Séraphin Rehbinder
Juillet 2011

Le dernier communiqué de l’Archevêché
des églises orthodoxes russes en Europe occidentale remplit de tristesse beaucoup de ses membres car il dévoile un peu plus les difficultés grandissantes que doit affronter notre Archevêché.

Le premier point, par exemple, confirme que le rattachement à notre structure ecclésiale du « doyenné de Grande Bretagne et d’Irlande » est remis en cause. L’archevêque est amené à discuter du rapprochement de ces paroisses avec l’évêque grec appartenant à l’Eglise de Constantinople. Et les discussions sont menées directement avec Monseigneur Grégoire de Thyatire, archevêque à Londres, seul compétent, et non plus avec le Patriarcat de Constantinople. Malheureusement ceci peut préfigurer un démantèlement progressif de l’Archevêché, surtout si l’on considère que Constantinople l’a, de fait, privé de la possibilité de nommer des évêques auxiliaires.

Il est dès lors heureux que le conseil se préoccupe de construire « une vision d’avenir commune de l’Archevêché sur une base purement ecclésiologique. » (1) (Session du 23 juin) L’Archevêché souffre en effet de l’absence d’une position publiquement affirmée sur ce qu’il est et ce qu’il veut être. Il en résulte qu’il donne parfois l’impression que son seul souci est de s’opposer à l’Eglise russe. On remarque de plus, avec satisfaction, que le conseil recherche une vision d’avenir « commune » et sur un fondement « purement ecclésiologique ».

« Vision commune » doit vouloir dire une vision discutée et partagée par tous les membres de l’Archevêché et notamment par ceux qui, tout en ayant une légitimité tout à fait égale aux autres membres, ont été écartés de toutes les instances, partout dans l’Archevêché, parce que leur vision différait justement de celle des membres actuels du conseil.

Mais cette « vision commune » pour s’appuyer vraiment « sur une base purement ecclésiologique » ne peut être élaborée en vase clos. L’ecclésiologie orthodoxe est avant tout conciliaire. Il y a maintenant en France et en Europe occidentale des centaines de milliers d’orthodoxes dont les membres de l’archevêché ne constituent qu’une petite minorité. Et il serait vain de construire des visions d’avenir sans se référer à la réflexion toute l’Eglise, c’est à dire celle des évêques et les laïcs présents dans nos contrées, quelle que soit leur origine.

Or on voit que la position de l’ensemble des Eglises orthodoxes, est arrivée, cahin-caha, à considérer, qu’au stade actuel, il faut maintenir l’organisation qui existe actuellement dans les pays non orthodoxes. Car c’est celle qui répond sans doute le mieux aux défis pastoraux de l’Eglise.
L’existence en Europe occidentale de plusieurs évêques grecs, russes, roumains, antiochiens (dont trois récemment consacrés pour cette région) etc., chacun rattaché à son Eglise d’origine, témoigne largement de cet état de fait. L’organisation territoriale, sur laquelle insistent tellement certains membres de l’Archevêché, pose encore trop de problèmes et manifestement la plénitude de l’Eglise estime que le principe territorial pur est loin d’être le seul critère qui s’impose à elle et qu’elle ne peut, ni ne doit, tout lui sacrifier.
On peut ne pas être d’accord avec cette vision, mais il faut avoir conscience que c’est la vision générale. Ne pas la recevoir est une attitude grave, qui met en opposition avec le plérôme (la plénitude) de L’Eglise. Il faut alors se poser sincèrement la question : est-ce que vraiment la vision que j’ai, moi, est plus juste que celle de l’Eglise qui m’environne? N’oublions pas que si, exceptionnellement, l’attitude d’une minorité a été rejointe par toute l’Eglise, le plus souvent l’attitude obstinée d’un petit groupe le conduit au sectarisme.
Quoiqu’il en soit, il existe en France une instance où tous les problèmes peuvent et doivent être posés. C’est l’Assemblée des évêques orthodoxes de France.

Une autre partie du communiqué nous attriste profondément.
C’est celle qui concerne le clergé : « L’archiprêtre Nicolas Rehbinder (sic) est confirmé dans ses fonctions de recteur de l’église de la Présentation de la Très Sainte Vierge au Temple. »
Cette petite phrase, anodine pour qui ne connaît pas les faits, veut simplement dire que la demande de congé canonique régulièrement et très respectueusement adressée par le père Nicolas à l’Archevêque a été rejetée, après d’ailleurs avoir été acceptée, quand elle avait été faite, au préalable, oralement. Ce qui est grave c’est que le conseil, non seulement veut imposer ses idées à tous, mais prétend obliger ceux qui ne sont vraiment pas d’accord avec lui de rester dans sa structure. Une telle attitude foule au pied la liberté fondamentale, je dirais ontologique de l’homme. Elle est proprement impensable car elle rappelle trop la pratique de certaines sectes, qui interdisent à ses membres d’en sortir.

Après ce nouveau pas, qui fait suite à l’excommunication d’une paroissienne à Nice, on peut se demander si les membres du conseil ont vraiment conscience de la gravité et du scandale de certaines de leurs décisions. Jamais le patriarcat de Moscou n’a refusé de régulariser un congé canonique, même dans les cas où la rupture avec l’Eglise russe se faisait dans des conditions particulièrement désagréables ou désinvoltes.

............................................
Sur le même sujet

Seraphin Rehbinder: L'archevêché est-il fidèle à sa vocation?
Une contribution de Séraphin Rehbinder
A propos de la pétition Nice

Rédigé par Parlons d'orthodoxie le 24 Juillet 2011 à 21:43 | 7 commentaires | Permalien



Recherche



Derniers commentaires


RSS ATOM RSS comment PODCAST Mobile