Vladimir Golovanow

Le pape François a publié, le 8 septembre 2015, deux décrets («motu proprio») qui allègent la procédure «d'annulation de mariage».

Rigidité catholique contre souplesse orthodoxe

En fait l'Église catholique, comme l'Église orthodoxe, «n'annule» jamais un mariage - et ce point ne change pas - mais elle peut reconnaître la «nullité du lien» contracté par le sacrement du mariage à la demande des couples mariés et divorcés et via un procès juridique en bonne et due forme. Jusqu'ici il s'agissait d'une procédure longue et méticuleuse (deux jugements identiques prononcés chacun par trois juges ecclésiaux) qui établissait la preuve que l'un des contractants n'adhérait pas aux conditions formelles de l'engagement du mariage catholique nonobstant un «oui» publiquement recueilli devant témoins. On pouvait invoquer «l'immaturité»), la rupture de l'engagement à la fidélité ou celui de désirer des enfants...

Le «lien» contracté est alors déclaré «nul» par un tribunal ecclésiastique diocésain comme si le mariage n'avait jamais existé. L'Église estime en effet qu'il n'y a alors pas eu de mariage réel même si toutes les apparences étaient présentes.

La théologie catholique interdisant, de toute façon, de toucher à «l'indissolubilité du mariage», l'Église ne peut pas «dissoudre» un mariage mais seulement certifier qu'il n'a pas été contracté en pleine conscience et en pleine liberté. D'où cette notion de «nullité» sur le plan juridique.

Dans l'Orthodoxie les principes sont les mêmes et le mariage crée un lien perpétuel que même la mort ne rompt pas. Mais l’Église orthodoxe applique à la faiblesse humaine ce que l’on appelle «l’économie», cette souplesse qui existe au sein de la pastorale orthodoxe à côté de « l’acribia», application stricte du canon, de la règle. L'Église est consciente que, parfois, les règles sont trop strictes pour les hommes. Alors, quand il y a un échec dans la vie personnelle de l’homme ou de la femme, c’est à l’évêque de voir s’il n’y a pas une possibilité de donner une deuxième chance. C’est ce que l’Église orthodoxe applique, mais ce n’est pas une règle: il n'y a pas de procès, pas de nullité - l’évêque peut donner la possibilité à quelqu’un de se remarier et d’avoir une nouvelle chance dans sa vie privée.

Rapprochement de la procédure orthodoxe

La réforme du droit canonique introduite par le pape François supprime le deuxième jugement conforme requis jusque-là, il n'y aura plus qu'un seul jugement et il sera gratuit, alors que la procédure précédente entrainait des frais qui la rendaient inaccessible au commun des mortels, et surtout, le pape ouvre aussi la possibilité d'un processus d'annulation abrégé sous la responsabilité de l'évêque, "pour des cas évidents", ce qui reprend pratiquement la procédure orthodoxe. L'objectif est évidement de répondre aux couples qui ont refait leur vie loin de l'Église en leur permettant de revenir dans la communion ecclésiale comme le fait l'Église orthodoxe.

Conséquences inédite: cette procédure va simplifier les mariages mixtes dans lesquels le conjoint catholique avait été marié religieusement: certains évêques orthodoxes refusaient la célébration de ces mariages au motif que le lien du mariage chrétien ne pouvait être reconnu nul que par l'Église qui avait administré le sacrement qui l'avait créé. Une procédure abrégée suffira donc maintenant…

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 11 Septembre 2015 à 12:00 | 2 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par Vladimir. G: débat virulent sur le "modèle orthodoxe" avant et pendant le synode sur la famille le 12/09/2015 15:20
Je n'ai pas encore vu de réaction négative à cette décision pontificale, mais le débat sur le "modèle orthodoxe" avait été virulent avant et pendant le synode sur la famille d'octobre dernier.

Le cardinal Kasper (ancien président du Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens, 81 ans), avait ouvert le débat: dans un discours de février 2014et dans un livre intitulé «LEvangile de la famille » il proposait d'admettre à l'eucharistie des personnes divorcées remariées civilement en s'appuyant sur la pratique de l'économie dans l’Eglise orthodoxe,

Une réplique cinglante est venue sous la forme d'un livre collectif regroupant les textes de cinq cardinaux de premier plan et quatre autres spécialistes. « Qu’il s’agisse de la catéchèse ou de la patristique, les auteurs ne trouvent aucun fondement à un remariage civil après un divorce comme le propose le cardinal Kasper,» résume le Père Dodaro dans la préface. "Il n'y a pas de position orthodoxe unique sur le divorce, les remariages, l'admission aux sacrements; il n'y a pas une position unique qui caractériserait les points de vue de toutes les différentes Eglises orthodoxes... Je n'ai pas entendu de hauts prélats orthodoxes applaudir l'Église catholique de vouloir adopter ou même étudier de plus près leurs pratiques, donc je ne sais pas à quel point cela contribuerait au dialogue œcuménique si nous allions dans ce sens," est-t-il ajouté. Et le Père Dodaro rejettait "l'économie" comme pouvant offrir une solution acceptable: "Nous croyons que cela viole le principe de l'indissolubilité du mariage, parce qu'il s'agit là de personnes déjà mariées, au moins l'une d'entre elles, non seulement aux yeux de l'Église, mais aux yeux du Christ. Nous ne comprenons pas comment le cardinal Kasper ne voit pas cela." En conclusion «la fidélité séculaire de l’Eglise au "vrai mariage" représente le fondement irrévocable de sa réponse miséricordieuse et charitable au divorcé civilement remarié ». Pas de charité authentique sans vérité, disent en substance les auteurs.

