Chers amis,

Nous vous informons que le nouvel éditorial de Mars 2014, signé du président, vient d’être publié et proposé à la une du site de l’OLTR.

Le texte intitulé "La Tête du Corps ecclésial – Vérité orthodoxe" est disponible à la une du site
Le texte complet est ICI

La visite à Paris du Patriarche de Constantinople

Récemment, Sa Sainteté le Patriarche Bartholomée a rendu visite à son nouvel exarque en la cathédrale Saint Alexandre Nevsky, à Paris. A cet égard, il est intéressant de se référer aux paroles prononcées lors du Te Deum afin d’essayer de comprendre quelle est la place canonique de l’Archevêché, aux yeux de l’Eglise de Constantinople.

A plusieurs reprises, il a été affirmé que l’Eglise de Constantinople était l’ « Eglise-mère » de l’Archevêché. Que cela veut-il dire exactement?

En général, cette expression est employée pour désigner l’Eglise qui, ayant envoyé des missionnaires dans une contrée voisine, y a porté l’évangile et, au bout d’une longue période, a considéré que la nouvelle Eglise, née de ses soins, était suffisamment développée, qu’elle n’avait plus besoin de tuteur et pouvait vivre par elle-même (être autocéphale).

Comme l’Archevêché n’est pas une Eglise (autocéphale), mais un diocèse de l’Eglise russe qui a dû se résoudre à demander, après la révolution, la protection du Patriarcat de Constantinople à cause des persécutions de l’époque, cette acception commune ne peut pas s’appliquer à lui.

Toutefois, Constantinople étant incontestablement l’Eglise-mère de l’Eglise russe, on peut considérer qu’elle est aussi Eglise-mère de l’Archevêché, celui-ci étant historiquement un diocèse particulier de l’Eglise russe . Il serait alors juste d’inviter l’Eglise russe à se préoccuper aussi du sort de ce diocèse en vertu des bonnes relations qui doivent exister entre les Eglises autocéphales.

Ou alors, cela indique-t-il que, dans la lignée de ses errements précédents, on doit considérer que l’Archevêché est une entité indépendante, seulement protégée par le patriarcat de Constantinople ?

En tout état de cause, il serait souhaitable de préciser le sens de cette expression et la place canonique de l’exarchat à l’intérieur (ou à l’extérieur) de l’Eglise de Constantinople.

Il est également souhaitable d’éviter des expressions hautement ambigües dans la description des caractéristiques de l’Archevêché. Citons par exemple ce qui a été prononcé lors du discours de bienvenue au Patriarche : « le…privilège que représente le fait d’être en lien avec le premier siège de l’Église orthodoxe, avec la tête du corps ecclésial, ». Quelle est au juste la signification de cette phrase ? « La tête du corps ecclésial » serait-elle le patriarche de Constantinople ? Bien sûr que non ! tous les orthodoxes savent que la tête du corps ecclésial est le Christ lui- même, selon l’enseignement de Saint Paul : « Il est la tête du corps de l'Église » (Col., 1, 18) et par référence à la tradition des Pères qui enseignent que l’Eglise est le corps du Christ. La phrase citée est, au mieux, une expression maladroite, mais au pire c’est le début d’une déviation grave, celle-là même qui a entrainé le schisme de 1054. Si chez les catholiques, l’appartenance à l’Eglise se définit par la fidélité à la foi du Pape de Rome, chez les orthodoxes, elle se définit par la confession de la Vérité, de la vraie foi, dont personne ne peut s’attribuer, seul, la définition. Et aucun primat d’Eglise n’est à l’abri du risque d’hérésie, fût-il le premier.

On a entendu, récemment, d’autres phrases également contestables dans la bouche de certains hiérarques de l’Eglise de Constantinople. Le Métropolite de Prousse a, par exemple, déclaré que le premier parmi les primats des Églises orthodoxes autocéphales dispose de pouvoirs exceptionnels, le faisant « premier sans égaux » (« primus sine paribus ) alors que la formule traditionnelle est justement « primus inter pares » (premier parmi des égaux).

