Père Nikolaï Nikichine ( diocèse de Chersonèse PM): Les objets saints et l’orthodoxie en France
Si la France contemporaine est un modèle d’État laïc, de nombreuses reliques chrétiennes se conservent pourtant jusqu’à présent sur son territoire. Certaines d’entre elles remontent à la période où les Églises orthodoxe et catholique n’étaient pas encore divisées. À propos de ces objets saints ainsi que de la situation de l’orthodoxie en France, nous nous sommes entretenus avec le prêtre Nikolaï Nikichine (diocèse de Chersonèse PM) - doyen de deux métochions – la communauté de Sainte Hélène à Paris et le métochion du saint prélat Nikolaï à Saint-Nicolas-de-Port.

Koultoura : Père Nikolaï, de quand datent les pèlerinages contemporains depuis la Russie vers la France ?

p.Nikolaï Nikichine : Tout a commencé en 1997, par la prière que j’ai prononcée dans l’église parisienne Saint-Leu-Saint-Gilles face aux reliques de Sainte Hélène. Il y a alors eu une prise de conscience en Russie : Paris n’est pas seulement un centre de culture, c’est aussi un point crucial de lieux saints.

Koultoura : La principale découverte pour les orthodoxes, ce fut, évidemment, la Couronne d’épines ?
N.N. : Nous avons découvert en effet que Notre-Dame de Paris abritait la Couronne d’épines qu’on sortait pour le culte chaque premier vendredi du mois. J’ai organisé la première prière face à la Couronne en 2004. Et après que le patriarche Alexeï II, en 2007, est venu à Paris et a rendu hommage à la sainte relique, un pèlerinage important a commencé depuis tous les coins de Russie.

Père Nikolaï Nikichine ( diocèse de Chersonèse PM): Les objets saints et l’orthodoxie en France
Koultoura : Comment avez-vous commencé à étudier les reliques orthodoxes ?
N.N. : J’ai terminé la faculté de mathématiques de la MGU et je reste, par ma vocation, un scientifique. Arrivé à Paris, j’ai terminé l’institut orthodoxe de théologie saint-Serge et me suis consacré à l’étude des reliques. Ma première découverte, ce furent les reliques de sainte-Hélène ;et leur authenticité a été ce don qui a prouvé que reposait ici en France, sous le boisseau, quelque chose de plus précieux que les technologies modernes et autres avancées de la civilisation. J’ai élaboré une méthodologie pour l’étude des reliques, qui m’a permis de me convaincre que le tas de brindilles de Notre- Dame n’était pas une contrefaçon mais bien la véritable Couronne d’épines du Sauveur.

Koultoura : Et comment la Couronne d’épines s’est-elle retrouvée à Paris ?
N.N. : En 1239, les croisés ont apporté la Couronne d’épines de Constantinople à Paris. Nous avons coutume de considérer les croisés comme des pillards brutaux. Mais peut-être ont-ils été le bras du métier Divin ? Car beaucoup de ce qu’ils n’ont pas ramené de l’actuelle Turquie n’est déjà plus disponible pour le culte. Et la Couronne d’épines à Paris est ainsi devenue source de grâce pour toute la France et pour beaucoup d’autres pays.

Koultoura : C’est de la bouche de pèlerins russes que j’ai pour la première fois entendu dire que la Sainte-Tunique du Christ se trouvait à Argenteuil.
N.N. : Oui, au VIIIème siècle, Charlemagne a offert cette tunique à sa fille – supérieure du monastère d’Argenteuil. Nous savons que le Shah perse a offert une particule de cette relique du Seigneur au père de Mikhaïl Romanov – le patriarche Philarète.

Koultoura : Le Voile de l’Intercession de la Mère de Dieu, dans la cathédrale de Chartres est un objet d’adoration particulière pour les orthodoxes.
N.N. : Le Voile est le symbole de la protection et de l’intercession de la Sainte mère. L’intercession, tout comme la Couronne d’épines, a été ramenée de Constantinople (quoique beaucoup plus tôt – à la fin du IXème siècle) et a joué un rôle libérateur dans l’histoire de Chartres. En 911, les Vikings ont assiégé la ville. L’évêque est apparu avec ce voile sur le mur de la ville et les Vikings ont soudain été aveuglés, à la suite de quoi ils ont reculé. Dès l’année suivante, leur chef Rollon a été baptisé et le bandit qu’il était est devenu le premier prince de Normandie.

