L’archiprêtre Nicolas Balachov : Un consensus a été atteint sur l’essentiel des questions concernant la proclamation de l’autocéphalie
Le Synode du Patriarcat de Constantinople a déclaré son intention de discuter avec toutes les Églises orthodoxes locales de la requête qui lui a été adressé par le président ukrainien, Petro Porochenko, sur l’érection d’une Église autocéphale en Ukraine. Existe-t-il une procédure admise de tous pour l’octroi de l’indépendance ecclésiale – l’autocéphalie – et que disent les canons ecclésiastiques de ce mécanisme, c’est ce qu’a expliqué à RIA Novosti l’archiprêtre Nicolas Balachov, vice-président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou.

Père Nicolas, pourquoi la question de l’octroi de l’autocéphalie à telle ou telle Église ne reçoit-elle pas de réponse claire une fois pour toutes : il n’existe pas de prescriptions fondamentales à ce sujet ?

- En effet, les conditions et la procédure de proclamation de l’autocéphalie n’ont pas été définies clairement par les canons des Conciles œcuméniques (leurs décisions sont fondamentales et ont une signification primordiale pour toutes les Églises – éd.)

C’est pourquoi, lorsqu’on a commencé à préparer le Concile panorthodoxe, à Rhodes en 1961, ce thème a été inclus d’un commun accord au catalogue des questions méritant examen. Les Églises orthodoxes locales ont entamé son examen à la réunion de la Commission préparatoire interconciliaire de Chambésy, près de Genève, en 1993.

A l’époque, huit Églises orthodoxes locales avaient présenté des rapports sur le thème « L’autocéphalie et le mode de sa proclamation ». Deux positions conceptuelles différentes se sont dégagé des diverses opinions émises alors.

Les Patriarcats de Constantinople, d’Alexandrie et de Jérusalem et l’Église orthodoxe de Grèce soulignaient la priorité de la compétence des Conciles œcuméniques et des Conciles locaux du Patriarcat de Constantinople dans l’octroi de l’autocéphalie. Les Patriarcats de Moscou, de Roumanie et de Bulgarie, ainsi que l’Église orthodoxe polonaise, partaient du droit de chaque Église autocéphale à accorder l’autocéphalie à l’une de ses parties. Cependant, dans le courant de la discussion, il a été possible de s’entendre sur l’essentiel : il ne peut y avoir d’autocéphalie sans la volonté de l’Église-mère, c’est-à-dire de l’Église orthodoxe de laquelle dépend actuellement la partie désireuse d’acquérir l’autocéphalie. Et il ne peut y avoir d’autocéphalie sans l’accord de toutes les Églises qui « s’exprime par l’unanimité des Conciles des Églises autocéphales ». Une fois ces principes posés et admis unanimement par les Églises, il restait à s’entendre sur la procédure, sur les détails du processus.

De quels détails s’agit-il avant tout ?

Compte tenu de l’importance de la question, qui acquiert une actualité particulière au regard des derniers évènements, je produis une large citation du document final de la Commission préparatoire interconciliaire, contresigné par les représentants de toutes les Églises autocéphales reconnues :

3. La pleine convergence des opinions sur les conditions canoniques nécessaires à la proclamation de l’autocéphalie d’une Église locale quelle qu’elle soit a été constatée, à savoir sur le consentement de l’Église-mère, le consensus panorthodoxe et le rôle du Patriarcat œcuménique, ainsi que celui des autres Églises orthodoxes locales lors de la proclamation de l’autocéphalie :

a) L’Eglise-mère, qui reçoit une demande d’autocéphalie de la part d’une région ecclésiastique qui dépend d’elle évalue si les conditions ecclésiologiques, canoniques et pastorales sont remplies pour l’octroi de l’autocéphalie. Dans le cas où le Synode local de l’Eglise-mère, en tant que son organe ecclésiastique suprême, donne son consentement à la demande il soumet sa proposition à ce sujet au Patriarcat œcuménique. Il informe les autres Eglises autocéphales locales.

b) Le Patriarcat œcuménique, selon la pratique panorthodoxe, communique par lettre patriarcale, tous les détails concernant ladite demande et recherche l’expression du consensus panorthodoxe. Le consensus panorthodoxe d’exprime par la décision unanime des synodes des Eglises autocéphales.

c) En exprimant le consentement de l’Eglise-mère et le consensus panorthodoxe, le patriarche œcuménique proclame officiellement l’autocéphalie de l’Eglise requérante par la publication d’un Tomos patriarcal. Le Tomos est signé par le Patriarche œcuménique. Il est souhaitable qu’il soit co-signé par les Primats des Eglises autocéphales, mais doit en tout cas l’être par le Primat de l’Eglise-mère.