Il est, sans doute, utile de rappeler que le deuxième rang, par l’honneur (après celui de Rome), fut accordé au siège de Constantinople en raison expresse de la présence de l’empereur dans cette ville (concile de Chalcédoine, canon 28).

Le père Alexandre Schmemann a déjà expliqué que l’orthodoxie a tendance à nier l’histoire (1). Il faut aussi éviter de la tordre pour créer des prétendues traditions de toutes pièces.

Nous devons donc prier pour que la foi orthodoxe se maintienne sans altérations dans toutes les Eglises autocéphales et que le Seigneur nous préserve de nouveaux schismes.

Séraphin Rehbinder

mars 2014 - Jour de la Fête de l'Orthodoxie

(1) « Tout changement de situation, c’est-à-dire l’histoire elle-même, entraîne chez les orthodoxes une réflexion extrêmement négative, qui aboutit, en fin de compte, à un refus du changement, à sa réduction au mal, à la tentation, à un assaut du démon. » Cette phrase est tirée de la réflexion du père Alexandre sur ce sujet crucial qui figure dans son journal à la date du Samedi 19 janvier 1974 et dont je conseille la lecture intégrale.

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Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 9 Mars 2014 à 10:44 | 7 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par Marie Genko le 09/03/2014 19:55
Cet editorial pose les bonnes questions.
Celles que tout Orthodoxe peut et doit se poser.


2.Posté par NOUVEAUX BESOINS DES PAROISSES EN OCCIDENT (posté par Vladimir.G) le 10/03/2014 19:51
Le 9 juin 2001,à l'Assemblée de son diocèse, le métropolite Antoine de Souroge lance des questions dont la problématique nous rejoint dans le temps et dans l'espace. Mgr Antoine dirige alors le diocèse depuis plus de quarante ans en restant fidèle à son Eglise-mère, l'Eglise russe, malgré toutes les pressions qu'il subit, et il n'en élude pas les difficultés (nous savons qu'à la même époque Mgr Serge d'Eucarpie entre en discussion avec Moscou. Mais cela reste alors confidentiel.) Fidèle à "la mission historique de l'Eglise russe", comme avait écrit le père Jean Mayendorff (1), Mgr Antoine s'efforce de favoriser l'émergence d'une Église locale en coopérant avec les autres juridictions Orthodoxes sur place: il y a l'archidiocèse grec du patriarcat œcuménique, avec lequel il réussira à convenir du partage d'un lieu de culte à Oxford (2) et les diocèses serbe et roumain; Mgr Antoine participe notamment l'organisation de la célébration commune du Dimanche de l'orthodoxie.

Je vous propose un large extrait de cette conférence (traduction et sous titres du SOP)
Notes de l'introduction de VG
(1) In "A Life Worth Living," [Eulogy for Fr Alexander Schmemann], St Vladimir's Theological Quarterly 28 (1984), 3-10.
(2) Cf. http://fr.groups.yahoo.com/group/orthodoxierusseoccident/message/6791

MGR ANTOINE DE SOUROGE:

Je voudrais expliquer pourquoi, il y a de nombreuses années, nous avons créé cette assemblée [diocésaine], quelles étaient nos intentions en la créant, dire ce qui, je pense, n'a pas été totalement réalisé ; et aussi jeter un regard vers l'extérieur, vers le monde dans lequel nous vivons.

