Intervention de Monseigneur Nestor, évêque de Chersonèse (PM), à la Table ronde de l’OLTR consacrée à la mémoire de Monseigneur Serge (Konovaloff)

Parlons D'orthodoxie

Intervention de Monseigneur Nestor, évêque de Chersonèse (PM), à la Table ronde de l’OLTR consacrée à la mémoire de Monseigneur Serge (Konovaloff)
Chers pères, chers frères et sœurs,

C’est avec joie que j’ai accepté de participer à la Table ronde consacrée à Mgr Serge (Konovaloff) de bienheureuse mémoire. La possibilité m’est offerte de contribuer, ne fût-ce que modestement, à cette heureuse initiative. Nous nous devons de maintenir le souvenir d’un homme remarquable, d’un bon pasteur qui a tant souffert pour « nos malheureuses paroisses», selon sa propre expression, qui se sentait grandement responsable pour son troupeau si divers, multiethnique et pluriculturel. Mgr Serge se sentait responsable de l’avenir du diocèse qui lui avait été confié.

Il nous incombe, et ceci jusqu’à présent, de continuer à réfléchir sur la personnalité de Monseigneur Serge, sur les orientations qui étaient les siennes, sur ses aspirations, ses souhaits pour son éparchie. Toutes ces questions restent aujourd’hui d’actualité.

Il faut commencer par préciser que c’est avec la bénédiction de Mgr Serge que je me suis retrouvé en France. Un groupe de prêtres parisiens avait pris l’initiative de demander aux écoles de théologie de Moscou d’envoyer à Paris deux jeunes hiéromoines pour assister l’archevêché.

Mgr Serge avait validé cette proposition. Au lieu de deux étudiants un seul fut choisi, c’était moi. Notre première rencontre avec Mgr Serge se situe fin 1999, dans les semaines qui suivaient mon arrivée à Paris. Peu après Noël je fus invité par Mgr Serge pour prendre le thé. A sa demande je m’étais déjà mis à officier à l’église du Christ Sauveur à Asnières. Le thé qu’il offrait, il le faisait infuser lui-même, était très bon et très fort.

Intervention de Monseigneur Nestor, évêque de Chersonèse (PM), à la Table ronde de l’OLTR consacrée à la mémoire de Monseigneur Serge (Konovaloff)
Tout lui en témoignait de sa simplicité. Dès ce premier contact et jusqu’au bout, il s’est montré à avec moi ouvert et constamment bienveillant. Jamais je ne l’ai vu en colère ou tout simplement irrité à mon égard. Il m’est arrivé d’être témoin de situations délicates, voire difficiles, pour Mgr Serge, immuablement c’est par la bienveillance qu’il réagissait.

J’ai bénéficié de son soutien constant pendant les trois ans que je suis resté rattaché à l’archevêché. Lors de notre première rencontre il a observé : « Vous ne pouvez pas vous imaginer ce que je ressens en conversant avec un jeune homme portant la soutane et la croix pectorale, capable de converser librement venant de là-bas, de Russie, et représentant la génération nouvelle ». Il m’avait fait part des sentiments qui l’avaient envahi lorsque, dans les rues de la capitale russe, un milicien avait spontanément sollicité sa bénédiction.

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Peu après cet entretien j’étais officiellement nommé à la paroisse d’Asnières. A la demande de Mgr Serge j’étais devenu membre à part entière du clergé de l’archevêché. Je continuais néanmoins à appartenir à l’Eglise orthodoxe russe ce qui ne m’empêchait pas de participer à toutes les réunions du clergé et d’y voter. Il y avait dans cette situation une certaine ambiguïté mais telle était la volonté de l’archevêque.
Je garde le souvenir de plusieurs offices célébrés rue Daru avec la participation de Mgr Innocent de Chersonèse, offices suivis par des réunions du clergé auxquelles prenaient part des prêtres de chacune des deux entités. Comment oublier Mgr Serge maniant l’encensoir lors de l’entrée épiscopale à l’église cathédrale des Trois Saints Docteurs lorsqu’y était célébrée la fête paroissiale !

Mgr Serge était venu officier à Asnières le jour anniversaire de la consécration de la paroisse. Lors des agapes l’archevêque ne restait jamais à sa place, il faisait le tour des convives s’entretenant avec chacun. Il a célébré la liturgie à Asnières en novembre 2002, peu avant de décéder. Surmontant sa faiblesse l’archevêque a manifesté sa joie de voir la paroisse croître et prospérer.

