Marie Genko: Réflexions à propos d'un article du Père Grigorios Papathomas
Après avoir pris connaissance du lien ICI, mis en ligne sur "Parlons d’Orthodoxie" par Catherine Palierne : je me suis efforcée de bien comprendre l’article publié par le Père Grigorios Papathomas. Dans cet article, le Père Grigorios constate une crispation du culturalisme ecclésiastique depuis les années 1990. Il déplore cet état de fait, et il attribue d’une façon générale le culturalisme ecclésiastique à la chute des empires. Dans sa conclusion, il écrit que les Canons de notre Eglise sont, pour cette raison, considérés comme une archéologie ecclésiale.

Ma première observation est qu’il convient de se poser la question sur la cause profonde de ce que le Père Grigorios appelle la crispation récente du culturalisme ecclésiastique
Je voudrais défendre ici le point de vue du fidèle. Car il ne serait pas du tout absurde de considérer que ce culturalisme ecclésiastique est justement voulu et exigé par les fidèles, avant même qu’il ne le soit par certains membres de notre clergé.
Quelles en sont les causes : Pour moi il ne s’agit pas, comme l’affirme le Père Grigorios Papathomas, de l’héritage d’une culture d’empire, mais bien plutôt de l’héritage d’une culture patriarcale. Antioche et Jérusalem n’ont jamais été des empires.

Les patriarcats de Géorgie, de Roumanie, de Serbie n’ont pas davantage été l’expression d’une culture impériale, mais bien plutôt l’expression d’un ensemble de rites et d’usages d’une Eglise établie localement. Les empires ont toujours cherché à créer un pouvoir centralisé. L’Eglise, au contraire, s’est toujours construite localement dans sa pratique, ses habitudes et son rite. C’est cette culture patriarcale d’une Eglise établie localement, qui est devenue inséparable de l’identité religieuse des Orthodoxes.
Et c’est à cette identité religieuse que nous, les simples paroissiens, voulons à tout prix rester fidèles, en dépit des migrations qui nous ont dispersés dans le monde.

Comment être certains que cette fidélité est légitime:

a/Notre fidélité à notre identité patriarcale contribue à nous ancrer dans notre Foi et elle nous permet de résister contre la formidable pression de l’environnement déchristianisé du monde dans lequel nous vivons.

b/La pluralité des identités patriarcales sont une digue salutaire contre l’uniformisation voulue et encouragée dans le processus de globalisation de notre planète. L’Eglise orthodoxe, dans la richesse de sa diversité et la pluralité de ses usages, que le Père Grigorios Papathomas appelle « le culturalisme ecclésiastique », est pour nous, les fidèles, une véritable bouée de sauvetage ! Nous nous agrippons à cette bouée, parce qu’elle est notre ultime recours ! Car qui protègera notre foi et notre conscience en dehors de notre Eglise ? En cette aube de XXIème siècle comment pourrions-nous oublier les persécutions et le martyr de tant de chrétiens orthodoxes durant tout le siècle dernier ? Et ces persécutions elles ont été commises au nom du nivellement voulu par l’hydre athée du socialisme international.
Le démon a changé de visage et d'autres dangers nous guettent aujourd'hui.
Dans ce contexte difficile, lorsque nos plaies sont encore à vif, comment pouvons-nous observer les Canons de l’Eglise ?

Comment établir localement une assemblée de fidèles autour d’un seul évêque ?

a/Sur une terre patriarcale orthodoxe, aucune entorse aux Canons ne devrait être possible, puisqu’il suffit, comme nous le montrent les paroisses russes établies en Turquie, que celles-ci commémorent le patriarche du lieu, celui de Constantinople.

b/Pour les paroisses orthodoxes, établies sur les terres autrefois païennes des continents américains, indiens ou asiatiques, nous observons qu’elles ont gardé, pour la plus part d’entre elles, une filiation avec leurs Eglises mères respectives. Tout au long de l’Histoire de l’Orthodoxie, nous avons vu l’émergence de nouveaux patriarcats. Il serait donc logique de voir naître de nouveaux territoires patriarcaux sur ces continents, souvent très partiellement évangélisés dans un christianisme hérétique ! Un patriarche d’Amérique du Nord, à la tête de plusieurs diocèses, et commémoré par des Orthodoxes regroupés au sein de différentes paroisses serait une solution canonique; même si dans ce patriarcat les paroisses resteraient fidèles aux racines de leurs identités patriarcales respectives. Une telle approche mettrait l'Orthodoxie en Amérique en règle avec les Canons de notre Eglise. Et je suis certaine qu’il s’agit là d’une des questions qui seront mises à l’étude et réglées lors de la tenue du prochain grand concile orthodoxe.

