V. Golovanow

C’est le titre d’un article de Fabrice Deprez, jeune journaliste qui a travaillé en Ukraine, en Russie et dans les pays Baltes et qui tente une synthèse des évènements pour le journal catholique de référence en France "La Croix" (article réservé aux abonnés (1). Mais cet article se révèle en fait très approximatif alors même qu’il sera la référence pour l’opinion française.

UNE APPROXIMATION DE TAILLE

Après avoir rappelé l’élection du métropolite Épiphane (Doumenko), que notre chroniqueur baptise curieusement "I’Epifani", il fait un micro-trottoir: "Avec quelques milliers d’autres Ukrainiens, Constantine a bravé le froid hivernal, samedi 15 décembre, pour se rendre devant la cathédrale Sainte Sophie et assister à la création d’une nouvelle Église orthodoxe ukrainienne. « C’est un événement historique », s’enthousiasme cet électricien venu de la région de Tcherkassy, dans le sud du pays. Une bandelette aux couleurs du drapeau ukrainien noué sur la poitrine, il attend patiemment la confirmation du succès du concile, une journée que « nos enfants étudieront à l’école », assure-t-il."

"Concrètement, explique ensuite très justement Fabrice Deprez, le concile a fusionné l’Église du Patriarcat de Kiev (la plus importante du pays d’après plusieurs sondages) et la minoritaire Église autocéphale, deux organisations religieuses qui n’étaient alors pas reconnues comme canoniques."

Notons là une approximation unanimement reprise dans les media occidentaux: si le pseudo-patriarcat de Kiev (KP) était bien majoritaire dans les sondages généraux, il était clairement minoritaire auprès des fidèles orthodoxes, ne contrôlant guère plus de 5000 paroisses, contre 12 000 pour l’Église Orthodoxes Ukrainienne (EOU, patriarcat de Moscou, qui ne participait pas au Concile) et environ 1000 pour "l’Église autocéphale d’Ukraine" (EAU, très présente aux USA et au Canada où ses Église sœurs ont rejoint le patriarcat de Constantinople.)

UN CONCILE TRÈS POLITIQUE

Le journaliste souligne à juste titre l’intervention des autorités civiles dans le pseudo-concile: le président Porochenko assiste au concile et se félicite de l’apparition d’une Église «sans Poutine, sans Cyrille et sans prière pour l’armée russe». "Un discours aux accents très politique venu rappeler qu’avant d’être un événement religieux, la création d’une Église orthodoxe ukrainienne est vue dans le pays comme une manière de s’affranchir de la tutelle russe" souligne Fabrice Deprez.

Et il donne la parole à un prêtre du KP, Andrii Taschenko, venu de Lviv, province ultra-nationaliste de l’ouest ukrainien, qui faisait partie de l’empire autrichien puis de la Pologne avant 1945. « Cela fait trois cents ans que nous nous battons pour ce moment », dit cet activiste en se référant au rattachement de la métropole de Kiev à l’Église russe en 1686.
"Pour lui, comme pour les fidèles du KP, la création de cette nouvelle Église ne devrait pas changer grand-chose à leur quotidien, écrit le chroniqueur. mais la situation sera différente pour les fidèles du Patriarcat de Moscou : cette Église était jusqu’alors la seule Église canonique du pays."

DEUX ÉGLISES ORTHODOXES SUR UN MÊME TERRITOIRE


"Le métropolite Épiphane s’est voulu rassembleur en assurant que « les portes de notre Église sont ouvertes à tous »," continue le chroniqueur en soulignant que le président Poroshenko a garanti aux fidèles la possibilité de rester au Patriarcat de Moscou, "mais il n’a laissé que peu de doutes sur le fait que la nouvelle Église serait celle qui bénéficierait du soutien des autorités…" Et comme seuls deux évêques sur les 85 que compte l’EOU ont participé au pseudo concile (ils ont été immédiatement destitués et remplacés à la tête de leurs diocèses par le synode de leur Église).il est peu probable que la majorité des fidèles rejoignent la nouvelle juridiction.