En ce qui concerne la création de notre assemblée, très peu de personnes ici présentes en étaient membres à ses débuts. Elle a été créée quand nous redoutions - et cela à juste titre -l'intrusion des autorités politiques soviétiques, parce que nous appartenions à l'Église orthodoxe russe et que l'Église russe était très fortement sous leur contrôle. L'assemblée diocésaine a été établie afin de réunir, les fidèles qui étaient conscients de notre vocation en tant qu'Église à être libres, à proclamer l'Évangile, et à créer une communauté qui ne soit en aucune façon asservie à quelque forme que ce soit de pouvoir politique.
"Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour rester libres"

C'était là notre objectif initial. Depuis, les circonstances ont changé, car la situation en Russie s'est modifiée, notamment en ce qui concerne la liberté et l'indépendance de notre Église et la marge de manœuvre de notre diocèse, mais néanmoins la situation ne s'est pas modifiée tout aussi complètement que nous pourrions l'imaginer. Aujourd'hui, nous sommes confrontés au problème que peut faire naître une certaine amitié entre l'Église et l'État : il y a un risque que, comme dans le passé, l'Église redevienne, d'une façon ou d'une autre, un instrument de l'État, car l'amitié mène à la coopération et, de là, à la dépendance.

Nous devons garder .ce fait présent à notre esprit, et faire tout ce que nous pouvons pour rester moralement et administrativement libres. Pour le moment, nous n'avons pas de problème d'ordre administratif avec le patriarcat de Moscou. Nous sommes libres de gérer notre diocèse à notre manière. Mais, moralement, nous devons avoir conscience du fait que l'Église en Russie a des problèmes, qu'elle est confrontée à des tentations et à des risques. Notre tache est donc de rester indépendants, non pas en nous affirmant contre notre Église-mère, mais en nous définissant comme un corps libre moralement et administrativement, au point d'être un modèle de vie ecclésiale. En disant cela, je pourrais être accusé d'arrogance. Comment pouvons-nous être un modèle ? Et cependant, force est de constater que nous sommes dans une situation privilégiée.

Nous sommes un groupe d'hommes et de femmes qui ont librement choisi d'être orthodoxes, de rester fidèles à l'Évangile tel qu'il est proclamé depuis les premiers siècles par l'Église orthodoxe, un groupe qui n'a jamais eu la moindre relation de dépendance vis-à-vis des autorités civiles. Cela est très important et très précieux. C'est une situation que nous devons préserver avec toute notre énergie et toute notre conviction. Cela ne signifie pas que nous devrions être rebelles, hostiles ou déloyaux envers l'Église-mère. Cela signifie que nous devons être ce que l'Église est appelée à être : un corps composé d'hommes et de femmes qui ont choisi d'être les messagers de l'Évangile et les messagers du Christ dans le monde dans lequel ils vivent. Nous ne pouvons être libres et proclamer la vérité qu'en vivant une vie digne de cette vérité. Cela est essentiel, car prêcher l'Évangile, c'est avant tout vivre l'Évangile de telle manière que les gens, en regardant l'orthodoxie, ou même un petit groupe de fidèles comme nous, puissent dire : "Ah, c'est ça le message" ; de telle manière que, comme l'écrivait un auteur chrétien des 2e-3e siècles, "les gens qui nous regardent disent : comme ils s'aiment les uns les autres ! " (Épître à Diognète).

"NOUS AVONS VRAIMENT QUELQUE CHOSE A PARTAGER"

Nous sommes appelés non seulement à nous aimer les uns les autres, mais à aimer toute la création de Dieu et à la servir à quelque prix que ce soit. De nos jours, le prix n'est pas notre sang, ce ne sont pas nos vies, au sens d'avoir à subir la violence et la mort ; mais c'est la façon dont nous vivons, la façon dont les autres nous regardent et voient l'orthodoxie comme quelque chose d'unique, parce qu'elle manifeste la substance de l'Évangile de manière unique.
Il y a beaucoup plus à faire que tout ce que nous avons fait jusqu'à ce jour. Notre assemblée a souvent agi comme un organe administratif. Elle a souvent été un lieu où nous échangions nos points de vue et nos convictions. Mais l'administration ne doit pas tuer l'essentiel de la vie, l'intensité de la vie.

