Comprendre réellement les offices n'est pas une question de langue
Faut-il adapter la langue liturgique où est-ce au croyant de faire l'effort de comprendre? Ce débat fait rage chez nous mais aussi en Russie et Mgr Hilarion de Volokolamsk, a fait un point intéressant le 13 octobre 2009, lors d'une rencontre avec les professeurs de l'Académie de théologie de Saint Petersbourg.

Il a d'abord rappelé que l'Église Russe n'avait pas arrêté de position sur la question de la traduction des textes liturgiques du slavon en russe; les avis y sont partagés et la question doit être abordée sous plusieurs aspes.

Un effort personnel

"D'une part, il n'est pas normal que les offices soient célébrés dans une langue qui n'est pas comprise, ou pas bien comprise, a continue l'archevêque. Pour autant, je pense que chacun d'entre nous doit honnêtement reconnaître que nous ne comprenons pas tout dans les célébrations. Moi, par exemple, je ne comprend pas toujours ce qui est lu en slavon, malgré ma formation théologique, et je dois m'adresser à l'original grec pour saisir ce qui est lu en slavon." Partant de ce constat, il souligne que ce n'est pas la traduction qui résoudra le problème, et comme exemple il prend le Grand Canon d'André de Crète: "Si on le lit en russe, il deviendra un tout petit peu plus compréhensible qu'en slavon, mais c'est le style même de ce canon, ce commentaire allégorique des Saintes Ecritures, qui est complètement étranger à l'homme contemporain.
Bien plus, le plus souvent les gens ne savent pas, qui peuvent bien être ces personnages bibliques dont il est question, ce qu'ils ont fait et pourquoi on en parle." Le problème n'est donc pas de traduire ce texte en une langue compréhensible, mais il réside dans le fait que ces textes ont été composés alors que les gens avaient d'autres modes de pensée, d'autres systèmes références à conclu le prélat.

"Nos offices, tels qu'ils se sont formés, représentent une grande richesse spirituelle et une grande école spirituelle. Mais c'est une école qu'on ne peut suivre sans préparation, sans efforts intérieurs." A affirmé Mgr Hilarion, en soulignant que personne ne pourra comprendre comme il faut les célébrations, quelle que soit la langue, s'il ne lit pas les saintes écritures et s'il n'étudie pas les textes liturgiques, s'il ne se pénètre pas de l'esprit et de la forme de pensée qui ont donné naissance à ces textes.

Des pistes de réflexion

On peut toutefois introduire des passages traduits en russe pense Mgr Hilarion: "il est tout à fait acceptable de lire en russe l'Apôtre, l'Évangile, les cathismes. Mais, pour les cathismes, il faut partir du grec et non de l'hébreu, car le psautier liturgique est bâti sur la traduction de la septante." Mais, souligne-t-il, il ne sert à rien de tout traduire: "cela détruirait notre culture liturgique, il faudra inventer de nouvelles musiques (…). Il faudra complètement réformer la structure liturgique et, en résultat, on pourra arriver à rendre les célébrations plus compréhensible mais nous y perdrons quelque chose de beaucoup plus important."
Et il compare avec les tentatives faites il y a cent ans de traduire le langage de l'icône en langage de la peinture ordinaire…

L'archevêque a conclu en répétant que la question de la réforme de la langue liturgique est très complexe et qui n'a pas de réponse univoque: "Cette question demande une discussion tranquille et conciliaire, qui ne soit pas accompagnée de stigmatisations, agressions, divisons en partis. Et c'est seulement à l'issue d'une telle discussion qu'on pourra juger quelles mesures ils convient de prendre."

(Les titres et passages en gras sont de VG)

Rédigé par Vladimir Golovanow le 27 Octobre 2009 à 10:03 | 22 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par Maire le 17/11/2009 15:18
Par PITIE, ne faites pas comme les catholiques romains qui désertent maintenant leurs églises. J'ai vécu les désastres de la prétendue modernité apportée par Vatican 2. La prière n'a pas besoin d'être COMPRISE ; elle doit être VECUE.

Dieu est ineffable ; pourquoi donc sa prière ne le serait-elle pas ?

Je vous assure en pratique que l'utilisation de la langue "vernaculaire" -le Slavon- en comparaison avec la langue courante dite "véhiculaire" est bien meilleure pour la prière et la Sainte Liturgie.

Eric

2.Posté par Irénée le 18/11/2009 09:42
Il me semble que ce genre de propos est complètement obscurantiste et contraire à toute la tradition de l'Eglise...Si les hymnographes de Jean Damascène à Romain le Mélode ont composé des hymnes dont la portée théologique et catéchétique est si dense et importante pour la vie et la prière de l'Eglise, ce n'ent pas pour qu'ils soient chantés en javanais chez les russes et en bantou chez les arabes...
C'est nier et méconnaître la portée de la Liturgie orthodoxe que d'affirmer ce genr de chose...
Je n'ai bien entendu rien contre l'utilisation du slavon ou du grec comme langues liturgiques, bien au contraire, mais il ne faut pas pour autant s'enfermer dans un conservatisme étroit.
Bon courage quand même à ceux qui souhaitent prier sans rien comprendre !

3.Posté par BONHOMME le 12/12/2009 23:51
Et si nous nous laissions simplement porté par la prière. Ce n'est pas nous qui crions ABBA? C'est l'Esprit-Saint en nous, et peu importe la langue.

4.Posté par Irénée le 13/12/2009 13:51
Suivant ce genre d'approche, St Cyrille n'aurait pas traduit l'évangile en langue slave, ni la Liturgie !
On peut avoir foi en la capacité de l'Esprit Saint à souffler comme il veut et quand il veut, mais je ne crois pas à l'obscurantisme vaguement supersticieu...les prières de l'Eglise ne sont pas des "formules magiques", mais sont porteuses de sens et d'enseignement...

