, elles étaient privées du droit à être ordonnées, car leur baptême était considéré imparfait […]. Oikonomos offre une explication différente et donc intéressante : « Quand, par nécessité, ils baptisaient des personnes alitées, ils ne le faisaient pas par aspersion (à la façon latine) ni par effusion, en versant de l’au sur la tête, mais mouillaient le corps entier ». Ce type de baptême n’était pas répété, « mais était considéré comme un SCEAU IMPARFAIT ».

1 : Le texte anglais est accessible à ce lien ICI

2 : Constantin Oikonomos fut un théologien grec très connu et respecté. L’extrait est traduit du livre du Père Georges Métallinos « I confess one baptism » disponible en ligne ICI
Une petite biographie est en ligne ICI





Rédigé par Daniel O. le 14 Novembre 2012 à 17:44 | 4 commentaires | Permalien



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