Les orthodoxes de Milan : « chacun entendait sa langue !»
Traduction Elena Tastevin

Le prêtre italien ne parle pas mais comprend le russe. Les paroissiens d’origine russe, ukrainienne, moldave ne parlent pas mais comprennent l’italien. Ainsi vivent l’archimandrite Dimitri (Fantini) et les paroissiens de l’église orthodoxe (Diocèse de Chersonèse Patriarcat de Moscou) dans le centre-ville de Milan. L’amour les unit et le problème de la langue est une question secondaire

« Bénis mon âme, Seigneur », - l’archimandrite Dimitri (Fantini) commence seul les vigiles.
L’hiérodiacre Silouan (Yaroslavtsev) n’arrivera que pour les matines. Le mercredi il accomplit d’abord son travail laïc d’ingénieur. Le recteur de l’église russe via Giulini à 10 minutes à pied de la cathédrale gothique de Milan chante le psaume 103 lui-même pour donner un répit à la chorale.

Le père Dimitri aura 70 ans en décembre mais les italiens savent chanter à tout âge. Il chante d’une voix agréable et mélodieuse depuis que, pour la première fois, est entré en 1977, médecin orthopédiste à l’époque, dans la cathédrale de Milan (patriarcat de Moscou).Le recteur de la cathédrale, l’archimandrite Dmitri (Fantini) italien officie en slavon de mémoire , parfois en suivant les brévières.

Les orthodoxes de Milan : « chacun entendait sa langue !»
Médecin des âmes

« J’ai été protestant et je m’intéressais à d’autres religions. Ainsi je suis entré à l’’église russe Saint Nicolas. La beauté de la liturgie, la bonté et l’ouverture des paroissiens m’ont frappé et j’y revenais régulièrement. Quelque temps après, le père Euloge Hessler m’a proposé de chanter dans la chorale. Plus tard je me suis converti à l’orthodoxie ».
Ensuite j’ai entrepris un voyage en Russie et j’ai éprouvé un vrai choc culturel en assistant aux offices dans les églises et les monastères, notamment celui de la Laure de la Trinité Saint Serge. C’était l’époque de Brejnev, l’Eglise n’était plus persécutée mais elle ne prospérait pas.
Entre temps, la paroisse du père Euloge a rejoint les schismatiques et lui, néophyte, selon ses propres dires, « est resté sans église ». Alors il a commencé à construire une église lui-même. En mai 1980 il a prononcé ses vœux monastiques et le jour de la Saint Nicolas l’évêque Séraphin (Rodionov) de Zurich l’a ordonné prêtre.

En août 1983 le jeune hiéromoine se rend en URSS. « Pendant ce voyage j’ai fait connaissance avec le protodiacre Boris devenu métropolite Serge de Ternopol et de Kremenetsk. Nous nous sommes liés d’amitié avec Monseigneur et je prie toujours pour lui». Rentré de voyage, le père Dimitri officiait dans l’église de Tous les Saints à Modène. Il a continué à exercer son métier de médecin. Il passait les jours de la semaine à l’hôpital et le week-end à l’église.

« A ma question comment concilier ces deux services Monseigneur Séraphin a répondu : « Tu es médecin, soigne les corps à l’hôpital et les âmes à l’église ». J’ai travaillé comme médecin jusqu’à la retraite au début des années 1990. J’y vois la Providence Divine : juste l’année d’après l’âge de la retraite a été considérablement décalé en Italie. J’aurais été obligé de continuer mon travail aujourd’hui.


Les orthodoxes de Milan : « chacun entendait sa langue !»
L’église dans le bureau

De novembre 1984 à mai 1985 le père Dimitri officiait dans une église roumaine de Milan avec son recteur le père Trayan Valdman. Il voulait, cependant, qu’il y ait une église russe à Milan.

Il n’avait pas de locaux et sans avoir reçu d’aide de la municipalité il a loué un local commercial dans l’immeuble où il habitait. Il a retapé l’intérieur et peint lui-même la majorité des icônes. Il a officié la première liturgie le 10 novembre 1985, le jour où l’Eglise célèbre la mémoire des pères du monachisme russe, Saint Serge et Saint Séraphin. Le 22 décembre de la même année, le père Dimitri a été désigné recteur de cette église. Il officiait avec le père Pavel Sciales qui est passé ensuite à l’église du patriarcat de Constantinople et l’hiéromoine Georges (Rafaelli) depuis parti à la retraite.

En septembre 1995 le père Dimitri a été nommé higoumène et en 2011 Sa Sainteté le Patriarche Cyrille l’a fait archimandrite.
Il avait rendu visite à la paroisse en 1999 lorsqu’il présidait le Département des relations extérieures du patriarcat de Moscou.

