Synode sur la famille : intervention du métropolite orthodoxe russe Hilarion de Volokolamsk
Le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du département des relations extérieures du patriarcat de Moscou (orthodoxe) a participé ce jeudi 16 octobre à Rome au synode des évêques catholiques consacré aux « défis pastoraux de la famille ». Nous vous reproduisons ci-dessous le texte complet de son intervention :

« Votre Sainteté, vos Excellences, je m’adresse à vous au nom de sa Sainteté Cyrille, patriarche de Moscou, ainsi qu’au nom de l’Eglise orthodoxe russe en vous disant : « Que Dieu le Père et le Seigneur Jésus-Christ vous accordent grâce et paix. » (Th. 1, 2).

Cette session du synode des évêques de l’Eglise catholique romaine se tient alors qu’est célébré le cinquantième anniversaire du début des travaux du IIème concile du Vatican. Elle est consacrée à un sujet d’actualité pour tous les chrétiens, celui de la nouvelle évangélisation et de la propagation du message du Christ dans le monde. Il y a un demi-siècle, les pères du concile étaient parfaitement conscients d’une plus grande efficacité de la mission si elle est menée dans un contexte de coopération plus étroite entre les diverses confessions chrétiennes.

Vatican II a grandement contribué à l’approfondissement du dialogue interchrétien. Il a marqué le début des relations officielles entre l’Eglise catholique romaine et les Eglises orthodoxes. Notre présence aujourd’hui parmi vous en atteste. Il nous incombe de continuer à réfléchir de concert aux problèmes de notre temps.

La chasse au plaisir et à l’enrichissement irresponsable aux dépens des couches pauvres ont marqué ces dernières décennies le développement des sociétés européennes et américaine. L’égoïsme et l’individualisme ont à la longue provoqué une crise non seulement dans les relations humaines mais ont aussi influencé en mal la politique et l’économie. La société séculière a oublié Dieu et se leurre en croyant que les basses motivations du lucre lui permettront de gérer l’amélioration du bien-être général et d’aboutir ainsi à un monde de prospérité et d’équité. Cependant, l’expérience tragique du XXème siècle a clairement montré que répudier Dieu et ses commandements n’apporte pas le bonheur aux hommes. Au contraire, cette attitude amène les souffrances et les malheurs. La crise qui frappe actuellement de nombreux pays montre que la société séculière a fait le mauvais choix de modèle de développement.

L’Eglise orthodoxe russe et l’Eglise catholique romaine, fidèles à la mission qui leur a été assignée par le Christ, témoignent inlassablement de la vérité et dénoncent le monde « en fait de péché, en fait de justice et en fait de jugement » (Jn, 16, 8). Nos Eglises sont de plus en plus conscientes de la nécessité d’unir leurs efforts afin que soient mieux entendues les réponses chrétiennes aux défis de la société moderne. Ces dernières années, nos Eglises ont fructueusement coopéré dans le cadre du forum orthodoxe-catholique.

Nous pourrons continuer, j’en suis persuadé, à agir encore mieux ensemble afin de trouver des réponses concertées aux nouveaux défis, voire aux nouvelles menaces du siècle.

Je profite de cette occasion pour appeler nos frères catholiques à mettre en place un front commun de défense de la foi chrétienne dans les pays où elle est opprimée et persécutée. Nous voyons aujourd’hui les tenants du sécularisme et de l’athéisme en Europe s’appliquer à évincer la foi chrétienne : les symboles chrétiens deviennent l’objet d’interdits, la vision traditionnelle chrétienne du mariage comme une union entre un homme et une femme est attaquée, la valeur de la vie humaine depuis son début et jusqu’à sa fin naturelle est mise en doute.

L’existence même des Eglises chrétiennes est menacée dans certaines parties du monde. Dans les pays dits du « printemps arabe », des millions de chrétiens encourent de cruelles persécutions. Ils doivent quitter des terres qu’ils ont habitées depuis de nombreux siècles. Il y avait encore il y a peu près d’un million et demi de chrétiens en Irak, il n’en reste aujourd’hui que près de 150 000 ; les autres ont été soit exterminés, soit chassés. En Egypte, en Libye, en Afghanistan, au Pakistan, au Nigeria, en Inde, en Indonésie ainsi que dans d’autres pays du Proche-Orient, les persécutions des chrétiens se font de plus en plus cruelles.

