Quelques jours se sont écoulés depuis le prononcé du jugement de la cour d’Aix en Provence concernant l’appel de l’association cultuelle russe de Nice contre la décision qui confirmait que la cathédrale Saint Nicolas était bien la propriété de l’état Russe. Il est sans doute intéressant de se pencher sur les motivations des juges qui ont confirmé le jugement du tribunal de Nice.

Les juges ont tout d’abord rejeté les arguments de procédures des deux parties et se sont intéressés aux arguments de fond.


Ils ont refusé, en premier lieu, la demande qui voulait interdire à l’Etat russe de réclamer la propriété du bien en raison de l’accord du 27 mai 1997 (connus surtout sur la question des « emprunts russes »). Ils se sont fondés sur une clause de cet accord qui stipule qu’il ne s’applique qu’aux contestations antérieures au 9 mai 1945. Or la contestation examinée ne pouvait naître qu’à la fin du bail emphytéotique qui se terminait le31/12/2007. Elle ne peut donc être rejetée en vertu de l’accord mentionné.

En second lieu, les juges ont repoussé l’argument selon lequel le bien était un bien personnel de Nicolas II et non un bien de l’Etat. Ils se sont essentiellement appuyés pour cela sur l’oukase de cet empereur qui confirmait que le bien était la propriété du « cabinet impérial ». Ils relèvent encore que dans l’acte de bail il est mentionné que le terrain appartient à « la Cour Impériale de Russie » c’est à dire à l’Empire de Russie.

La cour d’Aix en Provence n’a pas admis non plus qu’il y ait rupture juridique entre L’Empire Russe et la Fédération de Russie. Elle s’appuie pour cela sur ce même accord du 27 mai 1997. En effet l’accord traite notamment des « emprunts russes » c’est à dire des obligations émises par l’Empire russe et détenues en France. C’est donc que la Fédération reconnaît qu’elle est la suite, en droit international, de l’Empire russe. Dès lors il apparaît que tant la Fédération de Russie que la République Française reconnaissent cette continuité.

Enfin les juges n’admettent pas que l’A.c.o.r. ait pu devenir propriétaire du terrain et de la cathédrale par prescription. Pour cela il eut fallu que l’association se comportât en propriétaire des lieux de façon non équivoque. Or, relèvent les juges, les statuts de l’association, qui datent de 1923, précisent que son objet est d’assurer la continuité du culte orthodoxe et non de recueillir les bien de « l’Eglise Russe » devenue défaillante. La cour remarque aussi que lors du recensement des biens russes à l’abandon, par la commission Jaudon, en 1925, l’A.c.o.r. s’est opposée aux prétentions de cette commission en affirmant non pas qu’elle était propriétaire de la cathédrale, mais que ces biens n’étaient pas à l’abandon. Enfin, la cour constate que l’acte d’attribution au profit de l’association, établi par Monseigneur Euloge, en 1927, ne faisait que confirmer que ladite association tenait ses droits sur la cathédrale de « l’Eglise russe » laquelle ne bénéficiait que d’un bail emphytéotique. Elle était donc locataire et non propriétaire bien. L’association ne s’est donc pas comporté de façon non équivoque comme propriétaire et ne peut en conséquence prétendre l’être aujourd’hui.

La cour a par conséquent confirmé les droits de la Fédération de Russie à rependre possession de la cathédrale Saint Nicolas de Nice, à la fin du bail. De plus la cour a jugé qu’il était prématuré d’examiner la demande, formulée par la Fédération, de nomination d’un expert pour apprécier les comptes de l’association, depuis le 31 décembre 2007 et relativement à l’exploitation de l’édifice de la cathédrale. Elle n’a pas rejeté la demande mais a jugé qu’elle devait être examinée après la remise de l’édifice à la Fédération de Russie.

Voilà donc confirmé en appel que le droit de propriété sur l’édifice de la cathédrale appartient à l’Etat russe. Certains le regrettent, et on peut comprendre leur tristesse. Mais les réactions de quelques membres de l’Archevêché, qui crient au scandale et vont même jusqu’à contester l’indépendance de la justice française ( qu’ils louaient lorsqu’elle avait rendu une décision en leur faveur à Biarritz) paraissent déplacées. Elles ne contribuent qu’à exacerber les antagonismes, pour ne pas dire les haines, alors des solutions de compromis sont toujours possibles et souhaitables.

Séraphin Rehbinder Mai 2011

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Rédigé par Orthodoxierusseoccident le 23 Mai 2011 à 20:59 | 2 commentaires | Permalien



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