5.Posté par genovieva le 13/12/2009 19:01
1 Corinthiens :
13 C'est pourquoi, que celui qui parle en langue prie pour avoir le don d'interpréter.
14 Car si je prie en langue, mon esprit est en prière, mais mon intelligence demeure stérile.
15 Que faire donc ? Je prierai par l'esprit, mais je prierai aussi avec l'intelligence; je chanterai par l'esprit, mais je chanterai aussi avec l'intelligence.
16 Autrement, si tu rends grâces par l'esprit, comment celui qui est dans les rangs des simples auditeurs répondra-t-il Amen! à ton action de grâces, puisqu'il ne sait pas ce que tu dis ?
17 Tu rends, il est vrai, d'excellentes actions de grâces, mais l'autre n'est pas édifié.
18 Je rends grâces à Dieu de ce que je parle en langue plus que vous tous;
19 mais, dans l'Eglise, j'aime mieux dire cinq paroles avec mon intelligence, afin d'instruire aussi les autres, que dix mille paroles en langue. "

6.Posté par vladimir le 13/12/2009 21:02
Je voudrais d'abord bien préciser que si les titres sont de moi, les passages en gras sont de Mgr Hilarion... je me suis contenté de les mettre en gras.

Je trouve que l'approche de Mgr Hilarion est la meilleure à l'heure actuelle: il est dangereux de tout traduire, car toute traduction implique perte de sens (1). Or c'est bien le sens que les pères ont mis dans les texte qui doit être compris et il faut donc que les fidèles fassent l'effort de se référer à l'original pour vraiment comprendre. Mais en plus, dans nos prières, il n'y a pas que le sens - prière de la raison (essentielle pour l'esprit occidental, mais dont l'Orthodoxie se méfie!) - il y a aussi le rythme, la musique (surtout pour les hymnes chantés), qui font appel à la prière du cœur (très importante pour l'Orthodoxie) et qui sont totalement perdus en cas de traduction.

Néanmoins il faut aussi qu'il y ait des traductions pour que ces même fidèles puissent suivre, participer, comprendre de quoi il est question... C'est ce dosage qui est difficile à trouver et qui, je pense, dépend des paroisses: s'il y a une majorité qui souhaite faire l'effort de chercher le vrai sens et qui tient à la prière du cœur - il faut garder au maximum la langue originelle. Mais si la majorité penche vers la sensibilité occidentale, ce qui n'est pas surprenant chez nous, voire la facilité d'approche pour les nouveaux convertis et les jeunes (arguments surtout développés en Russie), alors il faut plus utiliser les traductions, tout en reconnaissant leurs insuffisances. Et nous, en Occident, nous jouons un rôle important dans ce débat car c'est bien cet équilibre qui est concrètement recherché dans la plupart de nos paroisses ici, contrairement à la Russie où le slavon n'est pratiquement jamais traduit, même pour la lecture de l'Évangile.

(1) Mgr Hilarion cite l'exemple du Grand Canon traduit en slavon. Mais que dire des traductions en français! Quand le pain "substantiel" devient "quotidien" et l'Église "conciliaire" - "catholique"

7.Posté par Tchetnik le 15/12/2009 16:00
Il est patfois bon de maintenir une lamgue sacree, immuable et eternelle qui ne sert qu'a s'adresser a Dieu et a lui rendre hommage.

Mais dans le meme temps il est indispensable de faire en sorte que tous puissent comprendre le message du Christ, l'accepter dans leur vie et le faire leur.

Langue sacree et langue profane devraient avoir (et ont d'ailleurs) leur place dans la manifestation de la realite divine sur terre et dans le dialogue perpetuel avec dieu.

Il est parfois dommage de voir certains pretres persister a faire leurs homelies dans une langue que la plupart des fideles ne comprennent pas. ici, en Amerique, la plupart des Grecs ou des Russes ne parlent que superficiellement la langue de leurs peres. Il est dommage de voir que certains ne vont plus a l'eglise a cause de cette incomprehension. Incomprehension qu'il serait ideal de depasser, j'en conviens, car quand on connait la Liturgie, on peut la suivre dans n'importe quelle langue.

Il est bon de vouloir preserver un heritage culturel et historique, car il est aussi vecteur de connaissance de Dieu. Mais, sans remettre en cause cette dimension, il convient de conserver la premiere place au Christ , a La verite et a la Grace.

"Je prierai avec mon esprit mais aussi avec mon intelligence."

Saint Nicolas Kassiatkine et Saint Innocent Veniaminov l'avaient bien compris et illustre en apprenant d'abord la langue du peuple qu'ils voulaient evangeliser.

(desole pour les accents. Claviers anglo-saxons...)

8.Posté par Tchetnik le 15/12/2009 16:02
Oublie:

Il est helas vrai que tout n'est cependant pas traduisible sans une perte de profondeur spirituelle. Certains termes Slavon sont ridicules parfois quand traduits en Russe moderne. Mais au moins pour les lectures evangeliques et les homelies, l'effort est faisable.

9.Posté par Michel le 16/12/2009 03:38
Il y a certainement perte de sens mais il est important que la population comprenne dans sa langue le message évangélique.

Les questions de sens ou de traductions peuvent etre abordée dans des "études bibliques".