L’article note que c’est maintenant Patriarcat de Constantinople de reconnaître canoniquement la nouvelle Église par la remise d’un «Tomos», décret définissant le statut canonique de l’Église. Cette étape est prévue pour le 6 janvier 2019. Mais nous devons souligner que les éléments d’ores et déjà connus de ce statut sont loin de répondre aux attentes des tenant de l’indépendance de l’Église ukrainienne: Constantinople ne reconnaîtrait pas un "patriarcat de Kiev", ni même une Église autocéphale à l’égal des quinze autre Églises qui forment la communion orthodoxe. Il s’agirait tout au plus de revenir à la situation d’avant 1686, quand la métropole de Kiev jouissait d’une autonomie limitée au sein du patriarcat de Constantinople…

En tous les cas, nous arrivons maintenant à cette situation contraire aux canons de deux juridictions orthodoxe sur un même territoire. Il est certains que Porochenko va user de tous les leviers administratifs pour obliger les paroisses de l’EOU à rejoindre la nouvelle juridiction. Des "perquisitions" rappelant les heures sombres du stalinisme ont d’ailleurs déjà commencé (2), mais la situation risque de devenir dramatique si le pouvoir passe à des spoliations de lieux de culte qui rencontrerons une forte résistance des fidèles, comme on l’a vu récemment dans l’ouest du pays.

En conclusion, l’information donnée par les media occidentaux, y compris ceux qui sont censés être les plus objectifs, donnent toujours en fait des informations au mieux incomplètes et souvent biaisées sur la situation dramatique en Ukraine.
L’UKRAINE POSSÈDE UNE NOUVELLE ÉGLISE ORTHODOXE

(1) https://www.la-croix.com/Religion/Orthodoxie/LUkraine-possede-nouvelle-Eglise-orthodoxe-2018-12-16-1200989912
(2) https://www.la-croix.com/Religion/Orthodoxie/Perquisitions-Ukraine-eglises-rattachees-Moscou-2018-12-04-1200987412?fbclid=IwAR12DjRuPGbJKSAPPhwC70MTQhihRmiOcZM7SXXuDvNCwLwmDOdFUeU9LUo

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 18 Décembre 2018 à 12:26 | 13 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par justine le 18/12/2018 13:41
La meilleure réponse à ces "approximations" ou plutot, pour dire les choses par leur nom, à cette reproduction de la position des schismatiques et fanariotes, est le message que le Synode de l'Eglise Orthodoxe Ukraine, par la voix du metropoilite Onuphre de Kiev et toute l'Ukraine vient de publier: voir
https://orthodoxie.com/message-du-saint-synode-de-leglise-orthodoxe-dukraine-suite-au-concile-de-reunification-du-15-decembre-2018/

2.Posté par justine le 18/12/2018 13:54
Le Primat de l'Eglise de Pologne, le metropolite Sabas, vient d'écrire une lettre au métropolite Onufrij dans laquelle il l'assure une fois de plus de son plein soutien, confirme la décision du Saint Synode de l'Eglise Orthodoxe de Pologne refusant de reconnaitre les schismatiques ukrainiens et de communier avec eux, et exprime sa grande inquiétude de ce que les récents développements - légitimation des schismatiques et leur union dans une "eglise" dans les girons du patriarcat de Constantinople - pourront avoir comme conséquences pour le peuple orthodoxe d'Ukraine.
http://vzcz.church.ua/2018/12/17/predstoyatel-polskoji-pravoslavnoji-cerkvi-visloviv-pidtrimku-blazhennishomu-mitropolitu-kijivskomu-i-vsijeji-ukrajini-onufriyu/

