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... Fondra-t-elle cette neige,
Quand la mort viendra nous prendre ?
Connaîtrons-nous d’autres neiges,
D’autres roses plus parfaites ?
Sur nous la paix viendra-t-elle
Comme Jésus nous l’enseigne ?
Ou bien n’aurons-nous jamais
La solution du problème ?
Garcia Lorca, «Chanson d'automne»
Le 7 février, la veille de la fête de la Sainte Rencontre, un concert a eu lieu dans la Grande salle du Conservatoire de Moscou.
Sa deuxième partie comporte deux œuvres du métropolite Hilarion (Alfeev) interprétées pour la première fois, « La Fugue sur le motif B.A.C.H. » et le cycle « Les Chants de la mort ». Le futur métropolite avait mis en musique quelques poèmes de son auteur favori Garcia Lorca, mais ces créations de jeunesse ont vite été oubliées. Quelques années plus tard il écrivit d’importantes œuvres comme : « La Passion selon Saint Matthieu », « L’Oratorio de Noël », « La Veillée Nocturne », « Le Chant de l’Ascension ».
Quand la mort viendra nous prendre ?
Connaîtrons-nous d’autres neiges,
D’autres roses plus parfaites ?
Sur nous la paix viendra-t-elle
Comme Jésus nous l’enseigne ?
Ou bien n’aurons-nous jamais
La solution du problème ?
Garcia Lorca, «Chanson d'automne»
Le 7 février, la veille de la fête de la Sainte Rencontre, un concert a eu lieu dans la Grande salle du Conservatoire de Moscou.
Sa deuxième partie comporte deux œuvres du métropolite Hilarion (Alfeev) interprétées pour la première fois, « La Fugue sur le motif B.A.C.H. » et le cycle « Les Chants de la mort ». Le futur métropolite avait mis en musique quelques poèmes de son auteur favori Garcia Lorca, mais ces créations de jeunesse ont vite été oubliées. Quelques années plus tard il écrivit d’importantes œuvres comme : « La Passion selon Saint Matthieu », « L’Oratorio de Noël », « La Veillée Nocturne », « Le Chant de l’Ascension ».
Ces œuvres sont interprétées dans des salles prestigieuses et connaissent un grand succès dans le monde entier. Cependant il est naturel de vouloir retourner parfois dans sa jeunesse...
Les chansons composées à partir des poèmes de Garcia Lorca sont revenues dans leur version pour orchestre sous le titre « Les Chants de la mort », et nous avons eu la possibilité unique de les entendre le 7 février et de découvrir dans cette musique la confession de deux jeunes cœurs sensibles, le poète Garcia Lorca et le musicien Grigori Alfeev.
Quelques jours avant le concert, Monseigneur Hilarion répondait aux questions du site « Pravmir ».
– Monseigneur, vous êtes un homme jeune, votre carrière ecclésiale est parfaitement accomplie. Pourquoi ce thème morbide vous attire-t-il ?
– J’ai écrit « Les Chants de la mort » lorsque j’avais dix-sept ans. C’est une œuvre avec laquelle je terminais mes études et entrais au Conservatoire. Mais à l’époque elle a été écrite pour voix et piano, et en été 2012 je l’ai transcrite pour orchestre. Le thème de la mort m’a toujours fasciné, ceci depuis ma première jeunesse.
Garcia Lorca, dont les vers sont le prétexte de ces chants, est mon poète préféré depuis l’enfance. Le thème de la mort est le fil conducteur de toute son œuvre. L’intensité et la profondeur de sa poésie m’ont toujours inspiré. Lorca a été un homme croyant, du moins dans sa jeunesse, et sa poésie est pénétrée d’un profond sentiment religieux. Comme s’il avait le pressentiment de sa fin tragique et qu’il s’y préparait. Sa poésie est un requiem qu’il a commencé à écrire dans sa jeunesse et que le sort n’a pas permis d’achever.
Les chansons composées à partir des poèmes de Garcia Lorca sont revenues dans leur version pour orchestre sous le titre « Les Chants de la mort », et nous avons eu la possibilité unique de les entendre le 7 février et de découvrir dans cette musique la confession de deux jeunes cœurs sensibles, le poète Garcia Lorca et le musicien Grigori Alfeev.
