Père Pierre Adalbert Mottier : Décès, séparation de l'âme, trépas, premier jugement, bioéthique et spiritualité

Parlons D'orthodoxie

Le père Pierre Adalbert Mottier nous a fait parvenir ce commentaire que nous mettons en ligne en tant que contribution.

Bonjour à tous!
Il y a quelques années nous avons reçu en Suisse un document fédéral invitant au don d'organes, ainsi qu'une carte de donneur à remplir et à insérer dans le portefeuille. Le fait est que les pays qui sont en carence d'organes ont une legislation basée sur le volontariat, et non sur le consentement présumé.
Devant l'importance d'une telle question, je me suis alors mis en recherche d'informations de type médical, légal, bioéthique et spirituel. Je vous livre ici quelques résultats de mes découvertes sur le sujet, ainsi que quelques questionnements.

1) La raison profonde de la position négative de l'Église orthodoxe vis-à-vis de la crémation tient justement au respect du processus de la mort et de la favorisation des meilleures conditions pour un bon passage de l'âme vers le lieu sans douleur ni peine, parmi les saints.

Décès, séparation de l'âme, trépas, premier jugement. Et je ne rentre pas dans la question des péages qui est en soi une problématique distincte. Ces étapes sont sanctionnées par différents offices ou prières particulières pour l'agonisant ou le nouveau défunt. Le processus de la mort, en partant du physique jusqu'au spirituel prend donc un certain temps et nécessite un accompagnement adéquat. Je trouve la question du don d'organes statim post-mortem violente, parce qu'on "invite" la personne a éluder la question de la mort, comme si ce processus pouvait être économisé ou nié. On a en fait affaire à une question purement matérialiste.

2) La soi-disant évolution de la législation concernant la définition de la mort est liée à l'impossibilité de prélever des organes viables sur un défunt. On a une personne décédée, mais pas encore défunte, et la nuance est de taille. L'ancienne défintion obligeait au constat de l'arrêt des fonctions cardio-respiratoires. La nouvelle définition n'implique que l'arrêt des fonctions du tronc cérébral. On a consulté des prêtres, des imams et des rabbins (lesquels ? ) qui ne se sont apparement basés sur aucune référence spirituelle pour rendre leur jugement. Sinon on aurait tout de même une petite publication argumentée à se mettre sous la dent.

3) Au moment du prélèvement le donneur (supposé mort) est non seulement anesthésié mais aussi curarisé et c'est le clampage de l'aorte qui est la cause du décès aussitôt consigné. L'équipe d'anesthésie quitte ensuite la salle d'op., et les organes pré-dégagés sont extraits en quelques minutes. Données françaises officielles d'il y a environ dix ans (je rechercherai les références si nécessaire ... et si je retrouve le fichier !).

4) Chacun remarquera que la question du don d'organes est toujours présentée sous l'angle du receveur, et jamais sous celui du donneur. Comme c'est au donneur potentiel qu'on pose la question sans présenter équitablement le problème de son point de vue, il n'a en fait aucun moyen de prendre une décision sereine, qu'on reconnaît pourtant être grave, si ce n'est sur le plan émotif. Or toute l'argumentation positive des autorités religieuses est basée sur l'assimilation du don à un acte charitable (ce qui n'est pas faux) mais sans jamais dépasser le stade organique et matériel puisqu'on oublie systématiquement que la mort (du donneur) est un continuum et non une polarité quantique où il passerait subitement de vivant à mort. La question se situe donc au minimum tout autant sur un plan spirituel que matériel : quelle est la valeur réelle d'un don provisoire et précaire face au passage qui introduit l'âme d'un appelé à la vie éternelle ? Autrement dit : a-t-on le droit moral de prendre un risque avec sa propre introduction dans l'au-delà pour préserver ce qui n'est que temporaire chez autrui ? Et si oui sous quelles conditions ? Et peut-on décider pour autrui en étant garanti de ne pas induire une douleur néfaste dans sa mort ? Ne prie-t-on pas pour une mort sans douleur ? Qui sait à quel stade de la mort la douleur s'arrête ? Qui connaît l'impact ou l'inocuité d'une violence effectuée sur un corps encore biologiquement vivant ?

Donc mon ultime questionnement : les autorités de l'Église sont-elles habilitées à se positionner pour le prélèvement d'organes vitaux ou assimilés sans avoir consulté : a) l'Écriture sainte en tous ses aspects sur le sujet b) les Pères anciens et actuels c) le Seigneur dans sa divine Volonté au moyen de la prière et du jeûne durant tout le processus de positionnement. Ce qui implique une démarche spirituelle, théologique, concertée à défaut d'être conciliaire... Quant aux exemples respectables, édifiants et héroïques, sont-ils pour autant des normes spirituelles ? Peut-on les exposer dans le cadre d'un cas de conscience en confession ?

Tout ceci ne concerne bien entendu que les dons post mortem.

Quant à la greffe de jambe des saints Côme et Damien, si l'histoire est véridique il ne peut s'agir à l'évidence que d'un miracle, on est loin d'une systématisation, ce n'est pas un organe vital, et l'éthiopien est froid. On est là dans un contexte de résurrection plus que de médecine, ce qui démontre une fois de plus que la foi sans faille et l'amour véritable et désintéressé sont les motifs essentiels d'un tel événement.

Paix et joie.


Commentaires (5)
1. Vladimir. G: Autres pistes de réflexion sur ce sujet: le 16/07/2015 17:17
Autres pistes de réflexion sur ce sujet:

LA POSITION DE L'ÉGLISE RUSSE
Dans le cadre du débat parlementaire sur les dons d’organes qui se déroulait en Russie en 2013, l’Eglise orthodoxe russe avait invité les citoyens à exprimer leur accord à une greffe de leurs organes après leurs décès: « Une vie peut dépendre de la décision que vous prendrez », est-il dit dans la Déclaration conjointe des services des relations avec la société, de la bienfaisance et du service social du Saint Synode. L’Eglise encourage les personnes qui décident de donner une partie de leur corps pour de sauver la vie du prochain. C’est là un geste authentiquement chrétien, un geste qui s’inspire de la vie du Christ, venu dans ce monde afin de Se donner volontairement en sacrifice, d’offrir Sa chair et Son sang pour le salut du monde. L’Eglise orthodoxe russe estime que trous les croyants ont vocation à imiter l’exemple du Sauveur et à se sacrifier pour le bien d’autrui.

