Vladimir GOLOVANOV partie 1
Le Conseil œcuménique des Églises (COE)

Le COE est fondé en 1948 avec, comme Églises fondatrices Orthodoxes, le patriarcat de Constantinople, l’Église de Grèce et les antiques patriarcats d’Alexandrie et d’Antioche. Ce premier groupe est rejoint en 1961 (Assemblée de New-Delhi) par l’ensemble des Églises orthodoxes d’Europe de l’Est y compris l’Église russe (probablement comme résultat de la politique "d'ouverture" de Khrouchtchev: les apparitions des Eglises orthodoxes sur la scène internationale lui permettent de masquer le durcissement antireligieux interne). Comme mentionné plus haut. L'Eglise catholique n'y participe pas avant 1965 (voir plus loin). Le COE siège à Genève, compte officiellement 349 Eglises dans plus d'une centaine de pays, représentant presque toutes les traditions chrétiennes.

1957 Déclaration d'Oberlin : Les représentants des Eglises orthodoxes confirment bien entendu leurs positions exprimées précédemment et ces positions sont particulièrement bien exprimées dans la "Déclaration des représentants de l'Église Orthodoxe à la conférence d'étude nord-américaine Foi et Constitution" qui s'est tenue à Oberlin (Ohio, USA) les 3-10 septembre 1957. Elle a été rédigée et signée par tous les participants orthodoxes, qui s'exprimaient ainsi au nom de l'Orthodoxie; il s'agit de Mgr Athenagoras Kokkinakis de Thyateira et des pères Georges Florovsky, Eusebius A. Stephanou, George Tsoumas (Le père George Tsoumas (1912-1977?, il fut le recteur de plusieurs paroisses aux Etats Unis et professeur à l'institut de théologie Holy Cross de 1938 à 1977), John A. Poulos, John Hondras, George P. Gallos.

Le document reprend les déclarations déjà formulées par les Orthodoxes dans les débats qui s'étaient déroulés précédemment, et en particuliers les affirmations des textes rappelés en partie 1 sur les raisons et les objectifs de la participation orthodoxe au mouvement œcuménique. Mais il met plus clairement l'accent, dans sa conclusion, sur les différences d'approche antre les Orthodoxes et la majorité protestante des participants:

Citation:

" Nous sommes pleinement conscients des profondes divergences qui séparent les confessions chrétiennes les unes des autres, dans tous les domaines de la vie et de l'existence chrétienne, dans la compréhension de la foi, dans la manière de vie, dans les habitudes cultuelles. En conséquence, nous cherchons une unanimité de Foi, une identité d'ordres ministériels, une fraternité dans la prière. Mais pour nous, ces trois points sont organiquement liés les uns aux autres. La communion dans le culte liturgique n'est possible que dans l'unité de la Foi. La Communion présuppose l'unité. Dès lors, le terme "intercommunion" nous semble être l'épitomé de cette conception que nous sommes forcés de rejeter. Une "intercommunion" présuppose l'existence de plusieurs confessions séparées et divisées, qui se regroupent occasionnellement pour mener certains actes ou actions en commun. Dans la véritable unité de l'Église du Christ, il n'y a pas de place pour plusieurs "confessions." Il n'y a dès lors pas de place pour une "intercommunion." Quand tous seront unis en vérité dans la Foi et l'ordre apostolique, il y aura une Communion et une fraternité totale en toutes choses.

Déjà en 1937, à Edimbourg, les délégués Orthodoxes avaient déclaré que nombre de problèmes étaient exposés dans le cadre des Conférences "Foi et Constitution" d'une manière et d'une position qui étaient extrêmement peu sympathiques pour les Orthodoxes. Nous sommes obligés de répéter cela ici aussi. Mais à nouveau, comme il y a quelques années à Edimbourg, nous voulons témoigner de notre préparation et de notre volonté à participer à cette étude, afin que la vérité de l'Évangile et la plénitude de la tradition apostolique puissent être portés à la connaissance de tous ceux qui, vraiment, de manière désintéressée et pieusement cherchent l'unité dans notre Seigneur béni et son Église Une, Sainte, Catholique et Apostolique." Fin de citation

Ce texte est bien connu parmi les orthodoxes d'Occident, qui le prennent souvent comme référence de leur participation au mouvement œcuménique. Il l'est par contre moins dans les Eglises slaves qui, comme indiqué plus haut, ne participaient pas encore au mouvement en 1954.