3.Posté par Silvain : La frange LGBTQIP se mobilise pour soutenir l''''abbaye de Thélème le 20/12/2018 11:25
L'ambassade US pro-gay félicite "l'Église orthodoxe indépendante"
L’ambassade des États-Unis à Kiev a félicité sur Twitter (le 15 décembre) une Église orthodoxe ukrainienne indépendante récemment établie et son dirigeant Epifaniy Dumenko.
L'ambassade est un partisan officiel de la Gay Pride 2018 de Kiev, un événement de propagande imposé à la population afin de la familiariser avec l'idéologie gay.
En juin 2018, l’ambassade a publié une déclaration du secrétaire d’État de Trump, Mike Pompeo, propageant ce que Pompeo appelait le "Mois de la fierté".
La nouvelle église a été créée dimanche avec le soutien du patriarche de Constantinople, ce qui a provoqué une scission profonde parmi les orthodoxes.
La nouvelle église est identique au groupe Filaret, fondé par Filaret Denysenké, défroqué en 1992 par l’Église orthodoxe ukrainienne, une mesure alors reconnue par Constantinople.
Aucun des évêques de l'Église orthodoxe ukrainienne n’a rejoint le groupe Filaret, qui est promu par le président et oligarque ukrainien Petro Poroshenko. (NDR, en fait il y en a deux)

Commentaire
Voilà à quoi ressemblera la nouvelle panhérésie officielle, dans laquelle la plupart se reconnaîtront, et sur laquelle dominera celui dont je n'ai pas le droit de citer le nom sous peine d'être censuré par les modérateurs, après que les précautions politiques de non-ingérence vis-à-vis de l'Église russe seront tombées partout, même à Rome. Surtout à Rome.

4.Posté par Guillaume le 20/12/2018 14:00
La Croix est un quotidien assez ineptes et qui a une méconnaissance totale de l'Orthodoxie. Même moi, simple latin un peu éclairé j'en sais bien plus.

5.Posté par Vladimir.G: les approximations et contre-vérités qu'il publie fondent une grande partie de l'opinion le 20/12/2018 19:20
Le problème est que "La Croix" est le journal catholique de référence en France, comme je l'écris, et les approximations et contre-vérités qu'il publie fondent une grande partie de l'opinion qui s'intéresse à la religion ...

6.Posté par justine le 20/12/2018 20:49
Selon les dernières nouvelles, 45 des 79 clercs (sur 290) qui étaient partis dans le schisme avec Siméon, metropolite destitué de Vinitsa, sont déjà revenus à l'Eglise canonique mardi 18 décembre, après une rencontre avec le nouveau métropolite Barsanufij de Vinitsa.
http://orthochristian.com/118038.html

Auparavant, le nouveau métropolite avait été recu avec grande joie par la foule des fidèles. Voir ces
2 videos, l'un de 9 min, l'autre de 3 min. :
https://www.facebook.com/varsonofii/videos/2330026913900599/
https://www.facebook.com/platon.baronov/videos/1430695690394007/

7.Posté par Vladimir.G: confirmation des ananlyses précédentes... le 21/12/2018 10:44
Merci Justine,

Le site donné par Justine (http://orthochristian.com/118038.html et lien) fournit (en anglais) tous les détails et sources de cette information... Les vidéo sont impressionnantes !

8.Posté par Manolis le 21/12/2018 14:23
Silvain, votre discours me semble passablement toxique. Je ne vois vraiment pas comment justifier un tel discours complotiste mélangeant t les USA, les homosexuels et l'orthodoxie ukrainienne.