La catastrophe humanitaire que vit actuellement la Syrie nous est profondément douloureuse. Les islamistes radicaux, soutenus par certains pays occidentaux, veulent s’y emparer du pouvoir politique. Là où ils ont déjà réussi à le faire les chrétiens sont persécutés et exterminés. Les communautés chrétiennes de Syrie et du Proche-Orient implorent notre aide. Les médias occidentaux ne prêtent aucune attention à cette clameur. Les hommes politiques préfèrent ne pas voir cette vague de persécutions d’une force inouïe. Notre devoir est d’appeler sans relâche les dirigeants politiques, les organisations internationales et les médias à ne pas fermer les yeux sur la tragédie humanitaire dont nous sommes tous témoins. Les orthodoxes et les catholiques du monde entier doivent élever leur voix en défense des chrétiens et de leur héritage au Proche-Orient....SUITE "Medias-presse" Baudouin Lefranc


Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 18 Octobre 2014 à 10:41 | 3 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par Vladimir.G: L'expérience orthodoxe sur la question du mariage le 18/10/2014 22:20

(RV) Lors des débats de la première semaine du synode, la question du mariage a bien sûr été abondamment abordée. Certains pères synodaux ont évoqué l’expérience de l’Eglise orthodoxe qui permet aux couples mariés de divorcer, et n’empêche pas la communion. Ce point particulier a été abordé dans la relatio post disceptationem et a provoqué de nombreuses réactions parmi les pères synodaux.

Le métropolite Athénagoras de Belgique est délégué fraternel, représentant du patriarche œcuménique de Constantinople, Bartholomée Ier pour la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas. Il revient au micro de Xavier Sartre sur ce que l’Eglise orthodoxe peut apporter à l’Eglise catholique sur les questions familiales et principalement sur la question du mariage.

L’Église orthodoxe a toujours reconnu que l’homme a aussi ses faiblesses. Déjà Saint Basile le Grand qui vivait au 4-5°siècle, qui était l’archevêque de Césarée en Cappadoce, un grand Père de l’Église d’Orient disait par exemple que si un homme était trompé par sa femme et qu’il voudrait se remarier, il serait pardonnable et donc, à excuser. Dès le début déjà, les Pères de l’Église étaient soucieux du salut de l’homme. Et finalement, comme pasteurs, nous devons accompagner toutes ces ouailles dans leur cheminement, le chemin du Christ.

Vous pensez que la doctrine orthodoxe en la matière peut être transposable au sein de l’Église catholique ?

Dès le début, les règles étaient les mêmes mais l’Église orthodoxe a aussi appliqué une façon plus souple ce qu’on appelle dans l’Église orthodoxe, « l’économie », c’est-à-dire cette souplesse qui existe au sein de la pastorale orthodoxe. D’un côté, il y a « l’acribia», l’application stricte du canon, de la règle et de l’autre côté, « l’économie ». C’est-à-dire qu’on doit aussi être conscient que parfois, les règles sont trop strictes pour les hommes. Alors, quand il y a un échec dans la vie personnelle de l’homme ou de la femme, c’est à l’évêque de voir s’il n’y a pas une possibilité de donner une deuxième chance. C’est ce que l’Église orthodoxe applique mais ce n’est pas une règle. Il se peut que l’évêque donne la possibilité à quelqu’un de se remarier et d’avoir une nouvelle chance dans sa vie privée.

Comment réussissez-vous à faire passer ce message auprès de vos frères catholiques ?

Nous avons déjà eu une semaine de travail. Nous, les délégués fraternels, nous avons eu la chance de pouvoir exprimer notre point de vue vendredi dernier. Et déjà, avant ça, nous avons entendu les pères synodaux eux-mêmes parler de la façon orthodoxe dans la pastorale. Ça veut dire que l’Église catholique est consciente que l’Église orthodoxe a quelque chose à dire dans ce domaine-là. Et donc, ce n’est pas tellement difficile de faire passer le message. Je sais que le Saint-Père lui-même est très intéressée à cette approche orthodoxe dans la pastorale.

