JORF n°112 du 15 mai 1998

DECRET

Décret no 98-366 du 6 mai 1998 portant publication de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie relatif au règlement définitif des créances réciproques entre la France et la Russie antérieures au 9 mai 1945 sous forme de mémorandum d'accord, signé à Paris le 26 novembre 1996, et de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie sur le règlement définitif des créances réciproques financières et réelles apparues antérieurement au 9 mai 1945, signé à Paris le 27 mai 1997 (1)
NOR: MAEJ9830040D


Le Président de la République,

Sur le rapport du Premier ministre et du ministre des affaires étrangères,
Vu les articles 52 à 55 de la Constitution
;

Vu la loi no 97-1160 du 19 décembre 1997 autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie relatif au règlement définitif des créances réciproques entre la France et la Russie antérieures au 9 mai 1945 sous forme de mémorandum d'accord et de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie sur le règlement définitif des créances réciproques financières et réelles apparues antérieurement au 9 mai 1945 ;



Vu le décret no 53-192 du 14 mars 1953 modifié relatif à la ratification et à la publication des engagements internationaux souscrits par la France ;

Vu le décret no 93-818 du 7 mai 1993 portant publication du traité entre la France et la Russie, fait à Paris le 7 février 1992,

Décrète :

Art. 1er. - L'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie relatif au règlement définitif des créances réciproques entre la France et la Russie antérieures au 9 mai 1945 sous forme de mémorandum d'accord, signé à Paris le 26 novembre 1996, et l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie sur le règlement définitif des créances réciproques financières et réelles apparues antérieurement au 9 mai 1945, signé à Paris le 27 mai 1997, seront publiés au Journal officiel de la République française.

Art. 2. - Le Premier ministre et le ministre des affaires étrangères sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

(1) Les présents accords sont entrés en vigueur respectivement le 26 novembre 1996 et le 27 mai 1997.

ACCORD ENTRE LE GOUVERNEMENT DE LA REPUBLIQUE FRANÇAISE ET LE GOUVERNEMENT DE LA FEDERATION DE RUSSIE RELATIF AU REGLEMENT DEFINITIF DES CREANCES RECIPROQUES ENTRE LA FRANCE ET LA RUSSIE ANTERIEURES AU 9 MAI 1945 SOUS FORME DE MEMORANDUM D'ACCORD

Mémorandum d'accord

Le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie sont convenus de ce qui suit :

Le Gouvernement de la Fédération de Russie paiera au Gouvernement de la République française une somme d'un montant de 400 millions de dollars US, en règlement définitif des créances réciproques entre la France et la Russie antérieures au 9 mai 1945.

Cette somme sera payée selon les modalités suivantes : huit versements semestriels de 50 millions de dollars US, chaque 1er février et chaque 1er août des années 1997, 1998, 1999 et 2000.

Les parties française et russe, en leur propre nom, ou au nom de personnes physiques ou morales, russes et françaises respectivement, ne présenteront pas l'une à l'autre ni ne soutiendront d'aucune autre manière les créances financières ou réelles, quelles qu'elles soient, apparues antérieurement au 9 mai 1945.

Toutes ces créances seront réputées avoir été réglées définitivement et intégralement par le versement de la totalité de la somme mentionnée dans le présent Mémorandum.

Les parties conviennent que, sur la base du présent Mémorandum, elles mettront au point, dans les meilleurs délais possible, l'accord sur le règlement des créances réciproques entre la France et la Russie.

Paris, le 26 novembre 1996.

Pour le Gouvernement

de la République française :

Jean Arthuis

Ministre de l'économie

et des finances

Pour le Gouvernement

de la Fédération de Russie :

Oleg Davydov

Vice-Président

du Gouvernement

de la Fédération de Russie,

Ministre des relations

économiques extérieures

ACCORD ENTRE LE GOUVERNEMENT DE LA REPUBLIQUE FRANÇAISE ET LE GOUVERNEMENT DE LA FEDERATION DE RUSSIE SUR LE REGLEMENT DEFINITIF DES CREANCES RECIPROQUES FINANCIERES ET REELLES APPARUES ANTERIEUREMENT AU 9 MAI 1945

Le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie, ci-après dénommés « les Parties » :

Se référant à l'article 22 du Traité du 7 février 1992 entre la France et la Russie ;

Se référant au mémorandum d'accord conclu le 26 novembre 1996 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie ;

Désireux de régler définitivement les contentieux soulevés par chaque Partie relatifs aux créances financières et réelles des Parties et des personnes physiques et morales des deux Etats susmentionnés, apparues antérieurement au 9 mai 1945,

sont convenus des dispositions suivantes :

Article 1er

La Partie française, en son nom ou au nom de personnes physiques et morales françaises, ne présente pas à la Partie russe ni ne soutient d'une autre manière les créances financières et réelles, quelles qu'elles soient, apparues antérieurement au 9 mai 1945, notamment :

