Orthodoxie occidentale: la leçon belge
Vladimir GOLOVANOW

Le père Serge Model (archevêché russe en Belgique) a publié une très intéressante étude sur "Une page méconnue de l’histoire de l’orthodoxie en Occident : la mission orthodoxe belge (1963-1987)":

"Aujourd’hui, l’histoire religieuse de l’émigration russe au XXe siècle est relativement bien connue. De nombreuses études, articles et livres ont, en effet, analysé ce sujet, parfois de manière très détaillée. Une page de cette histoire semble cependant encore peu étudiée, que ce soit « par ignorance ou par oubli », selon la formule de la Liturgie de Saint Basile : celle des communautés orthodoxes « occidentales », fondées dans différents pays d’Europe par des « convertis » à l’orthodoxie, célébrant dans les langues européennes locales (anglais, français, etc.) et fonctionnant dans un « style » quelque peu distinct de la manière orthodoxe traditionnelle.

Qui étaient ces Occidentaux « de souche » devenus orthodoxes et quelles étaient leurs motivations ? Comment ont-ils concilié leurs racines nationales et culturelles avec l’éthos orthodoxe ? Comment la vie de ces communautés s’est-elle organisée ? Quelles étaient leurs relations avec les Églises-mères et les communautés orthodoxes locales « nationales » ? Qu’en reste-t-il aujourd’hui ? Toutes ces questions peuvent se poser pour chacune des expériences menées un peu partout en Occident ; nous tenterons, ici, de les aborder à travers l’exemple de la « Mission orthodoxe belge », qui exista (au sein de l’Église orthodoxe russe [patriarcat de Moscou]) dans ce petit pays au cœur de l’Europe, entre 1963 et 1987." Suite ici
Au-delà du très intéressant cas particulier, dont l'auteur explique bien les circonstances et les choix, je voudrais m'arrêter sur quelques enseignements généraux que nous pouvons en tirer:

Le Patriarcat de Moscou et l'acculturation

C'est d'abord un nouvel exemple qui montre à quel point le Patriarcat de Moscou participe à "l’occidentalisation de l’orthodoxie en Europe occidentale". "Votre qualité de Belges et d’Occidentaux sera toujours scrupuleusement respectée dans le cadre de la foi et de la tradition orthodoxe. […] Vous pouvez être absolument sûrs que votre reconnaissance du pouvoir canonique de Sa Sainteté le patriarche de Moscou et de toute la Russie ne vous impliquera d’aucune façon dans des affaires politiques. Abstention complète de toute politique et loyauté envers les pays où nous vivons constituent d’ailleurs les bases mêmes de l’existence de notre Exarchat en Europe occidentale" assurait Mgr Basile (Krivochéine), exarque du patriarche de Moscou. (cf. article). "De même, les Fondements de la Doctrine sociale de l’Église orthodoxe russe soulignent que « le caractère universel de l’Église ne signifie pas néanmoins que le chrétien n’ait pas droit à une originalité nationale, à une expression nationale. […] Les différences culturelles entre chaque peuple trouvent leur expression dans la liturgie et dans les autres formes d’art religieux, en particulier dans les particularités de l’organisation de la vie chrétienne. »" (ibidem)

L'illusion des conversions locales

Une autre leçon qu'en tire l'auteur est qu'il faut "cesser de se faire des illusions au sujet d’une possible conversion « en nombre » d’Occidentaux à l’orthodoxie. Même durant les vingt-cinq ans d’existence de la Mission orthodoxe belge, et à l’époque d’une crise profonde dans l’Église catholique au sortir du concile Vatican II, le nombre de « convertis » en Belgique ne s’éleva pas à plus de quelques dizaines (au mieux, centaines) de personnes ; aujourd’hui, le nombre de Belges « de souche » devenus orthodoxes avoisine peut-être le millier (toutes générations et juridictions confondues). (…) En réalité, les chiffres des pays voisins sont tout à fait comparables (France : trois mille « convertis » environ, Grande-Bretagne : deux à trois mille, soit, à chaque fois, environ 1 % des orthodoxes des pays concernés [ce qui renvoie d’ailleurs les projets de création d’Églises orthodoxes « locales » en Europe occidentale au rang d’hypothèses largement irréalistes ou à un futur indéfini]). En réalité, les Occidentaux devenus orthodoxes cherchaient avant tout dans cette Église une « gardienne de la tradition indivise des premiers siècles », et estimaient que la présence du Christ se retrouvait « à un degré plus pur » dans ce « catholicisme traditionnel qu’est l’orthodoxie ».
Aujourd’hui, rares sont ceux qui, en Occident, recherchent le christianisme même le plus authentique, et l’écrasante majorité des personnes qui quittent le catholicisme, par exemple, se tournent vers l’islam ou les religions orientales, voire abandonnent simplement toute pratique religieuse, dans le contexte du processus accéléré de laïcisation de la société." (ibidem)

