MARIAGE: Chez les orthodoxes, l’école de la deuxième chance
Marie-Lucile Kubacki

Souvent évoqué comme une piste de réflexion pour résoudre le problème de l'accès au sacrement pour les divorcés remariés, le modèle orthodoxe mérite d'être examiné.

Certes, le remariage est autorisé, mais il n’est pas sacramentel. Il n’est pas pour autant bradé, puisqu’il fait l’objet d’un discernement nécessitant l’accord de l’évêque. Avec la miséricorde à la clé. Décryptage.

Jean-Pierre, catholique en instance de divorce, a rencontré Anne, veuve orthodoxe, il y a 20 ans. « Je me suis marié à 21 ans avec une certaine pression familiale, raconte-t-il. Quand je n’écrivais pas à ma fiancée, mes parents me rappelaient à l’ordre…

Mon couple ne fonctionnait pas. » Anne acquiesce : « Dans ma famille, on considérait qu’il valait mieux mourir que divorcer. Mon père m’a interdit de sortir l’année qui a précédé mon mariage, celle de mes 18 ans. À l’époque, il n’y avait pas de préparation au mariage».

Quand ils se rencontrent, ils ont environ 50 ans. Jean-Pierre se met à fréquenter la paroisse orthodoxe et change de confession. Six ans plus tard, son divorce est prononcé, et il décide de se remarier. Il se souvient :

« J’ai été convoqué chez l’évêque. Il voulait s’assurer que ma rencontre avec Anne n’était pas à l’origine de mon divorce et que je n’étais pas devenu orthodoxe pour pouvoir me remarier. » C’est un sujet tabou, mais certains changent effectivement d’Église en espérant pouvoir se remarier religieusement. « Ce n’est pas mon cas, affirme Jean-Pierre. J’ai eu un appel particulier dans l’orthodoxie : j’ai été bouleversé par leur rapport au sacré, au rite et à la tradition. Et par le côté familial de la paroisse. »

Comme les catholiques, les orthodoxes considèrent la rupture d’engagement comme « un péché et un échec ». Ils considèrent également le mariage comme un sacrement et défendent non seulement son indissolubilité, mais aussi son unicité. Mais ils peuvent autoriser les divorcés remariés à se confesser, à communier et à se remarier à l’Église une deuxième et, dans de très rares cas, une troisième fois, sachant que le remariage n’est pas sacramentel. Cette différence repose sur un principe : l’économie. Cela signifie que l’évêque peut décider d’appliquer les règles d’une manière plus souple dans un but précis. Dans le cas des divorcés remariés, l’institution estime qu’ils ont particulièrement besoin des sacrements et que leur exclusion va à l’encontre des enseignements du Christ quant au devoir de ramener la « brebis égarée ».

Lire L'Orthodoxie et les mariages mixtes

Par ailleurs, la possibilité de se remarier n’est pas accordée systématiquement. Elle fait l’objet d’un véritable discernement, comme l’explique Alexis Struve, prêtre orthodoxe : « À titre personnel, je pousse la personne divorcée à régler les tensions liées à la séparation. Je pense qu’il ne faut pas entrer dans une seconde construction avant d’avoir réglé le premier échec en conscience et devant Dieu, ni avant d’avoir su demander pardon ou pardonner. » Dans tous les cas, c’est l’évêque qui tranche après avoir rencontré la personne divorcée : « Une commission composée de plusieurs prêtres et de canonistes remet un avis. L’évêque prend sa décision après avoir consulté ce dossier et entendu l’argumentaire des personnes. »

L’exigence ne s’arrête pas là. Lors des remariages, une prière pénitentielle est lue sans détours. Jean-Pierre va chercher le texte dans son bureau : « Purifie tes serviteurs de leurs iniquités ; car n’ayant pas la force de supporter dans la solitude le fardeau de la vie, ils viennent pour s’unir en secondes noces. » Anne commente : « Nous étions au clair l’un et l’autre sur le fait que ce n’était pas une solution idéale pour l’Église. La prière sert à rappeler cela. C’est juste et ça n’a rien de triste. » SUITE

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 16 Mars 2019 à 10:43 | 5 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par Vladimir G: UN EXCELLENT TEXTE QUI REMET CLAIREMENT LES CHOSES EN PLACE! le 16/03/2019 15:00
Ajoutons que le remariage, même en cas de veuvage, est toujours un péché et l'évêque peut demander à l’époux(se) remarié(e) d'accomplir une pénitence (epitimia), considérée non comme une punition, mais comme une thérapie. "Cette "médication" doit être administrée dans la mesure appropriée, puisque le même médicament ne peut être administré dans les mêmes proportions pour chaque malade" (in "La confession et la direction spirituelle dans l'Église orthodoxe" archimandrite Job Getcha, https://www.archdiocese.ca/fr/book/export/html/2213)

