Du rapprochement entre l'Eglise catholique polonaise et l'Eglise orthodoxe russe
Dimanche, le 9 septembre, un appel commun des évêques polonais et russes a été lu dans toutes églises de Pologne. Ce document a été signé trois semaines auparavant, au nom de l'Église catholique de Pologne et de l'Église orthodoxe de Russie, par l'archevêque Jozef Michalik, président de la conférence des évêques de Pologne, et le patriarche de Moscou et de toutes les Russies, Cyrille Ier, lors de sa visite historique à Varsovie. Cette Pologne et cette Russie, auxquelles on prête une méfiance réciproque notoire et fondée sur une longue expérience, engagent un processus de rapprochement.

Car, comme le relèvent les signataires, non seulement le voisinage pluriséculaire, mais également le riche héritage chrétien de l'Occident et de l'Orient réunit nos peuples frères. Je crois utile de donner quelques éclairages à cet événement majeur qui ouvre la perspective réelle d'un meilleur avenir, alors que nombreux sont ceux qui se posent la question si les affaires du monde, dont l'évolution actuelle de la Russie, vont dans la bonne direction. Faut-il considérer, au moment où la politique russe dans le monde se durcit visiblement, que l'Église prend la relève pour approcher ses voisins occidentaux ? Les changements, que nous espérons conjoncturels, laissent-ils la place à une approche plus apaisée et beaucoup plus structurelle ?

En effet, la volonté manifestée de réconciliation, de nature à accompagner un processus politique déjà engagé, a son rythme propre et résiste aux interférences.

Il est difficile de ne pas voir d'emblée dans cette initiative l'influence directe de la pensée de Jean Paul II. Dès le début de son pontificat, commencé en pleine guerre froide, le pape slave considérait l'Orient et l'Occident comme les deux poumons du corps de l'Église et appelait celle-ci à respirer avec ses deux poumons. L'ancien Premier ministre polonais Tadeusz Mazowiecki estime que cette expression se rapporte à la division du christianisme, tandis que notre interprétation a été, à tort, limitée à la division de l'Europe décidée à Yalta. "Pour nous, les Polonais", dit-il, "les habitants de l'Europe centrale étaient plus attachés à l'Occident, même si nous étions aussi liés à la culture orientale.

Le pape nous appelait à respirer avec nos deux expériences, y compris celle où nous étions de l'autre côté. Mais l'expression choisie par le pape va plus loin: elle se rapporte d'abord à la situation de l'Église, à sa division. Sans doute ce problème doit-il être résolu plus largement: au niveau politique, culturel et spirituel". Il faut retenir que l'appel des évêques apporte une réponse qui embrasse ces deux dimensions, œcuménique, entre les catholiques et orthodoxes, et nationale, entre les Polonais et les Russes. Déjà difficile à imaginer, le rapprochement polono-russe peut-il créer l'opportunité de progresser dans le dialogue interconfessionnel ? En ajoutant, à quatre siècles d'un voisinage troublé, les mille années de la fracture de schisme ? Ce rapprochement ne serait-il pas le plus bel hommage à Jean-Paul II, le pape polonais ?

En effet, le texte de l'appel commun, négocié pendant trois ans, se compose de trois chapitres : Dialogue et réconciliation – Passé dans la perspective de l'avenir – Ensemble face à de nouveaux défis.

Il est révolutionnaire et courageux pour certains, dont moi-même, et insuffisant pour d'autres, car il ne règle pas tout. Chaque mot a son poids, aussi a-t-on préféré éviter d'inventorier épisodes historiques et plaintes mutuelles et les laisser aux chercheurs. D'autres regrettent que le document ne se réfère qu'aux fidèles, laisse à l'écart les non croyants et favorise un enseignement moral trop strict. Enfin, certains craignent que le rapprochement entre les frères ennemis ne se soit fait au dessus des têtes des Ukrainiens, Biélorussiens et autres voisins. En trois pages nos évêques indiquent, en revanche, un vaste programme de réconciliation à accomplir entre les deux peuples. S'avançant sur un chemin si difficile, ou tant des plaies restent encore ouvertes, ils trouvent les mots les plus simples et les plus justes en les empruntant à la prière commune à tous les chrétiens: pardonnez-nous nos offenses, comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés. Ce qu'ils proposent n'est pas un simple accommodement, mais un changement mental. SUITE Le Monde

Rédigé par Parlons d'orthodoxie le 5 Octobre 2012 à 17:09 | 0 commentaire | Permalien



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