Rédigé par Vladimir Golovanow le 16 Octobre 2010 à 11:11 | 23 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par Irénée le 17/10/2010 14:39
J'ai lu avec intérêt ce texte du Père Serge sur "la mission orthodoxe belge".
Mais je le trouve particulièrement sévère et injuste dans le paragraphe consacré aux conversions locales. Je ne dirais rien de la situation particulière de la Belgique que je connais mal, mais dans la mesure où il veut appliquer la même analyse à l'ensemble de l'Europe occidentale, il me semble nécessaire de faire au moins deux remarques :
Tout d'abord concernant les chiffres. Dire que 1% seulement des orthodoxes en France sont des convertis est peut-être numériquement juste. Mais cela ne me semble pas correspondre à la réalisté de ce que nous voyons dans nos paroisses. Il y a partout de nombreuses personnes ayant rencontré l'Eglise orthodoxe et ayant librement décidé de la rejoindre. Je dirais qu'en fonction des régions et des paroisses, leur proportion varie entre 10 et 60 %. Simplement pour confirmer que sur les 300 000 peronnes dont on parle le plus souvent, moins de 10 % fréquentent régulièrement une paroisse, si ce n'est à Pâques...Il faudrait aussi parler des nombreux couples mixtes dans lequel l'un des époux non orthodoxe à l'origine a rejoint la communion de son conjoint.
D'autre part, il faudrait aussi regarder l'apport de ces "convertis" à la vie des différentes communautés en Europe. Que ce soit les enseignants de théologie, les prêtres ou les personnes très engagées dans la vie de l'Eglise, je crois qu'on doit être entre 30 et 40 % de "convertis".
La situation est la même quand on regarde les fondations monastiques...Qui a fondé les 25 monastères fonctionnant aujourd'hui en France ? des grecs ? des roumains ? des russes ? Exception faite de Bussy (et d'un ou deux autres) tous ces monastères ont été fondés par des "convertis".
Regardons par exemple le récent annuaire de l'orthodoxie en France publié par le monastère de Cantauque, en regardant les noms des clercs ou des responsables divers, on se fait une autre idée que le 1% dont parle le Père Serge.
Ainsi parler d'échec et d'illusion me semble très excessif et injuste.

2.Posté par vladimir le 17/10/2010 16:50
II serait très intéressant qu'Irénée poursuive son étude, car je vois un majorité de paroisses, monastères et skits fondés par des Orthodoxes d'origine orientale...

Je parlerais personnellement de 10-15%, mais d'après une expérience très limitée sur 2 paroisses de traditions russes, absolument pas représentatives: ce matin à Lyon nous avions 40 paroissiens à la liturgie, dont 4 Français de souche (1 chante dans le chœur... en slavon); par contre il y avait 10 paroissien parlant peu ou mal le français. J'étais à Biarritz au printemps et une paroissienne m'a dit que, sur "une trentaine de paroissiens réguliers" il y avait 3 Français de souche, la majorité des autres étant des Ukrainiens habitant en Espagne et ne comprenant pas le français. J'étais allé à l'église grecque de Lyon au printemps: je n'ai entendu parler que grecque autour de moi!

Tout cela me fait penser que, si le chiffre du Père serge est vraisemblable en nombre de baptêmes ou d'enterrements, Irénée a raison qu'il faut le reprendre pour parler des "Orthodoxes actifs"; mais son estimation me semble exagérée ou, peut être, valable dans sa seule juridiction.

Comme nous n'avons pas les moyens de faire une étude sérieuse actuellement, nous n'avons que des témoignages limités par l'horizon de chacun. Tous les témoignages sont donc bienvenus pour compléter ce tableau!


3.Posté par Daniel le 17/10/2010 17:26
Texte très intéressant mais je suis sceptique sur le chiffre de 1% de convertis en France et déjà sur la définition du converti Dans quelle catégorie range-t-on les familles 100% françaises qui sont orthodoxes depuis plus d'une génération? Ce sont donc les les parents (ou grand-parents) des personnes en question qui se sont converties? Où range-t-on un Russe baptisé au lendemain de la fin du communisme, ou un Serbe qui s'est fait baptisé adulte en France? Dans les convertis? Il ne faudrait pas tomber dans la caricature : tout occidental de souche est un converti et tout orthodoxe russe, serbe, ou autre n'est pas un converti. Au bout de combien d'années de pratique régulière et assidue gagne-t-on le droit de ne plus être appelé converti?

