1.
Vladimir.G
le 27/12/2013 18:53
Extrait de l'interview du métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, président de la Commission synodale biblique et théologique au portail « Interfax-religia »
- Question: Un périodique a proposé récemment d’éditer de nouvelles traductions de la Bible et du Coran dans un même ouvrage afin de renforcer le dialogue entre orthodoxes et musulmans ? Que pensez-vous de cette idée ?
- Mgr Hilarion: Cette proposition a déjà suscité de nombreuses réactions, tant de la part du clergé orthodoxe que de la part des leaders musulmans. Les commentateurs remarquent fort justement que les extrémistes ne liront pas ces éditions. Par ailleurs le dialogue interreligieux dans lequel est engagé notre Église évite le syncrétisme, c’est-à-dire le mélange des traditions religieuses. L’édition de la Bible et du Coran sous une même couverture produit précisément cette impression. Cela n’empêche pas qu’il faut, à mon avis, faire des efforts pour montrer le vrai rapport du Coran au christianisme. Parmi les exemples positifs, on peut rappeler le livre du professeur T. Ibrahim, chef de la Société russe des islamologues « Sur la voie de la tolérance coranique ». L’un des chapitres est spécialement consacré à la traduction et à la réflexion sur le sens des passages coraniques sur le christianisme et sur le judaïsme.
2.
Vladimir.G :Sophie Gherardi: « L'islam russe n'est pas lié à une immigration »
le 13/05/2014 11:44
Rushan Abbyasov, vice-président du Conseil des muftis de Russie (D.R.), 32 ans, est né à Moscou de deux Moscovites. Le jeune vice-président du Conseil des muftis de Russie insiste beaucoup sur cette filiation : dans son cas comme dans celui de la plupart des musulmans de Russie, l'islam n'est pas lié à une immigration. « Nous sommes 25 millions de musulmans dans la Fédération de Russie [les estimations habituelles vont plutôt de 19 à 22 millions], et nous représentons plus de 50 nationalités. Mais notre religion est autochtone. Dès le VIIe siècle, dans les décennies qui ont suivi la mort de Mahomet, l'islam entre au Daghestan par Derbent. Les Bulgares de la Volga se convertissent à l'islam dès 922, alors que l'adoption du christianisme orthodoxe par les Slaves de Russie date de 988, avec le « baptême de la Rous ». Nous, les musulmans, sommes fiers de notre pays, la Russie : c'est notre pays».
Notre conversation avec Rushan Abbyassov se déroule dans l'impressionnant hall de style arabe du Grand Hyatt de Mascate. Aux côtés du mufti de Russie, le cheikh Ravil Gaïnoutdine, iI fait partie de la délégation russe qui assiste pour la première fois à la conférence interislamique organisée depuis les années 2000 par les autorités du Sultanat d'Oman. Le jeune mufti tient à souligner que l'islam russe n'est pas marginal, et qu'il a apporté sa pierre à l'islam moderne : un mufti russe du début du XXe siècle serait à l'origine de la réforme de la prière à la Mecque, dite par un seul imam au lieu de quatre imams représentant les quatre écoles juridiques traditionnelles.
La France donne le mauvais exemple
Rushan Abbyasov ne le cache pas, l'islam a mauvaise presse, et pas seulement en Russie. « Les gens qui ne nous connaissent pas pensent que l'islam, c'est le terrorisme. Mais c'est faux ! Pour tout bon musulman, le terrorisme est haram, interdit. Le mot paix, salam, a la même racine que le mot islam. Les médias ne font pas ce qu'il faut pour montrer que nous entretenons de bonnes relations avec les autres religions, les autres communautés. Il n'y a pas de guerres de religions en Russie. Nous avons un Conseil interreligieux qui existe depuis 1996 ».
Curieusement, Rushan Abbyasov attribue à l'influence pernicieuse de l'Occident une certaine dégradation de la tolérance religieuse en Russie : « Chez nous, les femmes peuvent tranquillement porter le foulard. Mais en voyant que la France a interdit le port du voile à l'école, certains sont dit : si un pays comme la France le fait, alors pourquoi pas nous ? Heureusement, la loi n'a pas été changée.»
Quand on l'interroge sur le lien idéologique fort qui existe entre le régime russe et l'orthodoxie, le jeune mufti adjoint reconnaît : « C'est vrai que l'Eglise orthodoxe est majoritaire et qu'il est plus simple pour elle de construire des églises que pour nous des mosquées. Les juifs et les musulmans ne jouissent pas des mêmes facilités. A Moscou, il n'y a que quatre mosquées pour 2 millions de musulmans ». Mais l'optimisme reprend vite le dessus : « depuis 1991, nous avons construit 8000 mosquées en Russie. Sur toute la période soviétique, 100 seulement avaient été construites, outre les 15.000 d'avant la Révolution. La grande mosquée de Moscou est en construction à 4 kilomètres du Kremlin à la place d'un ancien lieu de culte. Elle aura une coupole d'or et deux minarets de 81 mètres de haut inspirés par la tour du Kremlin et celle de la citadelle de Kazan. Ce sera un beau témoignage de notre architecture russe islamique. Et dix nouvelles mosquées sont en projet à Moscou pour la décennie qui vient.»
