Le métropolite Hilarion se prononce contre une « russification » complète des offices
La chaîne « Koultoura » programme un cycle de films documentaires intitulé « L’Eglise dans l’histoire ». L’auteur de ces films est Monseigneur Hilarion, métropolite de Volokolamsk. Il vient d’accorder une interview au quotidien « Novye Izvestia », il y parle en particulier de son travail avec le réalisateur Pavel Lounguine. Il y dit également qu’il ne convient pas d’accorder une attention excessive à l’action des féministes du groupe « Pussy Riots » qui ont fait irruption dans la cathédrale du Christ Sauveur.

- Monseigneur, vous êtes l’auteur de la musique du film « Le chef d’orchestre » de Pavel Lounguine. Ce film vient de sortir en salles.

- Cette musique n’était pas destinée pour le film. Au contraire, le film a été tourné pour illustrer cette œuvre. Pour commencer Pavel Lounguine s’est intéressé à cette partition. Je lui ai suggéré de tourner un film apparenté à un documentaire et dont la musique serait celle de ma « Passion selon Mathieu ».Mon idée consistait à montrer à l’écran une série de fresques byzantines et serbes des XII-XIII siècles consacrées à la Passion du Christ. Lounguine m’a répondu qu’il n’avait jamais tourné de documentaires et m’a proposé un scénario avec des personnages. Voici la genèse du « Chef d’orchestre » dont l’action se passe essentiellement à Jérusalem. L’on peut dire qu’en définitive la musique y prévaut sur le scénario.

- Le cycle « L’Eglise dans l’histoire » est-il un nouveau projet ? En effet, vous avez l’année dernière présenté sur la chaîne « Koultoura » plusieurs documentaires intitulés « L’homme face à Dieu ». Il s’y agissait de la doctrine de l’Eglise orthodoxe et de la vie de l’Eglise.

- « L’Eglise dans l’histoire » est une suite de « L’homme face à Dieu ». Ces deux cycles s’inspirent de mon livre récent « L’Orthodoxie » paru aux éditions du monastère de la Sainte Rencontre. Les films explicitent les sujets dont je traite dans le livre. « L’Eglise dans l’histoire » a été tourné dans les lieux où je devais me rendre pour mes voyages officiels. Le programme de mes déplacements a été en 2011 très varié. Je me suis rendu en Terre Sainte, à Istanbul, Rome, Kiev et Saint Pétersbourg, c’est à dire dans les lieux où s’est faite l’histoire de l’Eglise.

- L’action scandaleuse du groupe « Pussy Riots » dans la cathédrale du Christ Sauveur a suscité des réactions très vives dans l’opinion. Que pouvez-vous dire à ce propos ?

- J’estime que nous accordons trop d’importance à tout ceci. Je suis assez étonné de constater que la presse en a fait quelque chose de sensationnel, comme si les journalistes anticipaient l’évènement depuis de longues années. Nous sommes fréquemment témoins de comportements scandaleux dans les rues de nos villes. Si nous nous mettions à en débattre avec autant de passion, il ne nous resterait plus de temps du tout pour les choses sérieuses. Il convient d’appliquer la loi. Les manifestations organisées pour défendre ces personnes sont absolument inutiles. Il s’agit d’une opération qui ne doit pas rester impunie car il s’agit d’un délit au vu de la morale publique. Si les principes de la morale ne suffisent pas à dissuader ces personnes, remettons nous en à la justice.

- Vous avez à plusieurs reprises évoqué la possibilité d’officier la divine liturgie en russe moderne. Est-ce que cela ne risquerait pas de désacraliser nos prières ? Nous parlons d’une tradition multiséculaire. La phonétique même de la lecture des textes sacrés exerce une action très forte sur ceux qui prient.

- Je n’ai jamais évoqué la possibilité de dire les offices en russe moderne. Il y a pour commencer la difficulté de compréhension qui est celle du slavon d’église. Il appartient à la hiérarchie ecclésiale de trouver une réponse à ceci mais rien ne saurait être entrepris contre le gré des fidèles. Je suis d’ailleurs tout à fait contre la russification intégrale des offices. J’admets cependant que, dans les conditions de la mission, certaines parties des offices peuvent être dites en russe. Par exemple, les cathismes, longs extraits du Psautier, sont dans de nombreuses paroisses tout simplement omis. Ces textes lus en slavons d’église sont complètement incompréhensibles. Qu’est-il préférable ? Que les fidèles soient distraits lors de la lecture des cathismes ? Lire les psaumes en russe moderne ? Ou les omettre ? Des initiatives réfléchies sont envisageables. C’est d’ailleurs bien ce qui est dit dans l’un des textes de l’Assemblée interconciliaire : « Les langues nationales peuvent être utilisées lors des offices au même titre que le slavon d’église ». Le russe, ainsi que l’ukrainien, le moldave, etc. sont des langues nationales, l’Eglise orthodoxe russe considère ces langues comme étant des langues liturgiques. Il ne saurait être question d’une russification intégrale des offices, cela conduirait à la déperdition de la poésie ecclésiale et de la tradition multiséculaire qui constituent notre patrimoine inaliénable.

"Novye Izvestia"
Новые Известия «Я принципиальный противник полной русификации богослужения» Митрополит Иларион. Интервью Татьяны Эсайловой
Traduction "Parlons d'orthodoxie"

Rédigé par Parlons d'orthodoxie le 19 Avril 2012 à 14:06 | 21 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par Laurence Guillon le 19/04/2012 15:13
Je suis tout à fait d'accord avec le métropolite Hilarion. Son opinion sur la question est très réaliste. Et je trouverais préférable de lire certaines prières en russe que de ne pas les lire du tout. D'autant plus qu'elle sont riches d'enseignement, ce que j'ai découvert à la faveur des offices en français au monastère de Solan. Mais d'un autre côté, il ne faut pas prendre le risque d'un schisme, ou pratiquer des réformes linguistiques précipitées et maladroites.