9.Posté par Silvain : une fausse église pour une société perverse le 22/12/2018 01:43
@Manolis
L'orthodoxie ukrainienne, la vraie, n'est pas l'otage des USA ni celle du péché, des impies, ou des homosexuels. Elle est pure de cette ignoble union de schismatiques. L'autre orthodoxie, la fausse, est celle voulue par des intérêts occidentaux, américains en particulier, à travers les vecteurs pourris de la défunte Byzance. Il n'y a qu'à voir les messages de congratulations qui émanent du département d'État américain pour la forgerie du 15 décembre, et pour le reste, lisez ces fils de discussion.
Quant aux USA, tout le monde sait que le département d'État est derrière cette toute affaire, tout comme il l'est derrière le putsch de Maidan ou la gay-pride de Kiev. En même temps, il s'agit non seulement de faire de l'Ukraine un État occidental servant de tête de pont face à la Russie, mais de s'en emparer moralement en tentant de l'aligner sur les doctrine perverses qui polluent désormais les lois des nations occidentales. Le but est de séparer encore plus l'Ukraine de la Russie de Poutine ; qui a pour projet de restaurer un ordre moral, tout du moins de ne pas laisser s'ériger le transhumanisme comme norme de la société. L'un n'allant pas sans l'autre, le vecteur du relativisme moral est tout trouvé : une fausse église à la botte d'hommes pervers, car le mal engendre un autre mal. À Langley, la sociopathie est non seulement une seconde nature, c'est un mode d'emploi. Relisez, ou plutôt, lisez pour la première fois Sun Tzu.
Si cela vous amuse de traiter ma prose de toxique ou de complotiste, je ris doucement, car c'est le vocabulaire marginalisant des bien-pensants de ce monde et de leurs larbins, façon l'entartable BHL, qui défendent, urbi et orbi, le mensonge et la traîtrise. Mais j'assume, car il y a bel et bien complot. Relisez le psaume 82 : finalement, la Bible aussi est complotiste, et personne ne le lui reproche.
Et pour conclure, considérons les actions souterraines de l'improbable "Begog", assis sur le trône de la ville éternelle, si extraordinaire et si amène, derrière lequel tout le monde court comme un petit chien, dont les lieutenants sont financés par Soros, pour comprendre à quelle sauce on mangera demain les pauvres ukrainiens qui suivront le chemin sur lequel il est déjà maître de félonie. Non, je ne référencerai plus, je ne mettrai pas de lien (il y en a trop), ceux qui savent n'ont pas besoin de ces références, ceux qui ne savent pas doivent chercher ou se contenter de rester ignorants, du moins jusqu'à ce que des lendemains douloureux ne viennent les rappeler à une plus dure réalité.

10.Posté par BAB le 23/12/2018 19:08
Je suis tout a fait d'accord avec Sylvain, post 9

11.Posté par justine le 24/12/2018 15:24
Au post 8, Manolis: Tout cela - agissements subversifs de certains gouvernements d'Occident et en particulier des Etats Uni et de l'EU, la promotion effrénée de l'idéologie gendériste dans les pays chrétiens (ceux qui le sont encore et ceux où il y a encore des résidus de christianisme) et les immixtions dans la vie de l'Eglise - a un dénominateur commun et un but commun: c'est l'oeuvre des ennemis du Christ et leur but commun est de faire disparaitre jusqu'à Son Nom de la mémoire des hommes. Les uns sont les agents conscients de ce projet de la destruction de l'Eglise, les autres des instruments inconscients, menés les yeux bandés. Avez-vous vu p.ex. les cartes de "Noel" de ce lobby? "Joyeuse Fete" disent-elles, sous le décor d'un lapin ou autre chose sans rapport. Le pire qu'on puisse faire, c'est fermer les yeux sur l'évident et le nier. Pour cela, on a envie de crier avec le père Dimitri Smirnoff: "Frères chrétiens, réveillez-vous!" (titre d'un livre qui vient de paraitre en francais, voir ce lien:)

12.Posté par BAB le 25/12/2018 00:21
En Occident( USA et Europe ) les plus pervers sont la TV et les grands médias , qui travaillent pour les grosses oligarchies qui les possèdent..
Beaucoup de naïfs se laissent manipuler par les histoires et les mensonges,de la grande presse même des Russes.
En politique il faut savoir que le vérité est toujours cachée et qu'il faut toujours la rechercher;
Tout le reste est de la propagande.i

13.Posté par justine le 25/12/2018 12:44
A signaler: wikipedia a été ultrarapide à enregistrer, et ceci dans le sens du Fanar et des schismatiques, cette "nouvelle église" en Ukraine. Toutes les pages traitant de l'Orthodoxie, des Eglises Orthodoxes, ont été adaptées a ces fausses catégories et chiffres. Comme c'est une "encyclopédie ouverte" où chacun peut contribuer, il est URGENT que les Orthodoxes qui ont les moyens techniques nécessaires procèdent à des rectifications ou du moins obligent wikipedia à ajouter dans chaque cas et sur chaque page pour cette "nouvelle église d'Ukraine" un ajout qui dit clairement que cette "église" fait partie des "structures contestées", alors que maintenant wikipedia la range sous les "Eglises Orthodoxes Autocéphales en pleine communion les unes avec les autres"! Ce qui est évidemment un grossier mensonge!