Le rôle prééminent des Tatars
Qui finance ces lieux de culte ? La réponse fuse : « Ce sont les hommes d'affaires musulmans. Le businessman Suleyman Kerimov a donné 100 millions de dollars pour la grande mosquée ».Comme beaucoup d'oligarques, ce milliardaire originaire du Daghestan a fait fortune au carrefour entre pouvoir politique et secteur énergétique. Il a défrayé la chronique en France voici quelques années, d'abord pour avoir perdu le contrôle de sa Ferrari sur la Promenade des Anglais à Nice, accident qui lui a causé de graves brûlures, ensuite pour avoir fait entrer sur le territoire des jeunes femmes thaïlandaises munies de passeports européens grâce à son ami l'ambassadeur de Belgique en Russie.
Rushan Abbyasov , comme tous les muftis de Russie, est tatar. « C'est normal, nous sommes les plus nombreux. Mais dans les républiques, les muftis sont de l'ethnie locale », explique-t-il. A 12 ans, il a été envoyé par ses parents au Qatar pour apprendre l'arabe et étudier le Coran. Il a ensuite étudié à l'université islamique de Moscou « Imam Khatib ». Mais outre cette formation religieuse, le jeune homme est diplômé de l'Académie d'administration gouvernementale, l'ENA russe.
Sa formation diffère beaucoup de celle reçue par le grand mufti de Russie, un homme de la génération précédente. Du temps de l'Union soviétique, il n'était pas question d'aller étudier à l'étranger. Le cheikh Ravil Gaïnoutdine, qui avait fait des études de régisseur de théâtre, a eu la vocation à l'âge adulte et s'est formé à la théologie musulmane dans l'une des deux seules écoles coraniques de l'URSS, une madrasa du XVIe siècle, la Mir-i-arab de Boukhara, en Ouzbékistan. Après quatre ans d'études, il est devenu imam de la « mosquée-cathédrale » de Moscou, pour devenir dix ans plus tard président du Conseil des muftis de Russie.
La communauté musulmane de Russie est moins repliée sur elle-même que dans le passé. Elle organise depuis 15 ans un concours international de récitation coranique et depuis 5 ans un salon du halal : dans la dernière édition, 200 entreprises, dont 150 sociétés russes, proposaient toutes sortes de produits ou services halal. Et tout ça, conclut avec fierté Rushan Abbyasov, le Conseil des muftis de Russie le réalise avec son mince budget de 5 millions de dollars.
Propos recueillis par Sophie Gherardi, "fait-religieux.com"
3.
Vladimir.G : et les Tatars de Crimée...
le 14/05/2014 19:10
Dans l'interview ci-dessus Rushan Abbyasov parle du "rôle prééminent des Tatars". Il s'agit de l'ethnie majoritaire de la république du Tatarstan, capitale Kazan, située sur la Volga. C'est l'une des régions riches de Russie grâce à ses ressources pétrolière et ses Tatars s’enorgueillissent d'être les descendants des Bulgares de la Volga, convertis à l'islam dès 922, et qui ont favorisés la conversion de la Horde d'Or (les envahisseurs de Gengis Khan étaient animistes). Kazan a d'ailleurs toujours été un haut lieu de théologie musulmane prônant la tolérance...
Mais il ne faut pas oublier un autre groupe de Tatars, moins en vue et moins important, celui des Tatars de Crimée, majoritairement musulmans et représentant 12 à 15% des deux millions d'habitants de Crimée. Ils sont aussi turcophones et sunnites et ils sont installés dans la région depuis le XIIIeme siècle.
Leurs relations avec les Russes n'ont pas toujours été faciles: après l'annexion de 1783 des colons russes étaient arrivés et des Tatars avaient rejoint l'Empire Ottoman. Mais c'est surtout la dernière guerre qui a été dramatique: «Les Allemands avaient joué la carte de la hiérarchie raciale en Crimée pendant l'occupation pour inciter les Tatars à collaborer. Ils leur disaient que les musulmans étaient supérieurs aux slaves. Il est vrai que quelques Tatars ont effectivement aidé la Wehrmacht. Mais en guise de représailles, en 1944 le bureau politique soviétique a décidé de gommer les Tatars de Crimée des peuples soviétiques », commente Sabine Dullin, spécialiste de l'URSS à l'université de Lille 3. Sur 200.000 personnes déplacées en Ouzbekistan, la moitié ont péri dans les deux ans.