2.Posté par vladimir le 22/04/2012 22:35
Il est clair que le message de Mgr Hilarion s'adresse à toutes les nations... qui composent l'Eglise russe! Il est préférable que les textes soient lus et compris plutôt qu'omis ou inaudibles et « Les langues nationales peuvent être utilisées lors des offices au même titre que le slavon d’église » /ou le grec ancien/.... mais la traduction intégrale "conduirait à la déperdition de la poésie ecclésiale et de la tradition multiséculaire qui constituent notre patrimoine inaliénable". Et ce alors même qu'il existe d'excellentes traductions en russe contrairement à d'autres langues, en particulier le français, où le traductions sont truffées d’approximations théologiques et d'expressions malsonnante.

3.Posté par Daniel le 23/04/2012 12:55
@ Vladimir

Les traductions en français sont en effet perfectibles mais je ne voudrais pas jeter la pierre aux traducteurs qui ont initié le mouvement de traduction en français, majoritairement feu le Père Denis Guillaume... sans beaucoup de moyens et sans beaucoup de soutien d'ailleurs. Vu le peu de moyens disponibles, les résultats me semblent for honnêtes et ont permis de bâtir un socle... Aux générations suivantes de continuer...

4.Posté par vladimir le 23/04/2012 14:56
En gardant "la poésie ecclésiale et la tradition multiséculaire qui constituent notre patrimoine inaliénable"

J'insiste que, comme Mgr Hilarion, je suis partisan de l'usage des traductions là où elles sont utiles et je demanderais aux fidèles de faire l'effort minimum pour comprendre les hymnes en slavon ou grec ancien, dont les paroles et la musiques font justement partie de ce "patrimoine inaliénable". Je serais d'ailleurs partisan d'une plus large diffusion des traductions, en partie pour les textes spécifiques à chaque office, pour que les fidèles puissent suivre, bien que le suivi sur textes ne fasse pas vraiment partie de notre tradition.

5.Posté par Daniel le 23/04/2012 16:48
Ce qui fait partie de notre tradition multiséculaire est... la traduction des textes, pas de prier en une langue étrangère... chose d'ailleurs peu naturelle... et pas forcément agréable car quand on maîtrise mal une langue étrangère, on retraduit dans sa tête ce qu'on entend dans la dite langue. A ma connaissance, vous dites la prière de Saint Ephrem en slavon et pas en syriaque en dépit du charme du syriaque. Ensuite, on compose la musique pour les textes en s'inspirant de musiques existantes d'origine mais en les adaptant. Le byzantin a ainsi donné naissance au znamenié en version russe, au byzantin dans sa version roumaine, dans sa version serbe, dans sa version bulgare etc... Pour ce qui est de la musique, paradoxelement, les mélodies géorgiennes me semblent être celles qui conviennent le mieux à la langue française car comme le français, le géorgien n'est pas excessivement accentué. Mais le travail reste à faire...

Au final, les Japonais prient en japonais depuis le début de la mission de Saint Nicolas, Saint Innocent d'Alaska (je crois?) s'attacha à traduire pour les Aléoutes, Saint Etienne de Perm pour le peuple de l'Oural qu'il évangélisa (en traduisant du grec au passage), les Roumains abandonnèrent le slavon et de nos jours les Africains prient en langues africaines ainsi qu'en français et anglais... Il me semble aussi qu'à la Pentecôte chacun a entendu la bonne nouvelle dans sa langue...

Pour ma part, je demanderais plus aux traducteurs de soigner leurs traductions et de résister à la tentation du politiquement correct qui fait changer les textes, entre autre pour changer ce qui est soit disant antisémite (à ce sujet, les derniers Triode de Carême sont catastrophiques et il y a une volonté de supprimer ou d'altérer certains textes). Aux églises, je demande de trouver des fonds pour qu'on puisse former et financer de bons traducteurs et/ou musicologue dont on a besoin. Je suis plus intéressé de dégager 1000 euros pour la traduction d'un office d'un saint local roumain ou bulgare disponible uniquement dans la langue du pays que pour la composition d'un "cantique ayant l'oecuménisme pour objet"...

Quant à l'apprentissage des langues anciennes en France, je suis navré mais l'affaire est morte depuis belle lurette. A l'école le grec ancien a disparu : il aurait pu peut-être faciliter un apprentissage du grec byzantin. Le latin est quasiment en phase terminale (bon courage aux historiens du Moyen-Âge). Les langues vivantes tendent à se réduire à l'anglais... Et puis entre nous, combien d'année de travail et d'études de langues faudrait-il pour comprendre l'intégralité du canon de Pâques en grec? C'est loin d'être un effort minimum! A l'école, j'ai dû personnellement faire 7 ans d'anglais pour parvenir à m'en sortir et encore, car pour moi la langue était trop différente du français, alors que j'ai appris très facilement l'espagnol car c'était une langue latine... Je n'imagine pas le grec ancien avec ses déclinaisons, son vocabulaire, son alphabet...