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1964 les Catholiques participent: comme indiqué en introduction, l'Eglise catholique a totalement changé de position durant le concile Vatican II et participe officiellement au mouvement œcuménique avec le décret Unitatis Redintegratio (Restaurer l'unité, 24 novembre 1964). Si elle ne fait pas partie du COE stricto sensu, contrairement aux Eglises orthodoxes, elle est membre à part entière de la "Commission de Foi et constitution", qui en fait partie intégrante, et participe à ses programmes d'étude qui sont à l'origine d'un remarquable travail en profondeur sur les convergences et divergences doctrinales entre les Eglises divisées.

1982 "Baptême, Eucharistie, Ministère" (document de Foi et constitution n° 111, "texte de Lima"): c'est l'un des résultats les plus connu. Il a été adopté par la Commission plénière de "Foi et constitution" lors de sa réunion de Lima (Pérou) en 1982, traduit en soixante langues, diffusé à 15 millions d'exemplaires, il vise à faire le point sur les convergences et les différences qui subsistent dans des domaines fondamentaux de la foi et de la vie des Eglises. "Ce texte témoigne d'une prise de conscience nouvelle de données importantes de la tradition apostolique; la participation orthodoxe n'y est probablement pas étrangère. Certains développements qui figurent dans ce texte sont d'un grand intérêt, et s'il venait à faire l'objet d'une réception assez générale parmi les confessions auxquelles il s'adresse, cela marquerait un immense progrès. Pourtant, il faut reconnaître que l'Eglise orthodoxe ne peut reconnaître dans un tel document qu'une expression partielle et limitée de la Tradition de l'Eglise telle qu'elle la vit elle-même, et il lui serait impossible d'accepter sans s'écarter de cette Tradition certaines recommandations qui accompagnent le texte." (Archimandrite Placide Deseille, Publication du Monastère St Antoine-le-Grand, métochion de Simonos-Petra)

1986 . La 3ème Conférence panorthodoxe préconciliaire (Chambésy, novembre 1986) "sur la participation au Mouvement œcuménique et dialogues théologiques bilatéraux, officiellement engagés avec les autres Églises chrétiennes", définit avec beaucoup de clarté la position orthodoxe. En voici les points essentiels concernant le mouvement œcuménique. Ses textes ont été signés unanimement par tous les chefs des délégations représentant toutes les Eglises orthodoxes.

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Citation (les No sont ceux du texte original)

1. L’Église orthodoxe, dans sa conviction intime et dans sa conscience ecclésiale d’être la détentrice et le témoin de la foi et de la tradition de l’Église une, sainte, catholique et apostolique, croit fermement qu’elle occupe une place centrale dans le monde d’aujourd’hui pour ce qui touche au progrès de l’unité des chrétiens.

2.La responsabilité de l’Église orthodoxe ainsi que sa mission œcuménique quant à l’unité de l’Église ont été exprimées par les Conciles œcuméniques. Ceux-ci ont souligné tout particulièrement le lien indissoluble qui existe entre la vraie foi et la communion eucharistique. L’Église orthodoxe a toujours cherché à entraîner à sa suite les différentes Églises et Confessions chrétiennes vers la recherche en commun de l’unité perdue des chrétiens, afin que tous aboutissent à l’unité de la foi.