Ils furent réhabilités et autorisés à rentrer en Crimée en 1967 mais le retour massif eu lieu à partir de 1989 et les estime aujourd'hui à plus de 250 000...
D'après http://www.fait-religieux.com/la-photo-du-jour-1/2014/03/12/les-tatars-crimee-une-minorite-courtisee
4.
Tchetnik
le 14/05/2014 22:15
Les relations entre Russes, Ruthènes et Tatars de Crimée ont été d'autant plus conflictuelles que les derniers passaient le plus clair de leur temps à réduire en esclavage les premier, ce qui, pour élaborer un espace de dialogue et de relations constructives, n'est pas nécessairement la meilleure approche.
Kafa a été le centre du trafic d’esclaves et de la piraterie des Tatars de Crimée, qui, selon Alan Fischer, ont réduit plus d’un million de Russes, Ruthènes et Moldaves en esclavage dans des conditions particulièrement inhumaines et cruelles, du XVI au XVIIIième siècle.
5.
Vladimir.G : et les Tatars de Crimée...
le 15/05/2014 11:10
Tchetnik a parfaitement raison pour le passé et c'est bien ce comportement qui a justifié la conquête russe. Mon commentaire parle du présent depuis... 1783!
Je ne crois pas que les vieilles histoires d'esclavage aient jamais justifié la déportation de 1944 qui faisait par contre bien partie du système stalinien de condamner des classes (bourgeoisie, paysannerie) ou des peuples entiers. D'autres kidnappeurs plus récents, les Tchétchènes, ont aussi été déportés; là encore c'est pour collaboration avec la Wehrmacht pendant l'occupation...
6.
Vladimir.G :Tatars de Russie, Tatars de Crimée
le 16/05/2014 10:39
fait-religieux.com, le 12/05/2014
Le grand mufti de Russie Ravil Gaïnoutdine a rendu visite aux Tatars de Crimée fin mars, juste après le référendum du 16 mars qui a permis le rattachement de la presqu'île à la Russie. « Le contact a été très bon, ils ont compris que la Russie allait enfin s'occuper de leurs problèmes alors que pendant vingt ans l'Ukraine n'a rien géré du tout », affirme le vice-mufti Rushan Abbyasov. A l'en croire, la sollicitude russe envers les Tatars de Crimée a pris trois formes : symbolique, avec l'annonce par Vladimir Poutine que le tatar serait langue officielle en Crimée à côté du russe et de l'ukrainien ; politique avec la nomination d'un Tatar comme vice-premier ministre ; et économique avec le transfert de la propriété des mosquées et des madrasas (écoles coraniques) à la communauté tatar.
7.
Vladimir.G: Russie-Monde musulman: les relations s’accélèrent
le 12/05/2018 12:20
La photo du Kremlin de Kazan qui illustre cet article (cf. lien) montre le modèle de coexistence entre Orthodoxes et Musulmans qui prévaut en Russie depuis 3 siècles...
Russie-Monde musulman: les relations s’accélèrent
© Sputnik . Konstantin Chalabov
18:58 11.05.2018
Le monde musulman montre un intérêt croissant pour le développement de liens multiples avec la Russie, notamment avec le Tatarstan, a annoncé à Sputnik l’ambassadeur yéménite, qui a souligné que Moscou serait capable de favoriser la pacification au Yémen.
En marge du dixième Sommet économique international «Russie-Monde musulman» qui a lieu à Kazan du 10 au 12 mai, l'ambassadeur du Yémen en Russie, Ahmed Salem al-Wahishi, a parlé à Sputnik du développement des liens entre Moscou et le Yémen, et le monde musulman en général.
«Un grand nombre de participants [au sommet, ndlr] montrent un intérêt croissant pour le développement de l'économie et de la culture russe», a constaté l'ambassadeur.
Il a spécialement souligné les relations entre le Tatarstan et des partenaires de pays musulmans.
«Tout le monde s'intéresse particulièrement à la République du Tatarstan qui a établi une production moderne et développé l'agriculture. Les produits du Tatarstan sont très populaires dans le monde musulman pour leur qualité», a déclaré le diplomate.
Il a aussi souligné que les relations avec Moscou, établies il y a 90 ans, revêtaient une grande importance pour le Yémen.
«Depuis 1928, nos pays coopèrent dans les domaines politique, économique, social et culturel. Maintenant, notre coopération militaire est développée», a ajouté Ahmed Salem al-Wahishi.
De plus, Moscou est capable d'être un partenaire clé du point de vue diplomatique.
«Nous espérons que la Russie jouera un rôle important dans l'établissement de la paix au Yémen», a conclu l'interlocuteur de Sputnik.
https://fr.sputniknews.com/international/201805111036322215-