Discours du P. Alexandre Siniakov à la présentation du livre du patriarche Cyrille "La conversion au Royaume de Dieu. Méditations de Carême"
Voici le texte du discours prononcé par le hiéromoine Alexandre Siniakov à la présentation du livre du patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie, "La conversion au Royaume de Dieu. Méditations de Carême" qui a eu lieu le 12 mars 2014 à la Résidence de l'Ambassadeur de Russie à Paris

Le livre présenté à votre attention est la traduction d’un ouvrage publié par les Éditions du patriarcat de Moscou en 2012 sous le titre Le mystère de la conversion. Homélies du Grand Carême. Par rapport à son original russe, la version française a trois différences : elle est plus courte ; certaines homélies sont plus récentes ; enfin, chaque réflexion du patriarche y est précédée par des citations bibliques et patristiques absentes du prototype. Par ailleurs, la préface de la version française est signée par le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations extérieures et de la Commission biblique et théologique du patriarcat de Moscou.

En publiant ce livre, nous poursuivions un double objectif : d’abord, faire connaître l’expérience orthodoxe du Carême pascal ; puis, faire découvrir la prédication liturgique du patriarche Cyrille. Le Carême 2014 semblait une date idéale pour une telle entreprise : d’une part, cela fait cinq ans que le patriarche Cyrille est à la tête de l’Église orthodoxe russe ; d’autre part, le calendrier pascal oriental et occidental coïncident cette année.

Apparu assez tardivement dans l’histoire de l’Église, le Carême de Pâques – ou le Grand Carême, comme on l’appelle dans la tradition russe – a acquis une importance singulière dans la vie liturgique des chrétiens orthodoxes. Il fut au début un temps de préparation des catéchumènes au baptême, célébré la nuit de Pâques. Mais, au fur et à mesure que la liturgie et les usages monastiques se répandaient dans l’Église byzantine, le Carême a acquis une dimension pénitentielle et ascétique, en référence au jeûne de quarante jours du Christ dans le désert, devenue aujourd’hui sa caractéristique principale. Néanmoins, en publiant ce recueil des homélies quadragésimales du patriarche Cyrille, nous voulions montrer que l’aspect didactique, pédagogique, formateur du Carême n’a pas disparu dans l’Église orthodoxe : au contraire, les efforts ascétiques n’ont pas de sens s’ils ne s’accompagnent pas de l’écoute de la Parole de Dieu et de la réappropriation, par l’intelligence et par le cœur, du message apostolique.

Le patriarche Cyrille est un prédicateur remarquable : il prêche beaucoup, avec une surprenante facilité d’improvisation, tout en se référant aux Écritures et aux Pères de l’Église grâce à une mémoire, manifestement, assez exceptionnelle. Ses homélies sont à la fois très personnelles, libres, actuelles, mais aussi profondément enracinées dans la tradition patristique et dans l’héritage de l’Église russe.

Le livre que nous vous présentons contient trois parties : la première est une réflexion sur chaque parole de la prière de saint Ephrem le Syrien, prière lue à chaque office quotidien du Carême ; la deuxième partie comporte des méditations sur des sujets essentiels de la spiritualité chrétienne ; enfin, la troisième partie est consacrée à chaque jour de la Semaine Sainte. L’ouvrage se termine par une belle homélie de Pâques, sommet de la vie liturgique de l’Église du Christ.

De l’enseignement du patriarche Cyrille, contenu dans ces homélies de Carême, j’aimerais relever trois points qui me semblent distinctifs : le caractère dynamique, actif de la foi ; la beauté dont s’accompagne la vie évangélique et, enfin, la dimension universelle, cosmique, du message de l’Église.

Le premier point est le dynamisme de la foi. Le patriarche Cyrille souligne sans cesse qu’une foi qui ne transfigure pas la personne entièrement n’en est pas vraiment une. Si elle ne porte pas de fruits, elle est inutile. Si elle se limite à un ritualisme liturgique, elle est vaine. Ainsi, dans l’homélie du Mardi Saint, en réfléchissant au figuier stérile devenu sec à la parole du Christ (Mt 21, 18-22), le patriarche affirme que « cette image est particulièrement pertinente dans la vie spirituelle. Si nous suivons les prescriptions religieuses, mais ne portons pas des fruits de la piété authentique, c’est-à-dire l’amour et le bien, nous sommes inutiles, comme les plantes infécondes, parfois belles à voir, mais superflues » (p. 240).