Suite: http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/L-Eglise-russe-invite-les-citoyens-a-exprimer-leur-accord-a-une-greffe-de-leurs-organes-apres-leurs-deces-Il-est_a3128.html

DR. MARC ANDRONIKOF, MEDECIN AUX URGENCES
Marc Andronikof, chef de service des urgences de l'hôpital Antoine Béclère de Clamart nous fait part dans un ouvrage intitulé "Médecin aux urgences"* de ses réflexions sur des sujets comme l'euthanasie, les greffes d'organe, la bioéthique ou l'acharnement thérapeutique. Ce livre bouscule le consensus sur les avancées scientifiques et sur les capacités qu'elles ont à résoudre les problèmes auxquels nous sommes confrontés.

Rédigé sous forme d'entretiens avec la journaliste Jacqueline Dauxois, Marc Andronikof revient notamment sur la question des greffes d'organes. Il dénonce que dans les services d'urgence on réanime à tout prix les patients dans le seul but de leur prélever leurs organes : "Moi, je suis hérissé de ne pas laisser les mourants mourir en paix, et, de plus il me semble que le médecin doit soigner et aider la personne qui se trouve là [...] au lieu de la sacrifier pour les autres".

Il explique également que c'est la mort qui conditionne l'autorisation de prélèvement. Depuis peu on a légiféré pour définir la mort comme la mort cérébrale alors qu'avant elle était définie en fonction de l'arrêt du coeur, du cerveau et de la respiration. Aujourd'hui les prélèvements sont donc autorisés sur des personnes en coma dépassé. Il est temps, estime t-il "de se demander si l'on ne recommence pas les erreurs tragiques du passé au lieu de se persuader qu'elles ne peuvent en aucun cas se produire de nos jours."

Marc Andronikof rappelle que le prélèvement d'organes est automatique si on n'a pas déclaré qu'on le refusait et dénonce la propagande pour la transplantation d'organes malgré de nombreux scandales.
Il revient au travers des cas concrets sur la frontière entre l'euthanasie et l'acharnement thérapeutique en rappelant qu'il y a des seuils qui dépendent de la conscience de chacun et de s'interroger en tant que médecin : "où est la fin d'une course quand les interventions techniques en reculent le terme constamment?"
Suite: http://www.genethique.org/?q=content/4809#.Vaewc_lS58M
2. P. Dimiri le 17/07/2015 03:03
Reprise de http://www.forum-orthodoxe.com/~forum/viewtopic.php?t=1907&highlight=bio%E9thique , la déclaration de l'Eglise de Grèce sur les transplantations, aux fins de constituer un dossier critique sur ce fil de discussion.

RÉPUBLIQUE HELLÉNIQUE

LE SAINT-SYNODE
DE L’ÉGLISE DE GRÈCE
Ioannou Genadiou 14 (115 21)
___________



POSITIONS FONDAMENTALES SUR b
L’ÉTHIQUE DES TRANSPLANTATIONS


i. Principes généraux
1) L’Église traite les transplantations, ainsi que tout ce qui se réfère à la santé de l’être humain et à sa lutte contre la mort, avec beaucoup de sympathie, de la compréhension et du sérieux. Elle a conscience des dimensions du problème et des possibilités offertes par les transplantations, ainsi que de son grand devoir face à la société, à la pratique médicale, aux receveurs mais aussi aux donneurs potentiels. Elle désire aussi bien venir en aide du receveur qu’elle se doit de respecter le donneur.
2) Le critère de l'éthique ecclésiastique au sujet des transplantations est, comme pour tout autre problème, spirituel. Elle rejette sans réserve ce qui nuit à l’âme et dégrade les valeurs spirituelles. Au contraire, si une réussite scientifique particulière s’avère compatible à sa tradition, son enseignement et son expérience théologiques, elle traite de cette découverte ingénieuse avec l’audace de son originalité spirituelle. Elle n’a rien à voir avec l'académisme rationnel, elle ne recule pas devant des intérêts politiques, et elle ne verse pas dans la sécularisation.
3) L’Église protège et soutient tout ce qui transcende l’individualisme et l’attachement aux plaisirs et qui relie les êtres humains par des liens de réciprocité et de communion (participation), tout ce qui démontre la supériorité de la vie spirituelle par rapport à la survie biologique. Elle considère cependant avec le même respect et la même sensibilité le mystère de la vie et de la mort, ainsi que l’inhérence psychosomatique de l’homme.
ii. Principes particuliers
4) Les transplantations transforment le drame du receveur en espoir de vie. De par son caractère philanthrope, l’Église pourrait les bénir, du moment cependant qu’existe lors de la procédure de greffage la condition non négociable de la protection de la conscience du donneur et du respect des valeurs spirituelles.
5) Tout raisonnement pour l’acceptation des transplantations par l’Église s’articule autour de trois axes :

