Jérusalem: LES ANATHÈMES DU SAINT SÉPULCRE
Av. Alexander Winogradsky Frenkel (1) a publié le 02 mars 2018 un long article (2) sur la situation à Jérusalem dont je vous propose le passage sur la célébration du Dimanche du Triomphe de l’Orthodoxie ou des Icônes dans la basilique du Saint Sépulcre (j'ai ajouté des sous-titres pour plus de clarté). V. Golovanow

av. Alexander

« LE RITE DES ANATHEMA »

Le 25 février, au matin, tous les offices eurent lieu selon la tradition au sein de l’Anastasis. Le jour est particulier pour chacune des juridictions en présence. Le patriarcat orthodoxe de Jérusalem célèbre le premier dimanche du Grand Jeûne ou Carême qui mène à la Pâque. Il est consacré au « triomphe de l’Orthodoxie » et rappelle que, par la décision du VIIème Concile œcuménique, les icônes sont légitimes et qu’il est licite de représenter Jésus, sa Mère et les saints car ils sont le reflet de l’incarnation et du salut tels qu’ils sont confessés par la foi reçues des apôtres. Ce dimanche rappelle les exigences de la foi « authentique = orthodoxe (foi droite, glorieuse, véritable) qui est aussi en tension sur la « plénitude de tout, le plérôme = elle est « kath’olon », catholique ».

Selon l’antique tradition orientale, un service particulier est ensuite célébré devant l’Edicule récemment restauré : « le rite des Anathema ». Une série longue et qui remonte le cours de l’histoire de vingt siècles de christianisme : les noms de ceux qui se sont fourvoyés dans l’erreur théologique sont « anathema » – maudits » et ceux qui ont été fidèles à la foi authentique sont rappelés « pour une mémoire éternelle ».

Jérusalem: LES ANATHÈMES DU SAINT SÉPULCRE
Cet office est profond. Il signifie que certains se sont trompés et qu’ils sont exclus et anathémisés … Les hiérarques présents en arrivent à frapper du pied devant l’Edicule… pour rythmer l’office tandis que d’autres sont rappelés joyeusement comme des témoins authentiques pour l’éternité au jugement de siècles de synodes des Eglises locales.

Ce rappel est scandé et, dans l’espace restreint du Lieu saint, les mots sont audibles par tous. Le 25 février, les Arméniens ont à nouveau entendu qu’ils étaient des « hérétiques ».

C’est irritant. Un ami m’a dit : « J’ai beau y être habitué, cela reste très désagréable ». Surtout que cela donne un écho négatif à toutes les marques de sympathie ou de vœux d’unité chrétienne en Terre Sainte.

CÉLÉBRATIONS PARALLÈLES

D’autant que ce dimanche, les Arméniens apostoliques célébraient, au deuxième Golgotha en hauteur, face à l’Edicule central, le « Dimanche du pardon » que les orthodoxes byzantins avaient commémoré à l’entrée-même de la première semaine de Carême, voici une semaine.

A la chapelle de Sainte Marie-Madeleine, les catholiques latins célébraient le « Dimanche de la Transfiguration », mémoire de l’instant furtif mais théologiquement significatif de la récapitulation de l’histoire dans le Messie qui eut lieu au mont Thabor.

LES MYTHES ONT LA PEAU DURE

Les catholiques furent aussi mentionnés comme hérétiques pendant les Anathèmes.

On comprend dans quel contexte la protestation des Eglises a eu lieu ensuite « una voce »… en l’absence des clergés copte, syrien-orthodoxe et éthiopien, voire anglican. Car les mythes ont la peau dure : les catholiques sont persuadés, comme les orthodoxes liés au patriarcat de Constantinople, que les Anathèmes ont été levés suite à la rencontre du Pape Paul VI et du Patriarche Athénagoras en 1964 à Jérusalem, accueillis par le Patriarche Benediktos de Jérusalem. L’actuel Patriarche Théophilos fut alors son archidiacre ce qui souligne une légitimité historique dont il faut tenir compte.

A Jérusalem comme dans le patriarcat de Moscou et ailleurs, les Anathèmes n’ont pas été levés en 1965. Lorsque les Eglises orthodoxes se sont libérées du joug communiste ou dictatorial, elles n’ont pas confirmé cette décision qui semble acquise.


Jérusalem: LES ANATHÈMES DU SAINT SÉPULCRE

EXPLICATIONS COMPLÉMENTAIRES

Et dans un échange sur Facebook, Av. Alexander a complété son explication:

Citation:
Le Pape Paul VI a pris comptant d'une part sa primauté sur tous les patriarches. Or le Patriarche Athenagoras ne pensait que venir le saluer amicalement à Jérusalem. Cela s'est achevé sur un quiproquo: le Pape retournait à Rome avec un projet de reconnaissance totale et mutuelle alors que pour Athenagoras, les choses étaient plus souples, "orientales". Mais comme les autres Eglises orthodoxes étaient soit en dictature (les grecs), soit en despotisme communiste, elles n'ont pas confirmé une décision uniquement prise entre les deux "primi interpares", ce qui ne convient pas en régime orthodoxe. Et cela s'est poursuivi sur une forme de "détournement". C'était très sensible lors de la visite du Pape François et avec le Patriarche Bartholomaios en 2014. Il y a eu de nombreux grincements de dents et des absents du côté des membres du patriarcat orthodoxe de Jérusalem mais aussi des russes etc.