10.Posté par vladimir le 16/12/2009 16:31
En résumé:
1/ Le sens (approche occidentale: la raison d'abord): je pense que tout le monde est d'accord. Mais faut-il enseigner des contre-sens et des approximations ou demander aux croyants de faire un effort en allant chercher le vrai sens? Apprendre le vrai Notre Père ou le Crédo juste est-ce un trop grand effort?
2/ La musique et le rythme (approche orientale: le ressenti et la prière du corps): indiscutablement seuls les originaux le permettent.
3/ Enseignement et prédication: bien entendu la langue des fidèles... Et c'est bien ce qui se passe en Russie ou les homélies, en russes, commencent par répéter l'Évangile, lu en slavon... Mais tout se complique quand ils comprennent des langues différentes. A Lyon, nous en avons qui ne comprennent pas le russe, d'autre pas le français. A Biarritz, certains ne comprennent ni l'un ni l'autre (Ukrainiens émigrés en Espagne...). J'ai lu récemment une interview de Serge Schmemann qui parlait du grand nombre de nouveaux émigrants maitrisant mal l'anglais aux USA et c'est une question de ce type qui a provoqué la scission du diocèse de Grande Bretagne.
Je ne pense pas qu'il y ait actuellement une solution unique et valable partout. L'important et d'être à l'écoute les uns des autres et de rechercher ensemble la meilleure façon de répondre à l'appel du Seigneur.

11.Posté par Maire le 16/12/2009 16:36
Je re-précise ma pensée (qui était surtout orientée sur la prière) :

Je suis catholique romain et ai donc vécu le passage du Latin au Français.

Je n'ai fait que constater qu'il y avait des mots et des expressions (en Latin) qui portent intrinsèquement un sens profond depuis des siècles et dont le remplacement en Français "parle" beaucoup moins à l'âme.

Quand à "prier sans rien comprendre", je ne comprends pas ce que cela veut dire parce que "prier" signifie avant tout "essayer de rentrer en communion avec son Dieu".

A titre personnel, je pense avoir réellement "prié" deux ou trois fois dans ma vie (pas plus), cela n'a pas duré plus d'une seconde et il n'y avait absolument rien à comprendre si ce n'est à rendre grâce.

Le reste du temps, j'ai sûrement essayé de prier durant des années et des années en alignant les mots, les rituels et les formules ... en étant sage et respectueux de ce que l'on me disait de faire ... et en comparant mon état de bonheur lors d'une prière en Latin par rapport à celui espéré lors d'une prière en Français ... y'a pas photo !

Pour ce qui concerne la Divine Liturgie : je cite

"Mais au moins pour les lectures évangéliques et les homélies, l'effort est faisable"

Tout à fait d'accord, tant qu'il ne s'agit pas de prière à proprement parler.

Bien à vous tous dans la prière !

Eric

12.Posté par vladimir le 10/05/2012 23:37
Cette question étant décidément l'une de celles qui passionnent le plus nos intervenants (alors que je reprendrais volontiers la phrase dont je n'arrive pas à retrouver l'auteur: "le Salut n'est pas une question de langue"), essayons de refaire le point.

D'abord une constatation: ce débat est en cours quasiment dans toute l'Orthodoxie et dans tous les grands pays orthodoxes, à la seule exception de la Roumanie, les fidèles exigent le maintien de la langue traditionnelle souls la menace de schismes comme pour le calendrier(1). Pourtant les Russes, Bulgares, Serbes … ne parlent pas plus le slavon que les Grecs et Chypriotes ne parlent le grec ancien … ou les Français le latin. Comment expliquer que plus de 80% des Orthodoxes trouvent ainsi inutile de COMPRENDRE TOUT ce qui se lit et se chante durant les offices? S'agit-il donc d'attardés mentaux? De sauvages superstitieux qui attribuent une valeur magique aux langues mortes?

Pour moi, évidement, l'explication est autre: tous ces millions d'Orthodoxes estiment PLUS IMPORTANT D'ADHERER QUE DE COMPRENDRE. Cette adhésion se fait d'abord avec LE CŒUR ET NON LA RAISON, et la poésie, la musique des mots, des chants, des gestes deviennent plus importants que leur signification raisonnée. Cela explique la prise de position de Mgr Hilarion, parlant de "la déperdition de la poésie ecclésiale et de la tradition multiséculaire qui constituent notre patrimoine inaliénable" (2), comme celle de Vladimir Legoyda (3), estimant "qu’il ne serait pas opportun de faire traduire les textes liturgiques orthodoxes en russe moderne alors que l’expérience de la venue à l’Eglise de nos contemporains montre que la majorité de ceux qui se mettent à assister fréquemment aux offices apprennent à comprendre le slavon d’église ainsi que l’ordo" (et je constate la même chose dans nos paroisse en France, pour les personnes réellement concernées…).

Il est d'ailleurs intéressant de constater, là aussi, une différence d'approche très ancienne: les latins n'ont pas gardé le grec comme "original immuable" et ont rapidement fait les traductions avec les approximations que nous connaissons; dès le IIIe Siècle le latin prend petit à petit le dessus dans tout l'occident chrétien... pour mourir d'un coup au XXe siècle. En Orient c'est tout autre chose: on garde le grec et, pour les Slaves, on crée une langue qui en est le calque. Car le slavon n'a jamais été une langue vernaculaire, même s'il était proche du vieux bulgare, et c'est pourtant lui qui a été adopté.