4.Posté par Irénée le 17/10/2010 17:35
Merci Vladimir pour ce commentaire
Je n'ai pas le temps de me lancer dans une étude très détaillée, et je n'en ai pas les moyens !
Mais si je prend rapidement quelques exemples (et sans constituer un fichier ethnique !) :
Sur le site du diocèse de Chersonèse, en regardant la liste des prêtres en France et en Suisse, je crois que l'on peut dire que plus du tiers d'entre eux sont des "convertis" (je laisse les parenthèses, le mot pouvant et devant s'appliquer à tous chaque jour !)
Si on regarde la liste de 23 monastères figurant dans l'annuaire du monastère de Cantauque, un grand nombre a été fondé par des "convertis", et parmis ces fondateurs et higoumènes, figurent des personnes remarquables comme le Père Placide, le Père Syméon, le Père Elie et d'autres...
C'est le cas aussi pour des professeurs de Saint Serge ou du Séminaire d'Epinay...
Ce que vous dites de vos visites à Lyon et à Biarritz est certainement vrai, mais si vous allez à la crypte de la rue Daru ou bien à Notre Dame Joie des Affligés, plus de la moitié des fidèles sont des "convertis"...

5.Posté par vladimir le 17/10/2010 20:07
Si j'ai posté ce texte, c'est bien parce que je pensais qui pouvait ouvrir un débat sur la situation et le devenir de l'Orthodoxie en Occident.

La notion de "convertis" me parait assez clairement définie dans le texte du père Serge: "Occidentaux « de souche » devenus orthodoxes" (début du 2ème par, dans sa conclusion ils parle "des personnes qui quittent le catholicisme, par exemple". Il s'agit donc bien de conversion de personnes qui n'avaient pas été baptisées orthodoxes, y compris dans le cas de mariages mixtes.

La question du nombre: je pense que le père Serge compare le nombre de "convertis" au nombre d'Orthodoxes baptisés: "(France : trois mille « convertis » environ, Grande-Bretagne : deux à trois mille, soit, à chaque fois, environ 1 % " correspond assez aux estimations basses que l'on peut trouver, par exemple, sur le post "Les-orthodoxes-en-Europe-Occidentale"(1): France– 300 - 500 000, GB– 250 - 300 000. C'est la première fois que je rencontre une estimation du nombre de "convertis" et je ne vois donc pas comment la discuter. Les éléments que donne Irénée ne nous aident pas car ce sont à chaque fois des unités: en faisant la somme des quelques monastères, de la crypte, de Notre Dame Joie des Affligés, des 2 paroisses francophones que je connais à Lyon nous arriverons à quelques centaines. 3000 en extrapolant me parait possible...

Nous remarquons aussi que tous les exemples cités font partie des deux archevêchés russes, ce qui est normal étant donné que ce sont les plus anciens, et leur activité d'acculturation est aussi ancienne: c'est Chersonèse qui a lancé le mouvement à Paris en accueillant "la Confrérie de Saint Photius" dans les années vingt (2) comme fut accueillie la « Mission orthodoxe belge » 40 ans plus tard, puis cela fut le développement de la crypte et cela continue avec la publication des textes liturgiques en français par l'évêché de Genève. Je crois toutefois que le même type d'activité se développe aussi dasn les autres juridictions et des informations seraient bienvenues.

Je pense donc que ce chiffre de 1% est juste, mais il n'est peut être pas pertinent. En effet, suffit-il d'être baptisé et enterré, voire même marié, dans l'église orthodoxe pour réellement faire vivre l'Orthodoxie? N'est ce pas à cela que pense Irénée? Et là les proportions vont changer: nos " trois mille « convertis » environ" ne se rapportent plus aux centaines de milliers de baptisés mais aux quelques milliers de pratiquants (dizaines de milliers si on compte ceux qui vont à l'église pour Paques?) et leur présence devient sensible car eux, s'ils ont choisi de se convertir, c'est pour pratiquer réellement. Et leur action devient importante même dans des paroisses où ils sont très minoritaires, comme celles que j'ai citées: ils sont marguiller (à Biarritz) ou chantre et secrétaire du conseil paroissial (à Lyon), voire recteur, abbé, professeur de théologie comme le site très justement Irénée...

Pour moi l'Orthodoxie occidentale doit continuer à marcher sur ses deux pieds: avec les émigrés des pays de tradition orthodoxe, qu'elle doit continuer à accueillir et qui formeront encore longtemps ses "gros bataillons", et avec Occidentaux « de souche » qu'elle doit aider à devenir orthodoxes en préservant les traditions qui sont notre richesse essentielle.