Durant toutes ces années, l'assemblée a pensé et agi de façon réfléchie, avec intelligence et créativité. Cependant, il est une chose que l'assemblée n'a pas réussi à réaliser. L'assemblée est constituée de délégués qui représentent leurs paroisses. Mais est-ce que les membres de l'assemblée, lorsqu'ils rentrent dans leurs paroisses, transmettent aux autres paroissiens l'idéal qui nous a réunis ?

Ce n'est pas suffisant pour nous que de savoir vivre en Église et d'exister comme un corps refermé sur lui-même. Les paroisses doivent être conscientes de ce que l'assemblée cherche à faire. Après chaque rencontre, les paroisses doivent faire leur non seulement la vision qui a guidé notre discussion, mais aussi l'esprit de notre rencontre : ce que nous projetons de faire, ce que nous appelons les paroisses à faire. Notre diocèse, qui forme un tout, doit, plus que cela n'est le cas aujourd'hui, devenir un corps vivant, composé d'hommes et de femmes qui, avec passion, calme et détermination, vivent les commandements de l'Évangile et partagent leur relation au Seigneur Jésus-Christ.

Nous devons transmettre, à nos paroisses et à chacun autour de nous l'idéal d'un diocèse, l'idéal de ce qu'est vraiment l'Eglise locale, car le diocèse est l'Église en un lieu donné, en une situation donnée. Je suis conduit à me demander si nous avons bien fait cela, si, en rentrant, nous partageons cette expérience avec notre paroisse, si nous sommes suffisamment conscients de ce que nous avons reçu ici pour découvrir que nous avons vraiment quelque chose à partager, et pas seulement les conclusions de débats portant sur tel ou tel point. C'est là une question très importante.
"NOUS SOMMES EN TRAIN DE DEVENIR L'ÉGLISE LOCALE"

Les paroisses et le diocèse ont beaucoup changé depuis sa création et la première assemblée diocésaine. Nous avons eu un afflux de Russes, nous avons vu un certain nombre d'Anglais se convertir à l'orthodoxie, nous ayons maintenant dans notre diocèse des gens qui n'appartiennent ni à la culture britannique, ni à la culture russe, qui sont des Grecs, des Serbes, des Bulgares, ou d'autres encore. Nous sommes en train de devenir la vraie Église locale : l'Église locale qui englobe, et réunit ensemble des personnes de toutes nationalités, origines, cultures, tout comme le faisait l'Église primitive.

L'Église primitive était un corps de personnes qui étaient si étrangères les unes aux autres qu'elles ne pouvaient même pas communiquer entre elles sinon par l'Église. Il y avait des maîtres et des esclaves ; il y avait des citoyens romains et des membres des peuples soumis à l'Empire ; il y avait des gens parlant des langues diverses, appartenant à des cultures différentes. Les uns étaient très haut placés sur l'échelle sociale, les autres, très bas. Mais ils pouvaient tous être unis, car ils avaient une chose en commun : le Seigneur Jésus-Christ, qui était leur Seigneur, leur guide, leur maître. Il était pour eux la vérité, il était le chemin, il était la porte qui ouvrait sur l'éternité.

Parce que nous ne sommes plus dans un monde chrétien, l'Église devient de plus en plus ce qu'elle était aux premiers siècles. Dans nos sociétés il peut encore y avoir des vestiges de traditions et d'une culture chrétiennes, mais le monde en tant que tel n'est plus un monde chrétien. Il s'est décomposé moralement, philosophiquement, théologiquement, et de tant d'autres façons. Mais nous devons proclamer que la seule chose que nous puissions faire, c'est d'unir des hommes et des femmes en un seul corps - le corps du Christ, non pas un corps de personnes qui s'entendent simplement entre elles sur ce qui est le mieux pour elles-mêmes, mais un corps qui est la présence incarnée du Christ. Le père Serge Boulgakov disait que chacun d'entre nous était une incarnation, une présence incarnée du Seigneur Jésus, et qu'ensemble nous étions le corps du Christ, un corps d'hommes et de femmes qui sont la présence véritable du Christ, parce que nous avons tous été baptisés en Christ, nous sommes tous devenus les membres de son corps. Les gens devraient pouvoir reconnaître cela quand ils nous rencontrent.

