La Terre Sainte à Iassienievo ou une église pas ordinaire
Parlons d'orthodoxie

J'ai choisi de traduire cet article pour deux raisons: d'abord je connais bien Iassiéniévo, où j'ai des amis, mais j'ignorais l'existence de cette église dans ce "quartier-dortoir' plein de gigantesques barres en béton. Et ensuite, il fait référence à quelque chose de très orthodoxe, à ce mystère de la transfiguration du temps et de l'espace que j'ai connu moi aussi un jeudi saint, à Moscou: j'étais vraiment à la fois au XX° siècle, à Moscou, et au pied de la Croix, il y a 2000 ans, à Jérusalem, et avec moi toutes les générations de croyants qui avaient prié ensemble à chaque semaine sainte, depuis l'évènement lui-même.
A la différence de beaucoup d’autres visions du monde, notre foi orthodoxe s’enracine profondément dans des évènements réels. L’Eglise confesse qu’en notre Seigneur Jésus Christ dieu s’est fait homme, en toutes choses conforme à nous, sauf le péché, et que cela s’est produit à un moment déterminé de l’histoire, dans un endroit déterminé.
C’est pourquoi la Terre Sainte, où notre Seigneur Jésus Christ s’est incarné, a enseigné, a été mis en croix et est ressuscité pour nous, est infiniment chère à chaque chrétien. C’est pourquoi le flot de pieux pèlerins de notre pays qui veulent voir de leurs yeux les endroits où s’accomplit l’œuvre salvatrice du Seigneur, parcourir les chemins qu’il a suivis, respirer le même air, contempler les mêmes horizons, ne tarit pas et ne fait même qu’augmenter.

La Kouvouklia (le tombeau du Seigneur) fut reconstituée aussi à Valaam, dans le célèbre ermitage de la Résurrection. C’est précisément là bas, à Valaam, que séjournèrent les enfants spirituels de l’higoumène Melchisédech (Artioukhine), le recteur de l’église en construction consacrée à la Protection de la Mère de Dieu. Ce sont eux qui ont donné l’idée au père Melchisédech de faire la même chose dans son église. Mais n’était-ce pas déplacée, quand juste au même moment on restaurait celle de la Nouvelle Jérusalem ? Le père Melchisédech adressa cette question à monseigneur Arsène, archevêque d’Istra. Monseigneur Arsène ne bénit pas seulement le projet, il ajouta de façon inattendue : « et aussi l’emplacement de la Nativité du Christ ! »

Le projet fut bientôt béni par le très saint Patriarche Cyrille.
C’est ainsi que dans l’église de la Protection furent reconstitués les lieux saints les plus vénérés de Jérusalem et de Bethléem, l’étoile d’argent à quatorze rayons qui indique la place de la Nativité du Sauveur, le Golgotha, l’endroit ou le Seigneur Jésus subit la crucifixion pour nous, la Pierre de l’Onction, sur laquelle son corps fut oint d’huiles odorantes après la descente de Croix, le Tombeau du Seigneur, la Kouvouklia et le tombeau de la très sainte Mère de Dieu.

Au sein de l’Eglise, nous ne nous contentons pas de rappeler tel ou tel évènement de l’histoire de notre salut, nous y assistons vraiment, ils deviennent des évènements de notre propre vie, qui nous changent en profondeur. Il est très important que dans les livres de prières se répète si souvent le mot « aujourd’hui ». L’Eglise surmonte le temps et l’espace, et nous qui nous rassemblons pour la prière, nous accueillons Celui qui est né à Bethléem, qui a enseigné, qui est venu à Jérusalem subir volontairement ses souffrances, nous nous trouvons dans la chambre avec le Christ et ses Apôtres, nous le voyons crucifié pour nos péchés, nous l’ensevelissons en même temps que Joseph d’Arimathie, et nous allons à sa rencontre, quand il se lève du tombeau, avec un allègre : « Christ est ressuscité » !
En nous prosternant ici, dans la Kouvouklia, nous nous trouvons spirituellement à Jérusalem ; la foi, la prière, et la pieuse adoration des choses saintes ne sont jamais des « copies », elles sont toujours des originaux. Et nous nous prosternons véritablement devant les lieux saints, ici, à Moscou, à Iassiénievo, dans l’église de la Protection de la très sainte Mère de Dieu.
Revue « Foma »
Святая Земля в Ясенево, или Очень необычный храм