(1) http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/Les-orthodoxes-en-Europe-Occidentale_a187.html :
(2) http://ndjasg.perso.neuf.fr/textes/historique2006.html

6.Posté par Daniel le 17/10/2010 22:34
Il y a aussi beaucoup de convertis occidentaux :

- dans le diocèse roumain qui a hérité d'une partie de l'ex-ECOF

- dans les paroisses du Sud de la France qui dépendent de l'Evêque Luc (évêque serbe); ces paroisses ne comptent quasiment que des convertis, le sud-ouest n'est pas vraiment une zone d'immigration originaire d'Europe de l'Est; c'est un groupe de paroisse qui a connu des juridictions différentes en passant notamment par maintes églises vétérocalendéristes
( http://www.monasteresaintgeny.fr/ )

- dans la juridiction vétérocalendériste (Boulevard Sébastopol), hors AEOF donc héritière d'une mission francophone de l'Eglise hors frontière

Pour ma part, je compte parmi les convertis toute personne adulte ayant été reçu dans l'orthodoxie à l'âge adulte quel que soit son origine, ce qui fait qu'il faut y inclure maints immigrés originaires de l'Europe de l'Est qui ont été baptisé adultes là-bas voire ici en Europe occidentale, ou encore redécouvrent vraiment l'orthodoxie en Europe occidentale.

Faute de statistiques, j'ignore si tous les convertis sont assidus et si une fois passé l'enthousiasme, le soufflet ne retombe pas.

7.Posté par Irénée le 18/10/2010 12:45
Je ne conteste pas les chiffres donnés par le Père Serge, mais plutôt l'importance du role et de l'engagement des convertis au sein de l'Eglise en Europe de l'ouest, aus Etats Unis et ailleurs...
Mais pour en revenir aux chiffres bruts, si nous avons environ 180 paroisses et communautés en France. Cela signifierait qu'il y aurait dans chacune de ces paroisses environ 2000 personnes !
Et en modulant un peu, cela impliquerait des grosses paroisses de 8 à 10 000 personnes, et des petites entre 500 et 800. Cela ne correspond certainement pas à la réalité ! si ce n'est (peut-être) le nombre de baptisée, ou bien de personnes originaires de pays de tradition orhodoxe.
La réalité vécue est à diviser par 20 ou 30 !

8.Posté par Marie Genko le 18/10/2010 15:07
@Irénée,

Les assemblées paroissiales comptent un certains nombres de fidèles inscrits et cotisant!
Le nombre de ces inscrits n'est absolument pas représentatif du nombre de fidèles présents aux offices du dimanche. Il n'est pas représentatif non plus du nombre de baptêmes de mariages et d'enterrements
Je suis désolée de ne pas me souvenir du chiffre exact des personnes assistant aux conseils paroissiaux de la cathédrale. (150 ou 200?)
Mais certaines de ces personnes viennent rarement aux offices, peut-être vont-elles dans une autre paroisse?
La grande majorité des fidèles du dimanche sont, comme je l'ai déjà indiqué, des moldaves et des touristes de passage. De même un petit noyau de fidèles issus de l'émigration russe et quelques très rares convertis sont également assidus aux offices.
A la crypte, je dirais que plus de la moitié des paroissiens sont issus de l'émigration russe, je me souviens y avoir vu quelques quelques grecs et aussi un ou deux juifs convertis qui sont également des paroissiens assidus! Les Français pure souche ne sont, à mon sens pas vraiment nombreux?
Il faudrait demander au père Alexis Struve ce qu'il en est réellement, car mon appréciation est une estimation très aléatoire.
Il faut aussi ajouter que Paris n'est certainement pas représentatif de l'orthodoxie en France à cause de touts ces voyageurs et touristes venus d'horizons divers.

9.Posté par Volkoff le 18/10/2010 15:38
@ MARIE
Des amis me disaient qu'une grande église orthodoxe existe depuis longtemps dans le huitième arrondissement. Peut-on me dire si elle est toujours opérante? Merci.

10.Posté par vladimir le 18/10/2010 17:56
@Irénée
Toutes les estimations de membres de confessions ne parlent que de baptisés et, bien entendu, 2000 baptisés/paroisse en moyenne n'a rien d'excessif: nous avions prés de 1/2 million de russes arrivés dans les années 1920, la plupart orthodoxes et ayant fait souche, puis les Grecs, les Serbes, la 2ème émigration russe (déjà moins orthodoxe mais quand même), les Arabes et maintenant les nouveaux arrivants... et tous ces gens, qui baptisent en général leurs enfants dans l'Orthodoxie, sont des Orthodoxes qui ne correspondent pas à la définition des "convertis"que prend le père Serge. Et si vous ne contestez pas le chiffre des convertis, que personne ne semble en capable de mesurer mieux que le père Serge (ce qu'écrit Daniel nous en amène encore quelques centaines et confirmerait donc l'estimation du père Serge), vous seriez d'accord avec mon commentaire No 5.