Quelques jours avant le concert, Monseigneur Hilarion répondait aux questions du site « Pravmir ».
– Monseigneur, vous êtes un homme jeune, votre carrière ecclésiale est parfaitement accomplie. Pourquoi ce thème morbide vous attire-t-il ?
– J’ai écrit « Les Chants de la mort » lorsque j’avais dix-sept ans. C’est une œuvre avec laquelle je terminais mes études et entrais au Conservatoire. Mais à l’époque elle a été écrite pour voix et piano, et en été 2012 je l’ai transcrite pour orchestre. Le thème de la mort m’a toujours fasciné, ceci depuis ma première jeunesse.
Garcia Lorca, dont les vers sont le prétexte de ces chants, est mon poète préféré depuis l’enfance. Le thème de la mort est le fil conducteur de toute son œuvre. L’intensité et la profondeur de sa poésie m’ont toujours inspiré. Lorca a été un homme croyant, du moins dans sa jeunesse, et sa poésie est pénétrée d’un profond sentiment religieux. Comme s’il avait le pressentiment de sa fin tragique et qu’il s’y préparait. Sa poésie est un requiem qu’il a commencé à écrire dans sa jeunesse et que le sort n’a pas permis d’achever.
– Dans vos interviews vous dites souvent que des allusions aux œuvres de compositeurs du passé sont présentes dans vos créations. « Les Chants de la mort » font-ils exception ? On connaît le célèbre cycle « Les Chants et danses de la mort » de Moussorgski...
– Oui, mes « Chants de la mort » ont été inspirés par « Les Chants et danses de la mort » de Moussorgski ainsi que par la 14ème symphonie de Chostakovitch. Du point de vue stylistique, cette œuvre est très différente de mes compositions des dernières années. Mais lorsque j’ai procédé à l’instrumentation, je n’ai pas changé la musique, elle est restée telle qu’elle avait été écrite il y a presque trente ans. J’ai seulement remplacé le piano par l’orchestre auquel j’ai rajouté la guitare et, dans la dernière partie, le vibraphone. Il me semble qu’à sa manière c’est une œuvre parfaitement mûre et achevée. Elle très émotionnelle, tragique, sombre, entièrement en ton mineur. L’état d’esprit, le tempo, les images y changent en permanence. Il est évident qu’aujourd’hui je l’aurais écrite différemment.
– Toutes vos œuvres sont très tristes, tragiques même ?
– Toutes mes œuvres ne le sont pas. Il y a « L’Oratorio de Noël », dans lequel prédominent des tons joyeux, lumineux. La quatrième et la cinquième partie de la symphonie « Le Chant de l’Ascension » sont écrites en majeur. La Divine Liturgie et la Veillée Nocturne sont également écrites dans la tonalité majeure, bien que, évidemment, les thèmes tragiques me soient beaucoup plus proches et m’attirent davantage.
– La deuxième première musicale qui a eu lieu le 7 février est « Fugue sur le thème de Bach ». Votre amour de l’œuvre de ce compositeur est connu. Mais à part Bach il y a une multitude de grands compositeurs. Lequel d’entre eux vous pourriez considérer comme son égal ? Quelles sont les œuvres dont vous vous sentez proche ?
– Je ne mettrais personne aux côtés de Bach : il occupe une place particulière. Mais ce n’est pas une fugue sur le thème de Bach. C’est une fugue sur le motif B.A.C.H. qui est le monogramme musical du grand compositeur. Dans la langue allemande chaque note correspond à une lettre. Les quatre lettres du nom Bach signifient les notes si bémol, la, do et si bécarre. Bach lui-même le savait et a essayé d’utiliser son monogramme dans la fugue finale de « Die Kunst der fuge » (l’Art de la fugue). Mais ayant écrit l’exposition de la fugue, il est mort sans l’avoir achevée. Par la suite plusieurs compositeurs ont écrit des fugues, préludes, fantaisies et collages sur ce thème. On peut rappeler « Six fugues pour orgue sur le motif B.A.C.H. » de Schumann, et de nombreux autres morceaux. A un moment donné ce thème a attiré mon attention, et j’ai écrit une fugue pour orchestre de cinq minutes sur ce motif.