Bien entendu, cela n'exclu aucunement l'utilisation des langues locales, principalement à titre pédagogique. Là aussi Mgr Hilarion est parfaitement clair: "Qu’est-il préférable? Que les fidèles soient distraits lors de la lecture des cathismes? Lire les psaumes en russe moderne ou les omettre? Des initiatives réfléchies sont envisageables. C’est d’ailleurs bien ce qui est dit dans l’un des textes de l’Assemblée interconciliaire : « Les langues nationales peuvent être utilisées lors des offices au même titre que le slavon d’église ». Le russe, ainsi que l’ukrainien, le moldave, etc. sont des langues nationales, l’Eglise orthodoxe russe considère ces langues comme étant des langues liturgiques. Mais il ne saurait être question d’une russification INTEGRALE des offices…" (j'ai ajouté les majuscules sur le mot qui me semble essentiel). Il est donc clair que les langues nationales doivent être utilisées, y compris au cours des offices, mais la langue traditionnelle doit aussi être conservée pour grader intacte l'héritage qu'elle représente. L'important est de savoir mesure garder et de voir, en fonction du public, comment doser ces deux usages car il me semble incontestable que les croyants qui veulent réellement sentir cette adhésion orthodoxe doivent aussi faire l'effort d'apprendre et de comprendre au moins les prières de bases en langue traditionnelle.

Et la question de la qualité des traductions ne peut manquer de se poser: il faut que les traductions soient bonnes (théologiquement et poétiquement) alors que la situation en France est assez dramatique, avec la multiplication des traductions non sanctionnées (il m'est arrivé d'entendre trois textes différents du Pater au cours du même office "francisé"). Le rôle de la commission de traduction de l'AEOF devrait être de coordonner et d'animer pour éviter que chaque traducteur se croie digne de faire sa propre traduction dans son coin: cette traduction a peu de chance de s'imposer, sauf miracle du type inspiré. Chaque traduction devrait passer par un creuset bienveillant et compétent (si pas compétent elle ne deviendra jamais bonne, si pas bienveillant, les propositions de modifications seront prises comme des agressions) mais il faut que les textes proposés soient pratiqués et progressent en gommant les aspérités, les "Nouki" et autres "cyclamens". L'exemple du psautier du Père Placide est instructif: 30 ans de pratique dans son monastère avant de le faire publier, lu 2 à 3 fois par semaine selon le typikon, les moines prient dessus et voient ce qui accroche, corrigent… Mais ce sont des frères, pas de scandales (comme entre la Fraternité et le père Denys, ou même le père Placide) que des dialogues positifs. Et le résultat semble probant… Mais il ne pourra jamais remplacer un psaume chanté en grec ancien ou en slavon!

(1) Je pense aux schismes des "Vieux-calendaristes" (tenants de l'ancien calendrier) qui affectent les Églises de Constantinople, de Grèce, de Roumanie et de Bulgarie. En effet, ces Eglises ont adopté le calendrier dit "julien révisé" à la suite d'un "congrès panorthodoxe" assez peu représentatif qui s'était tenu en 1923 à Constantinople et avait décidé cette réforme et une partie assez importante des fidèles refusant cette réforme créa ces structures schismatiques.
(2) http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/Le-metropolite-Hilarion-se-prononce-contre-une-russification-complete-des-offices_a2363.html?com

(3) Responsable du service « Communications » du Saint Synode, cf. http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/Contre-le-passage-au-russe-moderne_a693.html?com#com_1169174

13.Posté par Fabre Daniel le 11/05/2012 07:22
il est une chose dont les nouveaux convertis ( bien que comme les considèrent les orthodoxes de souches, spirituellement inférieurs....) ont horreur, c'est de retrouver dans l'orthodoxie des fantômes " d'église enseignante et église enseignée " ! or ne pas comprendre c'est approuver ce système ..! donc avec le coeur certe ! mais pourquoi pas aussi avec l'intellect ??! ça fait peur à l'église enseignante sans doute !? des fois qu'on y découvre des pharisiens ! mais bon, comme d'habitude j'écris plus pour sortir ce qui est en moi , car c'est incroyable le nombre de réactions venant du converti que je fus il y a 20 ans qui n'apparaissent pas ici ........! enfin Dieu pèsera !

14.Posté par Daniel le 11/05/2012 07:46
@ Vladimir

Vous commencez par un constat erroné. A l'exception de la Roumanie dites-vous. Voici le bilan :

Patriarcat de Jérusalem : grec et arabe je suppose mais aussi hébreu
Antioche : arabe qui a donc entièrement supplanté le grec
Constantinople, Grèce, Chypre, Athènes : grec liturgique
Serbie : serbe moderne en train de supplanter le slavon
Roumanie : roumain
Géorgie : géorgien ancien (ancienne langue parlée)
Alexandrie : grec (?), anglais, français, langues africaines; mais le grec est sûrement ultraminoritaire
République tchèque : slavon, je suppose
Pologne : slavon mais apparition de paroisses utilisant le polonais
Russie : slavon en majorité
Bulgarie : slavon mais aussi bulgare


Ont donc complètement basculé dans la langue moderne et vernaculaire la Roumanie, la Serbie (en cours) et Antioche. Utilisent en majorité des langues vernaculaires Alexandrie et Jérusalem (arabe pour Jérusalem). Je vous suggère donc d'exposer vos vues à ces églises...

15.Posté par Daniel le 11/05/2012 13:31
@ Vladimir

Pour compléter voyons aussi d'autres églises :

- En Europe occidentale, j'ai quelques doutes qu'on ait eu des offices traduits du grec en latin. Certaines portions peut-être mais l'occident orthodoxes semblait avoir ses rites propres en latin.

- Eglise de Carthage : cette église disparue utilisait le latin mais aussi le punique (langue des carthaginois) dans une moindre mesure

Si l'on retourne en Orient, il est exagéré de dire que l'on a utilisé que le grec et le slavon... L'Eglise de Géorgie a traduit le grec au géorgien. L'Arménie, jadis orthodoxe, a utilisé et utilise l'arménien. L'Albanie du Caucase, ancienne église orthodoxe disparue dont le territoire correspond à l'Azerbaïdjan a aussi utilisé l'albanais du Caucase.