6.Posté par Clovis le 23/04/2012 17:24
Au sujet des traductions perfectibles en français notamment je suis d'accord, je possède plusieurs livres de prières et de psautiers, aucuns ne présente les même traductions, et cela rend difficile leur lecture. En slavon je pense par exemple qu'il n'y a pas 5 ou 10 versions du psaume 50 ou du psaume 90, (mis à part quelques petits détails peut-être) mais en français cela change du tout au tout avec comme vous le dites Vladimir des approximations et des expressions fort malsonnantes.
Mgr Hilarion a raison de souligner cette magnifique tradition séculaire russe, la divine liturgie en slavon est si belle qu'elle en revêt quelque chose d'universel.

7.Posté par vladimir le 23/04/2012 19:40
Bien cher Daniel,
Nous ne parlons pas exactement de la même chose mais il me semble possible de trouver des points d'accord.

- Je suis d'accord avec vous qu'il faut faire un effort d'unification critique des traductions en français (en choisissant la plus fidèle et la plus belle…); cela devrait être le rôle de l'AEOF et, si les textes étaient bien mis à disposition, cela permettrait à tous de suivre les offices (il n'y a, bien évidement, qu'un seul texte slavon, calqué sur le texte grec). J'y insiste car c'est une idée que m'avait donnée Mgr Gabriel de Comane il y a dix ans… mais je ne la vois toujours pas pratiquée.
- Mais, traducteur professionnel, je sais que toute traduction impose choix et donc "trahison" de l'original (sauf dans le cas du slavon qui a été crée pour refléter le grec). Le retour à l'original restera donc indispensable dès que l'on voudra retrouver le sens et la poésie véritables que les Pères ont voulu donner aux textes.
- La plupart des Russes ne connaissent pas mieux le slavon et les Grecs actuels le grec ancien que les Français le latin, mais cela ne les empêche pas de prier et de suivre les offices. Ils connaissent quelques prières essentielles, le sens général, quelques mots… et suivent les offices avec leur cœur. Car je pense que c'est là l'essentiel pour les orthodoxes: la prière du cœur passe avant la raison.
- Je pense possible pour tous d'apprendre à réciter ou chanter quelques prières de base en slavon ou grec ancien (tous connaissent déjà "Kyrie eleison" et "Axios":-) ), ce qui permettrait d'éviter les erreurs type "pain quotidien" (nous entons parfois différentes traductions du Notre Père durant le même office) ou les horreurs type "Nouki" (j'ai connu un chien qui se nommait ainsi, je ne peux pas l'associer à l'Hymne des chérubins) ou les "siècles de cyclamens" qui "nous gardent odieux"… (et je vais bientôt vous raconter la nouvelle traduction de la Bible en anglais!)
- Et le chant est l'un des fondements des offices orthodoxes (rappelons que les envoyés du prince Vladimir ne savaient plus s'ils étaient sur la terre ou au ciel). Aussi commencer un témoignage commun par un chant commun me semble bien dans notre tradition. Nous prions tous pour l'unité de l'Eglise – pourquoi ne pas le chanter ensemble? Et ce n'est pas Mgr Hilarion qui me contredira: son dernier quantique a été chanté dans la cathédrale du Christ Sauveur à Moscou et au Vatican…

8.Posté par Daniel le 23/04/2012 22:55
@ Vladimir

J'ai franchement des doutes sur la qualité du suivi des Grecs en grec ancien et des Russes en slavon... Quand parfois je leur demandais, qu'a-t-on dit là, comprenez-vous la lecture de l'Evangie ou de l'Apôtre, les réponses allaient du "très bien" à du "pas du tout". Je veux bien que le coeur ait une importance mais si les offices se limitaient au coeur, on aurait institué uniquement la prière du coeur uniquement. Quand dans l'office d'un saint, on fait une allusion à tel épisode de sa vie, il faut bien évidemment comprendre de quoi on parle. Prenez le canon de la Dormition : vous n'y comprenez rien, vous ratez bien des choses, simplement parce que votre coeur ne vous aura pas suggéré ce que l'auteur du canon a écrit. La compréhension du texte nourrit aussi le coeur et pas uniquement l'intellect. Je comprends le texte et donc je m'y intéresse plus facilement et je prie plus facilement. C'est un cercle vertueux. Les distractions sont plus faciles quand on ne comprend rien, et paradoxalement, la fatigue vient plus vite.

Pour la mise à disposition des textes, il y a des réserves de taille. La première est légale. Au sens strict, les traductions du Père Denis Guillaume sont protégées encore par le droit d'auteur. Les droits sont en majorité détenus par l'abbaye de Chevetogne. Il y a aussi un problème pratique. Pour un dimanche normal, les textes nécessaires seraient l'octoèque et les menées, voire un livre avec les psaumes pour les cathismes, un évangile... Cela constitue un joli volume à porter et à tenir en main au cour de l'office, ce qui n'est pas agréable. Comment se signer avec cet équipement? Comment suivre ce qui se passe devant en ayant les yeux rivés sur son papier. Sans compter que le gros des fidèles (toute origine confondue) ne connait pas l'organisation des offices et ne saura donc pas combien de stichères emprunter à l'octoèque, combien aux menées, quels cathismes, on lit.

Pour ce qui est du chant, à proprement parler, quasiment la totalité de l'office peut être chantée, même des parties usuellement lues. Le chant commun vient du sens qui est le même quel que soit la langue... Je ne vois pas l'intérêt pour un Russe de chanter en français avec accent russe et pour un Français de chanter en roumain avec un accent français, surtout s'ils ne comprennent pas ce qu'ils chantent.