Source: revue du diocèse, "Sourozh (n° 86, novembre 2001). SOP265 février 2002
http://masarchive.org/Sites/texts/2001-06-09-1-F-E-T-EM02-007.html



Docteur en médecine, le métropolite antoine (Bloom), âgé aujourd'hui de 87 ans, a été interne des hôpitaux de Paris, avant de devenir moine et prêtre, puis évêque. Connu et estimé pour son travail pastoral, il est aussi un prédicateur apprécié, prenant souvent la parole à la BBC où il participe à - -des émissions religieuses destinées à la Russie. Il est docteur honoris causa des Académies de théologie de Moscou et de Kiev, de la faculté de théologie presbytérienne d'Aberdeen et de l'université de Cambridge.

Je voudrais expliquer pourquoi, il y a de nombreuses années, nous avons créé cette assemblée [diocésaine], quelles étaient nos intentions en la créant, dire ce qui, je pense, n'a pas été totalement réalisé ; et aussi jeter un regard vers l'extérieur, vers le monde dans lequel nous vivons.

En ce qui concerne la création de notre assemblée, très peu de personnes ici présentes en étaient membres à ses débuts. Elle a été créée quand nous redoutions - et cela à juste titre -l'intrusion des autorités politiques soviétiques, parce que nous appartenions à l'Église orthodoxe russe et que l'Église russe était très fortement sous leur contrôle. L'assemblée diocésaine a été établie afin de réunir, les fidèles qui étaient conscients de notre vocation en tant qu'Église à être libres, à proclamer l'Évangile, et à créer une communauté qui ne soit en aucune façon asservie à quelque forme que ce soit de pouvoir politique.
"Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour rester libres"

C'était là notre objectif initial. Depuis, les circonstances ont changé, car la situation en Russie s'est modifiée, notamment en ce qui concerne la liberté et l'indépendance de notre Église et la marge de manœuvre de notre diocèse, mais néanmoins la situation ne s'est pas modifiée tout aussi complètement que nous pourrions l'imaginer. Aujourd'hui, nous sommes confrontés au problème que peut faire naître une certaine amitié entre l'Église et l'État : il y a un risque que, comme dans le passé, l'Église redevienne, d'une façon ou d'une autre, un instrument de l'État, car l'amitié mène à la coopération et, de là, à la dépendance.

Nous devons garder .ce fait présent à notre esprit, et faire tout ce que nous pouvons pour rester moralement et administrativement libres. Pour le moment, nous n'avons pas de problème d'ordre administratif avec le patriarcat de Moscou. Nous sommes libres de gérer notre diocèse à notre manière. Mais, moralement, nous devons avoir conscience du fait que l'Église en Russie a des problèmes, qu'elle est confrontée à des tentations et à des risques. Notre tache est donc de rester indépendants, non pas en nous affirmant contre notre Église-mère, mais en nous définissant comme un corps libre moralement et administrativement, au point d'être un modèle de vie ecclésiale. En disant cela, je pourrais être accusé d'arrogance. Comment pouvons-nous être un modèle ? Et cependant, force est de constater que nous sommes dans une situation privilégiée.