i) Tout en ressentant son devoir philanthropique envers le receveur –qui a besoin de vivre-, l’Église ressent davantage son rôle au côtés du donneur –qui est en mesure d’offrir de son propre gré. En aucun cas et sous aucun prétexte, elle ne sacrifie le respect envers le donneur pour le besoin de survie du receveur. L’objectif n’est pas que le receveur vive, mais que le donneur offre. Le receveur reçoit un corps mortel; le donneur offre une partie de son âme immortelle. Autant l’âme est supérieure au corps, autant le gain spirituel du donneur est supérieur au gain biologique du receveur. « Il y a plus de bonheur à donner qu'à recevoir. » (Actes 20.35)
ii) Le don d’organes exige le «consentement à bon escient» du donneur de manière absolue, c’est-à-dire que le donneur doit en toute connaissance de cause, librement et sans contraintes avoir consenti à l’ablation de ses organes, si pour une raison quelconque il en arrive à la mort cérébrale. Le donneur doit agir en tant que donateur. Et
iii) L’Église ne peut accepter les transplantations que dans une ambiance d’amour, d’altruisme, parfois même d’ un esprit de sacrifice de soi-même, d’échappement du cercle vicieux de l’amour propre et de l’égoïsme –jamais d’un raisonnement utilitaire ou matériel qui écarte le «donneur» de son offre.
A la suite de ces considérations, les transplantations sont traitées comme une raison de transmission de la vie à certaines personnes, mais avant tout comme une occasion de transfusion d’éthique spirituelle à la société.
iii. Le rôle de la médecine
6) La médecine se penche sur le rétablissement ou l'amélioration de la santé humaine et, par extension, sur la prolongation de la vie de l’homme. La théologie n’empêche pas la médecine dans cet effort mais n’ignore pas non plus son caractère relatif. Elle détermine en même temps certaines conditions pour son développement et sa pratique appropriés. Ces conditions sont les suivantes : i) Le respect de la personne, et ii) le bien d’autrui.
7) De même, la médecine en tant que science, mais aussi la recherche médicale, doivent être réalisées dans le cadre des règles médicales et bioéthiques qui protègent l’être humain en tant que personnalité. Les médecins doivent remplir leurs fonctions avec humilité et une conscience profonde de leur rôle d’instruments de Dieu au service de l'homme.
iv. La possibilité de donner des organes
8) La vie est un don de Dieu qui nous est offert non pas pour servir notre amour propre et notre possessivité, mais pour qu’elle soit si bien la nôtre que nous puissions (pour pouvoir) l’offrir avec amour. Le meilleur moyen pour la restituer à Dieu est de l’offrir avec amour à autrui («On ne peut être sauvé que par autrui » (Saint Macaire l’Égyptien).
9) L’esprit (La conviction) et la volonté de s’offrir soi-même constituent l’axe spirituel de la morale de l’Église au sujet des transplantations. Le discours apostolique « Nous avons connu l'amour, en ce qu'il a donné sa vie pour nous; nous aussi, nous devons donner notre vie pour les frères » (1 Jean 3 :16) dissout tous les doutes que le don de la vie et, par conséquent, le don du corps ne sont pas des actes de suicide ou d’euthanasie mais peuvent constituer des expressions du «grand amour», dont parle le Seigneur en personne lors de Ses dernières directions à ses disciples; «Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis (Jean 15:13). Le don de la vie est ce qui est le plus important; le don des organes est le moindre béni. Ces références hagiographiques transfèrent la problématique morale de la définition pedantesque (minutieuse) de la mort cérébrale au respect et à la libre expression de la maitrise (possibilité de disposer) de soi-même.
10) Dans le cas donc où quelqu’un souhaiterait donner ses organes, même si la mort cérébrale ne s’identifiait pas à la séparation définitive de l'âme par rapport à son corps, en même temps que ses organes il donnerait sa vie. Son acte ne comporterait pas uniquement l’élément du don, mais aussi celui du sacrifice de soi-même.
11) L’Église se prononce en faveur et encourage le don d’un de nos doubles organes (reins) ou des tissus (peau, moelle épinière, sang) par un donneur en vie.
v. La mort cérébrale
12) L’Église éprouve du respect et a confiance en la recherche médicale et la pratique clinique. Pour cette raison et bien qu'elle ne soit pas compétente en la matière, elle pourrait accepter l'avis unanime sur le plan international que la mort cérébrale s'identifie à la fin biologique irrévocable de l'être humain.
La mort cérébrale constitue une destruction définitive et irréversible du cerveau et un état de perte absolue des sens et de la conscience. Ainsi, la respiration ne s'effectue qu'artificiellement, et arrêt de la ventilation mécanique signifie l’arrêt pratiquement immédiat du fonctionnement du cœur.
13) Ce qui est en réalité effectué par le soutien artificiel de la respiration est le retardement provisoire du processus de la décomposition du corps, mais non pas de l’échappement de l’âme.
14) Il faut absolument distinguer la mort cérébrale de l’état végétatif chronique –habituellement dénommé «mort clinique». Selon cette distinction, le tronc cérébral fonctionne et, la plupart du temps, la ventilation artificielle n’est pas nécessaire.
15) Vu qu’il existe toujours le danger –heureusement dans certains cas rarissimes- d’inadvertance, d’erreur ou encore de manque de respect par rapport à la mort, l’Église, de même que la majorité des médecins et des soignants et des instances sociales compétentes en la matière, exige la garantie du respect absolu des critères internationalement acceptables pour le diagnostique de la mort cérébrale. Ainsi donc :
i) il est nécessaire de constater de manière documentée et claire les causes de la mort cérébrale;
ii) il faut que la certification de la mort cérébrale soit effectuée par un comité d’experts qui n’entretient aucune relation avec les équipes de transplantation, et ce conformément aux critères cliniques et de laboratoire en vigueur.
iii) Les critères de constatation de la mort cérébrale ne sont pas suffisants, s’ils sont uniquement cliniques. Il faut qu’ils résultent également des tests de laboratoire (tomographie axiale et un électro-encéphalogramme) afin de confirmer, dans la mesure du possible, non seulement l’arrêt des fonctions du tronc cérébral mai aussi du cortex. En cas de non constatation de causes apparentes d’une lésion cérébrale, il faut recommencer les examens pour s’assurer, même si ce retard risquerait d’entraîner la perte (une détérioration) des organes.
iv) Avant ces procédés pour la confirmation de la mort cérébrale, il est nécessaire que soient réalisés les examens biochimiques présentant des valeurs normales (pas d'urée ni de désordres électrolytiques). De même, il faut laisser écouler 24 heures du moment où survient l'événement pour pouvoir vérifier la mort cérébrale.
16) La vérification si quelqu’un est donneur (à savoir s’il y a consentement) ne doit avoir lieu qu’après le diagnostique définitif de la mort cérébrale, afin que la vérification puisse être le plus objective et libre de toute influence que possible.
17) Suite à tout ce qu’a été précité, le don d’organes de donneurs morts de cerveau, ainsi que la décision pondérée et consciente d’un être humain en bonne santé de donner un de ses organes à une personne en souffrance, sont en tant qu’actes d’altruisme et d’amour conformes à l’enseignement et aux convictions de notre Église.