Le deuxième point, c’est le lien consubstantiel entre la foi et la beauté. D’une part, la foi en Dieu se nourrit de la contemplation de la beauté de l’univers qui nous entoure. D’autre part, le croyant crée la beauté autour de lui. Ainsi, le patriarche écrit que « l’entourage a une importance cruciale pour notre perfectionnement personnel. En fait, tout doit être beau autour de nous : l’immense univers, dans lequel nous vivons, et le petit univers de la maison ou du lieu de travail, là où nous passons une grande partie de notre temps. Tout autour de nous doit être beau, harmonieux, esthétique, parce que la laideur et la difformité perturbent notre existence, s’insinuent dans notre âme et l’obscurcissent. Les gens beaux moralement et spirituellement ne peuvent vivre dans un environnement hideux » (p. 186).

Enfin, insister sur le caractère universel du message de l’Église n’est certes pas une exclusivité de la prédication du patriarche Cyrille, mais la façon dont il présente cette dimension fondamentale de l’Évangile du Christ est de nature à renforcer notre espérance, notre confiance dans l’œuvre du salut de Dieu, notre confiance dans l’avenir de l’humanité : « Oui, les ténèbres cohabitent encore avec la lumière, mais la lumière est plus forte que les ténèbres. La vérité est plus forte que le mensonge. La lumière du Christ finira par illuminer toute la création. Nous savons que notre Seigneur reviendra. Toute notre vie présente est une préparation à cette rencontre avec le Sauveur ressuscité. Nul ne sait quand ce jour arrivera, mais nous savons qu’il viendra, puisqu’il nous l’a promis, il l’a dit à ses apôtres et par eux au monde entier » (p. 286).

Sur ce, j’aimerais remercier de tout cœur Monsieur l’Ambassadeur Alexandre Orlov d’avoir organisé, dans ce magnifique Hôtel d’Estrées, résidence des Ambassadeurs de Russie, la présentation de ce premier livre du patriarche Cyrille en langue française qui est aussi la première publication des Éditions Sainte-Geneviève, créées à l’initiative de notre Séminaire orthodoxe russe d’Épinay-sous-Sénart, avec le soutien et la bénédiction de l’évêque Nestor de Chersonèse.

Je voudrais dire toute ma gratitude à trois personnes qui ont œuvré à l’édition de ce livre. Il s’agit de M. Victor Smirnov, ancien élève de notre Séminaire qui est désormais mon principal aide et fidèle appui, qui a travaillé des heures pour faire la maquette de l’ouvrage et lui donner le bel aspect que vous lui voyez. Il s’agit aussi du P. Hyacinthe Destivelle qui a eu la bonté de relire ma traduction et de corriger mes nombreuses erreurs. Et enfin, il s’agit de Mme Irina Abramovich dont la générosité a permis que ce livre voie le jour.

Votre présence, Mesdames et Messieurs, à notre rencontre de ce soir est un bel encouragement au travail que nous nous efforçons d’accomplir dans ce pays. Soyez en remerciés. Personnellement, je ne vois pas d’autre raison à notre mission en France que de promouvoir la connaissance et le respect mutuels entre les chrétiens de l’Est et de l’Ouest de l’Europe, de susciter de nouvelles rencontres entre eux qui leur feraient prendre conscience de la douleur et de l'incohérence de nos divisions. J’espère sincèrement que nos modestes efforts contribueront à préserver et à faire grandir la paix entre les peuples de notre continent, fondée sur la foi commune dans la résurrection du Christ Jésus.
Lien Séminaire orthodoxe russe - Maison Sainte-Genevièv