@Daniel
Vous proposez une autre définition de "converti". Pourquoi pas, mais cette définition ne serait pas pertinente pour l'article du père Serge: les "immigrés originaires de l'Europe de l'Est qui ont été baptisé adultes là-bas voire ici en Europe occidentale, ou encore redécouvrent vraiment l'orthodoxie en Europe occidentale" n'ont probablement pas les même motivations que "ces Occidentaux « de souche » devenus orthodoxes" auxquels il s'intéresse!

@Volkoff
Je ne comprends pas votre question: la cathédrale de la rue Daru, dont parle Marie, se trouve effectivement dans le VIIIème arrondissement et c'est la plus grande église orthodoxe de Paris...

@tous
Je trouve particulièrement intéressant le dernier paragraphe que je cite:
"Aujourd’hui, rares sont ceux qui, en Occident, recherchent le christianisme même le plus authentique, et l’écrasante majorité des personnes qui quittent le catholicisme, par exemple, se tournent vers l’islam ou les religions orientales, voire abandonnent simplement toute pratique religieuse, dans le contexte du processus accéléré de laïcisation de la société."
Constatez-vous aussi une retombée de cette vague de conversions des Catholiques par rapport aux années 1960 que le père Serge relie à Vatican II? N'y aurait pas une nouvelle vague, cette fois de Protestants ou Anglicans réfractaires aux évêques femmes, voire homosexuels? L'attrait de l’islam et des religions orientales, voire la sécularisation, sont-ils vraiment nouveaux et dangereux?

11.Posté par Irénée le 19/10/2010 10:58
@ Vladimir
Encore une fois, je ne conteste pas ces chiffres, même si la plupart des paroisses de province en France sont plutôt des communautés d'une petite centaine de personnes... pas de 2000 !
Ce sur quoi j'insistais, c'est sur l'importance des convertis dans le clergé, les monastères etc. Sur cette question importante, il y n'y a pas eu de réactions !
Car si 1% des orthodoxes fournissent plus de 30% des clercs, il y a des questions à se poser !
A la fois sur l'engagement très fort de ces convertis, et sur le peu d'engagement des orthodoxes "de souche"

12.Posté par Irénée le 19/10/2010 15:09
Nous aurions besoin d'une étude du même genre que celle effectuée aux Etats Unis sur les communautés orthodoxes : http://www.hartfordinstitute.org/research/2010-USOrthodox-Census.pdf

Nous n'en ferons pas une analyse ici.

Juste quelques chiffres : la taille moyenne des paroisses, toutes juridictions confondues est de 438 personnes (on est loin des 2000 !) En gardant ce chiffre et en l'appliquant à la France, nous aurions environ 100 000 "adhérents" ce qui me semble un chiffre plus vraisemblable...
Et le nombre de pratiquants réguliers est de 28% des personnes considérées comme "adherents", c'est à dire des personnes identifiées et connues comme orthodoxe par les responsables de la paroisse. On est moin d'un nombre de personnes ayant des "origines orthodoxes" dans la population...

13.Posté par Chani le 20/10/2010 11:59
Statistiques...

Churchill disait : "Il y a de petits mensonges, il y a de grands mensonges - puis, il y a les statistiques." Je pense que l'on ne devrait pas se baser sur les statistiques pour avancer. Ce ne sont que des données étatiques impossibles à utiliser, si ce n'est pour se donner de l'importance et faire de la politique.
La réalité, c'est que dans l'Eglise, il n'y a plus ni Juif, ni Grec ou ni Scythe. Pourquoi vouloir à tout prix calculer le nombre de convertis occidentaux, d'orthodoxes de souches, etc? Ce sont là des préoccupations païennes.
L'Eglise est fondée par les saints, non par tous ceux qui disent "Seigneur, Seigneur".

14.Posté par Irénée le 20/10/2010 13:52
Je suis plutôt d'accord avec Chani...mais il s'agissait de réactions à l'article du Père Serge Model.
La grande question est plutôt comment porter le message de l'évangile et annoncer la Bonne Nouvelle à tous...Mais il semble que beaucoup se préoccupent plus de questions d'identité nationale ou d'Eglises Mères...