vi. Consentement à bon escient ou présumé
18) Le don présuppose le «consentement à bon escient» du donneur en termes de ses actes. Tout ce qui «présume» sa volonté constitue une intervention à sa possibilité de disposer de soi-même et ne peut être acceptable.
19) Le «consentement à bon escient» est un acte d’abnégation et d’amour reliant le donneur au fait de sa mort qui survient de manière tragique à un âge relativement jeune. Il inclut également les vertus du désintéressement, de la concession des droits naturels, de la confiance et de l’intérêt pour autrui, du don de soi-même à autrui et de la délivrance de l’attachement aux plaisirs de la vie.
20) A travers son soin pastoral en matière de transplantations, l'Église serait éventuellement en mesure d'obtenir un certain nombre de greffes, contribuant ainsi à la survie d'un nombre équivalent d’êtres humains (selon le taux de réussite des interventions relatives). Compte tenu de la condition nécessaire du consentement à bon escient, le nombre de ceux qui font l’objet d’une culture spirituelle est bien plus élevé –ceux qui ont à bon escient exprimé leur consentement. Ceux-là ne représentent cependant qu’un nombre très réduit de donneurs; l’Église se tourne non seulement vers les donneurs effectifs mais aussi potentiels.
Le donneur fait peut-être du bien par son don, mais cet acte de consentement lui est avant tout bénéfique. Il sauve sur le plan biologique le receveur, mais il se sauve spirituellement lui-même.
21) Le consentement n’est pas un acte secondaire qui pourrait être éclipse par un autre (par ex. recensement, émission d’une carte d’identité, etc.). Son expression doit être libre et parfaitement consciente, le fruit d'une réflexion mûre. Pour cette raison, il serait bon qu'elle soit exprimée en toute indépendance par rapport à tout autre acte sociale, avec la condition nécessaire de l'information accomplie et sans contraintes.
vii. Consentement de la famille
22) Dans certaines conditions et par dispensation, l’Église pourrait accepter dans la perspective du caractère sacré des relations parentales et du développement souhaité des relations de communion, la substitution de la volonté du donneur par sa famille, pour autant que celle-ci n'aille pas à l'encontre de la sienne. La providence des parents constitue une expression de foi (« Si quelqu'un n'a pas soin des siens, et principalement de ceux de sa famille, il a renié la foi, et il est pire qu'un infidèle » (Α´ Tim.5´ 8), et les obligations relatives envers eux une preuve des droits parentaux sacrés.
La vie du donneur et la valeur de son corps sont éventuellement plus importantes pour sa famille que pour lui-même. Compte tenu de l’amour, il est peut-être plus difficile de décider du don du corps d’autrui que de notre propre corps. Dans ce sens là, c’est la famille qui constitue le donneur réel.
23) Étant donné que dans notre société et de nos jours interviennent de manière profanatrice toute sorte d’intérêts, essentiellement financiers, même dans les plus sacrées des relations, la loi doit se soucier de prévenir tout soupçon de commercialisation des greffes de la part de la famille.
24) Il serait souhaitable que, dans le cadre de toute procédure de signature de son consentement, le donneur puisse octroyer à l'avance le droit de la disposition de son corps à sa famille.
viii. Les réserves de l’Église
25) Considérant d’une part l’évolution des sciences de la communication et de l’informatique (internet, sauvegarde de fichiers informatisés avec un large éventail de données et peu de possibilités de contrôle, etc.) et, d’autre part, le déficit spirituel des sociétés contemporaines, qui peuvent conduire à la maltraitance, à l’exploitation ou au sacrifice des transplantations à l’autel des grands intérêts financiers, l’Église se doit de protéger cette institution, l’acte et les personnes concernées contre une éventuelle profanation (diagnostique précipité ou respect peu rigoureux des critères de mort cérébrale, commercialisation ou tout échange de quelconque nature se rapportant au don d’organes, la sélection de donneurs à base de critères racistes, la violation de listes d’attente, etc.).
26) Pour éviter les violations des listes d’attente, il faudrait constituer un registre informatisé d’enregistrement des donneurs qui serait contrôlé régulièrement par un mécanisme centralisé irréprochable.
27) Alors que pour protéger les implantations contre la menace de commercialisation, la législation grecque et internationale impose l’anonymat du receveur et du donneur et interdit le don d’organes à une personne de son entourage ou de sa famille déterminée par le donneur (à l’exception des greffes de reins par un donneur en vie), cela ne s’oppose pas nécessairement à la morale de l’Église chrétienne orthodoxe.
28) L’Église ne peut consentir à l’abstraction d’organes de bébés souffrant d’anencéphalie congénitale. Ces donneurs sont très rares, ce qui diminue les espoirs des bébés receveurs. Néanmoins, ces bébés anencéphaliques ne souffrent pas d’un manque de tronc et, dès lors, ne sont pas morts de cerveau et, comme ils n’ont pas de conscience, ils ne sont pas en mesure de donner leur consentement –et naturellement personne ne peut la présumer. Cela crée un obstacle juridique pour l’abstraction d’organes. De plus, la société doit rejeter toute appréciation utilitaire de ces bébés, car la nécessité de les respecter ne laisse pas de marge pour considérer leur passage de ce monde uniquement utilitaire.
29) En ce qui concerne la possibilité d’utiliser des organes artificiels ou des xeno-greffes (de greffes d’origine animale génétiquement traitées), ainsi que de produits de clonage, étant donné que la recherche n’a pas encore donné des résultats concrets et que son évolution n’est pas très claire, le Comité de Bioéthique se réserve de présenter au moment approprié ses positions et ses points de vue à ce sujet.
30) En raison d’une morale relâchée partout dans le monde face à l’euthanasie et de la tendance à l’instituer juridiquement, il existe un danger dans l’avenir immédiat de mettre en relation les transplantations avec l’euthanasie. Ainsi, des personnes choisissant ce mode pour mettre fin à leur vie pourraient éventuellement être considérées comme des donneurs d'organes. Voilà une raison supplémentaire pour que la législation en matière de transplantations dispose absolument d’un haut niveau idéologique.
ix. Critique à l’encontre de la nouvelle loi pour les transplantations
Alors que l’Église est favorable à la notion des transplantations, elle ne peut cependant pas consentir à leur récente protection par la loi dans notre pays, conception dominée par l’utilitarisme et le rationalisme étroit. Le seul moyen de protéger la morale et la pratique des transplantations d’une potentielle maltraitance réside en une législation claire, étudiée, idéologique et non pas utilitaire.
31) Dans la loi qui a récemment été votée, le législateur interprète le «non-refus» de la famille comme un consentement de la part du donneur Art. 12, par. 4). Les organes ne sont pas retirés avec le consentement de la famille, mais lorsque celle-ci «ne s’y oppose pas». Les transplantations ne peuvent pas se baser sur un «non-refus», et ce de la famille, lorsqu’en même temps nous essayons tous à recevoir le consentement, et notamment celui du donneur.
32) Dans ce cas, le manque ou l’incapacité de localiser la famille pourrait être interprété comme un «non refus». Par conséquent, toute personne étrangère étant victime de mort cérébrale, tout immigrant clandestin, tout inconnu ou personne abandonnée, tsiganes, etc. –dont le nombre est considérable et dont les parents soit ne se trouvent pas en Grèce soit il est difficile de les localiser- ou toute personne se retrouvant à l’hôpital après un accident de la route et dont la famille n’a pas connaissance des faits, pourraient être automatiquement considérée comme donneur. Faudrait-il ajouter à la misère de leur solitude l’abstraction arbitraire de leurs organes? Dès lors, la loi du «non-refus» devrait constituer une extorsion de la conscience.
33) Le «consentement» n’a rien à voir avec le «non refus». «Donner ce qui m’appartient» est tout à fait différent de «je suis privé de ce qui m’appartient». Dans le deuxième cas, la volonté de l’Etat et de la société vient remplacer en tant que droit l’expression de la liberté individuelle.
34) L’État n’a aucun droit d’intervenir dans la sphère intime de la vie des citoyens. Un tel acte contrevient aux articles 2, par. 1 (sur le respect et la protection de la dignité humaine) et 5, par. 1 (sur le libre développement de la personnalité de l’homme) de la Constitution.
35) Par ailleurs, il ne peut pas obliger le citoyen de s’exprimer sans pour autant garantir son droit de ne pas s’exprimer. Quelles seraient les conséquences si le citoyen refusait d’exprimer sa volonté?
36) La substitution du terme de «mort cérébrale» par «nécrose du tronc cérébral» est contestée sur le plan médical et considérée idéologiquement suspecte. C'est la constatation de la pause des fonctions non seulement du tronc cérébral, mais aussi du cortex, qui confirme l’arrêt irréversible de l’ensemble des fonctions cérébrales, et c’est pourquoi elle est indispensable.
37) L’arrêt obligatoire, décrété par la loi, du soutien artificiel de la fonction respiratoire dans le cas d’une personne victime de mort cérébrale, n’étant pas un donneur Art. 12, par. 6) est spirituellement et moralement antidéontologique. La loi doit protéger et certainement ne pas pénaliser le médecin qui, pour des raisons de conscience, ne souhaite pas interrompre le soutien artificiel de la respiration (Art. 20, par. 1).
38) La difficulté de la famille de consentir au don du corps, due à des raisons personnelles, sentimentales ou même philosophiques, doit être absolument respectée et ne doit pas être sujette au chantage de la menace de l’interruption du soutien artificiel (Art. 12, par. 6).
x. Les possibilités pastorales de l’Eglise
39) Selon les principes précités, l’Église doit lutter pour la dominance de ses principes et l’influence positive sur la politique pour les transplantations, et doit créer sa propre tradition spirituelle en matière de transplantations qui sera orientée vers les besoins spirituels de don des sentiments du donneur. De cette manière, trouver des greffes et promouvoir les transplantations ne constituera plus l’objectif recherché, mais un résultat naturel.
40) L’Église peut organiser des programme de formation de donneurs, afin de cultiver en ses croyants des vertus importantes (la mémoire de la mort, le don de soi-même, l’esprit de sacrifice, etc.). De cette matière, elle va témoigner de façon absolument novatrice de sa morale dans la société contemporaine.
41) L’Église ne sacrifie pas la vérité et ne subjugue pas la personne. Si quelqu'un souhaite devenir donneur, elle le bénit; si cela lui semble difficile, elle se montre compréhensive envers lui. Telle est la protection de la personne. Son esprit ne se subjugue pas à la nécessité des transplantations, mais se montre respectueux de la personne. Surtout de la personne en tant que donneur.
42) Elle respecte également et comprend parfaitement le désir naturel de ces patients qui désirent par la réception de greffes prolonger la durée de leur vie biologique, considérant que cela pourrait contribuer à leur accomplissement spirituel et à la raison de leur existence.
43) En raison de la dimension spirituel de l’acte du don corporel, il serait bon qu’avant l’acte même le prêtre de l’hôpital puisse lire une prière appropriée ou exécuter un acte sacral (chrême, signe de la croix, etc.).
44) Une formation relative d'orientation spirituelle pourrait également viser à la préparation du receveur, afin qu’il ne se sente pas uniquement comme le destinataire béni d’une greffe, mais aussi comme récepteur béni de l’amour d’un inconnu et de la grâce de Dieu.

