Mgr Vladimir de Kiev accuse l'Eglise gréco-catholique de soutenir les schismatiques
L'Eglise gréco-catholique Ukrainienne (EGCU, "uniate" (1)) a décidé récemment de reconnaitre les baptêmes administrés par le pseudo-patriarcat de Kiev (2), déclaré schismatique et anathémisé par l'Eglise russe en 1997. Après une première réponse très retenue par la voix de son secrétaire du Département des Relation Ecclésiales extérieures (ibid 2), le métropolite Vladimir monte le ton et accuse l'EGCU de porter atteinte aux relations interchrétiennes dans le pays.

"L'EGCU devient ainsi la seule confession à soutenir concrètement les schismatiques ukrainiens", souligne Mgr Vladimir en rappelant que, dans le cadre du dialogue, les parties s'engagent à ne pas avoir de contacts avec les groupes ecclésiaux qui ne bénéficient pas de la reconnaissance canonique. "Ainsi l'Eglise orthodoxe n'entretient pas de contacts avec des groupes schismatiques à l'intérieur du Catholicisme (3) en comptant sur la réciprocité de la part des représentants officiels de la partie catholique." Et il rappelle que "le pseudo-patriarcat de Kiev avait écrit en 2012 aux primats des Églises orthodoxes, catholique, anglicane et à l'EGCU en demandant la reconnaissance de ses baptêmes. Mais seule cette dernière a répondu…

Revenant sur l'ensemble des relations avec l'EGCU, le primat de l'Eglise autonome d'Ukraine a déclaré "qu'elles n'étaient pas si tendues que cela… Les quelques difficultés viennent des tentatives de l'EGCU de développer ses communautés dans les régions à majorités orthodoxe" et il insiste pour que l'EGCU respecte les principes formulés dans les accords de Balamand (1993, (4)) qui condamnent le prosélytisme dans les relations entre Orthodoxes et Catholiques.

Traduction et rédaction VG
Interfax

* * * *

Commentaire et notes du rédacteur:

Le prosélytisme de l'Eglise gréco-catholique d’Ukraine uniate est le principal point de désaccord entre Rome et Moscou. Il bloque la rencontre entre le Pape et le Patriarche et dans une interview donnée en janvier 2010 à l'agence d'informations "Amen" (traduction orthodoxie.com (5)) Mgr Hilarion de Volokolamsk en disait: "nous n'avons pas abandonné la question /de l'uniatisme/. Nous sommes arrivés au point où les catholiques romains pourraient discuter. Ils ont convenu que l'uniatisme était une méthode erronée. Le dialogue se poursuivra à cause des prolongements canoniques et pastoraux de la question.

Q: Le prosélytisme a été limité?
R: Ce sujet est sensible et va faire mal, parce que, par exemple, là où il existe, c'est une source de dissensions et une cause de conflits. Nous n'acceptons pas de pratiquer l’uniatisme.

Par contre Mgr Sviatoslav Shevchuk, le chef de l'EGCU, avait déclaré l'automne dernier que la réconciliation entre l’Eglise gréco-catholique d’Ukraine et le patriarcat de Moscou « est nécessaire, pour qu’en Ukraine les Eglises puissent vivre ensemble »(6), désirant donc suivre l’exemple de l’Eglise catholique de Pologne en instaurant un processus de réconciliation avec le patriarcat de Moscou. (Rappelons que l’Eglise catholique polonaise et l’Eglise orthodoxe russe ont signé le 17 août 2012 un message commun historique appelant les peuples russes et polonais à la réconciliation (7)

Notes:

