Une analyse de Raphaël Blere - Au Monténégro, l'Eglise orthodoxe serbe face à la persécution de l'Etat
Au Monténégro, l'Etat entend réduire l’influence de l'Eglise orthodoxe serbe, à travers la création d'une Église autocéphale et une loi controversée sur «la liberté religieuse». Une analyse de Raphaël Blere, consultant en Intelligence économique.

Au Monténégro, à l’approche des nouvelles élections législatives du 30 août, les tensions sont toujours aussi grandes entre le gouvernement et l’Eglise orthodoxe serbe du Monténégro dirigée par le métropolite Amphiloque.

En cause : la loi sur la liberté religieuse, votée par le Parlement le 26 décembre 2019. Celle-ci oblige l’Eglise orthodoxe serbe à présenter les titres de ses propriétés datant d’avant 1918, chose souvent impossible pour des raisons historiques, sous peine de nationalisation. Une mesure que l’Eglise orthodoxe serbe juge inacceptable et discriminatoire, alors que les autres communautés religieuses ne sont pas concernées par cette décision gouvernementale.

En effet, le Monténégro coopère avec les autres confessions, musulmanes, juives et catholiques. Un concordat a même été signée avec l’Eglise de Rome en juin 2011, lui permettant de jouir d’une certaine indépendance


Alors que la population orthodoxe (environ 70% du pays) vit cette décision comme une humiliation, des manifestations de grande ampleur ont eu lieu dans tout le Monténégro depuis le début de l’année autour des lieux symboliques et historiques du pays. Peuplé d’environ 609 000 habitants, le Monténégro est issu de la partition de l’ex-Yougoslavie et a gagné son indépendance en 2006 par 55,4% des voix et un taux de participation de 86%. Le pays est soutenu par l’Union européenne et est entré dans l’OTAN en 2017. Le président Milo Dukanovic, issu de la Ligue des Communistes de Yougoslavie s’est détourné de son mentor Slobodan Milosevic.

Il a ensuite adopté l’idéologie néo-libérale européenne via son parti le DPS, Parti Démocratique des Socialistes. De façon logique, le pays a demandé à rejoindre l’Union européenne en 2008, cette dernière retardant à chaque fois sa prise de décision. En cause : la très mauvaise réputation du pays gangrené par la corruption et divers trafics. Une situation analogue à celle de son voisin de l’est, le Kosovo.

Le patriarche russe Kyrill dénonce une «loi discriminatoire»

Pour contrer l’influence de l’Eglise serbe, indéfectible alliée du patriarcat de Moscou, le gouvernement du Monténégro a décidé de créer sa propre Église en 1993. Toutefois, cette nouvelle structure n’est reconnue par aucune autre juridiction dans le monde orthodoxe. Même le patriarcat de Constantinople soutient l’Eglise serbe du Monténégro. L’inverse aurait été possible, puisque le Phanar a déjà reconnu l’ex-Eglise schismatique créée en Ukraine par l’ancien président Petro Porochenko dans le but de contrer l’influence russe. Dans le monde orthodoxe, l’autocéphalie de l'Eglise serbe du Monténégro a toujours été reconnue dans le cadre de l'Eglise serbe en tant qu'exarchat.

La nouvelle Eglise du Monténégro est donc une fois de plus une création de l’Etat, comme en Ukraine, avec pour projet politique de détacher le Monténégro de l’influence serbe. Les Orthodoxes du pays voient leur foi écartelée entre un nationalisme pro-serbe et un nationalisme pro-monténégrin (pro-européen). Les réactions dans le monde orthodoxe sont fortes, le patriarche de l'Eglise orthodoxe russe Kirill a déclaré, dans un texte relayé le 13 juillet sur le site officiel du patriarcat de Moscou : «J’appelle les autorités civiles du Monténégro à abroger la loi discriminatoire qui a introduit la division et le schisme dans la société monténégrine, à mettre fin à la persécution de l'Eglise orthodoxe [serbe], à cesser toutes les tentatives de création d'une autre structure religieuse à sa place »...... SUITE


Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 26 Août 2020 à 16:22 | 1 commentaire | Permalien


Commentaires

1.Posté par Elections au Monténégro: le parti au pouvoir en tête mais le suspense persiste le 31/08/2020 17:30
Le parti du président Milo Djukanovic, au pouvoir depuis trois décennies au Monténégro, a une légère avance à l'issue des élections législatives de dimanche, selon des projections, mais il pourrait perdre la majorité au parlement si ses adversaires s'allient.

Des sondages à la sortie des bureaux de vote attribuaient dans la nuit de dimanche à lundi un peu plus d'un tiers des voix au Parti démocratique des socialistes (DPS), la formation pro-occidentale de M. Djukanovic.

Si ce niveau était confirmé par les résultats officiels attendus lundi, ce serait le plus mauvais résultat électoral du DPS depuis que le Monténégro est devenu indépendant de la Serbie en 2006.

Une projection de la commission de contrôle électoral CeMI sur la base de résultats encore partiels prévoyait 30 sièges pour le DPS au parlement monténégrin, qui en compte 81, et 27 sièges à la coalition pro-serbe "Pour l'avenir du Monténégro".

