De la station de métro  "Voïkovskaïa"
Un document qui est tombé entre mes mains me fait reprendre un sujet que j’ai déjà traité auparavant.

La municipalité de Moscou en la personne de A.Tchistiakov, président du comité des relations sociales de Moscou, refuse de renommer la station du métro « Voïkovskaïa ». Une lettre à ce propos en date du 8 novembre 2011 № 5467/11 a été envoyée à A.Kouznetsova, membre du groupe d’initiative demandant de renommer la station. La municipalité de Moscou a trouvé un tel changement « prématuré ». Nous serions très reconnaissants à la municipalité et au comité des relations sociales de planifier ce moment tant attendu. La date n’est pas obligatoire mais ayez l’obligeance de fixer au moins une année. Nous allons attendre sans vous ennuyer davantage si nous recevons une réponse claire et nette le changement aura lieu une telle année (bien entendu, il faut l’envisager dans le cadre du mandat actuel vu que malheureusement dans notre pays il n’est pas de coutume de tenir les promesses de ses prédécesseurs).

L’argument littéral de la « prématurité » est le suivant. « Le changement de nom des stations du métro est admis (référence à la loi de 1997) dans des cas exceptionnels, pour reprendre le nom d’usage ayant une portée culturelle et historique particulière ».

Il se peut que certains l’ignorent mais le métro de Moscou, à la différence de ceux de Paris, New York, Athènes, Vienne et Londres a été construit assez tardivement. A la deuxième partie du XX siècle, c’est-à-dire du temps des bolcheviks. Par conséquent, nous pouvons parler de la reprise des « noms d’usage » dans le cas des villes et des rues. Ils ne concernent pas le métro. Il est question de l’utilité de perpétuer les noms des leaders du régime déchu.

Je rétorque tout de suite aux discours indignés qui arguent du droit des bolcheviks pour la simple raison que ce sont eux qui ont creusé le métro. Ce ne sont pas les bolcheviks mais des ouvriers qui l’ont construit. Certains prétendent que si ce n’était le coup d’Etat de 1917 les moscovites se seraient toujours déplacés en fiacre. Or, les besoins objectifs de la mégapole auraient commandé la construction du métro à tout régime. Les recoins les plus éloignés du pays auraient eu l’électricité au XX siècle sous n’importe quelle autorité. Par conséquent, en 1935 le pouvoir a utilisé les besoins objectifs de la ville à sa convenance en leur conférant une forme idéologique : les noms, le décor.

Les « cas exceptionnels » portent à réfléchir.
Quel cas est le plus « exceptionnel », celui de Gorki ou de Voïkov ? Moi, j’aurais choisi Pechkov en dépit de l’aversion. Pechkov, lui non plus ne narguait les biens pillés mais pour le reste il écrivait essentiellement des livres. Il s’est lié avec les bourreaux mais ne fusillait pas lui-même les innocents. Il n’a pas achevé des jeunes filles à la baïonnette. Il n’a pas enlevé les bijoux des doigts qui étaient encore chauds. Je pense, bien sûr, à la famille impériale.

Si nous y rajoutons le fait que ces personnes inoffensives sont saintes pour des millions de citoyens de la Fédération de Russie on peut presque ériger un nouveau monument à Gorki-Pechkov, tant il a l’air gentil à côté de tout cela.

Le pouvoir est entre vos mains et vous pouvez écrire tout ce que vous voulez mais de fait, l’orthodoxie est notre religion. Le nom de Voïkov sur la carte de Moscou est un affront à nos sentiments religieux.
Quelle est la raison pour laquelle très honoré A.Tchistiakov ne classe pas Voïkov parmi les « cas exceptionnels » à la différence de Gorki? En effet, la station Gorki a changé de nom en même temps que la rue. Est-ce parce que le centre-ville doit être présentable alors que les quartiers éloignés peuvent attendre ? C’est inconséquent. Le nom de Lénine décore toujours une station du métro centre-ville. « La bibliothèque Lénine ». Mais la bibliothèque elle-même s’est débarrassée de ce nom depuis longtemps. Le nom souterrain n’est attaché à rien. Bref, le cas n’est pas « exceptionnel ». Ce n’est pas logique.

« La station « Voïkovskaïa » a été inauguré en 1964.
Elle se trouvait à proximité des voies portant le même nom et d’une ancienne fonderie de Moscou au nom de Voïkov », - commente son refus A.Tchistiakov. Mais, depuis 1995 l’usine ne porte plus ce nom !
Si vous avez peur de « Nikolaïevskay » ou « Koverdinskaya », nommez la station «Tchougounoliteïnaya » (fonderie).
Un de ces jours mon invité à la radio était l’historien V.Khandorine. Nous avons parlé du sort du monument à Koltchak.

Vladimir Gennadievitch a mentionné que les opposants se sont référés au fait que « Koltchak n’a pas été réhabilité ». Or, le terme de réhabilitation a apparu à l’époque du dégel de Khrouchtchev. Le dégel de Khrouchtchev était une sorte de tentative de concilier le génie et la scélératesse : garder le pouvoir soviétique mais nourrir l’ogre avec du maïs. La tentative n’a pas manqué d’échouer. Le maïs n’est pas adapté à la diète des anthropophages. Le terme de « réhabilitation » se rapportait aux victimes (le Seigneur connaît leur nombre) qui n’ont rien fait contre le régime. Il est obsolète. Le fait qu’il est temps de rendre hommage à la mémoire de Koltchak n’implique pas qu’il faut le « réhabiliter ». Il faut simplement le reconnaître en tant que héros.

Pour cela il convient de reconnaître juridiquement que la Fédération de Russie est l’héritière de l’URSS et non pas de l’Empire Russe. Il est clair pourquoi cela a été formulé ainsi dans les années 90. Pourquoi devons-nous prendre ces intérêts dépassés en compte aujourd’hui.

« Tout royaume divisé contre lui-même est dévasté, et maison sur maison s’écroule » (Luc 11 :17). Vous proposez d’attendre qu’un jour par miracle personne ne sympathisera avec Pinkus Vainer alias Voikov suite à l’enseignement nébuleux de l’histoire dans les écoles? Cela n’arrivera jamais. L’absence d’idéologie ébranle le pays. Le dégel s’est mal terminé. Ceux qui se sont confortablement installés aujourd’hui sur deux chaises doivent s’en souvenir. Il n’y a que deux chemins : en avant vers la nouvelle construction du pays (qui freine depuis déjà deux décennies) ou en arrière vers l’isolation avec une économie de camp.
Le groupe d’initiative qui a collecté des signatures pour renommer la station est désespéré. Attendez ! Le combat n’est pas terminé.

Revue "Expert", - Еще раз о «Войковской»
Traduction Elena Tastevin





Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 11 Octobre 2012 à 21:38 | 1 commentaire | Permalien



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