(1) ICI
(2) ICI
(3) Cette déclaration de Mgr Vladimir ne me semble pas totalement exacte: un dialogue se poursuit en effet avec les "vieux-catholiques, séparés de Rome, et la Troisième Conférence panorthodoxe préconciliaire (1986) a adopté une résolution sur le résultat du dialogue avec les "vieux-catholiques" disant en particulier : "Vingt textes ont déjà été rédigés et adoptés conjointement ; autant de thèmes théologiques, ecclésiologiques, sotériologiques, y compris les thèmes relatifs à la Mère de Dieu et à certains sacrements.(…). L'heureux aboutissement de ce dialogue théologique aura aussi des retentissements favorables sur le résultat des autres dialogues, en affermissant la confiance que ces derniers inspirent". In "Principes fondamentaux régissant les relations de l'Eglise orthodoxe russe avec l'hétérodoxie"
(4) La Commission internationale orthodoxe-catholique a réussi, à s’accorder sur la rédaction d’une déclaration commune intitulée « L’uniatisme, méthode d’union du passé, et la recherche actuelle de la pleine communion. » ("Déclaration de Balamand"). Analyse du professeur Stavrou "La question de l’Uniatisme" ; texte complet ICI.
(5) ICI janvier 23, 2010
(6) ICi
(7) ICI

Rédigé par Vladimir GOLOVANOW le 4 Février 2013 à 21:12 | 3 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par Daniel le 04/02/2013 22:24
Cette reconnaissance est naturelle en théologie catholique. Chez les catholiques, tout baptême est valide pour peu qu'il ait été donné avec l'intention de baptiser. Il peut donc même être administré par un athée... C'est très différent de l'orthodoxie pour laquelle il n'y a pas de baptême hors de l'église (sauf pour les oecuménistes bien sûr).

Concernant les accords de Balamand, j'ignore où ils en sont car : seuls neuf églises avaient envoyé des représentants : Constantinople, Alexandrie, Antioche, Bucarest, Moscou, Nicosie, Varsovie, Tirana et Helsinki (Eglise autonome). Les autres ont boycotté la réunion. Je n'ai eu aucune indication précise sur la façon dont les synodes des églises en question ont considéré le document, car à priori, une signature d'un délégué n'engage que lui...

Le texte a suscité de vives réactions côté orthodoxe pour plusieurs raisons notamment le fait de considérer catholique et orthodoxe comme églises-soeurs, ce qui est en fait de la théorie des branches à peine masqué, le fait d'affirmer que l"église orthodoxe ne s'est considérée comme véritable et unique église qu"en réaction à l'église latine etc.

Cette page en anglais est consacrée à une critique de Balamand :
http://orthodoxinfo.com/ecumenism/ea_balamand.aspx
-

2.Posté par Vladimir : « L’uniatisme, méthode d’union du passé, et la recherche actuelle de la pleine communion » le 05/02/2013 20:26
Dans une analyse très complète publiée en 2007 (cf. lien, p. 10 et suivantes) le professeur Stavrou écrit à propos des accord de Balamand:
Citation:
" Ce texte, intitulé « L’uniatisme, méthode d’union du passé, et la recherche actuelle de la pleine communion », comporte 3 grandes décisions indissociables :
1/ La démarche de l’uniatisme est condamnée par les deux Eglises catholique et orthodoxe en tant que méthode d’union et en tant que modèle d’unité ;
2/ Les deux Eglises se reconnaissent mutuellement comme Eglises Sœurs ;
3/ Les orthodoxes s’engagent « par économie » à respecter les communautés uniates existantes.
Le cœur de l’accord est le 2ème point : il interdit toute démarche du type uniatisme. !

Devant la renaissance récente de certaines Eglises unies, le document de Balamand semble être sorti trop tôt ou trop tard : il est loin, pour l’instant, d’être reçu dans l’unanimité…

1/ Du côté catholique, cette réception semble très mesurée :
- accueil positif des Eglises gréco-catholiques d’Ukraine et de Roumanie ;
- la lettre apostolique Orientale et Lumen de Jean-Paul II en 1995 (éloge du patrimoine spirituel et culturel des Eglises d’Orient) ne consacre pas un mot à l’accord de Balamand et place sur le même plan les Eglises uniates et orthodoxes ;
- par contre, l’Encyclique « Ut unum sint » de la même année, juge que la Commission Mixte Internationale a jeté là les bases d’une solution positive à la désunion ;
- la célébration enthousiaste à Rome en 2000 – tout à fait en dehors de l’esprit de Balamand – du centenaire de l’union des Eglises gréco-catholiques n’évoque pas le déchirement des Eglises locales orthodoxes et montre qu’il y a difficulté pour l’Eglise romaine d’envisager l’uniatisme sous une nouvelle forme, même si la charte sur l’uniatisme de Vatican II est rejetée dans l’accord de Balamand comme une impasse.