15.Posté par vladimir le 21/10/2010 16:48
1/ Je trouve rappeler la biographie du père Serge, donnée sur le lien en tête de mon article: son passé académique explique l'orientation scientifique de sa recherche ...
Né à Moscou en 1972. Diplômé de droit et de sciences politiques (orientation relations internationales) de l’Université catholique de Louvain (Belgique). Thèse de maîtrise : « État, Église, Nation. Aspects géopolitiques de l’orthodoxie russe aujourd’hui » (prix Boehringer Mannheim Belgium des Relations internationales 1997).
Prêtre orthodoxe à Bruxelles, secrétaire du diocèse de l’Église orthodoxe russe en Belgique, administrateur de la Fondation pour la préservation du patrimoine russe dans l’Union européenne, membre du comité de rédaction du Messager de l’Église orthodoxe russe (Paris).

2/ L'étude sur les USA citée par Irénée est très intéressante. Mais on introduit un nouveau concept celui "d'adhérent" à une paroisse. A quoi correspond-t-il dans notre réalité française (ou belge) ? Si ce sont les membre enregistrés et cotisants des associations cultuelles qui gèrent les paroisses, il est très réducteur car, à Paris en particulier, une grande partie des croyants fréquentent plusieurs églises alternativement et ne s'inscrivent pas (c'était mon cas tant que j'ai habité la capitale); mais même en province, où on n'a pas le choix, nombre de croyants viennent prier sans s'inscrire... Ils n'en sont pas moins orthodoxes pour cela!

Et en allant plus loin, les chiffres des membres des églises généralement disponibles concernent les baptisés (300-500000 Orthodoxes en France d'après "La Croix", ibidem) et c'est par rapport à ces chiffres, les seuls disponibles à ma connaissance, que se positionne le père Serge. La majorité d'entre eux ne fréquentent l'Église que pour les baptêmes, mariages et enterrements... Ne sont-ils pas Orthodoxes pour autant? Par contre est-il pertinent de rapporter le nombre de "convertis" au nombre de baptisés? Mais si non comment mesurer leur impact si on n'a pas d,autres données? Peut-être vaut-il mieux, dans un cas comme celui là, ne pas essayer de chiffrer mais chercher d'autres éléments d'analyse, éventuellement moins numériques, comme le fait Irénée? Ce sont autant de questions qu'il me parait tout à fait raisonnable de poser face à la méthode du père Serge.

Cela dit, je persiste à penser que la question essentielle qu'il pose est celle qui ne fait pas appel aux chiffres et que je rappelle dans mon commentaire 10. Il est claire que, si vraiment la vague des conversions est terminée, l'avenir de l'Orthodoxie en Occident repose à nouveau uniquement sur les immigrants de l'est et c'est leur accueil qui devient notre priorité.

16.Posté par Daniel le 21/10/2010 23:45
@ Vladimir (commentaire 15)

Il est vain de compter sur les immigrés pour renforcer les effectifs orthodoxes en France, du moins à long terme car d'une part cette immigration n'est pas forcément définitive. D'autre part, leur orthodoxie n'est souvent que superficielle. Si on observe les vagues précédents, plus nombreuses (500 mille âmes) on note qu'une grande partie a perdu la foi orthodoxe sur plusieurs générations. Il faut remercier au passage les mariages mixtes pour cela... Il n'y a aucune raison pour que la vague actuelle connaisse le même sort.

Concernant les conversions, elles sont peu nombreuses et ont toujours été peu nombreuses en raison du refus des évêques orthodoxes de mener à bien des missions d'évangélisation auprès des autochtones occidentaux; enfin cela varie d'une juridiction à une autre. Pire, l'église orthodoxe, avec son obsession oecuméniste et du témoignage commun avec les autres chrétiens apparaît comme une confession chrétienne parmi les autres et proche du catholicisme (qui n'a pas forcément une image très glamour). Au final, il ne faut pas s'étonner des faibles effectifs des convertis...



17.Posté par Marie Genko le 22/10/2010 00:06

Cher Daniel,

Je ne sais plus si c'est vous qui avez écrit que vous connaissiez des catholiques qui ne se sont pas convertis à l'orthodoxie à cause de nos permanentes disputes!
Les querelles que nous connaissons aujourd'hui, sont des jeux d'enfants comparées aux querelles vécues par les orthodoxes dans les années 30, 40 et 50 du siècle dernier.
La guerre entre l'EORHF et l'archevêché a été assez horribles!
Les publications et les accusations diverses n'ont épargné ni les uns ni les autres!
C'est à cause de ce manque d'amour entre nous, que nous n'avons converti que bien peu de monde.
Tout absorbés par la conduite de nos querelles, nous avons bien peu pensé à témoigner notre foi !
Le diviseur a toujours dansé dans nos esprits, et il continue aujourd'hui!
Au lieu de nous unir à nos frères de l'EORHF et fonder avec eux et l'Église de Russie une grande métropole russe en France, une métropole qui mettrait fin à toutes les querelles et les procès en cours, nous continuons à nous débattre en vain et à donner l'exemple détestable de la division!