14.Posté par justine le 25/12/2018 19:13
Encore à Manolis post 8: Venue comme pour vous "éclairer", voici cette nouvelle: Le "primat" de la "nouvelle église" en Ukraine, Epiphane, vient de dire dans une conversation téléphonique qu'il considérait nécessaire d'"assouplir" la position traditionnellement négative de l'Eglise orthodoxe ukrainienne vis à vis du mouvement LBGT, pour etre "plus detachée de la Russie et plus proche de l'Europe" et qu'il allait travailler à cela, préparant le peuple uklrainien à accepter un tel assouplissement. Il fit ces déclarations à un farceur qui l'appela au téléphone en se présentant comme un membre du parlement européen. Voir ici: http://orthochristian.com/118195.html

15.Posté par Affeninsel le 25/12/2018 23:01
@ Justine : merci d'avoir signalé cette falsification sur wikipédia. Je m'attache à le rectifier dans la mesure du possible.

16.Posté par justine le 26/12/2018 14:41
Poroshenko sur une icone dans la pose de l'Apotre Paul! Voir http://aktines.blogspot.com/2018/12/blog-post_789.html#more

17.Posté par Vladimir G: FORTE IDENTIFICATION NATIONALE le 29/01/2019 18:20
LA CRISE DE L’ORTHODOXIE UKRAINIENNE MET EN LUMIÈRE L'IMPORTANCE POLITIQUE DU CHRISTIANISME ORTHODOXE.

Projet de nouvel article

«Le schisme en Ukraine n’est pas le fait des Orthodoxes. C’est un acte politique sous couverture religieuse».

Patriarche d’Antioche Jean X, 7 janvier 2019
https://mospat.ru/en/2019/01/22/news169316/

PARTIE 1 : LA SOCIOLOGIE DES ORTHODOXES ET SES ORIGINES HISTORIQUES EN UKRAINE

Le groupe de recherche américain The Pew Research Center (1) a mené en 2015-2016 une enquête sociologique sur les liens entre appartenance religieuse et culture nationale dans 18 pays d'Europe de l'Est, du Caucase sud et des Balkans (2). En particulier, cette étude montre la place prépondérante de l'Orthodoxie en Ukraine. "Près de huit adultes sur dix (78%) s'identifient comme orthodoxes en Ukraine contre 71% en Russie," écrit David Masci spécialiste des relations état-église chez Pew, en soulignant que "cela représente 39% de plus qu’en 1991 - l'année de l'effondrement de l'Union soviétique officiellement athée et de l'indépendance de l'Ukraine. Avec près de 35 millions d’orthodoxes, l'Ukraine est donc la troisième population orthodoxe du monde, après la Russie et l'Éthiopie," (soulignons que l'Éthiopie ne faisant pas partie de la communion orthodoxe, l'Ukraine se trouve en fait en deuxième position…)

"L’Orthodoxie est clairement reliée à la vie nationale et politique de l’Ukraine, continue l'expert. Près de la moitié des Ukrainiens (51%) estiment qu'il faut être orthodoxe pour être vraiment ukrainien. En Russie aussi, 57% des personnes interrogées affirment qu’être orthodoxe est important pour être vraiment russe... Dans les deux pays, environ la moitié (48%) déclarent que les leaders religieux ont une influence en matière politique, bien que la plupart des Ukrainiens (61%) et environ la moitié des Russes (52%) préféreraient que ce ne soit pas le cas…" (3) Notons aussi que et 46% des Orthodoxes d’Ukraine "ont déclaré faire confiance aux primats de l'église nationale ukrainienne (soit le pseudo-patriarche de Kiev, soit le métropolite de Kiev et de toute l'Ukraine rattaché à Moscou) en tant qu'autorité suprême de l'Orthodoxie," écrit l'expert. Seulement 17% considéraient alors le patriarche de Moscou Cyrille comme leur chef spirituel (alors qu’il est commémoré dans les paroisses de l’église canonique) et une proportion encore plus réduite (7%) affirmaient se tourner vers le patriarche de Constantinople Bartholomée, effectivement sans aucune position canonique en Ukraine à l’époque (ibid. Il est probable que sa position serait différente maintenant.)