Ce jour-là les paroissiens lui offrirent une belle mitre ornée d’un aigle bicéphale byzantin. Jamais il n’a eu l’occasion de l’arborer alors qu’il avait manifesté son plaisir de recevoir ce cadeau. Mais il était quelque peu confus de la présence sur ce couvre-chef sacerdotal « d’un poulet byzantin », c’était sa propre expression, et il tenait à se débarrasser ce détail.

Intervention de Monseigneur Nestor, évêque de Chersonèse (PM), à la Table ronde de l’OLTR consacrée à la mémoire de Monseigneur Serge (Konovaloff)
Nous avons connu des moments de tension : je me suis rendu un soir dans son bureau de la rue Daru afin de lui poser une question. C’était précisément au moment où la paroisse de Rome passait à l’Eglise russe. J’ai trouvé Mgr Serge très ému et troublé. Je ne l’ai pas interrogé à ce sujet sentant qu’il n’avait pas du tout envie d’en parler.

Il aborda par contre le thème de la situation en Ukraine. Il craignait la répétition dans ce pays de la crise ecclésiale qu’avait connue l’Estonie en 1996. Peut-être pire, disait-il. Comment, dans ce contexte, devrait réagir l’archevêché ? Les relations avec l’Eglise orthodoxes russe lui tenaient à cœur, c’était quelque chose d’essentiel et de primordial… Lors de la célébration de l’anniversaire de l’église des Trois Saints Docteurs Mgr Serge était venue concélébrer avec le métropolite Cyrille, notre futur patriarche.

Parmi mes souvenirs les plus forts celui de la levée de l’interdit qui avait frappé le père Michel Ossorguine : l’archevêque avait trouvé en soi la force, la noblesse d’esprit et l’humilité indispensables pour passer outre ses sentiments personnels, au nom de l’unité ecclésiale et du maintien des bonnes relations avec l’Eglise orthodoxe russe.

L’unité ecclésiale, le développement des bonnes relations avec l’Eglise orthodoxe russe lui tenaient constamment à cœur. Son entourage le plus proche partageait cette attitude, je pense à ceux des prêtres qui pensaient comme lui, aux jeunes qui l’entouraient et qui lui étaient dévoués. Comment ne pas évoquer ici le père Sabba Toutounov, devenu depuis archimandrite. Mais je pourrais citer ici bien d’autres noms.

Je me souviens avoir eu à rédiger, avec mes paroissiens, une lettre de félicitations adressée au patriarche Alexis II au nom de notre paroisse d’Asnières et consacrée à la mémoire de la cathédrale du Christ Sauveur à Moscou qui avait été dynamitée à l’époque par le régime soviétique. Les temps avaient changé et la cathédrale avait été reconstruite à Moscou, elle devait être bientôt sanctifiée. La lettre se terminait par la phrase : « Nous voulons partager ce moment solennel avec l’Eglise russe à laquelle nous sentons que nous appartenons ». Mgr Serge remplaça cette phrase par : « avec laquelle nous sommes indissolublement liés dans l’esprit ».

En effet, Mgr Serge se sentait responsable de l’entité ecclésiale qui lui avait été confiée, de sa cohérence, il tenait à préserver l’unité de l’archevêché ainsi que ses traditions et la riche expérience pastorale qu’il avait accumulé, à maintenir les relations fraternelles, chaleureuses et non officielles entre le clergé et la hiérarchie et il comprenait qu’il donc impossible dire de l’une de ses paroisses qu’elle était une partie de l’Eglise russe.

Il a préféré parler des liens spirituels indissolubles qui s’étaient tissé entre nous, c’était à la fois plus précis et plus important. Mgr Serge était dans son esprit, dans ses intérêts culturels tourné vers la Russie, vers l’Eglise russe et c’était là l’un des fondements de sa personnalité. Pourquoi essayer d’imaginer comment les choses seraient si Mgr Serge avait vécu quelques années de plus ? Comme dit l’apôtre « les voies du Seigneur sont impénétrables ».

Le décès inattendu de Monseigneur a marqué la fin de toute une époque dans l’histoire de l’Orthodoxie en Europe occidentale. Son souvenir nous reste important, plus de dix ans se sont passés mais quand nous pensons au défunt nous éprouvons un regain d’espoir, une immense gratitude à Dieu qui a, en des temps difficiles, donné à son Eglise un pasteur remarquable, un homme d’une probité à toute épreuve, ignorant la ruse et disant la vérité en toutes circonstances. Au service de l’Eglise, il tenait à être tout pour tous.
Mémoire éternelle.