Pour ce qui est d'apprendre des phrases en slavon et en grec ancien, "Kyrie eleison", "Alleuïa", "Hosanna" font partie du patrimoine liturgique occidental depuis des siècles, et de ce fait, ils parlent à bien des gens. En revanche, une prière en langue étrangère, dans mon cas précis, c'est dire quelque chose d'intime en un langage lointain, donc très contradictoire, comme si je me mettais à rêver en anglais, à parler à ma famille en anglais... Ca rend justement la prière très cérébrale et intellectuelle... Je le dis en grec, mais je le traduis et le pense en français... autant le dire en français directement...

9.Posté par vladimir le 23/04/2012 23:06
Erratum: à l'avant dernier paragraphe du commentaire 7 il faut lire:
(nous ENTENDONS parfois différentes traductions du Notre Père durant le même office)

Je prie les lecteurs de bien vouloir m'excuser...

10.Posté par Daniel le 24/04/2012 07:47
Concernant les choses malsonnantes :

- "Des siècles des siècles. Amen" Je n'ai jamais pensé aux cyclamens etant peu familié des plantes et je ne sais pas si cela est déjà venu à l'esprit des gens. Mais en regardant sur wikipedia, cela traduirait le grec "εἰς τοὺς αἰῶνας τῶν αἰώνων" où il est bien question de siècles. Cela a été traduit en latin par "In saecula saeculorum" et littéralement en français, cela donne bien "dans les siècles des siècles" ou "au siècles des siècles", qu'on retrouve depuis fort longtemps dans les traductions françaises de la Bible ou des Pères, et c'est un calque du grec

- "Nous qui dans ce mystère" : usuellement tel qu'il est chanté, nous et qui ne sont pas collés, sans compter que nous n'avons pas tous eu unchien s'appelant "Nouki". Je n'ai jamais entendu une personne ayant un problème de compréhension sur ce point.

Une remarque sur le slavon, calque du grec. Il me semble que le texte slavon a connu plusieurs étapes et des révisions de traduction également, l'une d'elle ayant généré le schisme des vieux-croyants. Si on révise une traduction, c'est qu'elle n'était pas idéale du premier coup. Pourquoi demander une traduction parfaite au français du premier coup alors que pour le slavon on aurait procédé en plusieurs étapes avec des corrections?

11.Posté par Clovis le 24/04/2012 13:30
@Vladimir et Daniel

Concernant les choses malsonnantes, chacun selon son oreille ou ses habitudes entendra par association ou par homonymie phonétique (si j'ose dire) des choses qui n'ont pas été dites, cela m'est arrivé, par pour le Nouki, ni pour les cyclamens, mais pour d'autres choses qui ressortent parce qu'il n'y a pas cette tradition en France. Il en va de même pour les périphrases qualifiant la Sainte Vierge Marie, qui parle de la Theotokos, de la Mère de Dieu ou de la Déipare, par manque d'usage en français ou par une consonance trop connotée (je pense à Déipare) ces formules son malsonnantes en français. Je crois même qu'il en avait été question sur ce blog.

Quant aux traductions, il n'est pas question de demander la perfection du premier coup comme vous le dites, (même si cela serait bien) mais qu'il y ait un unité dans ces recherches, mais pour cela il faudrait que l'impulsion viennent d'en haut dans le clergé. Il y a beaucoup de richesses dans les traductions de l'Archimandrite Deseille, dans celles de la moniale Anastasia et dans celles du Père Denis que vous citez, et je pourrais en citer d'autres, mais cette profusion ne facilite guère les choses cela devient un peu la tour de Babel. Il serait souhaitable que l'Eglise se penche sur la question véritablement ; la première chose qu'on fait les évangélisateurs était le travail de traduction n'est pas Cyrille et Methode qui veut certes, mais dans l'orthodoxie occidentale et française en particulier il y a suffisamment de matière grise et de talents pour mener à bien tâche et convenir d'un glossaire, d'un missel et d'un psautier commun, de même pour les trois canons et la préparation à la Communion.

J'ai eu une approche de la liturgie par le coeur comme en parle Vladimir, cet amour m'a donné envie de comprendre et non pas que simplement saisir son contenu. Cela dit, même au commencement, je n'ai jamais été perdu dans la liturgie en slavon j'ai tout de suite identifié le credo, le Notre Père etc.

Pour ce qui est du chant, le simple même qu'il soit question de chanter implique que le sens même de ce qui est chanté revêt presqu'autant d'importance que la matière avec laquelle cela est déclamé chanté, la partition et le phrasé, la rythmique sont primordiales dans le chant pour faire passer en beauté une prière, et là le problème de passer d'une langue à une autre n'est pas toujours très heureux et de ce fait je vois plus d'intérêt à chanter en russe ou slavon qu'en français car rien qu'à les entendre on sent que ces chants n'ont pas été composés pour être traduits. Par exemple le passage en français du Xhristos Voskrese est caractéristique de cette question.

Tout doit être employé dans la liturgie pour que celle-ci soit la plus belle possible, que nous donnions ce qu'il y a de mieux pour louer Dieu, il ne faut pas l'oublier.