2/ Du côté orthodoxe, seule l’Eglise roumaine a officiellement entériné le document. Constantinople et Antioche sont attentistes face à la rigueur de Moscou et au refus de Jérusalem et d’Athènes. On soupçonne l’Eglise romaine de ne pas être tout à fait sincère lorsqu’elle dit ne plus encourager l’uniatisme…
Le renforcement des Eglises uniates d’Europe de l’Est est la raison invoquée, aujourd’hui encore, pour le refus des Eglises russe et ukrainienne de recevoir le Pape ; Alexis II l’a confirmé encore à Paris récemment.

3/ Il semble qu’il soit nécessaire de s’accorder sur une définition de l’uniatisme et que cette démarche soit un préalable à un accord sur les principes et directives de Balamand : l’uniatisme, présent au travers de 20 Eglises, est une réalité complexe et multiforme (cf. la conférence du 17/11/07), car chaque cas s’est inscrit dans une situation géopolitique et historique particulière, alors que, pour les orthodoxes, l’uniatisme et les latinisations parfois opérées sont toujours une violation de l’ecclésiologie commune du premier millénaire.

4/ le § 14 de l’accord de Balamand, si important, pose problème : est-il justifié, théologiquement, de parler d’Eglises Sœurs ? D’autant que, chez les catholiques, les paragraphes 8 et 23 de la constitution Lumen gentium, ainsi que le texte Domine Jesus publié en 2000 sous l’autorité du pape actuel, mettent en cause ce terme Le théologien Hervé Legrand va même plus loin lorsqu’il pose la question de savoir si l’Eglise catholique inscrit réellement dans sa pratique l’ecclésiologie de communion…

La conception orthodoxe de la sororalité entre Eglises :
Elle apparaît déjà dans le document de Munich de la Commission Mixte Internationale. Ce dernier évoque les relations concrètes entre Eglise et Eucharistie, en particulier la consanguinité des Eglises locales grâce à l’Eucharistie, d’où la notion d’Eglises Sœurs.
Cette dernière s’applique aussi, bien entendu, aux regroupements régionaux d’Eglises locales. Dans le cadre, notamment, de la constitution historique des 5 Patriarcats initiaux de l’Eglise du Christ. Les Eglises qui en dépendaient se considéraient toutes comme Eglises Sœurs et le fractionnement de certains patriarcats (par exemple Constantinople) avait logiquement entraîné des relations « mère-fille ».
Il y a lieu de noter que la notion d’Eglise Sœur, dans l’ecclésiologie orthodoxe, n’est pertinente que dans le contexte d’Eglises locales autocéphales et indépendantes liées entre elles par l’Eucharistie. Aucune Eglise locale n’est donc au-dessus des autres et aucun évêque au-dessus des autres. Rechercher une Eglise Sœur pour l’ensemble des Eglises orthodoxes ne semble pas, dans ce contexte, avoir de sens…

Comment l’une quelconque des Eglises orthodoxes, en communion avec les autres, peut-elle alors se considérer comme Sœur avec l’Eglise de Rome en tant que « patriarcat d’Occident » - et non en tant qu’Eglise catholique universelle ? La réponse est que la reconnaissance par l’orthodoxie de l’authenticité sacramentelle de l’Eglise romaine est suffisante pour en parler comme d’une Eglise Sœur, malgré les divisions pour motif de foi qui empêchent encore de partager avec elle le banquet ecclésial.
La sororalité des Eglises avait d’ailleurs été déjà affirmée par deux patriarches de Constantinople dans les circonstances graves et les vifs déchirements des 1ère et 4ème croisades. Mais au moment où le dialogue reprend courageusement entre les parties et où les anciennes plaies commencent à se cicatriser, il ne faut pas que le partage d’un terme théologique « Eglise Sœur», apparemment anodin, amène à considérer comme négligeables les différences dogmatiques existant encore, ni à confondre sororalité et pleine communion de foi !