45) A titre de conclusion, le soin pastoral de l’Église adressé aux donneurs, aux receveurs et aux médecins doit être tel qu’à travers tous ces moyens soit rendu hommage à Dieu, que les hommes soient spirituellement accomplis et que la maladie ou la prolongation de la vie constituent la condition nécessaire pour l’accomplissement du but le plus profond de leur création.
xi. Tactique proposée par l’Église
46) Il est généralement accepté que la parole et le rôle de l'Église dans l'évolution des transplantations en Grèce sont prépondérants. Les transplantations constituent sans doute l'un des rares sujets où l'État a besoin de l'assistance directe de l'Église. Cela signifie donc pour l'Église de droits substantiels mais aussi de grandes obligations.
47) Étant donné que les transplantations peuvent facilement faire l’objet d'abus et de violations des valeurs et des principes éthiques fondamentaux et qu’il existe une énorme différence d’éthique et d’approche entre la conception séculière et l’approche ecclésiastique, il va falloir que l’Église se montre très prudente dans ses actes et ses paroles.
48) Dans le cadre de sa coopération avec l’État, l’Église pose des conditions concrètes afin que ne lui soient pas imputés des décisions et actes séculiers, réalisés dans un objectif et un esprit tout à fait différents. Elle ne décidera d’organiser une journée des donneurs ou une campagne de soutien des transplantations, dans le but de rassembler le nombre le plus élevé de greffes, que lorsqu’elle disposera de garanties explicites pour le respect de ses principes et de ses conditions.
49) L’absence d’une prise de position ecclésiastique officielle à ce sujet a conduit à une acceptation ou à un refus arbitraires des transplantations par des personnes n’étant pas toujours habilitées de la représenter à cette occasion. Cela a provoqué une confusion, parfois même de la discorde, entre croyants et monde théologique.
Au moment actuel, l’Église déclare de manière claire mais discrète qu’elle pourrait, dans le cadre des principes théologiques précités, accepter l’idée des transplantations et qu’elle pourrait à travers celles-ci exercer son soin pastoral et diffuser son esprit et son éthique.
Par la suite, elle inviterait au dialogue et donnerait l’occasion de s’informer (séminaires organisés par des prêtres, discours, etc.), elle tenterait de cultiver un esprit de compréhension, d’entente et de large acceptation de ses positions théologiques fondamentales parmi ses fidèles, afin d’éliminer tout négativisme non justifié.
Une troisième démarche consisterait à la publication et la diffusion de brochures présentant et expliquant ses positions ou l’organisation d’un grand colloque ouvert à tous pour communiquer ses positions à notre société.
Enfin, elle procéderait à la publication d’une circulaire synodique résumant ses positions et propositions ecclésiastiques et exprimant clairement la forme et la mise en pratique de la morale chrétienne orthodoxe au sujet des transplantations.
50) En ce qui concerne la nouvelle loi, l’Église différencie sa position sans animosité, mais de manière prudente et claire, afin de ne pas nuire aux transplantations mais ne pas réduire non plus le poids de ses opinions. Elle a en même temps rendu publics ses points de vue quant aux sujets où elle a des réserves et des objections. De plus, elle est prête pour toute sorte d’interventions juridiques, elle demandera des amendements et des améliorations législatives telles, qu’elles garantiront les principes de son raisonnement et permettront son assistance substantive.
51) Une condition nécessaire pour qu’elle travaille aux côtés de l’Etat est que ce dernier prenne conscience de son énorme obligation de protéger juridiquement et pratiquement les transplantations contre toute forme d’inconscience, d'utilitarisme ou d’exploitation pécuniaire, et de garantir l’ intégrité scientifique, l’information et la formation des médecins et des acteurs concernés. De cette manière, le donneur ne fait plus la victime d’intérêts sordides, d’impiété ou de superficialité et d’ignorance scientifique.
52) De plus, la communauté médicale et l’État se doivent d'assister à la mise en oeuvre et la protection juridique de critères plus précis quant à la «mort cérébrale», dont le respect absolu doit être rigoureusement vérifié.
53) Par ailleurs, il est nécessaire d'instituer des centres sérieux et fiables pour les transplantations, disposant de l'infrastructure scientifique et technologique appropriée, afin que l’abstraction des organes du donneur et leur transplantation ultérieure au receveur approprié puissent être effectuées avec le meilleur taux de réussite et le moins de pertes possible.
54) L’Église fera de la sorte à être présente par ses représentants à des congrès scientifiques médicaux sur les transplantations, afin que ses connaissances restent à jour et qu’elles puissent présenter ses principes.
55) Enfin, son rôle et sa représentation au Conseil National des Transplantations -du moment que celui-ci subsiste- et à l'Organisation Nationale des Transplantations (Ε.Ο.Μ.) qui est actuellement mise sur pied, devra être central et interventionniste et non pas virtuel et secondaire. Son but serait que les centres de transplantations fonctionnent, dans la mesure du possible, avec ses propres principes du respect, de la liberté et de l'amour de la personne.
3. P. Dimiri le 17/07/2015 19:50
Concernant la déclaration conjointe des services des relations avec la société, de la bienfaisance et du service social du Saint Synode, trois petites observations :