12.Posté par Daniel le 24/04/2012 17:51
Je rebondis sur ce que dit Clovis : "ces chants n'ont pas été composés pour être traduits." Il faut distinguer 2 choses, le texte et la musique. Le texte est fait pour être traduit. Pour ce qui est de la musique, elle est en général adaptée à la nouvelle langue, car le nombre de syllabes n'est pas le même, l'accent n'est pas le même etc. Je citais l'exemple du chant byzantin qui s'est diffusé un peu partout sous des formes locales. Une mélodie byzantine en français demandera une adaptation de même que le byzantin fut adapté en Russie pour donner le znaménié, de même que le byzantin en Serbie est différent du byzantin en Grèce mais reste du byzantin... Là aussi, il faut laisser du temps au temps : la mise en musique requiert un bon texte (bien traduit) et une bonne musique... Le znaménié (le byzantin russe) a aussi connu des évolutions et des perfectionnements dans la notation. Peut-être, les premières mélodies venues de Constantinople n'était-elle pas idéales avant que les choses ne s'affinent... Patience... certains travaillent toujours à adapter le byzantin grec au français; en Amérique latine, vu la présence d'Arabes, il y a eu adaptation du byzantin arabe à l'espagnol et ça sonne vraiment très bien... Patience donc...

Mais dans tous les cas, je préfère un texte chanté de façon encore peu parfaite mais que je comprends qu'un texte auquel je ne comprends rien mais chanté de façon académique. Sachant au passage que quand on ne peut chanter, on lit... et que la qualité du chant dépend fort des chanteurs également.

Je ne suis pas très optimiste sur les talents et la matière grise qui serait présente pour faire ce travail. Ni sur les moyens... Qui maîtrise bien le grec liturgique et le français et dispose d'une vrai culture religieuse? Les Pères Placide et Denis appartiennent à ces vieilles générations où on faisait des humanités, et dans les humanités, figurait le grec et les langues anciennes. Par bonheur, ils ont pu nous léguer une traduction complète des menées, du triode, du pentecostaire, de l'octoèque (le Père Denis en l'occurence). Mais qui prendra le relais à leur suite? Ce travail de traduction est en grande partie bénévole; s'il fallait rémunérer des spécialistes, comment le ferions-nous?

13.Posté par vladimir le 25/04/2012 16:13
Clovis entend mieux la sensibilité orientale que Daniel: pour la majorité des Orthodoxes, qui restent les Orientaux de l'Europe, la prière est une communion totale avec Dieu qui passe principalement par la mobilisation des sens et du corps comme Clovis en témoigne. Musique des chants, évidement, mais aussi musique des mots eux-mêmes, gestuelle des signes de croix, de la vénération des icônes et des métanies, lumières des cierges et odeur de l'encens, tout contribue à rendre palpable l'indicible, à faire ressentir la présence du Règne ici et maintenant. La compréhension des textes y tient évidement sa place, mais somme toute secondaire et venant après le reste (toujours l'excellent témoignage de Clovis) et pour nous les chants en français (ou en russe, grec moderne…) perdent une part essentielle du Mystère. C'est cela que dit Mgr Hilarion en parlant de "la déperdition de la poésie ecclésiale et de la tradition multiséculaire qui constituent notre patrimoine inaliénable." Nous avons plusieurs chantres dans le chœur de notre paroisse, purs Français de souche qui ne connaissent pas le russe, mais qui chantent les offices en slavon et j'imagine qu'ils comprennent ce qu'ils chantent. Ce n'est donc pas un effort impossible…

Il n'empêche qu'il faut améliorer et homogénéiser les traductions sur tous les plans: Nouki et les cyclamens ne sont pas faux, comme "le pain quotidien" ou la "Mère de Dieu", ils sont laids et dépourvus de toute "poésie ecclésiale". Et il faut aussi mettre les textes appropriés à la disposition des paroissiens: il n'est pas question de jongler avec l'octoèque, les menées et le psautier: les choristes et lecteurs préparent à l'avance les textes qu'ils utilisent à chaque office et il faudrait aussi en mettre à disposition dans la langue voulue (il y actuellement plus de russophones que de francophones dans notre paroisse lyonnaise…). Et je voudrais citer un autre exemple d'adaptation: nous avons pour tradition de suivre les 12 évangiles du Jeudi Saint sur des livrets en slavon "modernisé": écrit en alphabet moderne et avec explication des mots particuliers. J'en ai vu un tirage bilingue dans la paroisse de Biarritz et le diocèse de Genève publie pour les principales fêtes le texte des offices bilingue slavon-français. On trouve les textes du jour en slavon sur plusieurs sites russes (par exemple http://days.pravoslavie.ru/) et l'AEOF pourrait essayer de le coordonner pour le français…

Bref il y a certainement plusieurs solution qui permettent de rendre plus intelligibles les offices en langues traditionnelles sans "déperdition de la poésie ecclésiale et de la tradition multiséculaire qui constituent notre patrimoine inaliénable." Contrairement à ce que vous pensez, bien cher Daniel, le slavon n'a pas été "corrigé": il a évolué comme une langue vivante et le schisme des Vieux Croyants s'est produit quand les savants de l'Eglise russe ont trouvé que cette évolution l'éloignait trop des originaux grecs et ont imposé un retour en arrière. Le slavon liturgique actuel est donc plus éloigné du russe moderne qu'il ne l'était au XVIe siècle, mais il est revenu au calque du grec, et il est maintenant question de le corriger pour le rendre plus intelligible aux Russes actuels qui, parallèlement, sont appelés à étudier les bases du slavon dans les écoles paroissiales…

14.Posté par Daniel le 25/04/2012 22:31
Non, les orthodoxes ne sont pas des orientaux... Saint Patrick évangélisateur de l'Irlande était-il un oriental, Sainte Geneviève de Paris, une orientale?