- Une chute possible -

Si cette coalition s'alliait avec deux autres groupes d'opposition, cela rendrait possible une chute du DPS, ce qui constituerait un séisme politique pour le Monténégro, petite nation adriatique de 620.000 habitants.

Le DPS n'a jamais perdu une élection et Milo Djukanovic dirige le pays sans discontinuer depuis le démantèlement de la Yougoslavie dans les années 1990. Réformiste dynamique pour certains, autocrate corrompu pour d'autres, c'est lui qui a présidé à la séparation du Monténégro de la Serbie et à son entrée dans l'Otan.

Prenant la parole au quartier général du DPS dans la soirée de dimanche, M. Djukanovic a appelé les Monténégrins à attendre que les résultats officiels des législatives soient annoncés dans la journée de lundi.

"Le DPS est le parti le plus fort du Monténégro", a-t-il déclaré. Selon lui, le DPS pourrait obtenir un total de 40 sièges avec ses alliés traditionnels. "La lutte pour la majorité est toujours en cours", a-t-il dit.

- "Le régime est tombé" -

Mais le chef de la coalition pro-serbe, Zdravko Krivokapic, n'a pas hésité au vu des résultats provisoires à proclamer la chute du DPS. "Le régime est tombé", s'est-il exclamé devant la presse.

Des partisans de l'opposition ont exulté dans les rues de Podgorica, circulant en tous sens à bord de voitures, tirant des feux d'artifice et se rassemblant devant la principale église orthodoxe de la capitale monténégrine.

Les dirigeants d'autres partis d'opposition étaient eux aussi enthousiastes. "La mafia ne dirigera plus le Monténégro", a lancé Dritan Abazovic, du parti libéral "Noir sur blanc".

Mais il reste à voir si l'opposition, qui s'étend de formations nationales serbes d'extrême droite à un camp d'inspiration civique et libérale, sera en mesure de créer une alliance viable.

En tout cas, Milo Djukanovic, qui est actuellement dans son deuxième mandat de président, après avoir fait quatre mandats de Premier ministre, n'a pas à affronter personnellement de test électoral avant 2023.

Le DPS était pour les élections législatives confronté au défi présenté par la coalition d'opposition pro-serbe de droite, qui veut que le Monténégro, contrairement à l'orientation pro-occidentale de Milo Djukanovic, établisse des liens plus étroits avec la Serbie et avec la Russie.

- Loi controversée -

Des analystes attribuent le résultat moyen du DPS à l'adoption d'une loi qui a déclenché une intense controverse avec l'Eglise orthodoxe serbe (SPC) et domine le débat politique monténégrin depuis des mois.

Adoptée à la fin de 2019, cette loi a ouvert la voie à ce que des centaines d'églises et de monastères gérés par la SPC, dominante au Monténégro et dont le siège est à Belgrade, deviennent propriété de l'Etat monténégrin.

Selon le recensement de 2011, près de 30% des habitants du Monténégro se déclarent serbes.

L'adoption de la loi a provoqué d'énormes manifestations sous forme de processions, menées par des dignitaires religieux et soutenues par l'opposition.

Dans les jours précédant les législatives, les manifestants ont organisé des processions avec des voitures à travers le pays en agitant des drapeaux serbes.

Milo Djukanovic, applaudi par ses partisans pour avoir mis le Monténégro sur la voie d'une éventuelle entrée dans l'Union européenne, est accusé par ses adversaires d'avoir transformé le pays en un royaume personnel construit sur des liens avec la corruption et le crime.

2.Posté par Lara le 01/09/2020 08:33
Le régime anti-église de Djukanovic est proche de l'échec total

Les partis d'opposition au Monténégro ont obtenu la majorité au parlement local et ont l'intention d'abolir la loi anti-église ...

Milo DjukanovicLes blocs électoraux d'opposition du Monténégro «Pour l'avenir du Monténégro», «Le monde est notre nation» et «Noir sur blanc» ont l'intention de créer un gouvernement de coalition d'experts qui révoquera le chef permanent du pays Milo Djukanovic et abrogera la loi anti-église contre l'Église orthodoxe serbe. C'est ce qu'a déclaré le chef du bloc «Pour l'avenir du Monténégro», professeur d'informatique à l'université de Podgorica Zdravko Krivokapic après les élections législatives dans le pays
«La première étape, bien sûr, sera l’abolition de la loi sur la liberté de religion, puis l’adoption de la loi sur la lustration et de la loi sur l’origine de la propriété, qui détermineront l’attitude à l’égard de ceux qui ont conduit le Monténégro au désespoir, obtenu une richesse incalculable et mis le reste des citoyens monténégrins dans la misère.

Ce sera honnête, juste et sera un avertissement pour tous ceux qui se lancent en politique que la politique n'est pas le travail le plus rentable », a déclaré le chef de l'opposition.

Nouveau commentaire :



Recherche



Derniers commentaires


RSS ATOM RSS comment PODCAST Mobile