1) Il s'agit d'une prise de position de principe relativement au don, rappelant les fondements de l'attitude chrétienne dans un contexte général.

2) Il ne s'agit pas d'une position officielle de l'Église russe , normative sur le plan pastoral, car d'une part il faudrait les considérants théologiques et d'autre part toute la casuistique du contexte particulier. En plus je suppose que cette prise de position ferait l'objet d'une publication à l'attention des pasteurs et des fidèles, validée par le saint synode et non par des instances subordonnées.

3) Au moment de la rédaction de cette prise de position on remarque clairement que non seulement la loi russe n'était pas sous toît, mais que les articles en consultation contenaient de graves lacunes. De là certainement son caractère inachevé.

Ceci ne lui enlève évidemment pas son caractère de cadre, invitant à un réflexion en profondeur sur la portée de la notion de don de soi et d'abnégation qui sont les reflets dans l'humanité du modèle parfait du sacrifice ultime de notre Seigneur Jésus-Christ.
4. Vladimir. G: LA POSITION DE L''''ÉGLISE RUSSE (suite) le 17/07/2015 21:38
En effet, le débat était en cours et je n'avais postè que le début du texte d'Interfax.
Voici la suite:

L’Eglise constate que le nouveau projet de loi sur les dons d’organes est nettement plus avancé que la loi en vigueur mais laisse cependant à désirer. Le projet admet, par exemple, les prélèvements d’organes et leurs greffes non seulement dans les hôpitaux publics mais aussi dans les cliniques privées. Des abus ne sont donc pas à exclure.

