Cathortho

J'ai pensé qu'après cette dénonciation de la "modernisation" par Mgr Hilarion (dénonciation absolument nécessaire dès lors que l'on a acquis la certitude que le monde moderne apparu avec les "Lumières" est fondamentalement anti-chrétien), les commentaires que je souhaite nombreux, pourraient utilement être nourris par les considérations d'un auteur français, René Guénon (1886-1951), dont une partie secondaire mais non négligeable de son œuvre, qui était principalement consacrée à ce qu'il appelait la "métaphysique pure", a consisté en une critique implacable, sans concessions, de la modernité. L'essentiel de ces critiques acerbes mais légitimes se trouvent dans deux livres régulièrement réédités et toujours d'une étonnante actualité : "La crise du monde moderne" paru pour la première fois en 1927 et "Le règne de la quantité et les signes des temps" paru pour la première fois en 1945.

Il me faut préciser que certains aspects de la pensée de René Guénon sont irrecevables pour nous chrétiens, notamment le fait qu'il se référait à une Tradition primordiale et universelle dont le Chrstianisme ne serait qu'un aspect à côté des autres grandes religions, minimisant ainsi le caractère absolument nouveau, universellement salvateur de l'Incarnation du Verbe qui, assumant la nature humaine, accepte volontairement sa mort pour, en ressuscitant, poser ainsi le germe de la résurrection en tout homme.
Néanmoins l'œuvre de René Guénon est d'une importance capitale dans le domaine de la métaphysique (qui pour lui relevait non pas de la philosophie mais de la spiritualité), de l'herméneutique des symboles et , nous y revenons, de la nécessaire critique du monde moderne et de la défense de la pensée traditionnelle.
Je vous propose ici en extrait d'un article de René Guénon paru en juin 1926, dans une revue catholique à laquelle il avait collaboré durant quelques numéros avant d'en extre exclu sur la pression des milieux néo-thomistes de l'époque. Cette revue, du nom de "Regnabit", avait été fondée en 1921 par le père Félix Anizan, des "Oblats de Marie Immaculée". Voici un extrait de cet article intitulé : "La réforme de la mentalité moderne" :

La civilisation moderne apparaît dans l'histoire comme une véritable anomalie : de toutes celles que nous connaissons, elle est la seule qui se soit développée dans un sens purement matériel, la seule aussi qui ne s'appuie sur aucun principe d'ordre supérieur. Ce développement matériel qui se poursuit depuis plusieurs siècles déjà, et qui va en s'accélérant de plus en plus, a été accompagné d'une régression intellectuelle qu'il est fort incapable de compenser. Il s'agit en cela, bien entendu, de la véritable et pure intellectualité, que l'on pourrait aussi appeler spiritualité, et nous nous refusons à donner ce nom à ce à quoi les modernes se sont appliqués : la culture des sciences expérimentales , en vue des applications pratiques auxquelles elles sont susceptibles de donner lieu. Un seul exemple pourrait permettre de mesurer l'étendue de cette régression : la "Somme théologique" de saint Thomas d'Aquin était, en son temps, un manuel à l'usage des étudiants ; où sont aujourd'hui les étudiants qui seraient capables de l'approfondir et de se l'assimiler ?
[...]
l ne fut pas se le dissimiler, ceux même qui se croient être sincèrement religieux n'ont, pour la plupart, de la religion qu'une idée fort amoindrie ; elle n'a guère d'influence effective sur leur pensée ni sur leur façon d'agir ; elle est comme séparée de tout le reste de leur existence. Praitquement, croyants et incroyants se comportent à peu près de la même façon ; pour beaucoup de catholiques, l'affirmation du surnaturel n'a qu'une valeur toute théorique, et ils seraient fort génés d'avoir à constater un fait miraculeux. C'est là ce qu'on pourrait appeler un matérialisme pratique, un matérialisme du fait : n'est-il pas plus dangereux encore que le matérailisme avéré, précisément parce que ceux qu'il atteint n'en ont même pas conscience ?
D'autre par, pour le plus grand nombre, la religion n'est qu'affaire de sentiment, sans aucune portée intellectuelle ; on confond la religion avec une vague religiosité, on la réduit à une morale : on diminue le plus possible la place de la doctrine, qui est pourtant l'essentiel, ce dont tout le reste ne doit être logiquement qu'un conséquence. "

(Article repris dans : René Guénon, "Symboles fondamentaux de la Science sacrée", Gallimard, 1980, pp. 27 et 29.)

Ce qui précède ne justifie-t-il pas la nouvelle évangélisation de l'Europe lancée par le Pape Benoît XVI et soutenue par le Patriarche Cyrille et Mgr Hilarion ?

Rédigé par CATHORTHO le 17 Juillet 2010 à 16:33 | 26 commentaires | Permalien



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