4. L’Eglise locale proclamée autocéphale est intégrée dans la communion des Eglises autocéphales en tant que membre à part entière et jouit de tous les privilèges canoniques, consacrés par la pratique panorthodoxe (Diptyques, commémoration, relations interorthodoxes, etc).

Note : Le contenu du paragraphe 3c fut renvoyé pour complément d’examen à la prochaine Commission interorthodoxe qui recherchera le consensus des Eglises orthodoxes locales sur cette question complétant ainsi son travail sur ce thème.

Ainsi, les principes fondamentaux ayant été unanimement acceptés, il fallait s’entendre sur les modalités de proclamation de l’autocéphalie, octroyée avec l’accord de toutes les Églises locales : qui signe et comment est signé le document nécessaire.

Cependant, le travail en commun a été interrompu.

Qu’est-ce qui a empêché de parvenir à un accord sur la procédure et de résoudre définitivement la question ?

Après 1993, l’Église de Constantinople, présidente de la Commission préparatoire interconciliaire, ne l’a plus convoquée pendant six ans. Lorsqu’une tentative de convocation a été faite en 1999, la crise ecclésiastique estonienne, qui avait éclaté trois ans plus tôt, a empêché la réunion. Le Patriarcat de Constantinople a exigé que la soi-disant Église orthodoxe apostolique estonienne, érigée sur le territoire canonique de l’Église orthodoxe russe en tant qu’Église autonome dépendant de Constantinople, participe aux réunions au même titre que les Églises locales reconnues de tous. L’Église orthodoxe russe ne pouvait y consentir.

Pourtant les négociations ont repris par la suite entre les Églises sur ce thème. A quel résultat est-on parvenu ?

Neuf années se sont encore écoulées avant que le Patriarcat de Constantinople renonce à ses exigences. Le processus de préparation du Concile panorthodoxe a repris. Lors de la réunion de la CPI de Chambésy, en 2009 (j’ai participé à cette réunion, comme à toutes les réunions de préparation au Concile, jusqu’à mai 2016), on a pu faire un pas supplémentaire vers un accord complet : la formulation de l’article qui n’avait pas été totalement achevé seize ans plus tôt a pu être élaborée. Le voici :

« 3. c) Exprimant le consentement de l’Eglise-mère et le consensus panorthodoxe, le Patriarche œcuménique proclame officiellement l’autocéphalie de l’Eglise requérante en promulguant le Tomos de l’autocéphalie. Ce Tomos est signé par le Patriarche œcuménique, Leurs Béatitudes les Primats des très saintes Eglises orthodoxes, invitées à cet effet par le Patriarche œcuménique, y joignant leur co-témoignage en apposant leurs signatures. » Le consentement panorthodoxe comme condition de l’autocéphalie est encore plus accentué. En même temps, « la question du contenu du Tome de l’autocéphalie et celle des modalités de sa signature par les primats » n’avaient pas été définitivement formulées et ont été transmises à l’examen de la prochaine CPI pour « rechercher une position unanime aux Églises ».

Pourquoi le mode de signature du Tome d’autocéphalie n’a-t-il toujours pas été défini ?

La question des modalités de la signature du Tome a été examinée lors de la réunion de la CPI en 2001, mais les Églises orthodoxes locales ne sont pas parvenues à un complet accord. Or, le consensus de toutes les Églises autocéphales reconnues a été le principe fondamental de toutes les manifestations de préparation au Concile panorthodoxe précédentes. Toutes les Églises étaient d’accord sur le fait que tous les primats devaient signer le Tome. Toutes étaient d’accord sur le fait que la signature du patriarche œcuménique (de Constantinople) devait figurer en premier. Mais la délégation du Patriarcat de Constantinople insistait pour que la signature du patriarche œcuménique se distinguât des autres. On proposait notamment de la munir de la mention « apofenete » (en grec « qui décide »), tandis que les signatures des primats des autres Églises orthodoxes locales seraient assorties du mot « sinapofenete » (qui décide ensemble »).