Mais il faut aussi regarder les différences régionales que l'étude met en évidence. La carte montre la division du pays en distinguant les provinces de l'est et du sud, où le patriarche de Moscou et la métropole de Kiev qui en dépend obtiennent plus de soutien que le pseudo-patriarcat de Kiev, contrairement aux chiffes moyens, et ce sans compter les provinces sécessionnistes et la Crimée…

À suivre...
Notes::
(1) http://www.pewforum.org/
(2) http://www.pewforum.org/2017/05/10/religious-belief-and-national-belonging-in-central-and-eastern-europe/; Il faut noter que les zones rebelles de l’Ukraine orientale n’ont pas été pris en compte dans cette enquête
(3) http://www.pewresearch.org/fact-tank/2019/01/14/split-between-ukrainian-russian-churches-shows-political-importance-of-orthodox-christianity/

18.Posté par Vladimir G: LES VICISSITUDES HISTORIQUES DE LA METROPOLE DE KIEV le 30/01/2019 10:16
LA CRISE DE L’ORTHODOXIE UKRAINIENNE MET EN LUMIÈRE L'IMPORTANCE POLITIQUE DE L'ORTHODOXIE (suite 1)

LES VICISSITUDES HISTORIQUES DE LA METROPOLE DE KIEV

Les différences résultent bien entendu de l'histoire dramatique de la métropole de Kiev. Elle fut fondée après le baptême de la Russie kiévienne (988) et occupait la 60e place dans les dyptiques du patriarcat de Constantinople. Après la conquête tatare (XIIIe siècle) le métropolite suivit le Grand Prince à Vladimir (1354), puis à Moscou, devenue capitale du principal état russe, tout en gardant le titre de "métropolite de Kiev et de toute la Russie" jusqu'à l'obtention du titre de "patriarche de toute les Russies" en 1589.

Entre temps, les princes lituano-polonais annexèrent le territoire dès le XIVe siècle (prise de Kiev en 1361) et la métropole de Kiev, autonome de fait, se rattacha à Constantinople en 1458 malgré les protestations du métropolite et du Grand prince de Moscou. Elle fut quasiment annihilée en 1596, quand la majorité du clergé passa dans l'Église catholique-uniate à la suite de l'Union de Brest-Litovsk (c'est l'origine de l'actuelle Église gréco-catholique d'Ukraine). Les croyants étaient restés majoritairement fidèles à l'Orthodoxie, en particulier dans les territoires contrôlés par la cosaques Zaporogues (voir carte historique), et la métropole de Kiev se rétablit à partir de 1632 avec la nomination du métropolite orthodoxe de Kiev Pierre Moghila par le patriarche de Constantinople. La défense de l'Orthodoxie fut l'une des causes de la révolte des cosaques sous la conduite de Bogdan Khmelnitski (il est considéré comme un héros en Russie et un traitre en Ukraine…) Après six ans de résistance à une féroce répression par l'armée polonaise, les cosaques demandèrent l'assistance de la Russie et signèrent le traité de Periaslavl (1654) par lequel Khmelnitski et les anciens des Cosaques juraient fidélité au tsar de Moscou. Ce traité ne parlait pas du statut de l'Eglise, mentionnant simplement la garantie des droits immobiliers du clergé, et le métropolite titulaire de Kiev refusa de reconnaître l'autorité du patriarche de Moscou en revendiquant l'obédience canonique de Constantinople. Un nouveau traité fut signé en 1659 et là il était spécifié que "le Métropolite de Kiev et tout le clergé de la "Petite Russie" seront sous la bénédiction du patriarche de Moscou" alors même que les cosaques ne contrôlaient que les deux diocèses bordant le Dniepr (Kiev et Tchernigov/Chernigov), les 5 autres diocèses ukrainiens, plus à l'ouest, restant sous le contrôle de la Pologne qui était toujours en guerre avec la Russie. Ce n'est qu'après de nombreuses péripéties que le tomos rattachant la métropole de Kiev au patriarcat de Moscou fut promulgué en 1686… (4)