A. - Les revendications relatives à tous emprunts et obligations émis ou garantis avant le 7 novembre 1917 par le Gouvernement de l'Empire de Russie ou par des autorités qui administraient une partie quelconque de l'Empire de Russie, et appartenant au Gouvernement de la République française ou à des personnes physiques ou morales françaises ;

B. - Les revendications portant sur des intérêts et actifs situés sur le territoire administré par le Gouvernement de l'Empire de Russie, par les Gouvernements qui lui ont succédé, par le Gouvernement de la République socialiste fédérative soviétique de Russie et par le Gouvernement de l'Union des Républiques socialistes soviétiques, dont le Gouvernement de la République française et des personnes physiques et morales françaises ont été privés de la propriété ou de la possession ;

C. - Les revendications relatives aux dettes à l'égard du Gouvernement de la République française ou de personnes physiques et morales françaises :

- du Gouvernement de l'Empire de Russie ;

- des Gouvernements qui lui ont succédé ;

- du Gouvernement de la République socialiste fédérative soviétique de Russie ;

- du Gouvernement de l'Union des Républiques socialistes soviétiques ;

- de toute institution établie conformément à la législation desdits Etats ;

- de toute personne qui résidait ou exerçait une activité professionnelle sur un territoire administré par les Gouvernements susmentionnés.

Article 2

La Partie russe, en son nom ou au nom de personnes physiques et morales russes, ne présente pas à la Partie française ni ne soutient d'une autre manière les créances financières et réelles, quelles qu'elles soient, apparues antérieurement au 9 mai 1945, notamment :

A. - Les revendications liées à l'intervention de 1918-1922 et résultant d'opérations militaires ou d'hostilités au cours de cette période ;

B. - Les revendications relatives à tous actifs situés en France qui appartenaient :

- au Gouvernement de l'Empire de Russie ;

- aux Gouvernements qui lui ont succédé ;

- au Gouvernement de la République socialiste fédérative soviétique de Russie ;

- au Gouvernement de l'Union des Républiques socialistes soviétiques ;

- à toute institution établie conformément à la législation desdits Etats ;

C. - Les revendications relatives à la partie de l'or remis par le Gouvernement de la République socialiste fédérative soviétique de Russie au Gouvernement de l'Allemagne en application de l'accord complémentaire au Traité de paix signé le 3 mars 1918 à Brest-Litovsk, transmise par la suite au Gouvernement de la République française en vertu du Traité de paix entre les puissances alliées et associées et l'Allemagne signé le 28 juin 1919 à Versailles, ainsi que les revendications relatives à l'or qui, selon la déclaration de la Partie russe, avait été remis à la France par l'amiral Koltchak ;

D. - Les revendications relatives aux dettes contractées par le Gouvernement de la République française, par toute institution établie conformément à la législation de la République française ou par toute personne qui résidait ou exerçait une activité professionnelle en territoire français, à l'égard du Gouvernement de l'Empire de Russie, des Gouvernements qui lui ont succédé, du Gouvernement de la République socialiste fédérative soviétique de Russie, du Gouvernement de l'Union des Républiques socialistes soviétiques ou de personnes physiques et morales russes ou soviétiques.

Article 3

En qualité de règlement complet et définitif de toutes les créances financières et réelles réciproques apparues antérieurement au 9 mai 1945, la Partie russe verse à la Partie française, et la Partie française convient d'accepter, une somme d'un montant de 400 millions de dollars des Etats-Unis. Cette somme est versée selon les modalités suivantes : huit versements semestriels de 50 millions de dollars des Etats-Unis chacun, le premier dans les quinze jours suivant l'entrée en vigueur du présent Accord, le deuxième le 1er août 1997 et les six autres versements le 1er février et le 1er août des années 1998, 1999 et 2000.

La Partie française assume la responsabilité exclusive du règlement des créances financières et réelles qu'elle a renoncé à soutenir conformément aux conditions du présent Accord, ainsi que de la répartition des sommes perçues conformément au présent Accord entre les personnes physiques et morales françaises, conformément à la législation française en vigueur, sans que la responsabilité de la Partie russe soit engagée à aucun titre de ce fait.

Article 4

Les créances mentionnées aux articles 1er et 2 du présent Accord, qui constituent l'ensemble des créances financières et réelles réciproques apparues antérieurement au 9 mai 1945, sont réputées avoir été réglées complètement et définitivement par le versement de la somme mentionnée à l'article 3 du présent Accord.

Article 5

A compter de l'entrée en vigueur du présent Accord, aucune des Parties n'entreprend à l'encontre de l'autre Partie ou de personnes physiques ou morales de l'Etat de l'autre Partie (ou du prédécesseur de l'Etat de l'autre Partie) d'actions sur la base de créances financières et réelles de quelque nature que ce soit apparues antérieurement au 9 mai 1945.

Article 6

Dans les quinze jours suivant l'entrée en vigueur du présent Accord, il est procédé à la levée de toutes les restrictions actuellement en vigueur établies par chaque Partie et dues ou liées auxdites créances, afin que chaque Partie et ses personnes physiques et morales aient, conformément aux lois et règlements en vigueur dans chaque Etat, accès aux marchés financiers français et russe.

