V.G.
Partie 2 « mort sur la Croix »

Il reste encore un aspect de la confession à envisager: quand nous venons à Dieu, que nous Le prions, que nous confessons devant Lui nos péchés avec plus ou moins d'ardeur, nous n'entendons de Sa part aucun mot de reproche ou de réconciliation. Il est comme muet. Il faut une grande sensibilité de l'âme pour ressentir si nous sommes réconciliés avec Dieu ou pas. On voit bien quelle est la différence entre la simple confession et la véritable réconciliation: lorsque l'on s'adresse un homme que nous avons peiné, insulté ou négligé, il peut nous écouter et nous dire: « J'ai été trahi par ton amitié, je ne te fais plus confiance ». Ou encore: « Non, je ne peux pas te pardonner, tu m'as blessé trop profondément, tu m'as peiné trop cruellement; ne pense pas qu'avec de simples mots tu puisses changer mon état, guérir mon âme ! Il faudra que tu me démontres, peut-être pendant un temps assez long et avec des signes visibles, la sincérité de tes mots, que tu as honte et que tu regrettes. Notre amitié est mise à rude épreuve ».

Il faut véritablement que nous réfléchissions là dessus: parce qu'à peine avons-nous dit nos péchés à Dieu, montré notre « repentir », dit tous nos regrets, nous attendons trop facilement que Dieu nous pardonne. Bien sûr qu'Il nous pardonne ! N'est-Il pas Dieu ? N'est-ce pas pour cela qu'Il a vécu, qu'Il a enseigné et qu'Il est mort sur la Croix ?

Voilà, c'est ce mot « mort sur la Croix » que nous oublions trop facilement. Sur ce sujet, saint Séraphim de Sarov a eu un jour une discussion qui devrait nous toucher profondément. Saint Séraphim disait que lorsque nous demandons à Dieu de nous pardonner avec repentir, Il le fera d'une manière certaine puisqu'il ne nous rejette pas, mais il faut se rappeler le prix qu'Il a payé pour obtenir le pouvoir de nous pardonner. Il a le pouvoir de nous pardonner parce qu'Il est mort pour nous; Il a le pouvoir de nous pardonner parce qu'Il pourrait considérer chacun de nous comme Son bourreau. Oui, littéralement nous participons à Sa crucifixion et littéralement Il peut dire de nous: « Pardonne leur Père, car ils ne savent pas ce qu'ils font... ».

À l'époque, les gens ne savaient pas ce qu'ils faisaient, pouvons-nous en dire autant aujourd'hui ? Ne savons-nous pas ce que dit l'évangile ? Ne savons-nous pas que le Christ n'est pas mort que pour nous, mais aussi à cause de nous ? Ne savons-nous pas que si mon péché, grand ou petit, n'existait pas, Il n'aurait pas eu a mourir ? Que s'il n'y avait eu qu'un seul pécheur sur la terre (c'est ce que nous rapporte un saint père), le Christ serait mort pour le sauver, lui uniquement. Ainsi, à chaque fois que je tue mon âme, que je me souille, que je deviens un traître, je ne trahis pas que Dieu, mais mon prochain et moi-même, à chaque fois je deviens responsable de la mort du Christ, le Fils de Dieu devenu Fils de l'homme.

Les "petits péchés"

