Le communiqué de l’exarchat des églises russes du patriarcat de Constantinople en Europe occidentale, intitulé "La Fédération de Russie choisit le moment de la Semaine Sainte pour réclamer la gestion de la cathédrale orthodoxe de Nice", nous paraît être une manœuvre de désinformation indigne:

Aussi, nous croyons opportun de publier ci-dessous les deux lettres adressées le 10 et le 31 mars dernier à l'avocat de l'ACOR par le cabinet Confino qui représente la Fédération de Russie.

Rappelons qu’il s’agit là d’une procédure civile n’ayant rien à voir avec le calendrier religieux.

l’équipe de rédaction


Destinataire: Monsieur Antoine CHATAIN Paris, le 10 mars 2010
Avocat à la Cour
STASI & ASSOCIES
2 avenue Hoche
75008 Paris

Mon Cher Confrère,
Le jugement rendu le 20 janvier 2010 par le Tribunal de grande instance de Nice a dit que la Fédération de Russie est le seul et légitime propriétaire de la Cathédrale russe orthodoxe de Nice et qu’elle est en droit de reprendre juridiquement l’exercice des attributs et charges de l’édifice depuis l’expiration du bail emphytéotique survenue le 31 décembre 2007.

Il a également dit que l’association est tenue d’effectuer les éventuelles remises en état à sa charge qui se révèleraient nécessaires ou d’en financer le coût.

L’exécution provisoire a été ordonnée.

Vous nous avez annoncé avoir interjeté appel.

Au regard de cette situation juridique, l’Etat que notre cabinet représente doit prendre maintenant des dispositions qu’implique le statut de propriétaire (notamment la souscription d’une ou plusieurs polices d’assurances propriétaire, la définition des travaux à entreprendre, la budgétisation des dépenses correspondantes, etc).

A cet effet, l’ambassade souhaite que se tienne sur place d’ici à la fin de ce mois, à une date à arrêter entre nous, une réunion destinée à permettre la prise de connaissance par ses services des dossiers administratifs, techniques et financiers relatifs à la gestion civile de l’édifice.

Elle propose que participent à cette réunion :

- deux représentants de chacune des parties,
- leurs conseils respectifs,
- un professionnel de l’assurance,
- un professionnel de la gestion immobilière,
- et, afin de permettre à cette transmission d’informations de se dérouler, nous l’espérons, dans les meilleures conditions de transparence et de sérénité, un observateur désigné par Monsieur le Maire de Nice, si ce dernier y a convenance.

Je vous serais obligé de me faire connaître votre accord ou vos observations sur ce processus.

L’objet du présent courrier officiel me conduit à en transmettre un tirage à Monsieur le Maire de Nice ainsi que, pour son information, à Monsieur le Préfet des Alpes-Maritimes.
J’attends donc votre réponse dès que possible.
Je vous prie de recevoir, mon cher Confrère, mes confraternelles salutations.

Alain CONFINO

..................................................................................................

Destinataire: Monsieur Antoine CHATAIN Paris, le 31 mars 2010
Avocat à la Cour
STASI CHATAIN & ASSOCIES
2 avenue Hoche
75008 Paris

Mon Cher Confrère,

1. Suivant courrier officiel en date du 10 mars dernier, nous vous avons fait part du souhait de l’ambassade de voir organiser, avant la fin du mois de mars, une réunion destinée à rassembler les informations nécessaires à la gestion civile de l’édifice.

A ce jour, sauf erreur de notre part, cette demande est demeurée sans autre réponse que votre lettre d’attente en date du 12 mars dernier, ce dont nous déduisons que votre cliente refuse cette réunion.

Dans ces conditions, et en raison du caractère indispensable des dispositions que l’Etat russe doit prendre, je vous prie de bien vouloir informer les responsables de l’association cultuelle que vous représentez, que se présenteront prochainement dans la Cathédrale :

- un ou plusieurs professionnels de l’assurance en vue de préparer la souscription d’une ou plusieurs polices propriétaire,

- un ou plusieurs administrateurs de biens en vue de représenter l’Etat de la Fédération de Russie dans la gestion civile courante de l’édifice,

- et un architecte chargé de déterminer les travaux de remise en état dont la réalisation se révèlerait nécessaire et/ou urgente, en liaison avec le service des Monuments Historiques.

Les professionnels ci-dessus désignés seront porteurs d’une lettre d’habilitation signée par un représentant de l’ambassade ou de notre cabinet.

Nous vous serions reconnaissants d’inviter votre cliente :

- à faciliter à ces professionnels le libre accès à l’édifice, libre accès dont ils feront naturellement usage dans le strict respect des offices et prières ainsi que cela leur sera rappelé par la lettre d’habilitation ;
- à leur communiquer les informations et documents en rapport avec leur mission, dont ils estimeront utile de prendre connaissance.