Nous sommes un groupe d'hommes et de femmes qui ont librement choisi d'être orthodoxes, de rester fidèles à l'Évangile tel qu'il est proclamé depuis les premiers siècles par l'Église orthodoxe, un groupe qui n'a jamais eu la moindre relation de dépendance vis-à-vis des autorités civiles. Cela est très important et très précieux. C'est une situation que nous devons préserver avec toute notre énergie et toute notre conviction. Cela ne signifie pas que nous devrions être rebelles, hostiles ou déloyaux envers l'Église-mère. Cela signifie que nous devons être ce que l'Église est appelée à être : un corps composé d'hommes et de femmes qui ont choisi d'être les messagers de l'Évangile et les messagers du Christ dans le monde dans lequel ils vivent. Nous ne pouvons être libres et proclamer la vérité qu'en vivant une vie digne de cette vérité. Cela est essentiel, car prêcher l'Évangile, c'est avant tout vivre l'Évangile de telle manière que les gens, en regardant l'orthodoxie, ou même un petit groupe de fidèles comme nous, puissent dire : "Ah, c'est ça le message" ; de telle manière que, comme l'écrivait un auteur chrétien des 2e-3e siècles, "les gens qui nous regardent disent : comme ils s'aiment les uns les autres ! " (Épître à Diognète).

"Nous avons vraiment quelque chose à partager"

Nous sommes appelés non seulement à nous aimer les uns les autres, mais à aimer toute la création de Dieu et à la servir à quelque prix que ce soit. De nos jours, le prix n'est pas notre sang, ce ne sont pas nos vies, au sens d'avoir à subir la violence et la mort ; mais c'est la façon dont nous vivons, la façon dont les autres nous regardent et voient l'orthodoxie comme quelque chose d'unique, parce qu'elle manifeste la substance de l'Évangile de manière unique.
Il y a beaucoup plus à faire que tout ce que nous avons fait jusqu'à ce jour. Notre assemblée a souvent agi comme un organe administratif. Elle a souvent été un lieu où nous échangions nos points de vue et nos convictions. Mais l'administration ne doit pas tuer l'essentiel de la vie, l'intensité de la vie.

Durant toutes ces années, l'assemblée a pensé et agi de façon réfléchie, avec intelligence et créativité. Cependant, il est une chose que l'assemblée n'a pas réussi à réaliser. L'assemblée est constituée de délégués qui représentent leurs paroisses. Mais est-ce que les membres de l'assemblée, lorsqu'ils rentrent dans leurs paroisses, transmettent aux autres paroissiens l'idéal qui nous a réunis ?

Ce n'est pas suffisant pour nous que de savoir vivre en Église et d'exister comme un corps refermé sur lui-même. Les paroisses doivent être conscientes de ce que l'assemblée cherche à faire. Après chaque rencontre, les paroisses doivent faire leur non seulement la vision qui a guidé notre discussion, mais aussi l'esprit de notre rencontre : ce que nous projetons de faire, ce que nous appelons les paroisses à faire. Notre diocèse, qui forme un tout, doit, plus que cela n'est le cas aujourd'hui, devenir un corps vivant, composé d'hommes et de femmes qui, avec passion, calme et détermination, vivent les commandements de l'Évangile et partagent leur relation au Seigneur Jésus-Christ.

Nous devons transmettre, à nos paroisses et à chacun autour de nous l'idéal d'un diocèse, l'idéal de ce qu'est vraiment l'Eglise locale, car le diocèse est l'Église en un lieu donné, en une situation donnée. Je suis conduit à me demander si nous avons bien fait cela, si, en rentrant, nous partageons cette expérience avec notre paroisse, si nous sommes suffisamment conscients de ce que nous avons reçu ici pour découvrir que nous avons vraiment quelque chose à partager, et pas seulement les conclusions de débats portant sur tel ou tel point. C'est là une question très importante.
"Nous sommes en train de devenir l'Église locale"

Les paroisses et le diocèse ont beaucoup changé depuis sa création et la première assemblée diocésaine. Nous avons eu un afflux de Russes, nous avons vu un certain nombre d'Anglais se convertir à l'orthodoxie, nous ayons maintenant dans notre diocèse des gens qui n'appartiennent ni à la culture britannique, ni à la culture russe, qui sont des Grecs, des Serbes, des Bulgares, ou d'autres encore. Nous sommes en train de devenir la vraie Église locale : l'Église locale qui englobe, et réunit ensemble des personnes de toutes nationalités, origines, cultures, tout comme le faisait l'Église primitive.