Le projet autorise également les greffes d’organes appartenant à des enfants. Il précise qu’en l’occurrence le prélèvement ne peut se faire qu’avec l’assentiment des parents de l’enfant décédé. L’Eglise constate que « le texte exprime cette disposition sous un autre libellé. Au cas où l’enfant décède dans un hôpital l’un des parents est immédiatement avisé et son accord est sollicité pour que l’on puisse procéder à un prélèvement. Il est évident que l’annonce du décès traumatise les parents et qu’il est difficile dans ces conditions de s’attendre à des décisions mûrement réfléchies. Cependant si le parent ne renonce pas à son accord dans un délai de deux heures le prélèvement peut être effectué ».

Or, observe l’Eglise, le projet stipule que l’accord de l’un des parents est suffisant.
« Que se passe-t-il, demande l’Eglise, si l’un des parents exprime son accord alors que le deuxième parent refuse la greffe ? Cette disposition risque de provoquer de graves conflits ».

De très nombreuses personnes n’expriment pas de leur vivant leur consentement ou leur refus d’un prélèvement d’organe après leur décès. En l’occurrence les médecins doivent annoncer le décès à la famille dans l’heure qui suit. Le projet prévoit que le prélèvement devient possible si les médecins ne parviennent pas à établir dans l’heure qui suit le décès un contact avec les membres de la famille.

A propos de cette disposition l’Eglise russe estime que: « Les médecins ne sont pas tenus de préciser aux parents, à la veuve du défunt, par exemple, qu’elle est en droit de refuser un prélèvement d’organe. Le texte du projet est très confus en ce qui concerne les modalités de l’expression d’un tel refus. La veuve devrait dans cette situation appeler l’hôpital elle-même ou exprimer par écrit son refus de prélèvement. Que faire si le numéro de l’hôpital ne répond pas ? Et que la veuve se trouve à une distance telle qu’il lui est impossible de se rendre à l’hôpital dans les deux heures qui suivent le décès ? Si elle se trouve à l’hôpital, comment trouver un notaire ou, la nuit, le responsable de l’établissement sanitaire, pour officialiser son accord ».

La plupart de ces cas de figure ne surviendraient pas, estime l’Eglise, si l’on partait d’une présomption de refus de prélèvement. En effet, une telle approche protègerait mieux les intérêts et la santé des éventuels donneurs d’organes et contribuerait à une meilleure prise de conscience ainsi qu’à à la solidarité de la société civile.

Les pouvoirs publics, s’ils veulent sauver les vies de ceux qui ont besoin d’une greffe, doivent non seulement mettre en place les infrastructures sanitaires indispensables mais aussi mener une campagne d’explications qui ferait s’accroître le nombre des donneurs. Il convient également de simplifier au plus les formalités d’expression de consentement à la greffe. « Cette approche nécessite plus de temps et d’efforts mais ce n’est que si chaque membre de la société devenait conscient de sa responsabilité pour la vie d’autrui son don serait sincère et prendrait tout son sens ».

Source: http://www.interfax-religion.ru/?act=news&div=51518
Traduction " Parlons d'orthodoxie"
http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/L-Eglise-russe-invite-les-citoyens-a-exprimer-leur-accord-a-une-greffe-de-leurs-organes-apres-leurs-deces-Il-est_a3128.html
5. Vladimir. G: position officielle de l''''Église russe le 17/07/2015 22:25
Il y a bien un document officiel et normatif de l'Église russe sur le sujet: "Les bases de la conception sociale de l’Eglise orthodoxe russe", adopté par le Concile épiscopal des 13-16 août 2000 (lien). Le préambule dit: "Le document reflète la position officielle du Patriarcat de Moscou sur ses relations avec l’état et la société civile. Il établit enfin une série de principes directeurs s’appliquant à l’épiscopat, aux clercs et aux laïcs. Le document entend servir les besoins du Plérôme de l’Eglise orthodoxe russe sur une longue période historique, tant sur le territoire du Patriarcat de Moscou qu’hors de ses frontières. Il traite donc essentiellement de questions théologiques et ecclésio-sociales, ainsi que des aspects de la vie des états et des sociétés qui étaient et demeurent actuels pour la plénitude de l’Eglise à la fin du XXe siècle et dans un futur proche."

Le titre XII traite des questions de biotique introduites par:

"12.1) Le développement rapide des technologies biomédicales envahissant la vie de l’homme moderne de la naissance à la mort, ainsi que l’impossibilité de fournir une réponse aux problèmes moraux soulevés dans le cadre de l’éthique médicale traditionnelle, posent à la société une sérieuse interrogation. Les tentatives de l’homme de se mettre à la place de Dieu, en modifiant et en «améliorant» la création de son propre arbitraire, peuvent apporter à l’humanité de nouvelles peines et de nouvelles souffrances. Le développement des technologies biomédicales, dont l’emploi incontrôlé dépasse sensiblement l’interprétation des possibles conséquences morales, spirituelles et sociales, ne peut pas ne pas susciter la profonde préoccupation pastorale de l’Eglise. En formulant son attitude face aux problèmes bioéthiques largement discutés dans notre monde et en premier lieu à ceux qui ont une action directe sur l’homme, l’Eglise s’appuie sur la Révélation divine qui présente la vie comme don incomparable de Dieu, sur le concept de liberté imprescriptible et de dignité de la personne humaine à l’image de Dieu, appelée, «en vue du prix que Dieu nous destine à recevoir là-haut dans le Christ Jésus» (Phil 3, 14), à la perfection du Père Céleste (Mt 5, 48) et à la divinisation, c’est à dire à communier à la nature divine (2 P 1, 4)."