Afin d’éviter toute difficulté, vous voudrez bien nous confirmer l’accord sans réserve de votre cliente à ce sujet.

2. Nous vous demandons de bien vouloir nous faire communiquer dès à présent les copies intégrales (conditions particulières et conditions générales) des polices d’assurances souscrites par l’A.C.O.R. au titre de la cathédrale.

3. Enfin, nous vous rappelons le souhait de l’Etat russe d’assurer la gratuité des entrées de la cathédrale, souhait qui avait été exprimé dès le mois d’avril 2006 par Monsieur Alexandre AVDEEV, alors ambassadeur de la Fédération de Russie en France, et réitéré à maintes reprises depuis lors.

Bien que l’ A.C.O.R., malgré ces annonces, ait estimé devoir continuer à percevoir des droits d’entrée dans l’édifice après le 31 décembre 2007, et estime pouvoir continuer à le faire après le jugement du 20 janvier 2010, ce sur quoi nous faisons toutes réserves, l’Etat russe déclaré propriétaire entend une nouvelle fois l’inviter à cesser cette pratique.

Cette mesure ne devrait pas avoir d’impact sur l’exercice normal du culte, eu égard aux autres ressources dont dispose l’association (dons des fidèles, vente des plaquettes et autres produits, cotisations, etc.).

Cette mesure ne pourra avoir le moindre impact sur l’entretien de l’édifice, dès lors que l’Etat russe entend à présent prendre lui-même en charge les dépenses correspondantes nécessaires.

A cet égard, nous vous invitons à nous communiquer les derniers comptes approuvés de l’ACOR afin de permettre de déterminer et budgéter les postes de dépenses qui seront ainsi pris en charge.

En raison de l’objet du présent courrier, nous en transmettons copie, pour leur information, à Monsieur le Maire de Nice ainsi qu’à Monsieur le Préfet des Alpes-Maritimes.

Dans l’attente d’une très prompte réponse,

Nous vous prions de recevoir, cher Confrère, nos confraternelles salutations.


Jean-Philippe CONFINO

Alain CONFINO

Rédigé par l'équipe de rédaction le 14 Avril 2010 à 16:57 | 12 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par Irénée le 05/04/2010 22:29
Que ce soit une manoeuvre ou non, essayons de ne pas nous montrer inutilement polémiques sur cette difficile question. Laissons faire les cabinets d'avocats, les juristes et les juges, et essayons de "parler d'orthodoxie" en laissant la question des propriétés foncières à d'autres...

2.Posté par Cyril Semenoff-Tian-Chansky le 06/04/2010 02:15
Préciser n'est pas toujours polémiquer. Dans le cas présent, il faut relever que l'Archevêché ne craint pas la contradiction en publiant sa déclaration contre la Fédération de Russie en pleine Semaine de la Passion. La publication d'affaires juridico-ecclésiale sur le site pastoral d'un Archevêché est de nature à semer le trouble, et si les conséquences ecclésiales existent, en quoi concoure-t-elle à enseigner le troupeau ? Comment peut-on proclamer que le Christ est ressuscité et en même temps faire part de dissensions de nature ecclésio-administrative ? La Charité tant ressassée par la Fraternité devrait s'appliquer même à ceux avec qui on est en désaccord.
Mon grand-oncle de bienheureuse mémoire désignait ceux qui semblaient s'écarter du droit chemin, mais tout en ne professant pas non plus hérésie, du mot d'opposant, et non pas d'adversaires.
Mais l'Archevêché n'a pas daigné rectifier la traduction tendancieuse qu'elle a fait du texte de l'Evêque Alexandre.
Signé : Cyril Semenoff-Tian-Chansky, paroissien de l'église Saint-Serge.

3.Posté par MODERATUR du Forum ORTHODOXIERUSSEOCCIDENT le 06/04/2010 13:02
Cyril écrit:
"Mais l'Archevêché n'a pas daigné rectifier la traduction tendancieuse qu'elle a fait du texte de l'Evêque Alexandre. "

----------------------------------

Nous tenons à préciser que la question de cette traduction a été largement traitée sur le forum "ORTHODOXIERUSSEOCCIDENT"

Plutôt que de détailler, nous invitons à se rendre sur la page cité en lien et à retrouver les messages suivants:
Principalement les messages 6796 et 6810 mais aussi les messages 6678, 6729, 6804 et bien d'autres encore.

Le lecteur se convaincra qu'un argumentaire précis y a été proposé et comprendra pourquoi Cyril peut, à juste titre, une nouvelle fois, manifester son dépit de n'avoir pas été entendu.

Ceci était une juste précision sur ce point sans vouloir détourner le débat initié plus haut.