– Dans la première partie du concert on entendra des airs d’opéras de Verdi. Pourquoi avez-vous arrêté votre choix sur ce compositeur ?
– Ce n’est pas mon choix, mais celui de Svetlana Kassian, soliste de l’Opéra du Bolchoï, l’interprète principale de ce concert.
– A votre avis, qui sont les gens qui forment votre public ? Qui vient à vos concerts ?
– Ce sont des paroissiens de nos églises, ainsi que des personnes qui sont à mille lieues de l’Eglise mais qui aiment la musique.
– Oui, mes « Chants de la mort » ont été inspirés par « Les Chants et danses de la mort » de Moussorgski ainsi que par la 14ème symphonie de Chostakovitch. Du point de vue stylistique, cette œuvre est très différente de mes compositions des dernières années. Mais lorsque j’ai procédé à l’instrumentation, je n’ai pas changé la musique, elle est restée telle qu’elle avait été écrite il y a presque trente ans. J’ai seulement remplacé le piano par l’orchestre auquel j’ai rajouté la guitare et, dans la dernière partie, le vibraphone. Il me semble qu’à sa manière c’est une œuvre parfaitement mûre et achevée. Elle très émotionnelle, tragique, sombre, entièrement en ton mineur. L’état d’esprit, le tempo, les images y changent en permanence. Il est évident qu’aujourd’hui je l’aurais écrite différemment.
– Toutes vos œuvres sont très tristes, tragiques même ?
– Toutes mes œuvres ne le sont pas. Il y a « L’Oratorio de Noël », dans lequel prédominent des tons joyeux, lumineux. La quatrième et la cinquième partie de la symphonie « Le Chant de l’Ascension » sont écrites en majeur. La Divine Liturgie et la Veillée Nocturne sont également écrites dans la tonalité majeure, bien que, évidemment, les thèmes tragiques me soient beaucoup plus proches et m’attirent davantage.
– La deuxième première musicale qui a eu lieu le 7 février est « Fugue sur le thème de Bach ». Votre amour de l’œuvre de ce compositeur est connu. Mais à part Bach il y a une multitude de grands compositeurs. Lequel d’entre eux vous pourriez considérer comme son égal ? Quelles sont les œuvres dont vous vous sentez proche ?
– Je ne mettrais personne aux côtés de Bach : il occupe une place particulière. Mais ce n’est pas une fugue sur le thème de Bach. C’est une fugue sur le motif B.A.C.H. qui est le monogramme musical du grand compositeur. Dans la langue allemande chaque note correspond à une lettre. Les quatre lettres du nom Bach signifient les notes si bémol, la, do et si bécarre. Bach lui-même le savait et a essayé d’utiliser son monogramme dans la fugue finale de « Die Kunst der fuge » (l’Art de la fugue). Mais ayant écrit l’exposition de la fugue, il est mort sans l’avoir achevée. Par la suite plusieurs compositeurs ont écrit des fugues, préludes, fantaisies et collages sur ce thème. On peut rappeler « Six fugues pour orgue sur le motif B.A.C.H. » de Schumann, et de nombreux autres morceaux. A un moment donné ce thème a attiré mon attention, et j’ai écrit une fugue pour orchestre de cinq minutes sur ce motif.
– Dans la première partie du concert on entendra des airs d’opéras de Verdi. Pourquoi avez-vous arrêté votre choix sur ce compositeur ?
– Ce n’est pas mon choix, mais celui de Svetlana Kassian, soliste de l’Opéra du Bolchoï, l’interprète principale de ce concert.
– A votre avis, qui sont les gens qui forment votre public ? Qui vient à vos concerts ?
– Ce sont des paroissiens de nos églises, ainsi que des personnes qui sont à mille lieues de l’Eglise mais qui aiment la musique.
– A quarante-cinq ans vous êtes déjà métropolite, un compositeur célèbre, un missionnaire reconnu, un animateur de télévision, le recteur d’une grande paroisse, un théologien mondialement célèbre, le responsable du DREE. Avez-vous parfois le sentiment que « vous n’avez plus rien à désirer, rien à atteindre » ?
