Un entretien de Tudor Petcu avec Laurence Guillon sur sa conversion a l'Orthodoxie.
Pendant une longue période Laurence Guillon a été une fidèle collabotrace de P.O. qu'elle a grandement aidé.Nous lui en sommes reconnaissants

Tudor Petcu Tout d'abord, je vous en serais très reconnaissant si vous pouviez parler un peu de vos expériences spirituelles ou, mieux dit, de vos voyages spirituels. Comment caractériseriez-vous l’influence que ces expériences avaient eue sur votre personnalité?

Laurence Guillon: En réalité, je me suis convertie très tôt à l’orthodoxie, sans faire de voyages particuliers. Je ne suis pas passée par le bouddhisme ou l’hindouisme, je me suis intéressée dans mon enfance à la Grèce antique, et désintéressée du catholicisme, et à l’issue de mon engouement pour la Grèce, qui était païen, fait d’amour de la vie, d’extase vitale, j’ai découvert le christianisme à travers les romans de Dostoïevski.

J’avais envie de sortir du monde occidental et contemporain qui ne me correspondait pas du tout. Je cherchais à m’évader, je voulais retourner au moyen âge, je me sentais déracinée spirituellement et même historiquement, car l’enracinement dans un pays est pour moi spirituel et charnel. J’aimais le moyen âge français, mais je m’en sentais coupée, malgré la relative bonne conservation de notre patrimoine, car le catholicisme que j’ai connu dans mon enfance, celui de Vatican II, mais même celui d’avant, ne me reliait pas à ce passé médiéval il en était lui-même coupé.

Alors que je me suis tout de suite retrouvée dans la spiritualité russe, et l’Orthodoxie faisait le lien avec le moyen âge, comme avec l’antiquité, d’ailleurs, elle me restituait le passé à l’intérieur du présent, elle me mettait en continuité et en relation.

Les expériences spirituelles fortes me sont venues plus tard, sans doute comme un résultat de la maturation de cet ensemencement orthodoxe précoce. J’ai eu des rêves impressionnants qui m’ont parfois réveillée, mise en face de mes errements, ou au contraire encouragée. J’ai eu des moments d’intense contemplation dans la nature, et quelques fortes révélations à l’église, en lien avec le mystère du temps. Je me suis rendu compte que ma vie, en dépit de mes errements, était guidée et qu’on ne me lâchait pas.

Tudor Petcu S'il vous plait de bien vouloir mettre en évidence le moment où vous avez découvert l'Orthodoxie et l'importance de cette découverte quant a l’évolution de votre vie.


Laurence GuillonJe l’ai découverte à mon adolescence, en lisant les romans russes, Tolstoï et surtout Dostoïevski, Crime et Châtiment, l’Idiot, et surtout les Frères Karamazov. Je me suis intéressée à l’histoire russe, aux chants liturgiques et aux icônes. J’ai été bouleversée par le film de Tarkovski « Andreï Roubliov ». Je suis arrivée à Paris à dix-sept ans, pour faire mes études, et j’ai commencé à chercher une paroisse orthodoxe qui pût m’accueillir. J’ai trouvé une église à Vanves, et le père Barsanuphe (Ferrier) m’a fait visiter le skite du saint Esprit en me montrant et m’expliquant les icônes du père Grégoire (Krug), ce qui été pour moi une révélation. Parallèlement, je m’initiais à l’iconographie auprès de Léonide Ouspenski.

Lire "L'orthodoxie plaît aux enfants" et ICI

Mon engagement dans l’Orthodoxie m’a, je pense, mise en porte à faux avec l’occident contemporain. Je me suis sentie décalée par rapport à tout ce qui se passait dans le France des années soixante-dix et quatre-vingt, et j’ai fini par partir en Russie, au début des années 90. Cela m’a compliqué l’existence, et au début, je ne l’ai pas bien accepté, je me suis éloignée de l’Eglise pendant quelques années, puis j’y suis peu à peu revenue. Actuellement, je ne regrette pas mon choix. D’ailleurs, dès le début, j’étais certaine de ne pas revenir dans aucune église occidentale.
Un entretien de Tudor Petcu avec Laurence Guillon sur sa conversion a l'Orthodoxie.

Pourquoi l'Orthodoxie est-elle assez belle et importante à vos yeux et comment pourrait-elle nous aider à mieux comprendre le tréfonds de l’existence humaine?

J’ai aimé l’Orthodoxie d’abord parce qu’elle était belle, comme les émissaires de saint Vladimir à Constantinople, et pour moi le beau est lié au juste, au vrai, au bon. L’Orthodoxie a gardé la Tradition, et dans le monde complètement psychotique où nous sommes, cette Tradition donne une orientation à ma vie, elle la relie au cheminement ancestral des hommes vers leur Dieu. Elle me met en communication mystérieuse avec mes ancêtres les plus lointains, au moment même où en Occident, tous les ponts culturels et spirituels ont été coupés, où les gens ne savent plus d’où ils viennent ni où ils vont. Elle reste ferme, elle ne cherche pas à séduire, elle est dans le droit fil de notre évolution depuis des millénaires, et nous apporte tout cet héritage, sans déformations ni interprétations fantaisistes, philosophiques, esthétiques aventureuses.

C’est une référence à laquelle on peut confronter tout ce.que nous voyons ou entendons raconter, et qui nous donne du discernement. Au début, je reliais l’Orthodoxie à la Russie, mais quand j’ai été obligée de rentrer en France, je suis allée dans un monastère d’obédience grecque, le monastère de Solan, fondé par le père Placide Deseille, et j’ai découvert tout ce que la liturgie orthodoxe avait en commun avec la civilisation méditerranéenne du sud de la France où j’avais grandi et où je me retrouvais à nouveau. Les liens de l’ancien et du nouveau testament avec notre passé pastoral, agricole, les liens de la liturgie et des mélodies byzantines avec l’antiquité la plus lointaine : l’Orthodoxie nous recentre..... SUITE
Un entretien de Tudor Petcu avec Laurence Guillon sur sa conversion a l'Orthodoxie.

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 16 Décembre 2016 à 11:14 | 0 commentaire | Permalien



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