MODERATUR du Forum ORTHODOXIERUSSEOCCIDENT

4.Posté par Natalie le 06/04/2010 13:31
Ça c'est formidable! Très , très fort comme l'atteste ses derniers documents

Et un grand merci

5.Posté par Daniel le 06/04/2010 15:37
Si l'ACOR nous lit et si elle veut bien suivre mes conseils, qu'elle agisse dans la légalité. Le jugement en première instance accorde la propriété à la Fédération de Russie. Elle le désapprouve et a donc fait appel selon les règles de droit. Mais l'appel n'étant pas suspensif, elle doit exécuter le 1er jugement, quitte à reprendre possession de la cathédrale ultérieurement si au final du marathon judiciaire elle obtient satisfaction. Mais refuser d'exécuter un jugement (et/ou ses conséquences) est quand même un manque de respect criant pour l'institution judiciaire... Pourtant quand il s'agit du monastère d'Esphigmenou occupé par des "zélotes" en dépit de la décision de tribunaux grecs, le SOP dénonce leur attitude. L'ACOR ferait mieux de continuer son combat, si elle l'estime juste, dans le respect des règles de droit...

6.Posté par Bartimée le 08/04/2010 10:56
C'est le Mardi Saint 2008 (22 avril) que l'exarchat avait choisi pour annoncer à Madame Lydia Fedorovna Places par lette RAR qu'elle a reçu ce jour-là, l'excommunication dont elle était l'objet pour avoir dit la vérité. Décret qui n'est d'ailleurs toujours pas annulé bien que la levée lui en aurait été annoncée post-mortem par le recteur comme il a été indiqué sur le site officiel de l'archevêché "exarchat.org".
Ne pouvait-on la lui signifier de son vivant ? Depuis quand parle-t-on aux morts ailleurs qu'au Grand Guignol?
Faut-il donc prendre un ton si tartuffien pour reprocher, le Samedi Saint soit dit en passant, à la Fédération de Russie qui est une entité laïque, ce qu'une entité religieuse s'était autorisée à faire donnant par là même l'exemple déplorable d'un cynisme rarement atteint.

7.Posté par PetiaS le 08/04/2010 12:13
@Bartimée
-> Question :
"Depuis quand parle-t-on aux morts ailleurs qu'au Grand Guignol?"

-> Réponse :
Depuis le 1er mars 2010 dans un des hopitaux de Nice, la preuve dans la mise au point de l'archevêque Gabriel (date de publication éludée sur le site de l'archevêché) :
"Madame Places était décédée depuis 15 minutes. Père Jean Gueit lui a cependant dit qu’il apportait la réconciliation de l’archevêque et de lui-même".

Il me semble qu'une "réconciliation" telle qu'exprimée dans cette missive ne soit pas du tout approprié pour lever une interdition de s'approcher du calice, donc de facto de communier. Il doit exister pour cela des prières bien spécifiques dans le trebnik qui sont sans doute tombées dans les oubliettes de nos éminences grises par peur de revenir à une époque ou l'ordo liturgique était encore respecté.

En tout cas l'impudence des responsables de l'ACOR et de l'archevêché atteind des sommets. Il est grand temps d'y remettre de l'ordre.

8.Posté par Daniel le 08/04/2010 14:51
@ Petia

Une excommunication (à savoir interdiction de communier) peut en effet être levée "post mortem". Il y a une prière spéciale pour cela.

Je le tiens de cette histoire dont l'origine m'échappe. C'était sous l'empire romain à l'époque des persécutions. Il s'avère qu'un moine avait été excommunié (privé de communion pour un péché) par son père spirituel. Il s'avère que ce moine fut pris dans la persécution et mourut en martyr. Ces restes furent recueillis et placés dans une église, le cercueil sous l'autel car c'était un martyr. Mais à chaque liturgie, le cercueil se déplaçait et se positionnait de lui-même dans le narthex quand venait la liturgie des fidèles. Le narthex est la place où se tiennent normalement les pénitents et les catéchumènes. Les gens, intrigués, enquêtèrent et apprirent qu'il avait été excommunié. Son confesseur lut la prière d'absolution et dès ce jour le cercueil demeura à sa place sous l'autel.

Le livre "Les funérailles orthodoxes" du Père Denis Guillaume mentionne aussi la lecture de la prière d'absolution par le confesseur à la fin de l'office des funérailles ou à la maison avant la mise en bière. Je ne pense pas qu'elles soient inconnues de l'archevêché et n'irait pas jusqu'à porter les accusations que vous faites. Cela dit, en l'état, l'excommunication semble avoir été levée in extremis par l'archevêque du vivant de la défunte (juste avant qu'elle ne décède), ce qui rendrait non nécessaire la lecture de cette prière.