18.Posté par Irénée le 22/10/2010 09:58
Permettez-moi de vous faire part de ma surprise face à cette affirmation permanente concernant les querelles, voire les conflits dans lesquels seraient en permanence englués les orthodoxes.
Ce sentiment correspond sans doute au vécu de certains, mais certainement pas de la majorité... Je lis et je vois au contraire beaucoup d'exemples de coopération inter-orthodoxe, de travail et de témoignage commun, tant en France qu'ailleurs dans le monde. Il ne faudrait pas trop se concentrer sur quelques incidents sans doute regrettables, mais peut-être finalement très marginaux.
Je crains d'ailleurs que d'une certaine manière les blogs ne contribuent à attiser ces problèmes, en soufflant sur les braises...

19.Posté par vladimir le 22/10/2010 11:49
@Daniel,
Votre commentaire 16 est des plus surprenants:
- Ce sont les immigrés qui ont crée la majeure partie des lieux de cultes orthodoxes en France
- Leur nombre est nettement plus important que vous dites: 500 000 est l'estimation des seuls Russes de la 1ère vague. Il est clair que la déperdition est importante surtout en nombre de pratiquants, mais cet apport reste essentiel.
- Je connais autour de moi plusieurs mariages mixtes: aucun abandon de l'Orthodoxie et, même quand l'époux hétérodoxe ne se convertit pas lui même, la famille reste orthodoxe (baptêmes, Eucharistie...)
- Dans les deux paroisses lyonnaises que je connais, 20% des paroissiens environ sont arrivés de Russie après 1995
- Nous avons plus de 40 millions d'Orthodoxes dans l'UE (Roumanie 20, Grèce 9, Bulgarie 7, Pays Baltes 2, Europe occidental 2,3-3 (1) qui seront plus de 60 avec l'accession prévue des Balkans occidentaux (Serbie, Macédoine, Monténégro). Avec la libre circulation des personnes, il n'y a aucune raison que ces flux s'arrêtent, sans parler de l'assoupissement des visas avec la Russie promis dernièrement à Deauville.

Je sais qu'on parle beaucoup de cas de refus d'accueil. Je n'en ai jamais rencontré, au contraire, et je suppose qu'il s'agit de quelques cas très particuliers montés en épingle. La politique de non-prosélytisme est claire et affirmée, mais elle n'implique pas le refus d'accueillir les personnes en recherche, en particulier celles qui sont en rupture avec leur Église ou dans un mariage mixte: cela se pratique couramment. La meilleure preuve en est donnée par les nombreuses personnalités dont parle Irénée (cf. 4 ci-dessus) et je rajoute, à titre d'exemple concret que les recteurs d'au moins 2 des 8 paroisses canoniques lyonnaises sont des Français "pure souche" (l'arbre généalogique de l'un d'eux remonte à l'an 1000).

Mais la vague qui a vu se convertir toutes ces personnalités, et bien d'autres, n'est-elle pas retombée? Ce qu'écrit le père Serge in fine n'est-il pas justifié? J'avoue que, personnellement, je ne vois pas de conversion récente autour de moi (hors mariage mixte – encore 1 cas en cours!)…

20.Posté par Irénée le 22/10/2010 13:53
@ Vladimir
Pour répondre à votre dernier point, il ne me semble pas que ces conversions aient cessées. Elles sont sans doute moins nombreuses ou moins "spectaculaires" mais l'exemple récent du Père Gabriel confirme que c'es encore un phénomène vivant.
Dans les paroisses de province en particulier, il me semble que de nombreuses personnes qui ont longtemps hésité se décident maintenant à entrer dans la communion orthodoxe.
Il y a aussi les mariages mixtes, et il y en aura sans doute beaucoup d'autres...

21.Posté par Daniel le 22/10/2010 16:48
@ Vladimir commentaire 19

Je ne nie pas l'importance numérique des immigrés mais le simple fait que compter sur cela pour développer une église orthodoxe en France est illusoire car l'immigration n'est pas forcément définitive et la déperdition est importante. Concernant les mariages mixtes, j'ai de nombreux cas d'abandon de la foi, et quand on regarde les premiers immigrés russes et la déperdition qui s'est opérée, les mariages doivent y être pour quelque chose.