La compréhension des textes n'est pas secondaire... Qui l'a dit? C'est un enseignement théologique, une prière, une louange, c'est tout. Mais encore faut-il savoir ce qui se dit... pour que son "état intérieur" soit en accord avec le passage qui est lu à ce moment. C'est aussi le meilleur gardien contre les hérésies, car à cause de ces textes en langue ancienne non compris, je puis vous assurer que j'ai rencontré des orthodoxes m'affirmant que le Fils à un moment n'existait pas, et ce avant qu'ils ne soient engendrés par le Père... Alors que s'ils avaient compris, ils auraient remarqué que "sans commencement" et "co-éternel" reviennent à tout bout de champs dans les offices. Et c'étaient des personnes assidues à l'église... Après, il ne faut pas se plaindre si nos fidèles sont ignorants.

Il faudra m'expliquer pourquoi le chant perdrait une part essentielle du mystère en français et en russe moderne mais serait parvenu à le conserver en roumain (je n'ai jamais entendu les Roumains prôner le retour au slavon ou noté un tarissement de la sainteté dans cette église avec le passage au roumain), en japonais (qui n'ont jamais prié en slavon), en chinois, en aléoute, en arabe (Antioche a abandonné le grec lors de l'arabisation de la région), en serbe (le slavon est en déclin) etc. Je me demande bien si vous ne flirtez pas avec une pensée un rien magique... d'autant que la pratique vraiment traditionnelle de l'Eglise valide les traductions dans toutes les langues locales... on le fait depuis la Pentecôte! Vous semblez prôner une sorte de diglossie : grec -slavon. Ca ne va pas aider les efforts missionaires!

Votre conception de la laideur est toute personnelle, les goûts et les couleurs... "Nous qui" ne m'a jamais choqué pas plus que "Mère de Dieu". En revanche, je puis vous assurer que les sonorités du grec et du slavon peuvent rebuter, comme pour toute langue...

Je crains que vous ne réalisiez mal le travail de mise à disposition des textes dans une paroisse pour un dimanche normal. Pour les vêpres, il faudrait un texte en version numérique pour lequel on ferait un copié-collé des stichères de l'octoèque puis un texte en version numérique des menées pour prendre les stichères des menées... Ajoutez à cela le copié-collé des cathismes. Une fois venu les apostiches, à nouveau, copié-collé de la partie qui vient de l'octoèque et copié collé de celle qui vient des menées. Vous imprimez tout cela et vous distribuez... Naturellement, ce feuillet ne pourra pas servir l'année suivante et les choses seronts plus complexes quand on sera dans la période du Triode de Carême... C'est en fait tout le travail que fait le choeur quand il jongle entre les différents livres... Seul hic, ces versions numériques n'existent pas, second hic, c'est du travail pour le chef de choeur. Troisième hic, bonjour les impressions chaque année!

Libre à vous de prier dans la langue de votre choix tant que vous n'empêchez pas les autres de la faire dans la leur... Mais j'espère vraiment, surtout pour Clovis, que vous ne ratez pas trop de trésors théologiques orthodoxes, car la liturgie ne se limite pas au credo et au Notre Père, et si vous ratez tout le reste de l'hymnographie, notamment celle des vêpres et des matines je puis vous assurer que vous êtes à plaindre. Comme le disait Laurence Guillon (qui connait le russe), je ne sais pas où, c'est en lisant en français certaines prières qu'elle a pu réaliser leur richesse...

Il serait heureux que vous demandiez aux personnes lisant et chantant en slavon, de traduire ce qu'ils lisent ou chantent. Ou aux slaves et grecs Vous seriez surpris dans certains cas de voir que certains le lisent et le chantent phonétiquement mais le comprennent fort mal!

Le fait est qu'en Russie le Concile de 1917 a évoqué la question du passage au russe mais révolution et communisme oblige bien des choses furent gelés.A présent, des réflexions reprennent mais nécessitent un doigté et une politique des petits pas afin de ne choquer personne. Je suis prêt à parier et mettre ma main au feu que d'ici quelques décennies, le russe se fera plus présent dans les offices et finira par supplanter à terme le slavon... Un peu sur le modèle de ce qui s'est passé en Serbie... L'avenir nous le dira...

15.Posté par Clovis le 25/04/2012 23:51
Merci de vos messages Vladimir et Daniel

Je ne crois pas que la compréhension soit le clef de la participation à la divine liturgie, nous sommes confrontés à des Mystères qui dépassent l'entendement, l'Incarnation, la Résurrection et la Transsubstantiation, Saint Thomas ne pouvant y croire désira toucher les plaies de notre Seigneur Jésus Christ. Il faut comprendre/aimer avec son coeur, la raison suivra. Les écritures, les chants et les lectures ne sont que des témoignages de ces Mystères.

La musique est un langage qui y participe lui-aussi Vladimir parle à très juste titre de la musique des mots, elle est capitale et surtout en slavon ou le mot lui même participe presque comme une onomatopée à ce qu'elle signifie, et je parle pas du sens complexe qui se cache derrière chaque mot, préfixe-suffixe, il faudrait une phrase entière pour traduire correctement certains mots. Vous comprendrez que tout cela ne facilite pas la traduction des chants.

Le second problème que je trouve est celui de l'authenticité, celle de l'orthodoxie dans ce qu'elle a d'oriental n'est plus à démontrée elle est endémique, comme le catholicisme en occident. Mais l'orthodoxie en occident et particulièrement en France puisque c'est elle qui m'intéresse, manque d'authenticité et ce n'est pas pour rien que les premiers arrivés ont été chercher aux sources de l'antique chrétienté des gaules. Peut-être y-a-t-il quelque chose à chercher de ce côté là en attendant je trouve qu'il manque ce souffle des siècles dans les offices en français. Libre à chacun d'approfondir, de lire et comprendre les textes comme une démarche personnelle, comme un investissement qui ne se limite pas qu'aux heures de présence à la liturgie. Mais quant à moi, je préfère que rien n'entrave ma participation à la liturgie, je perds trop à essayer de suivre avec mes livres, même si, sans tout comprendre je sais de quoi il retourne en slavon, suivant la lecture mot après mot, je préfère me libérer de ce poids de l'exégèse durant les offices. A trop se concentrer sur les paroles l'on en oublie la mélodie et vice et versa. C'est un équilibre.