Les coptes, eux aussi, jadis orthodoxes, ont utilisé le copte, descendance de l'ancienne langue des égyptiens. Les monophysites, eux aussi anciens orthodoxes utilisent le syriaque et les nestoriens anciens orthodoxes, l'araméen ou l'une de ses versions. Je suppose pour pour ces églises, une grande partie des textes fut composées originellement dans ces langues et qu'il ne s'agit pas de traductions du grec. A titre d'exemple, Saint Ephrem écrivait en syriaque, y compris sa fameuse prière que nul ici ne dit en syriaque alors que nous pourrions l'apprendre.

Il faut aussi prendre conscience de la réalité dans laquelle nous vivons. Il est évident qu'en Russie, à l'heure actuelle, une russification pronocée entraînerait un schisme et des remous, ce qui nécessite une politique des petits pas. En Serbie, le passage au serbe s'est fait sans problème... mais peut-être aussi parce que ce mouvement a débuté a minima dès les années 20.

En Russie peut-être aurait-il débuté dès 1917 car évoqué lors du Concile de cette année, mais la révolution a tout gelé et figé et contribuer aussi à développer aussi au sein de l'Eglise russe une vison idyllique de l'Eglise en 1917, comme si tout y était parfait, comme si le but était de revenir à cette église de 1917, ce qui implique de privilégier le slavon voir de ne garder que lui, mais a aussi des incidences peu heureuses sur l'iconographie (style saint sulpicien) et la musique liturgique (style italo-polonais).

Dans les pays non orthodoxes comme l'Afrique, l'Europe occidentale etc, nous sommes dans un contexte très différent de mission... Or, la majorité des missions orthodoxes ont fait le choix de la traduction, y compris les missions de l'Eglise de Russie. Au final, que reste-t-il en grec dans l'Eglise de Géorgie : parfois le trisagion, et Ispola éti despota (retranscription phonétique). En Roumanie, c'est à peu près la même chose, de même dans le monde arabe... Ce qui compte n'est pas le nombre de fidèles dans cette église mais la vigueur spirituelle de ces églises. Il ne me semble pas que ces églises aient cessée de produire des saints...

16.Posté par Nikolas le 11/05/2012 14:25
Merci à Vladimir pour cette perle : "il est plus important d'adhérer que de comprendre".

On se demande vraiment pourquoi le St Esprit donna le don des langues à la Pentecote pour que chacun de "nous les entendons proclamer dans nos langues les merveilles de Dieu."
Puisqu'il suffit d'adhérer avec le coeur et non la raison.

"Comment croira-t-on, à moins d'avoir entendu ?" dit l'Apôtre.
On se demande pourquoi l'Apôtre dit cela puisque même si l'on nous prêche dans une langue inconnu et incompréhensible, le Salut n'est pas une question de langue mais d'adhésion par le coeur et non par la raison, come le dit si bien Vladimir.

Celui-ci est aussi très belle:
"un psaume en français ne remplacera jamais un psaume en grec ancien."

Et tout d'un coup je voyage dans le temps, je me trouve a Alexandrie au début de notre ère et un juif pharisien me dit "pffff cette traduction des Septantes.... un psaume en grec ne remplacera jamais un psaume en hébreu"

Merci à vous, votre prédication en Français aura été très instructive.

Heureusement que l'Eglise Orthodoxe n'a jamais proclamé la doctrine des trois langues sacrées (hébreu, grec, latin) comme "l'église latine".
Mais il faut croire que certains orthodoxes en ont décidé autrement en proclamant la doctrine des 4 langues sacrées : hébreu, grec, latin, slavon.
Merci à eux, parceque je me demandais vraiment comment l'Eglise avait réussi ces missions au japan, en alaska, en afrique, ........ect ect avec des langues aussi barbares que le japonais, l'aloutien, le swahili,.... ect

17.Posté par vladimir le 11/05/2012 16:00
Bien cher Daniel,

Merci pour votre clarification mais je parle de GRAND PAYS ORTHODOXES et, de ce point de vue, seule la Géorgie est à ajouter… mais sans changer la vision d'ensemble. Mes informations concernant la Serbie différent des vôtres: le passage au serbe, très partiel, se heurte à une vive opposition et fait l'objet de débats.

Mais ce qui me parait surtout intéressant, c'est que plus de 80% des Orthodoxes ne veulent pas du passage en langue vernaculaire (y compris les Géorgiens) et que traiter cela par le mépris ("parlez-en au 20% qui changent") me parait non constructif. C'est au nom de ces 80%, dont je fais partie, que j'écris "mais il ne pourra jamais remplacer un psaume chanté en grec ancien ou en slavon", qui concrétise, à mon sens, la pensée de Mgr Hilarion parlant de "la déperdition de la poésie ecclésiale et de la tradition multiséculaire qui constituent notre patrimoine inaliénable".

Et, j'y insiste pour Nikolas, je ne prêche pas, je constate, avec Mgr Hilarion et environ 150 millions de fidèles. Mais peut-être, bien cher Nikolas, nous refusez-vous le droit à cette opinion, peut-être nous considérez-vous comme mauvais Orthodoxes, comme le laisse penser le ton agressif de votre message?