– J’ai toujours eu ce sentiment, et je l’éprouve toujours. Je l’ai eu au moment de l’entrée dans la vie monastique, et lorsque j’étais prêtre dans un village lituanien, ainsi que pendant mes études à Oxford, et lorsque je travaillais sous la direction du métropolite Cyrille, et lorsque j’officiais en Autriche et en Hongrie. Je n’ai jamais désiré ni sollicité quelque poste que ce soit, et je n’ai jamais eu aucune ambition au sein de l’Eglise.
La seule et unique chose à laquelle j’ai toujours aspiré c’est de servir Dieu et les hommes, en consacrant toutes mes forces à cette mission. Et la musique n’est pour moi qu’une forme de prédication et de ministère, et en ce moment elle n’en est pas la principale.
– Dans votre jeunesse la question courante des adolescents était « Et toi, tu écoutes quoi ? » Des chansons et thèmes musicaux de toutes sortes retentissaient à travers les fenêtres grand-ouvertes des appartements. Aujourd’hui cette question est déplacée, le silence règne dans les immeubles d’habitation. Pourquoi la musique quitte-t-elle la vie quotidienne ? Peut-on qualifier notre société de « post-musicale » ?
– J’ai toujours eu ce sentiment, et je l’éprouve toujours. Je l’ai eu au moment de l’entrée dans la vie monastique, et lorsque j’étais prêtre dans un village lituanien, ainsi que pendant mes études à Oxford, et lorsque je travaillais sous la direction du métropolite Cyrille, et lorsque j’officiais en Autriche et en Hongrie. Je n’ai jamais désiré ni sollicité quelque poste que ce soit, et je n’ai jamais eu aucune ambition au sein de l’Eglise.
La seule et unique chose à laquelle j’ai toujours aspiré c’est de servir Dieu et les hommes, en consacrant toutes mes forces à cette mission. Et la musique n’est pour moi qu’une forme de prédication et de ministère, et en ce moment elle n’en est pas la principale.
– Dans votre jeunesse la question courante des adolescents était « Et toi, tu écoutes quoi ? » Des chansons et thèmes musicaux de toutes sortes retentissaient à travers les fenêtres grand-ouvertes des appartements. Aujourd’hui cette question est déplacée, le silence règne dans les immeubles d’habitation. Pourquoi la musique quitte-t-elle la vie quotidienne ? Peut-on qualifier notre société de « post-musicale » ?
– Elle est devenue antimusicale. Parce qu’il n’y a pas si longtemps la musique classique était à la portée d’un très large public, et ce qu’on appelle « les variétés » était une musique de haut niveau artistique, tandis qu’aujourd’hui elle a été remplacée par une « pop » de pacotille, diffusée par les autoradios dans les taxis, les enceintes des restaurants. Parfois, lors des soi-disant « soirées d’entreprise » que je dois fréquenter pour des raisons professionnelles ou par respect à telle ou telle personnalité, cette musique montée à fond vous casse littéralement les oreilles. Je suis extrêmement sensible à l’agression sonore, et pour moi ce raz-de-marée de bruit est un véritable supplice. Je pense qu’il vaut mieux ne pas écouter de musique du tout qu’une telle cacophonie. Pourtant, même de nos jours, il existe quelques exemples d’un grand art musical, qui sort de la plume des compositeurs actuels. C’est réconfortant.
Anna Firstova
TRADUCTION pour "Parlons d'orthodoxie" ELENA LAVANANT
Photos : Le futur métropolite Hilarion (à 16 ans) à l’office célébré par le Catholicos-Patriarche Ilya II de Georgie. Archive personnelle du métropolite Hilarion, « Komsomolskaïa Pravda », site du Département des relations extérieures du Patriarcat de Moscou mospat.ru
« Pravmir » Анна Фирстова Таинство смерти – в таинстве музыки
Anna Firstova
TRADUCTION pour "Parlons d'orthodoxie" ELENA LAVANANT
Photos : Le futur métropolite Hilarion (à 16 ans) à l’office célébré par le Catholicos-Patriarche Ilya II de Georgie. Archive personnelle du métropolite Hilarion, « Komsomolskaïa Pravda », site du Département des relations extérieures du Patriarcat de Moscou mospat.ru
« Pravmir » Анна Фирстова Таинство смерти – в таинстве музыки
Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 14 Février 2013 à 09:30
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