Julius Margolin (1900-1971): "VOYAGE AU PAYS DES ZE-KA"
ANTOINE PERRAUD

Julius Margolin (1900-1971), incarcéré en URSS de 1939 à 1945, rédigea dès sa libération un livre formidable, enfin publié dans son intégralité

Le livre bénéficie de surcroît du titre approprié, "Voyage au pays des Ze-Ka", qui reprend le sigle z/k, ou zek, désignant à l’origine les «détenus du canal», c’est-à-dire affectés au creusement de l’ouvrage reliant la Baltique à la mer Blanche, avant de s’appliquer à tous les prisonniers du goulag, cet archipel de camps esclavagistes propre à l’URSS. Le récit reconquiert enfin sa cohérence et sa puissance, puisque l’édition de 1949, certes magnifiée par une traduction de Nina Berberova et Mina Journot, avait hélas escamoté un tiers du manuscrit, en particulier les passages les plus durs à propos du système soviétique.

Le lecteur ne trouve pas l’ampleur des visions et des sensations d’un Varlam Chalamov (Les Récits de la Kolyma, aux Éditions Verdier), qui en est venu à incarner le goulag, alors que Julius Margolin le traverse.


Nous sommes bouleversés par chaque mort qui tombe à nos côtés; nous sommes étreints par le souvenir d’une fillette de cinq ans qui hante un détenu; nous savons soudain gré à un cuisinier qui rajoute secrètement une portion de gruau dans l’écuelle; nous tremblons d’effroi et de colère face aux «ourki», ces truands qui imposent leur loi, au point de transformer les camps, puis toute l’URSS, à leur image.

Jules Margoline savait de quoi il parlait.
Né en 1900 dans une famille juive de Pinsk (aujourd’hui en Biélorussie), installé en Palestine à partir de 1936, ce Julius Margolin – telle était son identité – partit visiter la Pologne en 1939, où il se fit surprendre par la Seconde Guerre mondiale. Fuyant le nazisme, il connut la serre soviétique, de la relégation vétilleuse à la déportation. Rescapé du goulag, il put retourner en Palestine, où il rédigea, en russe, de décembre 1946 à octobre 1947, près de huit cents pages réfléchies et hallucinées sur les camps...

Suite " La CROIX"


Rédigé par l'équipe de rédaction le 25 Novembre 2010 à 05:09 | 2 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par vladimir le 26/11/2010 16:27
J"espère que l'extraordinaire "J'ai choisi la liberté" de Kravchenko, qui ne semble pas avoir été réédité depuis 1949, connaitra aussi une renaissance similaire. Il s'agit là, à mon sens, du plus extraordinaire réquisitoire contre l'ensemble du système, écrit dans une langue simple et aussi passionnant qu'un roman, mais bourré de faits réels confirmés par un procès retentissant. Il n'est pas étonnant que la pensée de Gauche dominante ait réussi à étouffer ce cri depuis 50 ans et il serait grand temps de l'entendre à nouveau!

2.Posté par yaroslav nie moudri le 29/12/2010 12:37
Après avoir lu cet ouvrage, je ne comprends pas pourquoi ? Alors que julius Margolin est 1 Citoyen de la Palestine , les structures étatiques de ce nouveau pays n'ont pas fait de procès à l Urss de l époque, pour barbaries+rétention abusives+tortures, etc...
ainsi que indemnités conséquentes - comme l Allemagne l a fait à l égard des populations ayant subies le nazisme - Au nom de quoi cet homme, devais payer un tribut à l Urss ? Existe t'il des droits qui seraient respectés pour des citoyens "non soviétisés " depuis 70 ans , qui par malheur seraient dans une situation un peu identique...., sachant que l histoire hélas se répète .... Comment prévenir cela ??

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