Mais pour ce qui me concerne, à partir du moment où ce constat est accepté, et où l'on ne cherche pas à nous imposer un changement dont nous ne voulons pas dans nos paroisses, je suis tout à fait d'accord pour que ceux qui le souhaitent jettent par dessus bord ce qui est, pour nous, "patrimoine inaliénable" et aillent chercher d'autres voies. Je pense d'ailleurs que, tant qu'à faire, ils ne devraient pas se contenter de solutions mi-chèvre mi-choux en plaquant sur les offices byzantins des langages inadaptés: si certains "n'adhèrent absolument pas au chant byzantin", il leur faut chercher autre chose et je comprends parfaitement la recherche des "rites occidentaux" dont Mgr Hilarion de New York a dit "Alors pour nous, pour ceux d'entre vous qui proviennent de traditions occidentales, Catholique-romaine ou Anglicane, vous êtes familiers avec cette Liturgie, ce Rite Occidental que nous célébrons aujourd'hui..." (*) Cette recherche a avorté en France (ECOF) mais se développe dans le Nouveau Monde (Amériques du Nord, Océanie...). Il s'agit probablement là de la construction d'une nouvelle tradition orthodoxe et, si je n'y adhère pas personnellement (comme 80% des Orthodoxes), je n'y voit rien à redire pour ceux que cela intéresse...

En conclusion, je reviens comme toujours au fait que l'essentiel est l'amour chrétiens: nous devrions tous nous respecter les uns les autres et respecter nos choix respectifs. Le salut n'est pas une question de langue ou de rite, mais il est certainement dans l'amour et l'acceptation de l'autre...

(*) http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/Diversite-de-l-Orthodoxie-Les-fondements-des-rites-Orthodoxes-Occidentaux_a1923.html

18.Posté par Justine le 11/05/2012 16:35
Un point de première importance dans le débat sur la traduction des textes liturgiques – inévitable dans les communautés dont les membres parlent une langue étrangère aux anciennes langues liturgiques ou très éloignées de celles-ci ¹ -, c'est la qualité des traductions que Vladimir mentionne dans son commentaire no 12.

S'il est relativement aisé de traduire (à partir de l'original grec bien entendu) la Divine Liturgie, les prières courantes et le psautier, il est presque impossible de bien traduire certains textes des Menées, notamment ceux de Grandes Fêtes, ou les Canons Triadiques du Dimanche. La difficulté de rendre ces textes magnifiques de façon satisfaisante, du point de vue théologique, linguistique et de la cantabilité, est en effet telle que seul des traducteurs élus par Dieu et pourvus d'un charisme spécial peuvent s'attaquer à cette tache. L'Histoire de l'Eglise montre d'ailleurs que les traducteurs d'autrefois furent tous des Saints (St Mesrop pour l'Arménien, St Euthyme pour le Géorgien, St Cyrille et St Clément pour le Slavon etc.) Pour ce qui est des langues occidentales, il semble que jusqu'ici, seuls des Anglophones soient arrivés à un certain degré de qualité, par les mérites du Monastère de la Transfiguration a Boston (Massachusetts). Quant aux traductions en français de Denis Guillaume, mieux vaut ne rien dire....

Il y a aussi le fait que les langues occidentales modernes sont très marquées par la décadence spirituelle des peuples qui les ont produites. Certaines (comme l'allemand par exemple) sont littéralement imbibées d'hérésie et ont besoin d'être purifiées, "baptisées" afin de pouvoir servir de véhicule à la Foi orthodoxe. Car chaque langue porte l'empreinte des "valeurs" de la société dont elle émane et tend à créer dans celui qui la parle des modes de penser et de se comporter analogues. Ces influences sont d'autant plus dangereuses qu'elles sont très subtiles et passent en général inaperçues.

Merci par ailleurs à Daniel pour les divers liens sonores, mais dans la version anglaise de l'hymne "Dieu avec nous" on ne comprend pas un mot. Est-ce vraiment en anglais qu'on y chante?


¹ En France on appelle le grec ancien "grec mort", mais c'est faux. Le grec ancien, du moins dans la forme qu'on trouve dans le Nouveau Testament et qu'utilise l'Eglise, n'est pas du tout une langue morte. Il n'est en rien aussi éloigné de la langue actuelle que l'est le latin du français. La principale différence réside dans la grammaire, très simplifiée en grec moderne.

19.Posté par Daniel le 11/05/2012 19:14
@ Vladimir

"Merci pour votre clarification mais je parle de GRAND PAYS ORTHODOXES et, de ce point de vue, seule la Géorgie est à ajouter… mais sans changer la vision d'ensemble." Les arabes orthodoxes apprécieront votre remarque... Un peuple orthodoxe est GRAND par ses saints et la piété des gens. L'orthodoxie arabe a été très riche spirituellement, quoique minoritaire au milieu des musulmans, avant de s'affadir énormément du fait de l'oecuménisme. Il faut donc ajouter la Géorgie, la Serbie aussi qui est passée au serbe très largement et les Arabes orthodoxes qui sont environ 3 millions au Moyen-Orient mais plus avec les émigrés.

Personne n'essaie de vous empêcher de prier en slavon. C'est vous qui avez amené le sujet sur le tapis, qui devient peu à peu un tatamis... et qui avez d'ailleurs remis le couvert donnant l'impression que vous vouliez bannir en douce un certain nombre de langues dont le français. Nous sommes très contents que les personnes croissent spirituellement en priant en quelque langue que ce soit... chose qui demande de savoir de quoi on parle, sans quoi ce qu'on entend n'est que musique et succession de sons dépourvus de sens.

J'attends néanmoins de comprendre en quoi le japonais, le chinois, le zyriane, l'estonien (il y eut traduction à l'estonien sous l'Empire russe), l'aéloute, le roumain, l'arabe, le géorgien ancien, le swahili, le lingala sont adaptés aux offices byzantins mais pas le français, l'espagnol etc. A moins que vous ne refusiez cet usage des langues d'Europe occidentale pour entraver la mission orthodoxe en Europe occidentale.