2.Posté par Vladimir G: Les Orthodoxes actuels croient, prient et laissent le reste aux "raisonneurs" le 17/03/2019 19:21
Je reproduit ici un excellent commentaire fait sur ma page Facebook:

Citation:
Av Alexander Winogradsky Frenkel Il n'est pas facile d'utiliser un langage qui tienne véritablement compte des traditions et qui soit en conformité avec le droit canonique qui a pour but de gérer la fécondité de la vie dans la foi au Ressuscité. Il n'y a pas de "divorce" dans l'Eglise orthodoxe pas plus dans l'Eglise latin romaine. Il y a le constat que la grâce reçue au moment du consentement marital n'a pas été efficiente, qu'elle est "nulle", non attestée pour diverses raisons. Dans ce cas, il appartient à chaque partie d'apporter la preuve de cette non-efficience et l'Eglise (dans l'Orthodoxie, l'Evêque et la Cour ecclésiastique) doit discerner qu'un voire les mariages précédents étaient bien NULS, non-existants dans la pleine réception des Mystères chrétiens et la foi des époux pour déclarer que le mariage et déclaré nul (nullité). Un temps de pénitence est alors demander. Ensuite, si la personne rencontre une nouvelle épouse ou époux et ont le projet de se marier, il y a un discernement proposé. Si avec foi authentique, les personnes demandent à être mariées, elles font pénitence (fiançailles et mariages sont moins festifs et plus solennels, pénitentiel dans le rite). Mais il faut faire très attention de ne pas parler de "divorce" stricto sensu car l'Eglise accepte un ou plusieurs remariages en tenant surtout compte de la manière dont les êtres reçoivent la grâce proposée par le Seigneur. C'est souvent très délicat. Un grand théologien orthodoxe contemporain, très traditionnel, a ainsi pu être marié quatre fois... c'est beaucoup mais il affirmait et il était honnête qu'il ne pouvait pas vivre sans une femme. Il y a aussi un sens profond de la miséricorde qui doit être témoignée par le clergé. Je vois des situation totalement invraisemblable et il faut tenir compte du contexte historique, culturel, des heurts intra-familiaux, des abus de la religion etc et de l'immaturité des fiancés de tout âge.
https://www.facebook.com/profile.php?id=100008600417897

3.Posté par Vladimir G: l n'y a pas de "divorce" dans l'Eglise orthodoxe pas plus dans l'Eglise latin romaine le 17/03/2019 19:23
Un excellent commentaire posté sur ma page Facebook par Av Alexander Winogradsky Frenke

Citation:
Il n'est pas facile d'utiliser un langage qui tienne véritablement compte des traditions et qui soit en conformité avec le droit canonique qui a pour but de gérer la fécondité de la vie dans la foi au Ressuscité. Il n'y a pas de "divorce" dans l'Eglise orthodoxe pas plus dans l'Eglise latin romaine. Il y a le constat que la grâce reçue au moment du consentement marital n'a pas été éfficiente, qu'elle est "nulle", non attestée pour diverses raisons. Dans ce cas, il appartient à chaque partie d'apporter la preuve de cette non-efficience et l'Eglise (dans l'Orthodoxie, l'Evêque et la Cour ecclésiastique) doit discerner qu'un voire les mariages précédents étaient bien NULS, non-existants dans la pleine réception des Mystères chrétiens et la foi des époux pour déclarer que le mariage et déclaré nul (nullité). Un temps de pénitence est alors demander. Ensuite, si la personne recontre une nouvelle épouse ou époux et ont le projet de se marier, il y a un discernement proposé. Si avec foi authentique, les personnes demandent à petre mariées, elles font pénitence (fiançailles et mariages sont moins festifs et plus solennels, pénitentiel dans le rite). Mais il faut faire très attention de ne pas parler de "divorce" stricto sensu car l'Eglise accepte un ou plusieurs remariages en tenant surtout compte de la manière odnt les êtres reçoivent la grâce proposée par le Seigneur. C'est souvent très délicat. Un grand théologien orthodox contemporain, très traditionnel, a ainsi pu être marié quatre fois... c'est beaucoup mais il affirmait et il était honnête qu'il ne pouvait pas vivre sans une femme. Il y a aussi un sens profond de la miséricorde qui doit être témoignée par le clergé. Je vois des situation totalement invraisemblable et il faut tenir compte du contexte historique, culturel, des heurts intra-familiaux, des abus de la religion etc et de l'immaturité des fiancés de tout âge.

