La chorale de garçons de Konakovo, événement dans la vie de la ville
Comment un prêtre et son épouse, anciens de la Gnessine, ont transformé la vie d’une petite ville de province

1995, Konakovo est une petite ville ouvrière sur la Volga nommée « 101ème kilomètre ». Une partie des habitants de la ville travaille à la centrale électrique locale, les autres vont quotidiennement chercher un salaire à Moscou, ceux qui restent cultivent leur jardin ou pêchent le long de la Volga.

Les enfants à la sortie de l’école traînent dans les rues, abandonnés à eux-mêmes. Le foot – la bière, la bière – le foot, à la tombée de la nuit c’est l’insécurité, les bagarres.

Puis, un jour, tout change : tous les soirs après l’école, plus de foot, plus de bière, tous se rendent au foyer local et y disparaissent jusque tard dans la soirée. Entassés dans une pièce, les jeunes apprennent par cœur des textes allemands, déchiffrent des partitions, chantent des œuvres de Bach, Haydn, Strauss, Tchaïkovsky ou Moussorgsky.

La chorale de garçons de Konakovo, événement dans la vie de la ville
Tout est clair maintenant. Le prêtre Vadim Makhnovsky et sa femme Natalia Makhnovskaya ont créé un chœur.

« La situation alors était très criminogène dans notre ville, le soir il était dangereux de sortir. Quand nous avons décidé de créer un chœur professionnel d’enfants, la chose paraissait impossible. Mais les parents nous ont soutenus, ensuite le maire nous a permis d’engager des professeurs, alors a débuté une collaboration entre notre Église, les autorités locales et le gouvernement. En fait, dans notre cas, le gouvernement a reconnu à l’Église le droit d’éduquer et de former des enfants. J’espère que personne ne regrette cette décision », déclare le père Vadim.

Son épouse et lui sont des musiciens professionnels, ils se sont connus à l’Académie Gnessine. Vadim enseignait l’art lyrique, Nathalie était étudiante. Leur carrière s’annonçait brillante, mais Vadim a souhaité être ordonné prêtre. Ils ont quitté Moscou pour s’installer à « 101 kilomètres ».

Au souvenir du premier concert de leurs choristes, Natalia blêmit encore : « La scène où ils chantaient Strauss était couverte de boulettes de papier que leur lançaient les spectateurs de leur âge. » Les choristes sont restés stoïques.

Depuis, plus de vingt ans ont passé. Maintenant l’école chorale fait un tabac en Russie, parcourt l’Europe et y décroche des prix. Mais pour le père Vadim et Natalia Makhnovskaya, les plus importants sont les concerts avec orchestre symphonique dans la salle Tchaïkovsky de Moscou — imaginez, dans la plus importante salle de la capitale leur chœur de garçons interprète la Passion selon Saint Matthieu de Bach.

La chorale de garçons de Konakovo, événement dans la vie de la ville
Au début des années 2010, l’école chorale de Konakovo comptait plus de 600 choristes, un exploit pour une si petite ville. Les garçons et les jeunes apprennent le solfège, chantent et jouent dans un ensemble.

— Pourquoi est-ce que le chœur est pour les garçons seulement ?

— « Les garçons, répond le père Vadim, ont des voix angéliques. Comme l’a dit un célèbre musicien „ce sont des sonorités entendues auprès de Dieu”. Plus tard, quand ils ont 12-13 ans, leur voix mue, c’est-à-dire qu’elle change, elle devient adulte, masculine. C’est aussi le moment où apparaissent chez eux les passions, ils perdent cette voix „angélique”. Le Seigneur ôte cette beauté. C’est l’exemple célèbre de Robertino Loretti. »

Depuis 2014, l’école chorale de Konakovo dispose de nouveaux locaux dans un grand bâtiment avec de nombreuses salles de cours et même sa propre salle de concerts. Il y a plus de travail, mais le père Vadim et son épouse Natalia ont trouvé un second souffle, ils savent que les jeunes ont besoin d’eux, ils voient les résultats de leurs efforts.

Me promenant avec l’archiprêtre Vadim le long de la Volga, je lui ai posé la question :

Pourquoi avoir fait ça, prendre en charge une école, des centaines d’enfants ?

— « Je pense, a-t-il répondu prudemment, je pense que ça s’inscrit dans l’idée de renaissance de la Russie. Pour nous ce ne sont pas de vains mots, des banalités, c’est ce qui nous fait vivre. Nous avons la chance d’éduquer toute une nouvelle génération de jeunes qui seront intellectuellement et spirituellement développés. »

Interview recueillie par Alexandre Egortsev Traduction pour "PO"

Le texte compet de l’interview est disponible sur le site Rublev

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Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 10 Septembre 2019 à 15:06 | 1 commentaire | Permalien



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