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 16 Mars 2014 à 18:37 | 3 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par Vidéo de la présentation du livre du patriarche Cyrille de Moscou: « La conversion au Royaume de Dieu. Méditations de Carême » le 02/04/2014 16:34
Le 12 mars, à la résidence de l'ambassadeur de Russie à Paris, a eu lieu la présentation du livre récemment paru du patriarche Cyrille de Moscou intitulé La conversion au Royaume de Dieu. Méditations de Carême. Nous vous invitions à visiualiser l'enregistrem SUITE

2.Posté par Vladimir.G : recension de Jean-Claude Larchet le 01/07/2014 10:20
Orthodoxie.com publie une très intéressante recension de J.C Larchet. Elle fait parfaitement ressortir les qualités et l'intérêt de cet ouvrage et en donne deux extraits significatifs, sur le jeûne et la prière, qui montrent bien comment les homélies du patriarche s'appliquent à la plupart d'entre nous, à notre pratique religieuse quotidiennes: "Son sens pastoral s’exprime bien dans ce recueil d’homélies qui restent proches des sources évangéliques tout en abordant un certain nombre de problèmes actuels, qui comportent à chaque fois un enseignement spirituel bien ciblé et directement applicable, et qui, par la simplicité et la vivacité de leur style, sont accessible à tout public."

J.C Larchet aborde aussi des points de traduction de la prière de St. Ephrème en montrant magistralement toute la difficulté de cet exercice!

Il est considéré comme l’un des principaux théologiens occidentaux contemporain et j’espère que sa recension incitera beaucoup d'Orthodoxes francophones à ce procurer ce livre très important.

3.Posté par Spiritualità. La «cattolicità ortodossa» di Siniakov le 25/10/2019 10:38
l teologo franco-russo impegnato per l’unità dei cristiani rivendica l’eredità spirituale dell’Oriente e dell’Occidente «Lo zelo serve, ma solo per combattere l’uomo vecchio dentro di noi»

Divinoumanità, cocreaturalità, sobornost: sono alcune delle peculiari parole chiave che distinguono la teologia ortodossa. La prima indica il destino positivo dell’uomo, nel cui volto è stampato il sigillo della divinità, il suo splendore, come hanno rimarcato pensatori come Berdjaev e Florenskij o pittori come Rublëv. Con la seconda ci si riferisce alla condizione comune dell’uomo, degli animali e delle piante, di tutto il cosmo insomma, che è ripieno della presenza di Dio e che è finalizzato alla salvezza. Infine, sobornost sta a significare unità nel senso di cattolicità ed universalità, ma anche comunione dei santi. Questi tre concetti sono stati ben illustrati al pubblico occidentale e anche italiano da Olivier Clément. E ora tornano grazie a Alexandre Siniakov, che a Parigi dirige un seminario ortodosso su incarico del patriarcato russo ed è autore del volume Come folgore sorge da Oriente (San Paolo, pagine 190, euro 18), che in Francia è stato premiato quale miglior libro di spiritualità nel 2018. Appartenente alla comunità dei Vecchi Credenti di un gruppo di cosacchi emigrati in Turchia per scampare alle persecuzioni degli zar e poi rientrati in Russia dopo la Rivoluzione bolscevica, di , che è nato nel 1981 e quindi da bambino ha visto sgretolarsi il regime comunista, si è convertito da giovane e ha perfezionato la sua vocazione nel monastero di Ipatiev.

Ma la passione per le lingue l’ha presto spinto in Francia, dove ha studiato alla Facoltà di teologia domenicana di Tolosa, per poi stabilirsi a Parigi. Il libro «è una testimonianza della cattolicità della mia ortodossia», come precisa nell’introduzione, ove ribadisce il duplice attaccamento all’eredità spirituale dell’Oriente e dell’Occidente. Il suo miglior amico, il domenicano Hyacinthe Destivelle, conosciuto al convento Saint-Thomas, l’ha aiutato a studiare la lingua francese, così come lui gli ha insegnato il russo. Ora padre Hyacinthe lavora al Pontificio Consiglio per l’unità dei cristiani. La loro amicizia è il segno di un ecumenismo praticato nei fatti e non solo declamato a parole. «Gli ortodossi – dice Alexandre alla fine del volume – sospettano che io sia filocattolico e i cattolici mi vedono diverso da loro, ma questa situazione non mi preoccupa ». Per lui anche se divisa la Chiesa rimane una: non riesce a considerare irreversibile la separazione fra i cristiani, anzi ritiene il confessionali- smo, che esclude ogni ricerca dell’unità, uno dei mali del nostro tempo. E fa proprio il grido di Gregorio di Nazianzo che nel IV secolo scriveva: «Perché noi, discepoli della pace, ci facciamo una guerra senza tregue e senza pietà?». Un altro grande dottore della Chiesa dei primi secoli, Basilio di Cesarea, fu amicissimo di Gregorio e insieme si recarono all’Accademia di Atene per completare la loro formazione.