16.Posté par Daniel le 26/04/2012 08:12
@ Clovis

Je suis d'accord avec vous : tout ne réside pas uniquement dans la compréhension mais la compréhension joue une part importante et joue son rôle de même que la préparation de la personne qui assiste etc. Participer au mystère n'est pas seulement une question de raison car comme vous le dites très bien, les textes nous parlent de mystères incompréhensibles et disent bien eux-mêmes que le mystère est incompréhensible. Cela est typqiue dans les théotokion qui traitent de l'enfantement de la Déipare où si je paraphrase on répète : "Comment une vierge a-t-elle pu enfanter et allaiter". Mais encore faut-il comprendre ce que le texte nous dit au moment précis où on le lit. Sinon, le coeur a aussi des problèmes à suivre, un peu comme si vous adressiez une déclaration d'amour à l'élu(e) de votre coeur... dans une langue qu'il ne connait pas...

Si vous ne comprenez pas, vous ratez des choses pourtant simples qui ne demandent pas une exégèse particulère et qui ont été écrites pour que les fidèles prient, soient "instruits" etc durant les offices sans avoir à sortir leurs ouvrages une fois à la maison. Cette compréhension des textes n'est pas personnelle car ils sont lus au milieu de l'assemblée lors des offices... offices, qui je me permets de le rappeler ne se limitent pas à la liturgie qui comporte une part fixe très importante et qu'il est très facile à suivre même en tibétain tant cette part fixe est importante... Mais des vêpres et matines incompréhensibles du fait de la part variable est importante, c'est très difficile à suivre et cela ne nourrit pas forcément aussi bien spirituellement. Donc, je m'inquiète un peu pour ceux qui n'auraient jamais accès à ces textes.

Pour prendre un exemple concret, les triodes en semaine du carême reviennent sur le sens du jeûne, invite à la pénitence, à l'aumône etc. Comment se mettre dans l'esprit du carême sans comprendre à minima ce qui est dit pour vous mettre dans cet esprit?

En somme, comprendre ce qui est lu (comprendre la langue), cela permet d'utiliser le coeur ET la raison. Mao aurait dit marcher sur ses 2 jambes. Et pour permettre aux fidèles de comprendre, l'usage de l'Eglise a été de... traduire en langue locale, c'est un constat... pas une revendication...

Naturellement, je réfute totalement l'idée que l'orthodoxie soit orientale. Il y a bien des saint locaux en Occident, en Bretagne et Irlande notamment, en rien orientaux... Mais l'esprit occidental actuel est en effet marqué par le catholicisme.

17.Posté par Irénée le 26/04/2012 11:26
Merci aux une et aux autres pour ces réflexions intéressantes...une fois de plus, je partage complètement les positions de Daniel sur cette question.
Je m'étonne simplement que personne ne semble avoir connaissance de l'existence d'une commission des traductions qui travaille depuis des décennies sous les auspices de l'assemblée des évêques...cette commission comprend des personnes de toutes juridictions, avec des personnes connaissant bien le grec et le slavon.
Je ne connais pas la liste actuelle des membres de cette commission, mais je sais que le père Boris Bobrinskoy y a travaillé pendant longtemps, ainsi que Nicolas Lossky et beaucoup d'autres...
C'est ce groupe qui a travaillé en particulier à la traduction de la liturgie de St Jean Chrysostome actuellement presque généralisée dans les paroisses francophones.
Les textes sont régulièrement révisés, des propositions d'améliorations sont faites etc. Ce n'est sans doute pas parfait, mais ce n'est pas non plus la situation de vide ou d'anarchie décrite dans certains messages !
Personnellement, j'apprécie assez les traductions du père Placide (Deseille)...

18.Posté par Clovis le 26/04/2012 12:42
@ Daniel

Je comprends bien votre point de vue, et je suis d'accord "pour le coeur ET la raison", mais nous vous inquiétez pas, je dispose de livres et (presque) tout ce qu'il faut pour suivre la liturgie et approfondir mon petit bonhomme de chemin, mais je fais ce travail à la maison, personnellement, durant la liturgie je préfère ne pas m'encombrer de trop de livres d'autant plus que je sers à l'autel. Lorsque je suis dans l'assemblée, j'ai une charmante épouse qui me traduit en direct tout ce qu'il me faut si besoin est !

La liturgie ne se réduit bien entendu pas qu'au credo et aux Notre Père, cela va de soi, mais ce sont les moment où l'assemblée est amenée à participer en proclamant sa foi, c'est le strict minimum !

Il y a en effet des trésors théologiques (quel choc d'avoir découvert en français les prières de Saint Jean Bouche Dorée), mais je pense que cet approfondissement doit faire l'objet d'une démarche personnelle, la liturgie est un temps à part entièrement consacré à Dieu que l'on est amené à partager corps & âme. C'est cette instruction dont vous parlez. L'on peut, l'on doit se préparer avant, comme pour les Saints Dons. Et je me félicite qu'il y a pour cela de nombreuses traductions françaises de personnes comme Schmemann ou encore de Bobrinski (qui lui n'a pas besoin de traduction !) etc...

