L’archimandrite Cyrille (Govorun): les chrétiens orthodoxes ont entamé leur Grand Carême, qui précède et prépare les célébrations de Pâques

Parlons D'orthodoxie

Le magazine Meduza a posé une série de questions élémentaires à l’archimandrite Cyrille Govorun, enseignant à l’université Loyola Marymount de Los Angeles. Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le jeûne orthodoxe sans jamais oser le demander

Pourquoi le Carême est-il devenu tellement à la mode en Russie ? On voit jeûner même des gens qui ne mettent jamais les pieds à l’église…

Arch. Cyrille: Cette « mode du Carême », comme vous dites, est peut-être une forme de réaction à notre culture actuelle de la consommation. Il s’agit probablement, pour beaucoup, d’une réaction instinctive, non déterminée par les préceptes de telle ou telle tradition religieuse concrète. Simplement, les gens prennent conscience que consommer de la nourriture en abondance et s’adonner sans restriction à toutes les autres joies de la vie ne leur suffit pas pour se sentir bien mais qu’il leur faut aussi, précisément, se restreindre parfois. Et c’est là que se pose la question du Carême.

À quoi servent le jeûne du Carême et toutes ces restrictions dans la tradition orthodoxe ? Quel rapport y a-t-il entre la faim et la fête ?

Arch. Cyrille : L’idée du jeûne religieux part de deux prémisses. La première est que l’être n’est pas fait que d’un corps, mais aussi d’une âme ; et que l’âme est tout aussi réelle que le corps. La seconde est que le corps et l’âme sont étroitement liés : ce qui se passe dans l’âme se reflète dans le corps, et inversement.

Ces prémisses sont d’ailleurs aussi à la base de l’idée du sport dans l’Antiquité : les athlètes cherchaient moins à réaliser des performances et à surpasser leurs concurrents qu’à acquérir des pratiques morales, visant à faire d’eux des individus meilleurs. Pour l’individu contemporain, le jeûne est souvent difficilement compréhensible, car il conçoit l’âme comme une métaphore, et le corps comme existant et possédant une valeur en soi. C’est aussi ce qui distingue le sport d’aujourd’hui de son modèle antique.

Quant au « lien entre la faim et la fête », il est direct : seule une personne qui s’est restreinte en termes de nourriture pendant plusieurs semaines est en mesure de ressentir pleinement la joie de la fête, de ce moment où l’on peut enfin rompre le jeûne. Cette fête réjouit l’âme et le corps, et permet de réaliser à quel point ils sont liés l’un à l’autre.

Pourquoi le jeûne prescrit-il de renoncer précisément à la viande, aux produits laitiers et aux œufs ? Par pitié pour les animaux ?

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