3. L’Église orthodoxe, qui prie sans cesse pour l’union de tous, a pris part au Mouvement œcuménique dès sa naissance et a contribué à sa formation et à son développement ultérieur. D’ailleurs, de par l’esprit œcuménique qui la distingue, l’Église orthodoxe a toujours combattu, au cours de l’histoire, pour le rétablissement de l’unité chrétienne. Ainsi donc, la participation orthodoxe au Mouvement œcuménique ne va aucunement à l’encontre de la nature et de l’histoire de l’Église orthodoxe. Elle constitue l’expression conséquente de la foi apostolique dans des conditions historiques nouvelles et face à de nouvelles exigences existentielles.

5. Un des principaux organes du Mouvement œcuménique contemporain est le Conseil œcuménique des Églises (COE). Malgré le fait qu’il ne regroupe pas en son sein toutes les Églises et Confessions chrétiennes, et que d’autres organismes œcuméniques remplissent aussi une mission fondamentale dans le progrès du Mouvement œcuménique pris de manière plus large, le COE représente à l’heure actuelle un organe œcuménique structuré. Certaines Églises orthodoxes ont été membres fondateurs de ce Conseil ; et par la suite, toutes les Églises orthodoxes locales en sont devenues membres. Comme on l’a déjà signalé à l’échelon panorthodoxe (IVe Conférence panorthodoxe, 1968), l’Église orthodoxe constitue un membre à part entière et à part égale du Conseil œcuménique des Églises, et met en œuvre tous les moyens dont elle dispose pour contribuer au progrès et à la bonne marche de l’ensemble des travaux du COE.

6. Cependant l’Église orthodoxe, fidèle à son ecclésiologie, à l’identité de sa structure interne et à l’enseignement de l’Église indivise, tout en participant au COE, refuse absolument l’idée de l’égalité des confessions et ne peut concevoir l’unité de l’Église comme un rajustement interconfessionnel. Dans cet esprit, l’unité recherchée dans le COE ne peut être simplement le produit d’accords théologiques. Dieu appelle tout chrétien à l’unité de la foi, telle qu’elle est vécue dans le mystère et la tradition au sein de l’Église orthodoxe.

7. Les Églises orthodoxes membres du COE reconnaissent l’article-base de sa Constitution, son but et ses aspirations. Elles sont intimement convaincues que les présupposés ecclésiologiques contenus dans la Déclaration de Toronto (1950), intitulée "L’Église, les Églises et le Conseil œcuménique des Églises", sont d’une importance capitale pour la participation orthodoxe audit Conseil. Il va de soi, dès lors, que le COE n’a rien d’une super-Église et ne doit en aucun cas le devenir. Le but poursuivi par le Conseil œcuménique des Églises n’est pas de négocier l’union des Églises, ce qui ne peut être le fait que des Églises elles-mêmes, sur leur propre initiative ; il s’agit plutôt de créer un contact vivant entre les Églises et de stimuler l’étude et la discussion des problèmes touchant à l’unité chrétienne (Déclaration de Toronto, § 2).

8. Les études théologiques et les autres activités inscrites aux programmes du COE sont des moyens de rapprochement des Églises. Mention soit faite, en particulier, de la Commission « Foi et Constitution », qui poursuit l’œuvre du « Mouvement universel pour la Foi et la Constitution ». …

9. Le COE, cependant, en tant qu’instrument au service des Églises-membres, ne s’occupe pas seulement du dialogue multilatéral mené dans le cadre de la Commission « Foi et Constitution ». Le large éventail de ses activités, que ce soit dans les domaines de l’évangélisation, de la diaconie, de la santé, de la formation théologique, du dialogue interreligieux, de la lutte contre le racisme, du progrès des idéaux de paix et de justice, recouvre des besoins propres aux Églises et au monde actuel, et donne l’occasion d’un témoignage et d’une action communs. L’Église orthodoxe apprécie cette activité pluridimensionnelle du COE et collabore activement, du mieux qu’elle le peut, dans les domaines dont il a été question." Fin de citation





Rédigé par Vladimir GOLOVANOW le 4 Juillet 2012 à 16:06 | 2 commentaires | Permalien



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