La délégation de l’Église orthodoxe russe a été d’avis que le Tome devait être approuvé par les signatures identiques de toutes les Églises orthodoxes locales, celle du patriarche de Constantinople, ayant, naturellement, la place du premier entre égaux. A cause de désaccords non résolus sur cette question, secondaire, finalement, le thème de l’autocéphalie n’a pu être présenté à l’examen du Concile œcuménique. Suivant une décision prise à la Synaxe des primats d’Istanbul, en 2014, la question devait être réexaminée dans le cadre de la nouvelle Commission interorthodoxe spéciale, afin, au cas où on parviendrait à un consensus, qu’elle puisse être soulignée au Concile. Dans les faits, la commission n’a pas étudié la question, malgré les appels de plusieurs Églises. Ainsi, en 2015, les primats des Églises orthodoxes géorgienne, serbe et bulgare, dans leur correspondance avec le patriarche Bartholomée de Constantinople, se sont déclarés en faveur de l’inclusion du thème de l’autocéphalie au Concile.

Lors de la Synaxe des primats suivante, en janvier 2016, à Chambésy, l’Église orthodoxe russe a proposé avec insistance de s’entendre enfin sur le peu qui restait à étudier dans la question de la proclamation de l’autocéphalie, afin de prendre une décision définitive au Concile. Mais le Patriarcat de Constantinople craignait que cela n’entraînât un délai dans la convocation du Concile.

Néanmoins, le patriarche Bartholomée de Constantinople a assuré le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie que, ni pendant le Concile, ni après, le Patriarcat de Constantinople n’agirait en aucune façon en faveur de la légalisation du schisme ou de la proclamation de l’autocéphalie en Ukraine. C’est à cette condition que l’Église russe a donné son accord à la tenue du Concile sans l’examen du thème de l’autocéphalie, ce dont le patriarche Cyrille a officiellement informé tous les primats lors de la réunion de la Synaxe le 24 janvier 2016.

Mais le Concile de Crète n’a finalement pas été panorthodoxe. Cela a-t-il définitivement ajourné la résolution de la question de l’autocéphalie ? Ou y a-t-il un espoir ?

Malheureusement, lors de la poursuite de la préparation du Concile, pour des raisons indépendantes de l’Église orthodoxe russe, on n’a pas suffisamment prêté attention au refus, souvent déclaré, de l’Église d’Antioche de participer au concile sans règlement préalable du litige sur la juridiction au Qatar (Les Églises d’Antioche et de Jérusalem de dispute la juridiction des paroisses du Qatar – éd.), ni aux protestations émises par les Églises géorgienne et bulgare. Tout cela a fait que le Concile a bien eu lieu, mais qu’il n’a pas été panorthodoxe.

Mais c’est une autre histoire. Et cela n’annule pas le fait que sur les questions essentielles de la proclamation de l’autocéphalie, sur le rôle de l’Église-Mère comme initiatrice du processus, sur le consensus obligatoire de toutes les Églises locales, exprimé par l’unanimité de leurs Conciles, nous sommes parvenus il y a déjà un quart de siècle à un complet accord au niveau panorthodoxe ou, pour reprendre les mots du document, « à une pleine convergence d’opinions ».

Lien DREE et "PO"
РПЦ: по главным вопросам предоставления автокефалии достигнут консенсус в Шамбези, близ Женевы, в 1993 году в ходе обсуждения удалось договориться о главном: нет автокефалии без волеизъявления церкви-матери, то есть той поместной православной церкви, к которой в настоящее время принадлежит ее часть, желающая получить автокефалию. И нет автокефалии без всеправославного согласия, которое "выражается единогласием Соборов автокефальных церквей"

РИА Новости https://ria.ru/religion/20180518/1520798806.html
L’archiprêtre Nicolas Balachov : Un consensus a été atteint sur l’essentiel des questions concernant la proclamation de l’autocéphalie

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 12 Juin 2018 à 01:32 | 1 commentaire | Permalien


Commentaires

1.Posté par Синод обратился к верущим по автокефалии в Украине le 25/05/2018 21:13

Обращения Митрополита Онуфрия было сделано во время заседания Священного Синода УПЦ в Свято-Успенской Киево-Печерской лавре.