Il y a-t-il d’autres positions de l’Église orthodoxe qui peuvent servir à l’Église catholique dans le domaine général de la famille ?

Je plaide aussi pour un retour à une prêtrise mariée. Je suis moi-même un fils d’un prêtre marié, j’ai un frère prêtre marié et j’ai un beau-frère marié. Et maintenant que je suis métropolite du diocèse pour le Benelux, je n’ai que des prêtres mariés. Ça veut dire que nous avons gardé cette ancienne pratique et que je pense qu’en Occident, vu que l’Église catholique a trop peu de prêtres, ce serait une bonne chose de retourner à cela. Et le prêtre marié est celui qui a déjà une expérience de la vie familière. Il peut être aussi le meilleur Père spirituel pour ceux qui se trouvent dans des problèmes familiaux.

2.Posté par Nicodème le 19/10/2014 20:30
Je suis curieux de connaître l'appréciation d'Hilarion , et surtout de Kyrill sur les phrases relatives aux homos . Aucun rappel des interdits scripturaires , pourtant très clairs et très fermes . Il ne s'agit point là d'acribie . Le lobby LBGT serait-il puissant à ce point d'être capable d'influer sur les textes synodaux . En tous cas , il n' avait pas impressionné Kyrill qui avait dit qu'une société qui érige en norme comportementale un péché grave n'a pas d'avenir ...

3.Posté par Un causeur le 20/10/2014 11:22
Concernant le synode des évêques catholiques sur la famille, la question suivante ne mérite-t-elle pas une réponse : « Il y a-t-il d’autres positions de l’Église orthodoxe qui peuvent servir à l’Église catholique dans le domaine général de la famille ? ».

La réponse est : oui. Depuis quand les questions concernant les enfants ne feraient-elles pas partie du « domaine général de la famille » ?

Vous me voyez venir.
Dès lors que des questions « internes au catholicisme » comme le célibat des prêtres et l’excommunication des « divorcés-remariés » sont abordées par les orthodoxes, en quoi aborder la question de l’excommunication de fait des petits baptisés catholiques dès leur baptême serait choquant ou illégitime ? Qui dérange-t-elle ? Dom Lambert Beauduin lui-même, de Chevetogne, avait plaidé leur cause dans une revue publiée il y 70 ans; étrangement le numéro concerné a disparu de la collection de la bibliothèque de L’Institut Catholique, mais elle n’est pas la seule bibliothèque en France. Continuerons-nous longtemps à être complices par notre inexplicable silence ? L’omerta serait-elle persona grata dans les réseaux de l’oecuménisme ? Pourquoi ne pas laisser cette dérangeance sous le boisseau comme le préconise sans aucune cohérence Vladimir G. :

Rappel pour mémoire sur P.O. :
Fin des travaux de la XIII session plénière de la Commission mixte pour le dialogue théologique entre les Églises orthodoxe et catholique-romaine

7.Posté par Vladimir.G: Un "Causeur" catholique? le 28/09/2014 20:46
Le débat sur la communion des petits enfants est interne au catholicisme et ne concerne pas du tout l'Orthodoxie: chez nous tout est clair…

Il est autrement plus grave de continuer à exclure les innocents et les purs du sacrement des sacrements - et ce sans aucune justification - après les y avoir admis pendant des siècles, que d’exclure les « divorcés-remariés » catholiques.
Ces « divorcés-remariés » eux, peuvent se défendre et revendiquer et on verra qu’ils seront réhabilités avant les petits innocents catholiques - alors qu’ils ont délibérément transgressé leur propre Droit Canon qu’on le veuille ou non. Depuis quand l’économie divine leur serait-elle davantage applicable qu’aux petits enfants de leur propre Église ?

Certes ces derniers dérangeaient-ils Eudes de Sully, mais était-ce suffisant pour qu’il les privât soudain du saint calice et que cela se perpétue jusqu’à nos jours dans l’indifférence générale?
Voyez dans nos liturgies, la communion des petits et même des tout-petits est un moment très fort dont on ne pourrait se passer, ils font vraiment partie de l’Église.

Oui, c’est un devoir prioritaire on ne le dira jamais assez que de mettre fin à cette invraisemblance. Invraisemblance qui se trouve de plus en contradiction complète avec les paroles du Christ.

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