Proprio a Basilio si deve un libretto originale, Su come trarre profitto dalle lettere greche, che esprime la convinzione che gli scritti profani costituiscano uno stimolo culturale e spirituale imprescindibile anche per chi è votato allo studio della parola di Dio. Siniakov ha messo in pratica la lezione: sin da ragazzo, nella biblioteca del paesino del Caucaso dove è cresciuto, ha potuto incontrare le opere di autori come Hugo, Stendhal, Zweig, Mann, Poe e Chesterton. Letture da cui ha appreso ad affrontare in maniera nuova la questione Dio, che emergeva prepotentemente nei personaggi dei romanzi francesi, inglesi o tedeschi. E persino russi come quelli di Dostoevskij non facili da reperire ai tempi del comunismo. L’amore per le lingue e per la letteratura è stato l’incubatrice della sua conversione, tanto che ora può tranquillamente sentenziare: «Non riesco a non vedere in chi disprezza le lettere i cattivi operai che lapidano i messaggeri mandati dal padrone, preoccupato per il degrado della sua vigna. Bisogna accogliere i libri come si accolgono i poveri: vedendoli come degli inviati da Dio».

Parole che anche noi cattolici dovremmo accogliere e su cui anzi meditare, in un momento storico in cui nella nostra Chiesa c’è persino chi vuole accantonare lo strumento libro ai fini dell’evangelizzazione, puntando tutto sui social o sui tweet. La malattia contro la quale Siniakov, che tra i suoi maestri spirituali indica Lossky e Berdjaev, si scaglia è il clericalismo, perché «ci porta non tanto a manipolare con discrezione la parola di Gesù, bensì ad annientarla con la coscienza a posto».

Si tratta di un male che evidentemente colpisce sia gli ortodossi che i cattolici, vista l’insistenza con cui papa Francesco vi fa riferimento. Per Siniakov i successori degli Apostoli, siano vescovi, preti o diaconi, non si devono considerare come un’élite spirituale, una sorta di potere separato, visto che c’è una sola dignità dei figli di Dio, «l’uguale dignità dei battezzati ». Il teologo e prete ortodosso non contesta affatto il ministero dei pastori della Chiesa: «Contesto il modo che esso ha di trasformarsi in superiorità sociale all’interno di comunità cristiane, rette idealmente dall’uguaglianza in Cristo di tutti coloro che le compongono».

Richiamandosi alla Gerarchia ecclesiastica di Dionigi l’Areopagita, egli definisce la comunione come un mettere in comune la santità: è questo il verso senso della cattolicità o, come la chiamano gli ortodossi, la sobornost. Ma per vincere il clericalismo ci vuole capacità di autocritica, ed è quanto Siniakov compie ricordando quando, subito dopo la sua conversione, ha trascorso un periodo di oscurantismo che lo portò addirittura a bruciare il romanzo Il Maestro e Margherita di Bulgakov, considerandolo una sorta di Vangelo secondo Satana. Ora riconosce di essersi comportato da vero zelota (come fa ancor oggi chi vuole restare ancorato alla tradizione idolatrando il passato), incapace di comprendere la satira fine dello scrittore, così ricca di humour e di bellezza. Allora compì «un autodafé nelle steppe del Caucaso», scrive con rimpianto e autoironia. E ammette: «L’unica lotta che esige tutta l’intransigenza e tutta la passione di cui la nostra natura è capace è la lotta contro se stessi. Lo zelo ci vuole per il cristiano, ma va usato per combattere l’uomo vecchio che sopravvive in lui».


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