Dans une interview accordée depuis Kichinev lundi dernier à plusieurs chaînes russes le patriarche Cyrille a dit à propos du roman de Mikhaïl Boulgakov « Le Maître et Marguerite » (1) : « C’est un livre d’une admirable teneur littéraire. L’auteur a, le premier dans la période qui a suivi la révolution, alors que les libertés avaient été supprimées dans le pays, su décrire et analyser les forces des ténèbres qui s’étaient emparées de la société soviétique. Le roman montre la chute de « l’homme soviétique », sa déchéance morale, l’inversion du bien et du mal, la corruption et la vénalité qui régnaient sans partage.
Mais tout ceci ne pouvait être dit que sous la forme d’une parabole métaphysique. C’est d’ailleurs bien ce qui a fait de livre un ouvrage immortel.

Involontairement, les lecteurs du roman devaient prendre conscience d’eux-mêmes. Boulgakov a magnifiquement montré que la société de l’époque était régie par le diable et que celui-ci prévalait en tout. Les gloses sont très nombreuses en vue de décrypter le message que véhicule « Le Maître et Marguerite ». Certains estiment que Boulgakov, s’étant éloigné de l’église, avait délibérément altéré la narration évangélique, qu’il avait élaboré une sorte de mythe portant sur la vie de Jésus-Christ. C’était pour l’écrivain une manière de montrer qu’il ne se reconnaissait plus dans « le christianisme officiel ».
Je n’adhère pas à cette lecture l’étude la vie de Boulgakov m’a montré que l’écrivain n’avait pas la moindre intention d’adhérer au combat anti-religieux. En effet, bien que provenant d’une famille qui appartenait au clergé, Boulgakov n’était pas un croyant pratiquant. Mais qui peut dire qu’il n’avait plus la foi ? Boulgakov a connu les années des pires persécutions anti-chrétiennes. Comment, à l’époque, se consacrer à l’écriture d’un roman dont le Christ serait le personnage principal ?
Il est plus que possible que si le livre avait été rédigé dans un autre registre jamais nous n’aurions eu connaissance de son existence avant l’effondrement du régime soviétique. C’est sans hésiter que je conclus : Mikhaïl Boulgakov a connu une expérience spirituelle d’une immense intensité. Je dis tout cela abstraction faite de la corrélation du roman avec la foi orthodoxe ».
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"PO"

(1) "Le Maître et Marguerite" est un roman de Mikhaïl Boulgakov écrit entre 1928 et 1940.

Le Maître et Marguerite
Interfax religion

Rédigé par Parlons d'orthodoxie le 9 Novembre 2011 à 20:30 | 1 commentaire | Permalien


Commentaires

1.Posté par vladimir le 21/10/2011 00:25
Ce commentaire est d'autant plus important que le débat fait rage en Russie après la sortie de 20 épisodes TV illustrant le roman. La dernière phrase résume l'idée essentielle: bien séparée du reste du texte je la traduirais plutôt "Et ce faisant il /le patriarche/ a souligné qu'il ne jugeait pas la concordance du roman avec les canons orthodoxes." En disant cela le patriarche ouvre un nouvel espace à la liberté d'expression: on peut parler de Christianisme en faisant abstraction des canons. Et le patriarche prend ainsi le contrepied de tous ceux qui accusent le roman de blasphème ou d'hérésie, de propagation d'un mysticisme gnostique de mauvais aloi, de tendances ésotériques et franc-maçonniques. Le patriarche place le roman sur un autre plan: une grande œuvre littéraire et un message moral de premier paln.

On sait que Boulgakov tenait beaucoup à ce roman jusqu'à son dernier souffle. Il sera terminé par sa femme et paraitra en version censurée après la mort de l'écrivain, les parties supprimées circulant clandestinement. Devenu un ouvrage culte parmi les intellectuels russe de la fin de l'époque soviétique, "Le Maitre et Marguerite" en a amené un grand nombre à s'intéresser à la religion. La reconnaissance que lui assure ainsi le patriarche est bien méritée!

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