L'Église primitive était un corps de personnes qui étaient si étrangères les unes aux autres qu'elles ne pouvaient même pas communiquer entre elles sinon par l'Église. Il y avait des maîtres et des esclaves ; il y avait des citoyens romains et des membres des peuples soumis à l'Empire ; il y avait des gens parlant des langues diverses, appartenant à des cultures différentes. Les uns étaient très haut placés sur l'échelle sociale, les autres, très bas. Mais ils pouvaient tous être unis, car ils avaient une chose en commun : le Seigneur Jésus-Christ, qui était leur Seigneur, leur guide, leur maître. Il était pour eux la vérité, il était le chemin, il était la porte qui ouvrait sur l'éternité.

Parce que nous ne sommes plus dans un monde chrétien, l'Église devient de plus en plus ce qu'elle était aux premiers siècles. Dans nos sociétés il peut encore y avoir des vestiges de traditions et d'une culture chrétiennes, mais le monde en tant que tel n'est plus un monde chrétien. Il s'est décomposé moralement, philosophiquement, théologiquement, et de tant d'autres façons. Mais nous devons proclamer que la seule chose que nous puissions faire, c'est d'unir des hommes et des femmes en un seul corps - le corps du Christ, non pas un corps de personnes qui s'entendent simplement entre elles sur ce qui est le mieux pour elles-mêmes, mais un corps qui est la présence incarnée du Christ. Le père Serge Boulgakov disait que chacun d'entre nous était une incarnation, une présence incarnée du Seigneur Jésus, et qu'ensemble nous étions le corps du Christ, un corps d'hommes et de femmes qui sont la présence véritable du Christ, parce que nous avons tous été baptisés en Christ, nous sommes tous devenus les membres de son corps. Les gens devraient pouvoir reconnaître cela quand ils nous rencontrent.

3.Posté par Marie Genko le 11/03/2014 22:06
Cher Vladimir,

Merci de nous communiquer le texte de cette merveilleuse conférence de Mgr Antoine de Souroge.
Toutefois il me semble qu'il n'est pas possible de le mettre en parallèle avec la situation de l’archevêché,

Le communique de Séraphin Rehbinder pose la question de la place canonique de l’archevêché.

Le diocèse de Souroge de Mgr Antoine n’était porteur d'aucune ambiguïté dans ce domaine, puisqu'il n'avait jamais rejeté sa filiation avec son Église mère, l’Église de Russie.

4.Posté par Gueorguy le 11/03/2014 23:55
@2 - Vladimir G.

Pourriez-vous expliquer, pourquoi proposez-vous ce texte, au demeurant, intéressant, comme commentaire à cet éditorial. Il me semble bien que la préoccupation principal de Seraphin est cette "dérive" percue (ou ambiguité) dans quelques textes du patriarcat de Constantinople, sur la notion de "La tête du Corps ecclésial" ou de "Premier sans égal"

5.Posté par Vladimir.G le 12/03/2014 11:06
Merci bien chers Marie et Gueorguy,

L'éditorial de Séraphin lie les thèmes Daru et primauté. Comme le thème de la primauté est largement traité par ailleurs, j'ai pensé intéressant de proposer ce texte pour mettre la situation de Daru en perspective: les questions du lien avec l'Eglise-mère (la vraie), de l'indépendance du diocèse et de la marche vers l'Eglise locale me semblent particulièrement bien traitées par Mgr Antoine...

6.Posté par Gueorguy le 12/03/2014 23:29
Merci Vladimir pour cette explication. Cela dit, je pense que l'idée dans cet éditorial n'est pas concentré sur le cas de Daru mais bien, au delà de la Primauté, de s'interroger sur les propos du Patriarche au sujet de "La Tête du Corps ecclésial".

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