9.Posté par T. Schakhovskoy le 08/04/2010 16:33
40e jour.
Comme le signale le forum de Nice (egliserussenice), c'est aujourd'hui le 40e jour depuis le décès soudain de Lydia Feodorovna dans les tristes conditions que l'on sait. Je salue ici son courage et sa dignité dans l'adversité, son esprit de fidélité envers l'Eglise orthodoxe russe de nos pères, pour laquelle, d'une certaine manière, elle a donné sa vie.
Vetchnaïa Pamiat' !


10.Posté par PetiaS le 08/04/2010 17:53
@Daniel

Je n'accuse pas, je constate uniquement que dans certaines paroisses de l'archevêché et au vue des horaires publiés sur leur site internet respectif, certains offices de la semaine sainte par exemple, ont du être réduit à leur stricte minimum...

Mais il s'agit d'un autre débat sans doute qui n'a rien à voir avec le topic courant.

11.Posté par Bartimée le 09/04/2010 08:29
C'est par le décret de l'exarchat n° 11-08 daté du 15 avril 2008, qu'il fut signifié par RAR le Mardi Saint 22 avril 2008 à Madame Lydia Fedorovna Places qu'elle était excommuniée.

C'est donc par décret également que cette excommunication devra être publiquement levée. Il est vrai que de la part d'un exarchat où une absolution a été un jour prononcée "sans avoir été donnée", ce qui fait bondir les canonistes, on peut s'attendre à toutes les fantaisies pseudo-canoniques. Comme par exemple des chuchotements prononcés en catimini et sans témoin sur un corps sans vie, qui n'ont rien à voir avec l'absolution de l'office des funérailles, laquelle n'a rien à voir non plus avec la levée d'une excommunication.

Le cas est trop grave pour être réglé dans l'esbroufe par des amalgames approximatifs. Il faut être clair c'est une question d'honnêteté, et d'honneur du à la mémoire de Lydia Fedorovna en son quarantième jour.

12.Posté par Cathortho le 19/04/2010 23:20
Dans le dernier n° du SOP (347, avril 2010) on peut lire un texte de Mr Nikita Struve reproduisant l'éditorial de la dernière livraison de la revue " Le Messager orthodoxe " dont Mr Struve assure la direction.
Dans ce texte écrit avec l'encre du ressentiment le plus amer Mr Struve laisse éclater sa rage concernant la décision du Tribunal de Grande Instance de Nice en date du 20 janvier dernier d'attribuer à la Fédaration de Russie la propriété de la cathédrale Saint-Nicolas.
On y trouve des mots et des expressions comme " stupeur ", " profonde tristesse allant jusqu'aux larmes ", " action déplorable " , " triste besogne ", " jugement surprenant " , "campagne effrénée contre l'archevêché d'origine russe en Europe occidentale " .
Mais l'argumentation centrale de Mr Struve repose sur la notion d'honneur. En effet ce " membre élu du conseil diocésain de l'archevêché des paroisses de tradition russe dans la juridiction du patriarcat oecuménique " estime que dans cette affaire (affaire strictement juridique il convient de le rappeler), le Patriarcat de Moscou, le gouvernement russe, et le Tribunal de Grande Instance de Nice ont conjointement faillis à l'honneur (l'expression répétée trois fois est : " ne fait pas l'honneur ") !
- Le Patriarcat parcequ'il " a été, sans aucun doute, à l'origine de cette tentative d'expropriation ". Cela s'appelle un procès d'intention (cachant mal une détestation dudit Patriarcat).
- Le gouvernement russe parce que " le fait que le tsar Nicolas II ait alloué pour l'édification de la cathédrale une parcelle d'un terrain de famille et qu'il ait donné pour la construction une somme importante, prélevée sur ses fonds personnels ne signifie pas que l'édifice ait appartenu à l'Etat russe ". Mais le Tsar n'incarnait-il pas l'Etat russe ? S'il ne l'incarnait pas, quelle était sa fonction ?
- Le Tribunal de Grande instance de Nice parce qu'il a rendu un " jugement surprenant [...] allant jusqu'à attribuer les objets sacrés de la cathédrale à l'Etat russe. " Et parmis les griefs faits à l'encontre du Tribunal Mr Strouve d'invoquer que celui-ci n'aurait pas, conjointement avec le Patriarcat de Moscou et avec le gouvernement russe bien sûr, tenu compte " du sang versé par les émigrés pour la France ". On ne peut que s'incliner devant cette belle envolée patriotique, malheureusment altérée par le peu de considération, pour dire le moins, manifestée par Mr Struve en la justice de son pays accusée par lui d'avoir failli à son honneur !

Nouveau commentaire :



Recherche



Derniers commentaires


RSS ATOM RSS comment PODCAST Mobile