5/ Subsiste de toutes façons l’impossibilité pour les Eglises orthodoxes de considérer comme « Eglises Sœurs » les Eglises catholiques orientales. Ces dernières sont une réalité ecclésiale mais ne constituent pas, pour les orthodoxes, une « Eglise locale », car elles coexistent de façon concurrente sur un territoire appartenant à l’ « Eglise-mère » locale. Certes, les membres de ces Eglises peuvent être considérés comme des frères engagés, eux aussi, sur les chemins de l’unité. Mais ces Eglises uniates ne peuvent être acceptées que selon un principe d’ « économie », comme le déclarait, dès 1984, le Patriarche Bartholomée I.."
Fin de citation
http://www.revistateologia.ro/downloads/Teologia/4_2007.pdf. P. 10 et suivantes



3.Posté par Moscou: Nouveaux obstacles dans les relations entre orthodoxes et gréco-catholiques le 07/02/2013 20:09
L’Eglise orthodoxe russe ne partage pas entièrement l’optimisme du représentant du Vatican en Russie, l’archevêque Ivan Yurkovich, nonce apostolique à Moscou, sur l’amélioration des relations entre les fidèles orthodoxes et gréco-catholiques (uniates) en Ukraine occidentale.
* * * *
"A bien des égards, nous avons réussi à surmonter les difficultés dans les relations entre orthodoxes et gréco-catholiques en Ukraine, qui existaient au début des années 1990, mais nous devons admettre que nous avons aujourd’hui à faire face à de nouveaux défis", a déclaré le 7 février 2013 à l’agence de presse russe Interfax-Religion le Père Dimitri Sizonenko, secrétaire aux relations interchrétiennes du Département des relations extérieures du Patriarcat de Moscou.

L’archiprêtre Sizonenko réagissait à la publication le même jour par "NG-Religii", le supplément bimensuel du quotidien moscovite "Nezavisimaia Gazeta", d’une interview du nonce à Moscou. Ce dernier estimait que les difficultés du début des années 1990 avaient été surmontées à bien des égards. "Aujourd’hui, il y a beaucoup de contacts, en particulier à caractère personnel et informel, entre les deux Eglises", déclarait-il.
L’acceptation des baptêmes de l’Eglise dissidente ukrainienne préoccupe Moscou

Le représentant de l’Eglise orthodoxe russe rétorque que le Primat de l’Eglise orthodoxe ukrainienne, dépendant du Patriarcat de Moscou, "est préoccupé, non sans raisons, par les tentatives de l’Eglise gréco-catholique de mettre en place et de développer ses structures dans les régions où les fidèles orthodoxes sont en majorité".

En outre, le Père Dimitri souligne encore qu’on ne peut pas s’empêcher de mentionner encore "une blessure qui a besoin de guérison", les schismes religieux.

Il déclare encore à Interfax-Religion que dans leurs discours, les représentants officiels de l’Eglise gréco-catholique ukrainienne disent "qu’ils s’efforçent d’atteindre l’unité entre les fidèles orthodoxes en Ukraine", mais dans la pratique, "ils font des choses en vue de parvenir au résultat inverse".
Les gréco-catholiques "renforcent les positions des schismatiques"

A titre d’exemple, l’archiprêtre fait remarquer la récente déclaration de l’archevêque Sviatoslav Shevchuk, chef de l’Eglise gréco-catholique, disant qu’il accepte les baptêmes effectués dans les églises dépendant de l’Eglise orthodoxe d’Ukraine - Patriarcat de Kiev. Cette dernière est une juridiction qui s’est séparée du Patriarcat de Moscou en juin 1992 dans le sillage de la vague nationaliste ukrainienne. L’Eglise orthodoxe d’Ukraine - Patriarcat de Kiev n’est pas reconnue par le monde orthodoxe et est qualifiée de schismatique par Moscou.

A première vue, estime le Père Dimitri, la déclaration de l’archevêque Sviatoslav Shevchuk ne contient rien de nouveau. En effet, depuis l’époque de saint Augustin, l’Eglise romaine se réfère à l’enseignement selon lequel le sacrement du baptême ne peut être répété. Elle accepte tout baptême, pourvu que certaines conditions soient observées.

"Toutefois, déclare le représentant du Patriarcat de Moscou, dans le contexte de la situation actuelle en Ukraine, il semble que cela ne témoigne que de son intérêt à renforcer les positions des schismatiques". (apic/interfax/be)

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