J'aimerais aussi savoir comment vous entendez contrer les missionaires hétérodoxes qui se déversent dans les pays orthodoxes, si les orthodoxes eux-mêmes sont ignorants de leur théologie à force de l'entendre dans des langues étrangères. Et là, je ne parle pas de l'orthodoxe assidu qui a une connaissance des offices mais des fidèles occasionnels. Pour donner un petit exemple, je fus horrifié de constater que bien des orthodoxes pensaient que le Fils n'était pas co-éternel au Père et qu'avant que le Père ne l'engendre, il n'existait pas, ce qui est une doctrine entièrement arienne dénoncée dans les offices qui répètent que le Fils est coéternel. Le souci est que cette ignorance favorisé par la méconnaissance des offices et des textes et de leur langue fait le jeu des hétérodoxes, en particulier témoins de Jéhovah mais pas uniquement. Il faut aussi penser à la façon dont on va instruire même a minima l'orthodoxe qui ne vient à l'église que très épisodiquement, afin de lui donner quelques armes spirituelles et théologiques et qu'il ne tombe pas entre les griffes du premier prédicateur venu.


@ Justine

Il est exact que maints traducteurs furent des saints quoique de leur vivant on ignorât parfois leur sainteté... A la décharge de la qualité perfectible des traductions en français, je dois dire que maintes églises, en se positionnant comme des églises pour "étrangers" et en ne souciant pas de l'aspect missionnaire (car la France est chasse gardée catholique), n'ont pas aidé ou favorisé la démarche de traduction. La faiblesse des moyens ou le manque d'intérêt engendre souvent des résultats peu satisfaisants pour toute entreprise humaine.

Je ne dispose pas des traductions réalisés par ce monastère américain : elles sont assez onéreuses et n'ai pu comparer. J'en ai entendu du bien car s'agissant d'un monastère vétérocalendériste, cela met à l'abri des adaptations du politiquement correct.

Concernant les versions sonores, la version anglaise est chantée par des Russes. Cela expliquerait-il le fait qu'on n'y comprenne pas grand chose? Et il faut tendre l'oreille en effet pour comprendre...

20.Posté par vladimir le 11/05/2012 22:32
Ah Daniel! Vous vous accrochez vraiment au détails. Il est pourtant clair depuis le départ que je parle de nombres et je constate, ce que vous ne contestez pas pas me semble-t-il, que la grande majorité des orthodoxes préfèrent gardez garder "notre patrimoine inaliénable"...

les traductions en japonais, chinois, zyriane, etc. sont un phénomène moderne dont j'attendrai deux siècles ou trois pour voir le résultat. Le géorgien ancien me semble constituer un cas à part que je connais mal. Mais les autres langues anciennes ont ceci de particulier qu'elles ont développé leurs propres rites: à ma connaissance, ni les coptes ni les latins n'ont traduit la liturgie byzantine, le slavon, comme on sait, n'as pas été une traduction puisque la langue a été adaptée à l'usage liturgique byzantin pour y introduire des concepts nouveaux. C'est peut-être cette volonté de plaquer artificiellement une langue sur des rites qui ne lui conviennent pas qui fait question? Et la solution est peut-être dans les rites occidentaux pour les langues occidentales?

Parce que, bien cher Daniel, vous ne répondez pas à la question essentielle: pourquoi plus de 150 millions d'Orthodoxes préfèrent garder des langues qu'ils ne parlent pas? Pourquoi Mgr Hilarion parle de "patrimoine inaliénable"? Tous des demeurés qui "ne savent pas de quoi on parle" et "entendent des successions de son" ?

Ma réponse c'est que, n'étant pas passé par la scolastique et les Lumières, ils perçoivent la Révélation avec leur cœur et non avec la raison et je me demande si ce n'est pas la la véritable approche orthodoxe. Je laisserais donc volontiers les hétérodoxes à leurs tentatives de conquêtes raisonnables: ceux qui ne savent pas ce que signifie exactement "engendré, non crée" (le savez-vous bien?) ne sont pas prés de devenir témoins de Jéhovah, Mormon ou Pentecôtiste contrairement à ceux qui essayent de comprendre et commencent à douter. D'ailleurs c'est la connaissance qui a amené le péché.

21.Posté par Fabre Daniel le 12/05/2012 06:19
le péché la connaissance ????????????????????????? un peu court Vladimir !

Mais c’est quoi, ce péché qui entraîne la mort et donc l’infime durée de la vie ? la Connaissance ! dites-vous Vladimir ?!....
Ne serait-ce pas plutôt :
La désobéissance ! spéciale dans une certaine « dés-orientation »....(voir plus loin dans le texte)
Tourner son écoute vers le serpent, présenté comme rusé.
La ruse, la finasserie sur les mots au lieu de la clarté du cœur.
Désirer l’interdit. ...un ressort important de notre psychologie !
En Mangeant(le fruit de l’arbre de) la connaissance du bon et du mauvais . Se nourrir de systèmes de valeurs au lieu de l’amour de Dieu. Et selon l’exégèse qui en fait un figuier, se nourrir de systèmes de valeurs tirés de la parole de Dieu – mais d’une parole en quelque sorte externalisée, figée comme un texte et non plus la périchorèse de la présence trinitaire.
Car, c’est exactement ce que propose le serpent : décortiquer la parole divine avec une logique toute humaine et non pas acquérir la connaissance seulement, mais :
chercher d’autres sens que celui ou ceux que rappelle l’Esprit Saint. (là on retrouve la Pentecôte ! non ?)