Lorsque l'on devient orthodoxe l'on est plongé dans une religion qui embrasse chaque moment de notre vie, mais cela ne vient pas sans une certaine imprégnation, sans un certain désir/amour et sans un certain investissement personnel, Je ne sais pas comment vous êtes devenu orthodoxe, moi c'est la liturgie qui ma "converti" je me suis dit voilà comment il faut louer Dieu, le reste est venu petit à petit, après Deeveyevo...
Toute proportion gardée, les Apôtres ne comprenaient rien à ce qu'il se passait, pas ce à quoi ils assistaient, mais ils ont voulu suivre le Christ par amour, combien de fois le Christ fut-Il obligé de leur expliquer Ses paraboles, et la pleine compréhension de ces Mystères eut lieu avec l'accomplissement des Ecritures et la descente de l'Esprit sur eux.

Nous avons la chance de vivre en temps de Grâce (selon cette ancienne et fort belle formule), nous croyons sans avoir vu, nous sommes baignés dans la religion, nous avons reçu une instruction religieuse pour la plupart (fut-elle catholique), mais l'amour est premier, c'est la pierre angulaire de l'édifice couronné par l'Esprit.

19.Posté par Daniel le 26/04/2012 14:55
@ Irénée (message 18)

Hélas, la commission de traduction de l'AEOF ne maîtrise pas le grec liturgique et certains choix de traduction sont peu heureux. Je vous renvoie à cette recension de Jean-Claude Larchet sur www.orthodoxie.com

"mais une telle situation n’existerait pas et on aurait pu aboutir à un texte unique, universellement reçu, si la commission liturgique de l’AEOF, au lieu de se constituer en un groupe fermé se situant dans la mouvance de la Fraternité orthodoxe (et dont aucun membre n’est un connaisseur du grec liturgique), s’était ouverte, pour la traduction et pour sa révision, à de vrais spécialistes de tous horizons,"

Source : http://www.orthodoxie.com/2010/02/recension-les-divines-liturgies-de-saint-jean-chrysostome-de-saint-basile-le-grand-et-la-liturgie-de.html

20.Posté par Bartimée le 28/04/2012 13:43
L'essentiel est que la démarche du ou des traducteurs soit honnête et signée. Rien n'est pire que l'anonymat. Les "groupes de traducteurs" et les "commissions de traduction" anonymes sont à proscrire.
Car il arrive que des traducteurs succombent à la tentation d'opérer des petits arrangements qui ne sont ni des adaptations, ni des interprétations mais des sortes de tromperies idéologiques. Il suffit de si peu, il suffit de dissimuler un mot, d'en raccourcir un autre. Ni vu ni connu.

Cela arrive non seulement dans des traductions profanes mais aussi jusque dans des textes sacrés.

Voici deux exemples de la traduction anonyme de la "Divine Liturgie de St Jean Chrysostome" dans un livret bleu bilingue français-slavon imprimé en Mayenne à la fin du XX°s.

- P. 38 …"Que le Seigneur Dieu se souvienne dans son royaume de vous tous, fidèles, en tout temps…" . En réalité le texte slavon précise : " … de vous tous fidèles orthodoxes ...".
Le mot "orthodoxes" est supprimé dans cette traduction française. Et parfois dans certaines paroisses francophones le prêtre se contente de dire : "… de vous tous, en tout temps …."
le mot : "fidèles", étant supprimé à son tour.

On voit clairement en effet ce que les simples mots : "orthodoxes", "fidèles", peuvent avoir de dérangeant, de scandaleux pour les champions de l'oecuménisme formel
à tout crin, qu'il soit franco-genevois ou autre.
- P. 51 Le Notre-Père se termine par : " … délivre-nous du Mal…" en plus avec un M majuscule, excusez du peu. Sans commentaire.

Ce ne sont pas les seuls accommodements de ce livret certainement plein de bonnes intentions. Mais ces sinuosités ondoyantes dans le politiquement correct
déjà en vigueur à la fin du siècle dernier, suffisent pour jeter le doute et susciter le trouble.

Car n'est-ce pas faire preuve de mépris, d'une part à l'encontre de l'orthodoxie francophone qui a droit au texte intégral c'est une simple question d'honnêteté,
et de mépris aussi d'autre part à l'encontre de l'orthodoxie russe elle-même que de la censurer et de la corriger ainsi en catimini.

Moralité : les traductions devraient garder le texte originel intact en regard et être toujours signées.
Quant au très honnête et regretté Père Denis Guillaume de bienheureuse mémoire, il a fait un travail considérable en pionnier qu'il fut, et ses "adaptations"
- par exemple dans l'Acathiste du samedi de la cinquième semaine du grand carême - ne sont jamais idéologiques.

S'il avait été complaisant idéologiquement il n'aurait certainement pas connu une fin de vie dans la grande misère et l'abandon total de ses pairs.

Que soit bénit le monastère qui l'a recueilli avec amour !

21.Posté par Marie Genko le 28/04/2012 15:45

Merci, Bartimée pour cette mise au point, qui nous montre combien chacun d'entre nous peut faire de mal en voulant à tout prix imposer sa propre Vérité!
Le Père Denis Guillaume est certainement un juste devant le trône du Seigneur!
Merci encore, et de tout coeur, de nous avoir rappelé l'oeuvre de cette grande figure de notre Orthodoxie ici en Occident!

Nouveau commentaire :



Recherche



Derniers commentaires


RSS ATOM RSS comment PODCAST Mobile