Et les votes du synode n'ont pas été concluants: la majorité s'est prononcée pour une forme de pardon permettant de donner l'Eucharistie aux divorcés remariés (et l'accueil des homosexuels) "avec respect et délicatesse", mais la majorité des 2/3 n'a pas été atteinte… Le Pape François semble bien être allé plus loin!

2.Posté par Vladimir.G: Les quatre aspects de la tradition orthodoxe au sujet de la famille par le Métropolite Athénagoras de Belgique! le 30/10/2015 10:06
Les quatre aspects de la tradition orthodoxe au sujet de la famille par le Métropolite Athénagoras de Belgique

Le Métropolite Athénagoras (Peckstadt) de Belgique, délégué du patriarcat œcuménique au synode catholique extraordinaire sur la famille l'an dernier (5 - 19 octobre 2014) avait décrit dans son intervention devant les pères synodaux quatre aspects de la tradition orthodoxe au sujet de la famille. Il disposait de quatre minutes pour exposer la position de l'Eglise orthodoxe sur la pastorale de la famille.

Votre Sainteté, Chers frères et sœurs en Christ,

C’est un honneur que de pouvoir représenter le Patriarche Œcuménique Bartholomée à l’occasion de votre Synode consacré à la famille. Le Patriarche Bartholomée m’a demandé de vous saluer tous en son nom.
Je vous remercie de m’offrir l’occasion d’intervenir dans vos débats et de présenter ainsi quelques réflexions issues de la tradition de l’Église orthodoxe.

PREMIEREMENT, NOTRE ÉGLISE VEUT TOUJOURS RESTER UNE AIDE POUR CEUX QUI SOUFFRENT. C’est assurément le cas lorsque le mariage a cessé d’être une réalité à cause de la « faiblesse humaine ». Cela est concédé comme une approche pastorale, en vertu de l’« économie » envers la faiblesse de l’homme et du monde corrompu dans lequel nous vivons. Mais le deuxième mariage sera toujours une déviation par rapport à l’« idéal d’un mariage unique », souvent une nouvelle chance pour « corriger une faute ».

Déjà dans l’Église primitive, saint Basile le Grand affirmait, à propos de l’homme trompé par sa femme, que cet homme est « pardonnable » s’il se remarie.

Hier on a déjà entendu ce qu’est l’« économie » dans l’Église orthodoxe ; c’est l’application souple des directives canoniques et ecclésiastiques dans la direction et dans la vie de l’Église. La mise en œuvre de l’économie n’est réalisée que par l’évêque et ne vaut que pour des cas concrets, mais ne crée aucun précédent.

D’abord chaque situation particulière doit bénéficier d’un accompagnement pastoral qui tente de réconcilier les conjoints. Si vraiment ce n’est pas possible, on peut envisager un remariage. D’ailleurs, la tradition orthodoxe veut que chaque fidèle choisisse librement son père spirituel. Il s’agit d’une personne qui a de l’expérience dans la vie spirituelle et qui est appelée à apprendre la façon de vivre.

DEUXIEMEMENT IL EST CERTAIN QU’ON NE DOIT ETRE NI TROP MORALISATEUR NI TROP RIGIDE envers les jeunes, sous peine de ne pas être écouté.

Parmi nos jeunes ils y en a qui ne sont pas encore suffisamment engagés dans l’Église pour dire : ‘Nous allons nous marier parce que notre couple, notre future famille, sera une cellule d’Église, et donnera un exemple d’engagement évangélique’. Il arrive pourtant qu’ils vivent quelque chose de vrai qui les prépare à un amour durable, et que ces jeunes se tournent finalement vers l’Église. Ici le rôle du prêtre est important pour proposer le sens de l’amour et du mariage. Dans ces cas-là, nous pourrons mieux leur expliquer – sans jugement – qu’ils se privent d’une grâce mais que le moment venu ils pourront toujours la recevoir.

EN TROISIEME LIEU, JE TIENS A ME REFERER A UN ECRIT DE SAINT SERAPHIM DE SAROV – un saint bien-aimé tant en Occident qu’en Orient – à propos de la Communion. Il affirma « … comment tout au long de sa vie, il recourt à la communion aux Saints Dons comme à la nécessaire rencontre avec le Christ. Il exhortera d’ailleurs toujours les fidèles à recourir fréquemment à l’Eucharistie et recommandera aux prêtres de la leur donner volontiers, car, ajoutait-il, la grâce qu’elle nous donne est tellement grande que tout homme, fût-il le plus grand des pécheurs, s’il approche du Seigneur avec humilité et contrition de ses fautes, est complètement purifié et renouvelé ».

QUATRE : EN CE QUI CONCERNE LES PRATIQUES ANTICONCEPTIONNELLES, l’Église orthodoxe, en général, se contente de rappeler le sens de l’amour, mais laisse le choix des méthodes à la conscience de l’homme et de la femme, avec l’aide, s’ils le souhaitent, de leur père spirituel. À propos d’Humanae Vitae, le Patriarche Œcuménique Athénagoras, ami de Paul VI, a déclaré que l’Église doit faire comprendre aux hommes et aux femmes de ce temps que l’amour est possible, que la vraie rencontre veut la fidélité, que la puissance amoureuse de l’homme peut ainsi se transfigurer et, disait le patriarche, « si un homme et une femme s’aiment vraiment, je n’ai pas à entrer dans leur chambre, tout ce qu’ils font est saint ».

JE CONCLUS, EN PLAIDANT POUR UN RETOUR A LA POSSIBILITE DES PRETRES MARIES, étant moi-même fils d’un prêtre et ayant un frère et beau-frère qui sont des prêtres mariés !

Source : http://www.paris.catholique.fr/deux-interventions-au-synode.html

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