(1) Le père Alexandre Winogradsky Frenkel dirige les communautés orthodoxes hébraïques de l'Est en Terre Sainte / Israël et sert dans la Vieille Ville de Jérusalem. Le père Alexandre est membre du patriarcat de Jérusalem "en charge des chrétien orthodoxes dans la société israélienne".
(2) "http://frblogs.timesofisrael.com/il-faut-quune-porte-soit-ouverte-ou-fermee/".

Lire aussi p. Alexandre Winogradsky Langue et Résurrection

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 7 Mars 2018 à 11:01 | 0 commentaire | Permalien



1.Posté par Daniel le 07/03/2018 12:08
Les faits sont les faits, les Arméniens, les catholiques, les Ariens et les autres sont hérétiques en dehors de l'église... Anathème ne signifie d'ailleurs pas maudit. Etymologiquement, ceci signifie "suspendu".

2.Posté par Vincent le 07/03/2018 20:53
L'Anathème signifie que les personnes concernées sont hors de l'Eglise confessante la Foi véritable établie par les 7 Conciles.

Si les "anathèmes" ont été levés, quid de l'intercommunion entre catholiques et orthodoxes (du Patriarcat de Constantinopleà ?

3.Posté par père Joachim le 08/03/2018 00:47
Les propos du Père Alexandre sont remplies "d'affect" "de bons sentiments" c'est pour moi le versant Sud de son discours, celui qui reçoit un beau soleil !
L’autre aspect limite AGAPOLOGIQUES cré le profil d'un saint personnage en ajoutant à la situation dramatique un floue navrant, comico-glacial.

Pour ce qui est de 1054 le non possum a mit dos à dos deux confessions d'une même foi. L'un est devenu pour l'autre, la partie hérétique à ANATHÉMATISER. (lire ORIENT OCCIDENT du Père Placide)

Fort heureusement après 1000 ans, les "parties concernées" retrouvent chacune des voies de sagesse (cf. la Crêtes qui a voulu tenir compte d'avancées). Un Benoît XVI, un Jean XXIII, ici un Cardinal, là un frère dominicain, ailleurs d’autres,.. apportent les baumes réparateurs dont l'église a besoin.
Prenons garde qu'un jour les "hétérodoxes" et les laissés pour comptes des races de la terre ne nous devancent avant même le JOUR du Royaume et nous laissent loin derrière drapés dans nos suffisances et notre incurie ! (et ... nos hérésies latentes)

4.Posté par père Joachim le 08/03/2018 12:50
A propos des Icônes du premier dimanche de carême. On ne verrais d'Icône ce jour s'il y avait un "rituel" RECONNU, célébré en conclusion de la Divine Liturgie. Chez les slaves ce rite est réservé aux églises cathédrales, c'est bien, mais Il n'est en rien "le rite des anathèmes"
Le rituel prévoie une procession, des chants, des icônes et la LECTURE du fameux Synodikon que "certains" semblent redouter.

Mis à part que ces "certains" en Terres Saintes semblent se comporter en redoutables phalangistes, sur la défensives, agressifs et violent (moins ces toutes dernières années), RIEN n’empêcherait ces derniers de se reconnaitre dans un texte antique de référence nommé Synodicon. Il ne fait que réactualiser au IX s. ce que disent les Écritures, sans se prétendre être une substitution du Crédo de Nicée où tous devraient se reconnaitre..

Dans cette proclamation complétée au cours des siècles ( qui le sera à nouveau, en temps voulu, quand les expressions de nouveau consensus seront réalisés) beaucoup se reconnaissent d'ores et déjà.

Les Arméniens, Coptes, Éthiopiens ... semblent aller dans ce sens puisque toutes ces familles revendiquent à présent le titre d’Orthodoxe mais quoi qu'il en soit, la raison nous enseigne qu'on n'est l'hérétique de l'autre que dans la mesure ou on assume cette stigmatisation. C'est bien ce que nous enseigne les échanges médiévaux d anathèmes ente Rome et Constantinople, qui sont à présent levés pour ouvrit un "dialogue d'amour" et à présent de "vérité".

5.Posté par Vladimir.G: la communion est le signe de l'union des Églises orthodoxes le 08/03/2018 19:41
Bien cher Vincent,

La levée des anathèmes ne changes rien à l'interruption de la communion. Cette interruption de communion peut se produire entre deux Églises orthodoxes, en cas de désaccord ecclésiologique, c'est actuellement le cas entre les patriarcats d'Antioche et de Jérusalem , mais avec les Catholiques le problème est évidement plus profond.

Un jeune Catholique en recherche demandait récemment à un prêtre orthodoxe pourquoi il ne pouvait pas communier avec nous, et le prêtre lui a répondu: vous pouvez, il suffit que vous deveniez Orthodoxe. En effet, la communion au même calice est le signe de l'union des Églises orthodoxes qui partagent la même foi. Tous ceux qui participent sont obligatoirement dans cette situation et il ne peut y avoir aucune exception...

L'Église catholique a une autre doctrine: c'est la soumission au Pape qui signe l'appartenance au catholicisme et la communion est ressentie comme un signe de fraternité ouverte à tous les Chrétiens au delà des différences dogmatiques. Il faut d'ailleurs souligner que le rapport aux dogmes est différent: respect absolu et inflexible chez les Orthodoxes, tolérance d'une souplesse certaine chez les Catholiques...

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