Voici les articles concernant la "transplantologie":

12.7) La transplantologie contemporaine (théorie et pratique de la transplantation d’organes et de tissus) permet d’apporter une aide efficace à bien des malades réduits sans cela à une mort inévitable ou une lourde invalidité. D’autre part, le développement de cet aspect de la médecine, en augmentant la nécessité d’organes, engendre certains problèmes moraux et peut présenter un danger pour la société. Ainsi, une propagande éhontée en faveur du don d’organes et la commercialisation de la transplantation créent les conditions du commerce des parties du corps humain, mettant en danger la vie et la santé des personnes. L’Eglise considère que les organes humains ne peuvent être regardés comme un objet d’achat et de vente. La transplantation d’organes d’un donneur vivant ne peut être effectuée que dans le cas du sacrifice volontaire du donneur pour la vie d’un autre homme. Dans ce cas, l’explantation (retrait d’organe) devient une manifestation d’amour et de compassion. Cependant, le donneur potentiel doit être pleinement informé des conséquences possibles de l’explantation d’organes sur sa santé. L’explantation d’organe entraînant un danger direct pour la vie du donneur est moralement inacceptable. Le retrait d’organe se pratique plus couramment sur des personnes venant de mourir. Dans ce cas, l’instant de la mort doit avoir été exactement déterminé. Il est inacceptable d’abréger la vie d’un homme, y compris en refusant la procédure de maintien artificiel, dans le but de prolonger celle d’une autre personne.

S’appuyant sur la Révélation divine, l’Eglise confesse la résurrection des corps (Is 26, 19; Rom 8, 11; 1 Cor 15, 42-44, 52-54; Phil 3, 21). Dans le rite des funérailles chrétiennes, l’Eglise exprime tout le respect dévolu au corps de la personne défunte. Cependant, le don d’organes et de tissus après la mort peut apparaître comme une manifestation d’amour par delà la mort. Semblable don et testament ne peut être considéré comme une obligation. C’est pourquoi l’accord volontaire donné durant la vie du donneur est la condition de la légitimité et de l’acceptabilité de l’explantation. Dans le cas où la volonté du donneur potentiel est inconnue aux médecins, ils doivent éclaircir les intentions du mourant ou du défunt, en s’adressant au besoin aux membres de la famille. L’Eglise considère comme une violation inacceptable de la liberté de l’homme la présomption d’accord du donneur potentiel au retrait d’organes et de tissus, fixée par la législation de nombreux pays.

Les organes et les tissus du donneur sont assimilés par le malade récipiendaire, y compris dans la sphère de son unité psycho-corporelle. C’est pourquoi ne peut être en aucun cas moralement justifiable toute transplantation capable de représenter une menace pour l’identité du récipiendaire, touchant à son caractère de personne unique et de représentant du genre humain. Cette condition est essentielle dans la résolution des questions liées à la transplantation des tissus et organes d’origine animale.

L’Eglise considère comme naturellement inacceptable l’utilisation des méthodes dites de thérapie fœtale, fondées sur le retrait et l’utilisation des tissus et organes des embryons humains, avortés à différents stades de développement, pour tenter de soigner certaines maladies ou de «rajeunir» l’organisme. En le condamnant comme un péché grave, l’Eglise ne considère pas comme une justification à l’avortement le fait que de l’anéantissement d’une vie humaine à peine conçue, quelqu’un puisse, peut-être, en retirer un avantage pour sa santé. En favorisant inévitablement une expansion encore plus large et une commercialisation de l’interruption volontaire de grossesse, cette pratique, (même si son efficacité, qui reste actuellement hypothétique, était scientifiquement démontrée) est un exemple criant d’amoralité et porte un caractère criminel.

12.8) La pratique du retrait d’organes humains aptes à la transplantation, ainsi que le développement des techniques de réanimation posent le problème de la constatation exacte du moment de la mort. On considérait autrefois l’arrêt définitif de la respiration et de la circulation du sang comme un critère fiable. Cependant, grâce au perfectionnement des techniques de réanimation, ces fonctions vitales importantes peuvent être artificiellement maintenues sur une période prolongée. Le fait de mourir devient ainsi un processus dépendant de la décision du médecin, ce qui donne à la médecine contemporaine une nouvelle responsabilité qualitative.

Dans l’Ecriture Sainte, la mort est présentée comme la séparation de l’âme et du corps (Ps. 145, 4; Lc 12, 20). Ainsi peut-on parler de continuation de la vie tant que se poursuit l’activité de l’organisme comme un tout. La prolongation de la vie par des moyens artificiels, où seuls fonctionnent quelques organes, ne peut être regardée comme une obligation ni dans tous les cas comme un objectif souhaitable de la médecine. Le retardement de l’heure de la mort ne fait souvent que prolonger les souffrances du malade, privant la personne du droit à cette fin digne, «sans honte et paisible», que les orthodoxes demandent à Dieu au cours de leurs services liturgiques. Lorsque la thérapie active devient impossible, elle doit être remplacée par des soins palliatifs (traitement de la douleur, soins, soutien social et psychologique) ainsi que par un travail pastoral. Ces différentes mesures ont pour but d’assurer au malade une fin de vie pleinement digne, adoucie par la miséricorde et l’amour.

Le concept orthodoxe de «fin sans honte» comprend la préparation à la mort, regardée comme une étape spirituellement importante de la vie de tout homme. Le malade, entouré de sollicitude chrétienne, est capable dans les derniers jours de son existence terrestre d’éprouver un changement spirituel en réévaluant le chemin parcouru et se repentant devant l’éternité. Pour les parents du mourant et le personnel médical, les soins patients rendus à un malade sont l’occasion de servir le Seigneur Lui-même: «Ce que vous avez fait à ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait» (Mt 25, 40). Priver le patient d’information sur la gravité de son état sous prétexte de préserver son confort moral équivaut souvent à le priver de la possibilité de se préparer à la fin et de trouver une consolation spirituelle dans la participation aux sacrements de l’Eglise; c’est aussi couvrir de méfiance ses relations avec ses proches et ses médecins."

Fin de citation
Source: http://orthodoxeurope.org/page/3/6.aspx
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