Предстоятель Украинской Православной церкви Блаженнейший Митрополит Онуфрий от имени Священного Синода обратился к епископату, духовенству, монашеству и мирянам по поводу инициатив относительно "предоставления Томоса об автокефалии Православной Церкви в Украине". Обращение было обнародовано в пятницу, 25 мая, в резиденции Предстоятеля УПЦ на территории Свято-Успенской Киево-Печерской лавры во время заседания Священного Синода УПЦ. Об этом говорится на сайте Украинской Православной церкви.

"Появление другой параллельной юрисдикции в Украине может породить новые противостояния внутри нашего народа, что не только будет угрожать безопасности государства, но и поставит под вопрос возможность будущего единства Церкви в Украине. Наш народ может быть разделен надолго, если не навсегда", - говорится в обращении

Предстоятель УПЦ отмечает, что Церковь видит выход из этой ситуации "в восстановлении церковного единства в Украине, а не в закреплении церковного разделения путем установления параллельной церковной юрисдикции".

"Мы разделяем обеспокоенность государственной власти Украины наличием церковного раскола в нашей стране. Впрочем считаем, что для успешного решения этой проблемы нужны другие условия, в частности мир и стабильность в нашем Государстве. Мы всегда способствовали, и будем способствовать Государству в вопросах нравственного и патриотического воспитания, но выступаем против использования Церкви в геополитической борьбе. Подтверждаем открытость и готовность к любому конструктивному сотрудничеству и диалогу с целью достижения церковного единства", - подчеркивается в обращении.

Блаженнейший Митрополит Онуфрий напоминает о том, что "Церковь создана не людьми, а Богом".
"Именно поэтому Церковь Христова живет по Своим правилам, которые нельзя менять, учитывая меняющуюся политическую ситуацию. Единственный путь восстановления церковного единства заключается в прекращении любых внешних вмешательств в церковные дела и предоставлении Святой Церкви возможности самостоятельно, с Божией помощью, вылечить рану разделения украинского Православия", - отмечает Предстоятель УПЦ.

Также Митрополит Онуфрий подчеркивает, что "каждое поколение православных христиан является ответственным за сохранение чистоты своей веры и соблюдения церковного канонического порядка".
"Призываем всех вас, дорогие владыки, отцы, честное монашество, братья и сестры, к "единству духа в союзе мира" (Еф. 4:3), к сохранению церковного единства. Мы являемся членами Церкви Христовой и всегда будем оставаться в ЕЕ лоне", - заключил Предстоятель УПЦ.

Напомним, 19 апреля спикер Верховной Рады Андрей Парубий подписал постановление об обращении к Вселенскому патриарху Варфоломею с просьбой предоставить Томос об автокефалии украинской поместной православной церкви. Документ Верховная Рада приняла 19 апреля 268 голосами.
Позже сообщалось, что Вселенский патриархат приступил к рассмотрению просьбы Украины предоставить автокефалию ее православной церкви.

2.Posté par Митрополит Иларион: одна из целей создания единой поместной Церкви le 28/05/2018 20:42
Митрополит Иларион: одна из целей создания единой поместной Церкви Украины - вовлечь православных в унию
Москва. 28 мая. ИНТЕРФАКС - В попытках создания единой поместной Церкви на Украине прослеживается в том числе желание вовлечь православных этой страны в унию, считает глава Отдела внешних церковных связей Московского патриархата митрополит Иларион.

"В риторике, связанной с проектом так называемой единой поместной Церкви Украины, очень часто упоминается еще одна группа - это украинские греко-католики, которых возглавляет архиепископ Святослав Шевчук. Он неоднократно заявлял о своей поддержке проекта единой поместной Православной церкви Украины, но говорил при том, что единство этой Церкви должно созидаться на преемнике святого апостола Петра, то есть на Римском папе", - сказал митрополит в интервью НТВ.

Иными словами, продолжил он, это "не что иное, как попытка вовлечь православных Украины в унию". Такие попытки предпринимались и в прошлом, отметил иерарх.

"То есть, по сути дела, за этим проектом стоят три силы: украинская светская власть, раскольничьи структуры и греко-католики", - резюмировал он.

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