Koultoura : Très peu de Français savent qu’aujourd’hui, les reliques de Marie de Magdala Égale-aux-Apôtres sont conservées dans l’église de la Madeleine.
N.N. : C’est vrai. Dès le XIXème siècle, quand l’église parisienne de la Madeleine a été bâtie, on y a transféré les reliques de sainte Marie de Magdala pour l’exaltation des chrétiens de la capitale. Avant, elles étaient conservées dans le sud de la France, dans le petit village de Saint-Maximin où, selon la légende, Marie de Magdala a passé 30 ans de sa vie.

Koultoura : Y a-t-il encore en France des reliques que nous ne connaissons pas ?
N.N. : Je m’occupe de saintes reliques qui ont joué un grand rôle dans l’histoire de la chrétienté. Il y a, dans la petite ville de Cahors, un voile – c’est celui dans lequel a été enveloppée la tête du Sauveur lors de son enterrement. À 50 kilomètres d’Amiens, dans une petite ville, est conservée la tête de Anne –
la mère de la Mère de Dieu. Près de Grenoble, on trouve des reliques d’Antoine le Grand. Vous souvenez-vous de l’exaltation avec laquelle les Russes sont allés rendre hommage à la ceinture de la mère de Dieu, apportée du mont Athos ? En France, dans la vallée de la Loire, est conservée une autre ceinture qui lui a appartenu.


Père Nikolaï Nikichine ( diocèse de Chersonèse PM): Les objets saints et l’orthodoxie en France
Koultoura : Si je comprends bien, les catholiques n’honorent pas vraiment ces reliques ?
N.N. : Hélas. Les gens ne s’y intéressent pratiquement pas. Ils y sont insensibles. On peut même parler d’indifférence religieuse des Français. Et cela se manifeste, en particulier, dans le fait que leurs cathédrales sont vides. Aujourd’hui, quand le culte de la Couronne d’épines se déroule à Notre-Dame, on me téléphone à chaque fois de Russie pour me demander de l’aide afin de pouvoir y participer. Les Russes ne peuvent tout simplement pas croire que ce culte commence à 15h et se termine une demi-heure plus tard et qu’aucune invitation spéciale n’est requise. Ce laps de temps suffit. Sur les 200 personnes qui y viennent, la moitié sont des orthodoxes.

Koultoura : Quel rapport les catholiques entretiennent avec nos pèlerins ?
N.N. : Il est très bon. L’ordre des Chevaliers du Saint-Sépulcre organise le culte de la Couronne d’épines et vend des cartes postales à Notre- Dame. Ces dernières années, leurs « bénéfices », grâce aux orthodoxes, a été multiplié par 5. En outre, si parmi les catholiques, lors de cette journée, une seule personne chante, j’apporte moi, de Russie, tout un chœur. Pour eux, c’est comme un cadeau. Ils nous sont reconnaissants et se réjouissent. Et aujourd’hui, précisément grâce à la ferveur des pèlerins russes, nous assistons à une renaissance du culte de la Couronne d’épines.

Koultoura : Certains Français de ma connaissance se sont convertis à l’orthodoxie. Est-ce une tendance ?
N.N. : Souvenons-nous, si vous le voulez bien, du XIXème siècle, de cette période où certains représentants de l’élite russe sont passés à la foi catholique. Aujourd’hui, c’est l’inverse. L’élite française devient de plus en plus souvent orthodoxe. Il y a aujourd’hui, parmi les prêtres orthodoxes, des représentants des plus éminentes familles françaises. Ça a représenté pour eux un pas difficile – il leur a fallu surmonter l’appréhension de leurs familles, traverser des conflits. Je dois dire qu’aujourd’hui en France, les prêtres les plus instruits et les plus actifs ne sont pas des Russes mais des représentants de l’intelligentsia française convertis à l’orthodoxie. Ici, on devient orthodoxe dans le milieu de l’émigration. Mais l’émigration, c’est un reflet et non la lumière de l’orthodoxie. La lumière – c’est en Russie.

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Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 10 Juin 2013 à 10:55 | 2 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par nina le 10/06/2013 22:02
http://saintleuparis.catholique.fr/spip.php?article59
MOLEBEN Ste Hélène et St Constantin ;

2.Posté par Vidéo: P. Nicolas Nikichine, "Lieux saints de France: regard orthodoxe" le 09/12/2013 15:55
Enregistrement de la conférence donnée par le P. Nicolas Nikichine, membre du clergé de l'Église orthodoxe russe en France (diocèse de Chersonèse), le 7 décembre 2013 au Séminaire.

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