La vie paroissiale s’est organisée avec l’arrivée de la vague d’émigration dans les années 1990. Des russes, des ukrainiens, des moldaves, des bulgares, des yougoslaves venaient travailler en Italie. Les italiens se mariaient avec des russes, des ukrainiennes et leurs femmes les initiaient à l’orthodoxie. Ainsi, la paroisse est devenue très vite multinationale.

Le père Dimitri ne parle pas mais comprend le russe, d’ailleurs, il comprend mieux le slavon que le russe. Il officie de mémoire et consulte de temps en temps des bréviaires.

Une des paroissiennes raconte que dans le doute elle a demandé à l’archimandrite comment se confesser alors qu’ils se comprenaient à peine l’un l’autre. Il a répondu « confessez-vous au Christ et pas à moi ». Elle a pu se confesser en ouvrant son cœur comme rarement.

Dans les années 1980 la paroisse eut l’idée de publier un journal paroissial. Le père Dimitri ne savait pas écrire en russe. Il découpait des mots et des lettres des journaux russes et en composait des phrases. Ainsi naissait une homélie que lisaient ses ouailles. Aujourd’hui l’hiérodiacre Silouan interprète les homélies du père Dimitri.

Les orthodoxes de Milan : « chacun entendait sa langue !»
Parmi les paroissiens il y a des italiens.

Parfois ils viennent avec leurs amis catholiques, ceux qui s’intéressent à l’Orthodoxie et ceux qui ont besoin de la consolation d’un prêtre.Le père Dimitri ne se souvient pas du premier italien qu’il a baptisé orthodoxe. "Je ne me souviens plus si j’étais particulièrement ému à ce moment-là ".

Certains de ses paroissiens deviennent moines et prêtres. Aujourd’hui ils officient le Nord de l’Italie. Le 18 juin quelques-uns de ses « pupilles » se sont rendus dans son église : l’higoumène Ambroise (Kasinasko), moine érudit, auteur du livre « 99 différences entre l’Orthodoxie et le catholicisme », l’hiéromoine Théophile (Barbieri) affecté à Novar.

L’église rue Giulini est une chapelle latérale de Saint Vincent, une grande église autrefois. La paroisse a déménagé ici en juin 1996. Le père Trajan, ami du père Dimitri, a transmis l’église aux russes orthodoxes lorsque sa paroisse roumaine a reçu le droit de célébrer dans une ancienne église catholique. Le local est petit : il y a tout juste assez de place pour l’autel, la chorale et les fidèles.

Skite dans un village de Lombardie

Depuis longtemps le père Dimitri voulait établir un petit skite dans un village de Lombardie pour quitter parfois le bruit de Milan et prier dans le calme. L’année dernière sa paroisse a accueilli l’icône miraculeuse de la Vierge « La fleur Embaumée » qui faisait jaillir la myrrhe apportée de la région de Chersonèse. Le recteur et les fidèles priaient la Vierge de les aider.

Leurs prières furent exaucées. Quelques jours après une connaissance du père Dimitri lui a dit que sa fille n’arrivait pas à vendre sa vieille maison qui se trouvait non loin de Milan à la frontière avec la Suisse.
Il s’est avéré que la maison se trouvait dans le village Moussadino rue des Roses. La sonorité du nom du village évoquait Chamordino, monastère de femmes très connu en Russie. Ayant appartenu à un monastère catholique l’immeuble de trois étages a presque 500 ans.

Rapidement Mgr Nestor, évêque de Chersonèse, a donné sa bénédiction pour acheter l’immeuble et y établir un skite d’hommes. Le 15 août le père Dimitri, le père Silouan et deux clercs de la cathédrale de Milan Jonas et Nicolas se sont installés dans la maison, ont consacré l’église et y ont célébré la première liturgie. En décembre, les formalités administratives ont été accomplies et l’immeuble est devenu propriété de la paroisse.

A l’autre côté du lac Majore dans la partie suisse habite le vieil ami du père Dimitri, l’archimandrite du grand habit Gabriel (Bungue).

En 2010 le père Gabriel, théologien catholique et ermite bénédictin, après avoir étudié pendant longtemps les saints pères, a pris la décision de se convertir à l’orthodoxie.

Photo: Deux moines orthodoxes, un Italien et un Allemand
Les orthodoxes de Milan : « chacun entendait sa langue !»

Le père Dimitri rend souvent visite au père Gabriel dans le skite Eremo Santa Croce. Photo 2013

Les orthodoxes de Milan : « chacun entendait sa langue !»

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Parrocchia dei Santi Sergio e Serafino, Via Giulini angolo Via Porlezza, 20144 Milano, Italia
Тел. +39 02 860 538
Факс: +39 02 860 538
Email: chiesa@ortodossia.info

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 7 Juillet 2013 à 06:41 | 0 commentaire | Permalien



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