Je vous remercie.

Table ronde de l’OLTR le 12 décembre 2012
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"Parlons d'orthodoxie"
Mgr Serge Konovaloff, fils d’un Russe émigré en Belgique et d’une Hollandaise
Il y a 8 ans, le 22 janvier 2003 nous quittait l’archevêque Serge (Konovaloff)


Commentaires (2)
1. ОВЦС - Епископ Корсунский Нестор принял участие в круглом столе, посвященном памяти архиепископа Сергия (Коновалова) le 20/12/2012 21:44
12 декабря 2012 года в Париже по инициативе Движения за поместное Православие русской традиции в Западной Европе (OLTR) прошел круглый стол, посвященный памяти видного иерарха Русского Зарубежья – архиепископа Евкарпийского Сергия (Коновалова, 1941-2003). В течение десяти лет – с 1993 по 2003 год – владыка Сергий возглавлял Экзархат русских православных приходов в Западной Европе (Константинопольский Патриархат). Круглый стол был приурочен к 10-летию со дня кончины иерарха, который преставился ко Господу 22 января 2003 года.

В работе круглого стола принял участие епископ Корсунский Нестор, поделившийся своими воспоминании о владыке Сергии. В 2000-2004 гг., будучи студентом Свято-Сергиевского богословского института в Париже, будущий епископ Корсунский в сане иеромонаха нес пастырское послушание в Экзархате русских приходов под омофором архиепископа Сергия, который в 2001 г. назначил его настоятелем Храма Христа Спасителя во французском Аньере.

Архиепископ Сергий, по словам управляющего Корсунской епархией, всегда уделял особое внимание отношениям с Московским Патриархатом, чувствуя неразрывную духовную связь между вверенными ему приходами и Русской Православной Церковью. Это чувство было характерно не только для самого владыки Сергия, но и «для его ближайшего окружения, для единомысленных ему священников, для окружавшей его и преданной ему церковной молодежи, из которой, может быть, особенно стоит упомянуть о нынешнем архимандрите Савве (Тутунове)».

«Владыка Сергий и на духовном, и на культурном уровне был обращен к России, к Русской Православной Церкви, — сказал далее епископ Нестор. – Я думаю, эта была одна из глубоких основ его личности. Нет смысла рассуждать о том, как все могло бы сложиться, если бы владыка Сергий прожил еще несколько лет. Как говорит апостол, непостижимы судьбы Божии и неисследимы пути Его! (см. Рим. 11, 33) Очевидно, что с преждевременной кончиной владыки закончилась определенная эпоха, какой-то период в истории Православной Церкви в Европе».

На круглом столе также прозвучали выступления Владимира Коновалова, Василия Тизенгаузена, протоиерея Николая Ребиндера.

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Архиепископ Сергий (в миру Сергей Алексеевич Коновалов) родился 8 июля 1941 года в Лёвене (Бельгия) в семье русского и голландки.

Закончил философский факультет университета в Лёвене. С 1964 года профессор англо-французской филологии в Брюсселе. Преподавал иностранные языки и историю Древнего мира в средней школе в Брюсселе.

В 1967 году женился на Лидии Черненко, у них родилось трое детей.

В 1968 году архиепископом Сиракузским Георгием (Тарасовым) рукоположен во диакона к церкви святителя Николая в Брюсселе. В 1976 году возведен в сан протодиакона. В 1980 году рукоположен во священника архиепископом Евдокиадским Георгием (Вагнером). Был настоятелем Свято-Пантелеимоновского храма в Брюсселе и окормлял паству православного прихода в Шарлеруа. В течение многих лет являлся духовником в юношеских лагерях «Витязей» в Бельгии и во Франции.

В 1984 году овдовел. В 1985 году возведен в сан протоиерея. В 1990 году пострижен в монашество и возведен в сан архимандрита.

8 июня 1993 года избран главой Экзархата русских православных приходов в Западной Европе (Константинопольский Патриархат). 27 июня 1993 года рукоположен в сан епископа.

Скончался 22 января 2003 года после тяжелой болезни. Погребен 25 января в крипте Успенской церкви русского кладбища в Сент-Женевьев-де-Буа.

Служба коммуникации ОВЦС
2. Mgr Nestor de Chersonèse a participé à une table ronde dédiée à la mémoire de l’archevêque Serge (Konovaloff) le 22/12/2012 18:13
Le 12 décembre 2012, à l’initiative du Mouvement pour l’orthodoxie locale de tradition russe en Europe occidentale (OLTR) a été organisée à Paris une table ronde consacrée à la mémoire de l’archevêque Serge d’Eucarpie (Konovaloff, 1941-2003), hiérarque russe de premier plan.