Mais avant d’aller plus loin, un autre constat s’impose. Quand le mot péché apparaît-il dans la Bible ? Dans l’histoire d’adam et d’eve ? Perdu. La première occurrence est en Genèse 4, 6, lorsque Dieu s’adresse à Caïn rongé de jalousie vis à vis d’Abel et lui dit attention, le péché est tapi à ta porte, ce que tous les Pères ont compris comme la porte du cœur. Sans faire de la sola scriptura ; La première occurrence d’un terme est souvent signifiante. Caïn va laisser entrer le péché et tuer Abel.
ainsi, Le péché a partie liée avec la mort d’une façon très particulière puisqu’il s’agit d’un meurtre. Toute l’exégèse juive puis patristique va ensuite appliquer ce schéma, de façon rétroactive, à la chute d’Adam et Eve. On peut : avertis par Dieu qu’il mourraient, si…, ils le font. C’est une sorte de meurtre de soi-même, de suicide assisté par le serpent. Mais qui reste une potentialité jusqu’à ce que Caïn le rende réel.

En hébreu, c’est une parabole assez énigmatique. On traduit en général : Dieu modela l’homme de la poussière de la terre. Premier problème : en hébreu, c’est ha adam, modelé de adamah. Littéralement « ce rouge modelé de rougeur ». Paradoxe : il est modelé de ce qui dérive de lui. Ensuite la formule avec article (ha) peut indiquer un terme générique et c’est le cas ici. Donc il s’agit de l’homme en tant qu’archétype, modelé à partir de la poussière de l’humanité. La poussière, en hébreu, est un symbole de légèreté, d’immortalité, de spiritualité, c’est ce qui s’élève de la terre quand on marche, pas ce qui se dépose. C’est quoi, la « légèreté » de l’humanité ? Je n’en sais rien mais je remarque que la liturgie parle de l’âme alourdie par le péché. Ou par les passions.
Le récit se développe en quatre étapes : modelage de l’homme archétypal ; distinction des sexes et émergence de la féminité ; intervention du serpent et transgression de l’interdit ; réalisation de la prophétie de mort liée à l’interdit, mais par les fils de l’homme archétype.
Quand l’apôtre Paul dit que nous sommes tous morts en Adam, ce n’est pas une figure de style. Il savait l’hébreu, lui.
D’autre part, si l’on examine l’intervention du serpent, il n’est pas question de désobéissance. Obéir, ob-éir, c’est littéralement écouter vers. Orienter son écoute. Isha obéit… au serpent. Et Ish à Isha. Ce faisant, la faculté d’obéissance en l’homme est déviée de son orientation originaire vers Dieu. Pécher, ce n’est donc pas désobéir, c’est obéir à n’importe qui ou n’importe quoi, et c’est ce que tous les spirituels appellent les passions.
C’est exactement ce que fait Caïn. Il a entendu Dieu, mais ensuite il écoute ce qui se tapit à sa porte.
Autre point clef, l’arbre :
Il ne s’agit pas de la connaissance tout court. Pas de « vous êtes un bon benêt, mon fils ! ».
Dieu n’interdit pas la connaissance à l’homme. Il s’agit, en hébreu, de la connaissance « du bon et du mauvais ». Cette forme est un hébraïsme typique qui nomme un ensemble par ses deux pôles opposés. Exemple, si je dis en hébreu « la grandeur et la petitesse », tout le monde comprendra qu’il est question de la taille des êtres, pas forcément de comparer les géants et les nains. Ici, bon et mauvais. C’est à dire l’ensemble des jugements de valeur. Qui ont partie liée avec la honte, ce qui se comprend, mais surtout avec la conscience de la nudité, ce qui est plus ardu à déchiffrer. Quand l’homme définit ses propres jugements de valeur, il a conscience, peur et honte de sa nudité devant Dieu. A ne pas raplatir en affaire de pudeur sexuelle comme l’a fait Augustin, c’est beaucoup plus profond.
(texte d'après Anne Geneviève...)

22.Posté par Daniel le 12/05/2012 07:58
"Parce que, bien cher Daniel, vous ne répondez pas à la question essentielle: pourquoi plus de 150 millions d'Orthodoxes préfèrent garder des langues qu'ils ne parlent pas? Pourquoi Mgr Hilarion parle de "patrimoine inaliénable"? Tous des demeurés qui "ne savent pas de quoi on parle" et "entendent des successions de son" ?"

Si je vous ai répondu : " la révolution a tout gelé et figé et contribuer aussi à développer aussi au sein de l'Eglise russe une vison idyllique de l'Eglise en 1917, comme si tout y était parfait, comme si le but était de revenir à cette église de 1917, ce qui implique de privilégier le slavon voir de ne garder que lui". Par ailleurs, les gens comprennent partiellement au moins ces langues anciennes. Les critères numériques ne m'intéressent pas : ce n'est pas parce qu'une majorité de gens est favorable à telle chose que la dite chose est bonne... Encore l'argument démocratique. D'ailleurs en la matière, par des pirouettes incessantes, vous minimisez les cas de traductions des offices byzantins qui concernent donc, si l'on prend les Eglises autocéphales la Géorgie, l'Antioche, Roumanie, la Serbie, Jerusalem, Alexandrie (dans ses missions qui constituent le gros des effectifs) et l'Albanie soit 7 églises autocéphales sur 14, et parmi ces 7, 6 utilisent une langue moderne.

Par ailleurs, vous êtes dans une opposition systématique entre coeur et raison alors que ce n'est pas l'un ou l'autre mais l'un ET l'autre, à moins de vouloir être unijambiste. L'absence de connaissance et l'ignorance n'ont jamais été des vertus orthodoxes. Ce n'est pas la connaissance qui a amené le péché mais le désir de connaissance et le désir d'aller au-delà des normes fixées par Dieu. Quelqu'un qui désire savoir de quoi parle les textes liturgiques ne va pas au-delà des limites fixées par Dieu car ces textes sont d'inspiration divine.

J'ai l'impression que c'est un dialogue de sourds...

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