Parlant en chaire dans la cathédrale du Christ Sauveur à Moscou le Dimanche du Triomphe de l'orthodoxie, qui correspond aussi au 40e anniversaire de son sacre épiscopal, le patriarche Cyrille est revenu sur sa rencontre avec le pape François: "Certains (fidèles) écoutent attentivement les paroles prononcées dans l'église, mais il y a aussi ceux chez qui ces paroles suscitent questions, confusion et désaccord. Ainsi la réponse qu'apporte l'Église à la confusion et au désaccord est extrêmement importante.


Patriarche Cyrille: "Pour entamer un dialogue, l'apôtre Paul a reconnu que même les païens avaient la Vérité ".
Nous avons deux options.

Une façon est très simple: si vous n'êtes pas d'accord avec la prédication de l'Evangile, alors vous hérétiques ou infidèles et on ne peut pas parler avec vous parce que en parlant avec vous, nous pouvons perdre notre vérité. Il y a parmi nous des gens pour penser comme cela. Mais il y a une autre approche: quand on te pose des questions, même agressives, essaye de comprendre ce qui pousse ton interlocuteur – il veut se battre ou il veut au fond trouver la vérité. Plutôt que de hausser les épaules et dire: "hors d'ici hérétique, athée," nous répondons à ses questions avec humilité, avec confiance dans la volonté de Dieu, dans l'espoir que nos paroles atteindre leur but. Nous entrons ainsi dans un dialogue avec les gens - sans proclamer notre enseignement, mais en répondant aux questions qui nous sont posées. Et cela ne se passe pas uniquement avec des athées, mais aussi lorsque nous témoignons de l'orthodoxie devant les représentants d'autres confessions. Ils nous posent des questions au sujet de ce qu'ils ne comprennent pas, avec quoi ils ne sont pas d'accord, qui ne correspond pas à leurs traditions, et nous répondons, nous témoignons de notre expériences, de notre foi. Questions et réponses – voilà ce qu'est le dialogue.

D'aucun parmi nous disent: "Je n'ai que faire d'un tel dialogue. Vous leur avez dit - ils ne comprennent pas. Secouez donc la poussière de vos sandales et dites qu'ils sont des hérétiques". Mais dès que vous dites à quelqu'un qu'il est un hérétique, vous fermez toute possibilité de dialogue avec lui - il cesse de vous entendre devient votre ennemi, parce qu'il ne se considère pas hérétique et interprète ces mots comme une insulte. Il n'y a alors aucun dialogue et les Chrétiens s'enferment dans leur environnement et créent des «ghettos», y compris nous même qui sommes appelés à apporter la lumière de Dieu au monde entier. Nous nous confortons et consolons l'un l'autre – comme nous sommes justes, comme tout est bien chez nous, et autour de nous le monde est en train de sombrer! Est-ce que le Seigneur ne vas pas demander à chacune de nous: vous n'avez pas engagé de dialogue avec le monde? Vous ne vous êtes pas battus pour chaque âme humaine? Et ne vous donnera-t-il pas en exemple les Apôtres qui, eux aussi, pouvaient tranquillement rester en Galilée? Un excellent climat, une bonne nourriture, du bon vin, de bons coreligionnaires - quoi demander d'autre? Mais les apôtres sont sortis sur les routes romaines et se sont dirigés vers le monde païen qui leur lançait des pierres et ils cherchaient un langage commun avec lui, comme l'apôtre Paul lorsqu'il a parlé aux sages d'Athènes et a dit qu'il avait vu leur autel à un dieu inconnu, Qu'il prêche lui-même (Actes 17:23.). L'apôtre a reconnu la que même les païens avaient la Vérité pour entamer un dialogue. Que diraient nos zélateurs à propos de l'apôtre Paul? "Comment peut-on faire cela?! Fréquenter les païens et plus reconnaitre qu'ils ont un autel sur lequel ils adorent le même Dieu que nous adorons?" En effet, l'Eglise a lutté depuis le début contre toutes les hérésies et les divisions, et le même Apôtre Paul dans son épître aux Corinthiens dit la nécessité de maintenir l'unité. Mais l'Église a toujours porté le témoignage apostolique au monde entier.

L'Eglise orthodoxe russe ne pense pas uniquement aux questions doctrinales - elle est très préoccupée par ce qui se passe dans le monde et il y a des problèmes auxquels on ne peut faire face seuls. Le problème le plus effroyable aujourd'hui est sans doute la persécution des chrétiens et je me demande pourquoi, jusqu'à récemment, il n'a pas provoqué plus de réactions actives. D'après les données des organisations internationales: Un Chrétien est tué dans le monde toutes les cinq minutes. Prés de trois cents personnes par jour, plus de 100 000 par an. Les chrétiens subissent aujourd'hui des persécutions sans précédent, comme il n'u en eut ni dans l'Empire romain ni en 'Union soviétique. Et nous vivons comme si de rien n'était – ce n'est pas nous qui sommes persécutés! (…)

J'ai rencontré les primats de plusieurs Église du Moyen-Orient, orthodoxes et d'autres confessions chrétiennes, et tous m'ont demandé d'une seule voix: faites quelque chose, nous sommes sans force, protégez nous, nous succombons! Et j'en ai parlé haut et fort en rencontrant les présidents de différents pays et dans les réunions internationales - mais personne ne semblait entendre ...

C'est alors que vint l'idée de le dire de façon telle que tous entendent. Et dans nos pourparlers avec le pape, nous avons convenu que nous devons nous rencontrer et clamer très fort, pour le monde entier, que les Chrétiens sont persécutés. Cette réunion a eu lieu, et le monde a commencé à parler! C'est étonnant: le Congrès américain déclare soudain que la destruction des chrétiens au Moyen-Orient est un génocide. Nous le demandions sans être entendus, et maintenant parce-que les voix de l'Est et l'Ouest se sont réunies et ont dit l'essentiel, ce qui nous concerne tous aujourd'hui.

Cela nous a aussi donné l'occasion de rejeter une nouvelle fois l'uniatisme: l'évêque de Rome, a convenu à La Havane que l'uniatisme ne peut pas être un moyen d'unir les Églises, qu'il provoque toujours la désunion, comme cela se passe en Ukraine. Nous avons également dit qu'il n'y a pas d'agression extérieur en Ukraine mais un conflit fratricide et souligné que le schisme doit être surmonté par la voie canonique et non en créant une "unique église locale" mythique, où les schismatiques prétendraient s'unir avec les Orthodoxes et les Catholiques.

Je pense que la rencontre du Patriarche de Moscou avec le Pape a été un événement important. C'est la première fois dans l'histoire, mais c'est aussi pour la première fois dans l'histoire que de telles persécutions sont infligées aux chrétiens, c'est la première fois dans l'histoire qu'il y a une telle déchristianisation de la civilisation humaine - et c'est cela que nous avons proclamé. Et maintenant nous pouvons espérer pouvoir travailler ensemble pour surmonter les effets désastreux sur l'esprit de l'homme moderne; nous pouvons le faire chacun à sa place, avec ceux qui sont responsables à l'Ouest, avec nous à l'Est, et avec tout le peuple croyant. Nous vivons une époque spéciale, mais il n'y a rien de nouveau. Comme dans les temps du Triomphe de l'Orthodoxie, comme au temps de saint Marc d'Ephèse, l'Eglise orthodoxe est appelé aujourd'hui à prêcher l'Evangile et à maintenir la pureté de la foi orthodoxe.

Amen.

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V. Golovanow

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 29 Mars 2016 à 11:39 | 23 commentaires | Permalien



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