4.Posté par Daniel le 18/03/2019 11:53
Il est faut de dire qu'il n'y a pa s de divorce dans l'église orthodoxe et absolument faux théologiquement de dire que "la grâce reçue au moment du consentement marital n'a pas été éfficiente".

La grâce n'est pas une baguette magique qui marche à tous les coups, ce n'est pas non plus une chose qui marche ou parfois ne marche pas. Elle dépend des efforst de la personne à savoir de la synergie.

La preuve qu'il y a divorce dans l'église orthodoxe est le fait qu'il existe des certificats de divorces attestés par le Pédalion et même des causes de divorce bien listées:
- adultère d'un des conjoints
- changement de religion d'un des counjoints
- tentative d'assinat d'un conjoint par un autre
- syphillis

etc

5.Posté par Vladimir G: Il faut de dire et répéter qu'il n'y a pas de divorce dans l''''église orthodoxe ... le 18/03/2019 17:27
LES BASES DE LA CONCEPTION SOCIALE DE L’EGLISE ORTHODOXE RUSSE:

En 1918, le Concile local de l’Eglise orthodoxe russe énumérait dans son «Décret sur les motifs de dissolution de l’union conjugale bénie par l’Eglise»: l’adultère et le remariage de l’un des époux, l’abandon de l’Orthodoxie par l’époux ou l’épouse, les vices contre-nature, l’incapacité à la cohabitation conjugale, manifeste dès avant le mariage ou résultat d’une mutilation volontaire, la lèpre et la syphilis, l’absence prolongée sans nouvelles, la condamnation associée à la privation de tous les droits, l’attentat à la vie ou la santé du conjoint ou des enfants, le proxénétisme, l’escroquerie des biens du conjoint, les maladies psychiatriques incurables et l’abandon volontaire de l’un des époux par l’autre. A cette liste de motifs de dissolution du mariage, on doit ajouter pour notre époque le SIDA, l’alcoolisme chronique médicalement constaté, la toxicomanie, l’avortement effectué par la femme en cas de désaccord du mari.

Pour l’éducation spirituelle des fiancés et afin de contribuer à l’affermissement des liens conjugaux, les prêtres sont invités à expliquer de façon détaillée aux fiancés au cours des conversations précédant la célébration du sacrement du mariage, l’indissolubilité de l’union conjugale célébrée à l’église, soulignant que le divorce ne peut être admis que comme mesure extrême en cas d’acte de la part d’un des époux défini par l’Eglise comme un motif valable de divorce. L’Eglise ne peut consentir à la dissolution d’un mariage pour satisfaire la concupiscence ou pour servir de ratification au divorce civil. Par ailleurs, lorsque l’échec du mariage est un fait, en particulier lorsque les conjoints résident séparément, et que la restauration de la famille s’avère impossible, le divorce ecclésiastique peut être prononcé à titre d’indulgence pastorale. L’Eglise n’encourage en aucun cas les remariages. Néanmoins, après un divorce ecclésiastique légal, conformément au droit canon, un second mariage est autorisé à l’époux innocent. Le remariage n’est autorisé aux personnes par la faute desquelles le premier mariage avait échoué et été dissous, qu’à condition qu’elles se repentent et s’acquittent de la pénitence donnée conformément aux règles canoniques. Dans les cas exceptionnels où est autorisé un troisième mariage, la durée de la pénitence est majorée, conformément aux règles de saint Basile le Grand.

Le Saint-Synode de l’Eglise orthodoxe russe dans sa décision du 28 décembre 1998 a condamné l’agissement des confesseurs qui «interdisent à leurs fidèles de conclure un second mariage sous prétexte que l’Eglise interdirait le remariage; qui interdisent aux couples le divorce alors que pour une raison ou une autre la vie familiale devient impossible aux époux». D’autre part, le Saint-Synode dit «rappeler aux pasteurs que dans son rapport au remariage l’Eglise orthodoxe suit l’apôtre Paul: «Es-tu lié à une femme? Ne cherche pas à rompre. N’es-tu pas lié à une femme? Ne cherche pas de femme. Si cependant tu te maries, tu ne pêches pas; et si une jeune fille se marie, elle ne pêche pas … La femme demeure lié à son mari aussi longtemps qu’il vit; mais si le mari meurt, elle est libre d’épouser qui elle veut, dans le Seigneur, seulement» (1 Cor 7, 27-28, 39).
(http://orthodoxeurope.org/page/3/6.aspx)

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