J'ignore ce qu'est le prosélytisme, je ne connais que l'esprit missionnaire qui commence par dire la vérité haut et fort, à savoir que l'église orthodoxe est la seule vraie église et non une branche du christianisme etc. Je ne ne demande pas aux orthodoxes d'être accueillant mais d'être missionaires (à minima) : "Allez et faites de toutes les nations des disciples etc". Les apôtres n'attendaient pas que les gens poussent la porte de leur maison, ils allaient sur le terrain à la rencontre des gens. Comment voulez-vous qu'une personne en recherche se tourne vers l'orthodoxie si les orthodoxes ne font pas un peu d'efforts en terme de visibilité? Il est évident que maintes personnes en recherche ignorent ce qu'est l'orthodoxie et Mais cette volonté est quasiment absente en France, contrairement aux Etats-Unis car maints évêques et prêtres conçoivent l'orthodoxie comme une affaire purement ethnique, même si officiellement, ils ne le diront pas. Il y a bien sûr quelques exceptions.


22.Posté par vladimir le 22/10/2010 17:34

1) Mes excuses pour l'amusante coquille de "l'assoupissement des visas avec la Russie"... Les lecteurs auront corrigé!

2) @Daniel,
Après avoir longtemps débattus de chiffres, nous tombons d'accord sur le fait que les immigrés et leurs descendants restent largement majoritaires dans l'Orthodoxie occidentale. Y a-t-il des raisons pour que cela change? J'en doute! Comment se développera l'Orthodoxie sans émigration si les conversions locales se tarissent comme le dit le père Serge?

Dans le cas de mariages mixtes je vois personnellement plus de venue à l'Orthodoxie que de départs, sauf dans le cas où l'époux orthodoxe n'avait d'orthodoxe que le baptême. Dans ce cas là, vous avais raison, il y a déperdition, mais est-ce à cause du mariage mixte où était-ce inéluctable?

Je ne parlerai pas pour toutes le juridictions, mais uniquement pour celle que je connais: le patriarcat de Moscou. Là il est claire que la 1ère priorité est l'accueil et la catéchèse des nouveaux immigrants de l'ex-URSS dont les besoins pastoraux son immenses (manque de culture chrétienne élémentaire + déracinement). Les couples mixtes font partie de ce troupeau car ils en constituent une part non négligeable (20-30000 jeunes femmes ont épousé des Français récemment...) qu'il faut "arrimer" à l'Orthodoxie.

Aucun repli ni aucun rejet: le séminaire et la nouvelle cathédrale le démontrent, tout comme le soutien à la paroisse nouvellement intégrée de Lyon. Mais je ne vois plus de nouvelles conversions hors mariage (le père Gabriel n'est qu'une exception venant couronner un cheminement commencé pendent les années fastes). Y a-t-il des candidatures locales au séminaire? A Saint Serge?

23.Posté par Vladimir G: "ces Occidentaux « de souche » devenus orthodoxes" le 16/08/2019 15:09
Je transfert ici ma réponse à un commentaire sur un autre fil ^pour ne pas polluer le débat:

17.Posté par Daniel le 16/08/2019 10:27 "Tchetnik (16) et Vladimir (15)

La définition du terme converti est claire, selon le Larousse. "Personne qui a été amenée ou ramenée à une religion, à une croyance considérée comme vraie." ou "Personne qui a adhéré à une autre religion que celle qu'elle professait auparavant."

Je connais ainsi une Roumaine arrivée jeune adulte en France et athée et devenue orthodoxe en France, dans une paroisse francophone du reste... C'est bien une convertie... "

Réponse: chercheur sérieux, le père Serge définit d'abord les concepts qu'il utilise. Le concept de "converti" est défini comme "ces Occidentaux «de souche» devenus orthodoxes".* Il s'agit pour lui de "ces Occidentaux «de souche» devenus orthodoxes". Cette définition correspond parfaitement à son propos et les gens de pays traditionnellement orthodoxes ayant été baptisés adultes récemment, comme votre Roumaine, bien cher Daniel, ne correspondent donc pas à cette définition.

Je reprends personnellement la définition du père Serge car elle correspond aussi au concept que je souhaite analyser. En effet, en adoptant l'Orthodoxie, ces "Occidentaux «de souche»" ne renoncent pas pour autant aux système de valeurs et façon de penser occidentaux: "Tout est foncièrement commun à l’Orient et à l’Occident, et tout est différent" écrivait le père dominicain Yves CONGAR (https://www.cairn.info/revue-historique-2009-3-page-645.htm), et c'est bien cette différence d'éthos qui est importante, aussi bien dans l'étude du père Serge que dans nos débats concernant l'avenir de l'Orthodoxie chez nous.

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