Article 7

Le versement de la somme mentionnée à l'article 3 du présent Accord n'est pas réputé valoir reconnaissance par l'une ou l'autre Partie de l'existence d'une responsabilité lui incombant au titre de quelque créance que ce soit réglée par le présent Accord, ni valoir confirmation de la réalité juridique de l'une quelconque desdites créances.

Chaque Partie jouit pleinement de la propriété des actifs restant sur le territoire de son Etat conformément aux conditions du présent Accord.

Article 8

Le présent Accord entre en vigueur à la date de sa signature.

Fait à Paris, le 27 mai 1997, en deux exemplaires, chacun en langues française et russe, les deux textes faisant également foi.


Pour le Gouvernement

de la République française :

Hubert Colin de Verdière

Ambassadeur de France

Pour le Gouvernement

de la Fédération de Russie :

Mikhaïl Kassianov

Vice-ministre des finances



Fait à Paris, le 6 mai 1998.

Jacques Chirac

Par le Président de la République :

Le Premier ministre,

Lionel Jospin

Le ministre des affaires étrangères,

Hubert Védrine

Rédigé par l'équipe de rédaction le 8 Février 2010 à 11:20 | 4 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par l'équipe rédaction le 08/02/2010 13:44
"Le POINT"

Les porteurs d'emprunts russes veulent s'emparer de la cathédrale Saint-Nicolas de Nice

Les porteurs d'emprunts russes ne désespèrent pas de toucher un jour leur dû. S'ils n'ont pas réussi à mettre la main sur un voilier-école russe, le Sedov , lors de son escale à Marseille ; ils entendent désormais s'approprier la cathédrale orthodoxe Saint-Nicolas de Nice. Attribué le 20 janvier à la Fédération de Russie par la justice française, l'édifice religieux, classé monument historique depuis 1987, comprend de nombreux objets de valeur dont une superbe iconostase et quelque 300 icônes. Prendre possession du plus grand édifice orthodoxe russe hors de Russie permettrait de dédommager les 316.000 Français ayant perdu plus de 100 milliards d'euros en souscrivant des bons de valeurs émis ou garantis par l'État russe avant 1917. "Si nous récupérons la cathédrale, nous continuerons à la gérer. L'édifice est l'un des lieux touristiques les plus fréquentés de la Côte d'Azur et dégage des recettes très fructueuses", explique Éric Sanitas, président de l'association fédérative internationale des porteurs d'emprunts russes ( AFIPER ). Lien ....

2.Posté par T. Schakhovskoy le 08/02/2010 19:29
Une réaction parfaitement indécente - d'abord la cathédrale de Nice, maintenant le terrain de la future cathédrale de Paris ! - qui aura sans doute fait sursauter la plupart des personnes de bonne foi suivant l'actualité de ce blog... mais à laquelle il fallait probablement s'attendre dans un pays où on ne parle plus que d'argent, ou presque.
Recroquevillés sur leurs espoirs de gains, les supposés descendants de "petits porteurs" (combien le sont réellement et combien sont des spéculateurs ou des collectionneurs) se moquent bien de l'orthodoxie... et du sang russe qui a coulé à flots sur le front de Prusse orientale pendant la Première guerre mondiale pour sauver la France, avec les terribles conséquences que l'on sait pour la Russie.
Je veux dire aujourd'hui à ces personnes qu'elles donnent une image bien mesquine de la France par leur acharnement procédurier et que ce sang russe a plus que payé leurs bouts de papier... Même Shylock l'usurier de Shakespeare était prêt à accepter une "livre de chair" en paiement d'une dette. Mais ces Shylock d'aujourd'hui sont apparemment plus avides encore.

3.Posté par Daniel le 08/02/2010 21:24
Je trouve cela plus complexe : les personnes privées comme morales, doivent payer leurs dettes. En la matière, tous les Etats, dont l'Etat français sont les plus mauvais payeurs, usant de l'impossibilité pour leurs créanciers de saisir leurs biens. Ne pas payer ses dettes quand on en a la capacité n'est absolument pas chrétien : c'est même une sorte de vol moralement inacceptable. Les Etats ne sont pas au-dessus de la morale. Car d'un côté, il y a bien eu des gens réellement spoliés voire ruinés... Si l'Etat russe est héritier de la Russie impériale, il est héritier de son actif (cathédrale de Nice) mais aussi de son passif, dettes diverses etc.

4.Posté par Philemon le 08/02/2010 22:05
Petite précision,
L'accord du 26 novembre 1996 dont vous publiez le décret d'application porte sur le règlement des créances réciproques entre l'Etat français (qui détenait des emprunts russes) et russe.
Il ne concerne pas les porteurs privés d'emprunts russes qui ne sont pas parti de cet accord et continuent à faire valoir leurs droits devant les juridictions françaises.

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