L'autonomie des cosaques fut progressivement réduite puis supprimée par Catherine II (1775) et les territoires de la "Petite Russie", complétés par le reste des territoires orthodoxes après les partages de la Pologne en 1795 (sauf la Ruthénie subcarpathique et la Galicie attribuées à l'Autriche-Hongrie), furent divisés en plusieurs gouvernorat intégrés à l'empire russe. La métropole de Kiev perdit de son importance après la suppression du patriarcat de Moscou par Pierre le Grand, les diocèses de la rive gauche furent directement rattachés au synode, les spécificités ukrainiennes furent progressivement nivelées et la métropole, devenue archevêché, de Kiev, fut un diocèse de l'Eglise russe parmi d'autres jusqu'après la révolution.

Les nouveaux diocèses crées dans les steppes de l'est après le démantèlement du Khanat de Crimée aux XVIII-XIXe siècles (dans les gouvernorat de Kharkov, Ekaterinoslav, Kherson et Tavria qui formèrent la "Nouvelle Russie") furent rattachés au synode… C'est toutefois l'archevêque de Kiev Vladimir qui fut le premier néomartyr de l'Eglise russe en 1917.

Le patriarcat fut rétabli par le concile de Moscou de 1917-18 et la métropole de Kiev retrouva son statut dans les limites de la république socialiste soviétique d’Ukraine, mais toute l'Église subit en URSS les féroces persécutions bolchéviques. Toutefois, la partie occidentale de l'Ukraine actuelle, où se situent deux diocèses orthodoxes, fut attribuée à la Pologne par le traité de Versailles (1919) et ces diocèses s'érigèrent en "Église Orthodoxe autocéphale d'Ukraine (UAOC)" (1921). Lorsque ces territoires furent annexés par l'URSS, en 1945, les hiérarques de l'UAOC s'exilèrent (principalement en Amérique du nord), ses paroisses et celles de l'Eglise gréco-catholique furent absorbées de force par l'Eglise russe qui subissait les persécutions staliniennes. Il y avait alors plus de paroisses en Ukraine qu'en Russie même où elles avaient été victimes des premières années du bolchévisme… Cette situation perdura jusqu'à l'effondrement de l'URSS et la proclamation de l'indépendance ukrainienne en décembre 1991.

À SUIVRE :
Notes:
(4) https://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/EGLISE-RUSSE-LA-REUNION-DU-SIEGE-METROPOLITAIN-DE-KIEV_a5433.html

19.Posté par Vladimir G: les leçons de l''''Histoire le 22/02/2019 13:31
Le Patriarcat de Constantinople dans la politique étrangère des États-Unis durant les premières années de la Guerre froide

Nous vous proposons la traduction française d’une étude historique de Pavel Valérievitch Ermilov, enseignant à la faculté de théologie de l’Université orthodoxe Saint-Tikhon à Moscou, sur les relations entre le Patriarcat oecuménique de Constantinople et le gouvernement américain au début de la Guerre froide. Cette étude s’appuie notamment sur les archives relatives à Harry S. Truman, président des États-Unis de 1945 à 1953 (photographie ci-dessus). Celui-ci souhaitait « la mise en place d’un front religieux international dans la lutte contre le communisme ». Dans cette optique, il s’est rapproché du Patriarcat oecuménique de Constantinople.
C’est l’ancien industriel et diplomate Myron Charles Taylor qui fut chargé de ce rapprochement dans un premier temps. En 1948, en accord avec les gouvernements grec et turc, les Américains œuvrèrent à l’élection du métropolite Athénagoras (Spyrou), jusqu’alors à la tête de l’Archevêché orthodoxe grec d’Amérique, à la tête du Patriarcat de Constantinople, ce qu’évoque notamment cette étude. Pour la lire, cliquez ici (l’étude en russe).

ttps://orthodoxie.com/wp-content/uploads/2019/02/POC_guerre_froide_Ermilov.pdf

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