Pendant dix années – de 1993 à 2003 – Mgr Serge était à la tête de l’Exarchat des paroisses orthodoxes russes en Europe occidentale (Patriarcat de Constantinople). La table ronde était associée au 10e anniversaire de la mort de Mgr Serge qui s’est présenté devant le Seigneur le 22 janvier 2003.
L’évêque Nestor de Chersonèse (P.M.) a participé a partagé ses souvenirs de Mgr Serge. Dans la période 2000-2004, en tant qu’étudiant à l’Institut de théologie Saint-Serge de Paris, le futur évêque de Chersonèse, alors hiéromoine, était placé sous l’autorité pastorale de l’Exarchat des paroisses russes sous la responsabilité de l’archevêque Serge qui, en 2001, l’a nommé recteur de la cathédrale du Christ-Sauveur à Asnières, non loin de Paris.



L’archevêque Serge, selon les propos du responsable du diocèse de Chersonèse, a toujours accordé une attention particulière à ses relations avec le Patriarcat de Moscou, se sentant responsable du lien spirituel indissoluble entre les paroisses qui lui sont confiées et l’Eglise orthodoxe russe. Ce sentiment était vrai non seulement pour Mgr. Sergius , mais aussi «pour son proche entourage, pour les prêtres partageant le même esprit, pour la jeunesse qui lui était dévouée parmi laquelle il est, peut-être, particulièrement utile de mentionner l’actuel archimandrite Sabba (Toutounov) » .

« Mgr Serge, tant au niveau spirituel que culturel, était tourné vers la Russie, vers l’Eglise orthodoxe russe –a dit ensuite l’évêque Nestor. Je pense que c’était l’un des fondements les plus profonds de sa personnalité. Cela n’a aucun sens de spéculer sur la façon dont les choses auraient pu tourner si l’évêque Serge avait vécu encore plusieurs années. Comme le dit l’Apôtre, les destins de Dieu sont insondables et impénétrables sont ses voies! (Rom. 11, 33). De toute évidence, avec la mort prématurée de Monseigneur, s’est terminée une époque déterminée dans l’histoire de l’Eglise orthodoxe en Europe. »

Lors de la table ronde, des exposés ont également été présentés par Vladimir Konovaloff, Basile de Tiesenhausen et l’archiprêtre Nicolas Rehbinder.

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L’archevêque Serge (dans le monde Serge Alekseevitch Konovaloff) est né le 8 juillet 1941 à Louvain (Belgique), il est le fils d’un père russe et d’une mère néerlandaise.
Il est diplômé de la Faculté de Philosophie de l’Université de Louvain. A partir de 1964, il devient professeur de philologie anglo-française à Bruxelles. Il enseigne les langues étrangères et l’histoire du monde antique au lycée de Bruxelles.

En 1967, il épouse Lydia Tchernenko, dont il eut trois enfants.
En 1968, l’archevêque de Syracuse George (Tarasov) l’ordonne diacre à l’église de Saint-Nicolas à Bruxelles. En 1976, il est élevé au rang de protodiacre. En 1980, il est ordonné prêtre par Mgr George (Wagner) d’Eudociade. Il était recteur de la paroisse Saint-Panteleimon Church à Bruxelles et était le pasteur de la paroisse orthodoxe à Charleroi. Pendant de nombreuses années, il était le père spirituel dans les camps de jeunesse « VITIAZ » en Belgique et en France.

En 1984, il devint veuf. En 1985, il a été élevé au rang d’archiprêtre. En 1990, il devint moine et fut élevé au rang d’archimandrite.
Le 8 juin 1993, il a été élu à la tête de l’exarchat des paroisses orthodoxes russes en Europe occidentale (Patriarcat de Constantinople). Le 27 juin 19993, il est élevé au rang d’évêque.

Il décède le 22 janvier 2003 après une longue maladie. Il a été enterré le 25 janvier dans la crypte de l’église de la Dormition de la Mère de Dieu au cimetière russe de Sainte-Geneviève-des-Bois.

Traduction « Parlons d’orthodoxie »
3. Mémoire éternelle à Mgr Serge (Konovaloff, + 22.01.2003 le 22/01/2016 21:10
Mémoire éternelle à Mgr Serge (Konovaloff, + 22.01.2003*
Вечная Память владыкe Сергию (Коноваловy, +22.01.2003)
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