Tout ceci doit nous donner la possibilité et l'obligation de prendre la mesure de chacun de nos péchés, parce qu'en fin de compte il n'y a pas de petit ou de grand péché. Bien sûr, il y a des péchés qui peuvent tuer notre âme en une fois et d'autre moins meurtriers, mais ils représentent tous notre part dans la crucifixion du Christ. Il nous semble si facile de nous séparer de nos péchés ! D'un grand péché, c'est sans doute possible; s'il nous a frappés véritablement au creux de l'âme, on peut s'en repentir profondément, tragiquement. Mais pour les petits, il nous semble suffisant de dire « Seigneur, pardonne-moi » et de se sentir pardonné. Dans la vie d'un saint russe, un fol en Christ, on raconte l'histoire suivante. Deux femmes viennent voir le saint, la première avec un grand péché, qui l'a profondément blessée, dont elle se repend et qu'elle pleure amèrement; l'autre avec beaucoup de petits en disant: « Et quoi ? Je suis pécheresse, ce sont de petits péchés ! Est-ce si important ? ». Le fol en Christ dit à la première: « Vas dans le champ voisin, trouve la plus grosse pierre que tu puisses porter et rapporte la moi ». À la seconde: « Remplis ton tablier avec toutes les petites pierres que tu trouveras sur le chemin et reviens me voir ». Les deux femmes firent ce qu'il leur avait demandé et revinrent ensuite. Le saint dit à la première: « Rapporte ta pierre là où tu l'as trouvée »; et à la seconde: « remets chaque pierre là où tu l'as prise ». Les deux partirent. La première revint rapidement car elle retrouva facilement l'endroit d'où elle avait pris la grosse pierre, tandis que la seconde revint tard avec son tablier rempli de pierres en disant: « Je ne sais plus où je les ai prises ». Et le saint leur dit: « Il en va de même avec les péchés: si tu te repens sincèrement d'un grand péché, c'est comme si tu remettais le gros caillou à sa place; mais pour se défaire d'une multitude de petites pierres, tu ne retrouveras jamais l'endroit où tu les a prises ».

Il faut donc avoir à l'esprit, que cela n'a aucun sens de se poser la question de savoir si tel ou tel péché vaut la peine que l'on s'en repente, parce que nous ne savons pas si nous pourrons nous débarrasser de ce petit péché que nous avons commis. Par un petit ou par un grand – peu importe, nous avons franchi la frontière, nous sommes passés du domaine de la lumière dans celui des ténèbres, et nous ne pouvons pas en revenir tout blanc et sans tâches. Encore une fois, je le répète: pour que la confession soit purification, il faut qu'elle soit parfaite réconciliation.

"Le bien que je voudrais faire, je ne le fais pas; le mal que je ne voudrais pas faire je le fais en permanence"

Maintenant, réconciliation en quoi et avec qui ? Le plus souvent, quand nous venons à la confession, nous pensons qu'il suffit principalement de se réconcilier avec Dieu et que pour cela il suffit de tout Lui dire, ou du moins autant que l'on en est capable, pour qu'Il nous dise: « Bon, Je te pardonne ! ». Cela n'est pas suffisant ! Cela n'est pas suffisant parce que la plupart de nos péchés consistent à mépriser, à peiner et à faire perdre espoir à l'un de nos proches; et la réconciliation devrait commencer par la réconciliation avec celui devant qui nous sommes fautifs. Dieu ne peut pardonner ce que nous avons fait à notre prochain, tant que nous n'avons rien fait pour nous réconcilier avec lui. C'est pourquoi, aux vêpres du pardon par exemple, il est totalement vain de dire à quelqu'un « pardonne-moi » et s'entendre répondre « que Dieu te pardonne », si auparavant nous ne sommes pas venus rencontrer ceux devant qui nous avons une dette et que nous avons peinés, que nous ne leur avons pas confessé la honte que nous ressentons de leur avoir manqué de confiance et de les avoir trahis.

Pour finir notre réconciliation doit avoir lieu avec nous-mêmes, pas seulement avec Dieu et avec notre prochain; c'est à dire que nous devons quitter cet état partagé, éclaté, éparpillé qui est le notre en permanence pour se sentir réunifié et guéri. Souvenez-vous de l'apôtre Paul qui dit: le bien que je voudrais faire, je ne fais pas; le mal que je ne voudrais pas faire je le fais en permanence (Rm 7,19). Il y a réellement en nous une séparation: une séparation entre nos pensées justes et sincères et les désirs de notre cœur; entre notre élan vers le bien et notre attirance vers le mal.

PARTIE 1

Rédigé par Vladimir GOLOVANOW le 4 Décembre 2012 à 10:50 | 2 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par Marie Genko le 05/12/2012 08:52
Cher Vladimir,

Merci de nous communiquer ce magnifique texte!

2.Posté par Vladimir le 05/12/2012 11:53
Attendez la suite...
Le mérite en revient au père Nicolas Kisselhoff (lien) qui l'a traduit et m'a autorisé à en proposer la publication avec mes titres et notes...

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