c/Enfin comment observer les Canons lorsque les fidèles orthodoxes se trouvent sur le territoire canonique du patriarche de Rome ? S’il est vrai que l’Eglise de Rome a perdu à nos yeux son Orthodoxie, devons nous pour autant faire fi du territoire qui a été attribué à Rome par nos saints conciles ? Car ce territoire canonique romain a eu plus de mille années d’existence légitime ! L’ignorer, et vouloir créer en Occident un nouveau patriarcat, c'est-à-dire une nouvelle Eglise établie localement, cela voudrait dire que les Orthodoxes ont renoncé à l’espoir d’un retour à l’unité de l’Eglise fondée par Notre Seigneur ! Ce serait la négation de toute démarche œcuménique !

Pourtant, certains théologiens voudraient voir le patriarche de Constantinople jouer le rôle du « locum tenens » du patriarche de Rome et soutiennent l’idée de la création d’une Eglise Locale d’Occident, soumise au Patriarcat de Constantinople ! Cette démarche prend appui sur 28ème Canon du Concile de Chalcédoine (451), dont je donne la citation ci-dessous. Citation que j'ai choisie pour la clarté de sa formulation à partir des:

Sources médiévales : E Schwarz Acta Consiliorum Oecumenicorum, Leipzig 1922

« Suivant en tout les décrets des Saints Pères, et reconnaissant le canon des cent cinquante évêques qui vient d’être lu, nous prenons et votons les mêmes décisions au sujet des privilèges de la très sainte église de Constantinople, la nouvelle Rome. Les pères ont en effet accordé justement au siège de l’ancienne Rome ses privilèges, parce que cette ville est la ville impériale. Pour le même motif, les cent cinquante très pieux évêques ont accordé des privilèges égaux au très saint siège de la nouvelle Rome, jugeant avec raison que la ville qui est honorée de la présence de l’Empereur et du Sénat, et qui jouit des mêmes privilèges que l’ancienne ville impériale Rome, est, comme celle-ci, grande dans les affaires ecclésiastiques, étant la seconde après elle ; en sorte que les seuls métropolitains des diocèses du Pont, de l’Asie et de la Thrace, et les évêques des parties de ces diocèses situées dans les régions barbares, seront ordonnés par le très saint siège de la très sainte église de Constantinople ; bien entendu, chaque métropolitain des diocèses susdits ordonne, avec les évêques de la province, les évêques de celle-ci, comme prescrit par les divins canons ; mais, comme on l’a dit, les métropolitains des susdits diocèses sont ordonnés par l’archevêque de Constantinople, après élection concordante faite selon la coutume et notifiée à ce dernier.”


Il n’est pas question ici de territoires canoniques tombés en hérésie.

Actuellement, les fidèles orthodoxes, dispersés en Occident, commémorent les patriarches de leurs Eglises mères respectives. C’est une solution d’attente du retour de Rome en Orthodoxie. Le jour, où le Saint Père de Rome aura la même foi que la notre, c’est avec une joie profonde que les Orthodoxes établis en Occident le commémoreront ! Je voudrais ajouter que ce retour comblera particulièrement ceux des fidèles orthodoxes qui viennent du protestantisme ou de la religion catholique et qui prient dans nos églises malgré l’usage de langues étrangères et de rites bien éloignés de ceux de l’Eglise de leur enfance.
La stricte observance des Canons de l’Eglise voudrait que tout contact avec les hérétiques soit proscrit par les Orthodoxes. Il me semble utile de remarquer ici que ces Canons sont ceux de l’Eglise universelle du premier millénaire. Ces Canons sont donc communs à tous les chrétiens, même ceux dont la foi a dévié de la notre.

Dans ce cadre, l’œcuménisme est il une nouvelle hérésie ?

Il faudrait remonter aux sources de ce mouvement et en faire une analyse objective. Ce qui est voulu par le peuple de Dieu a toujours été pris en considération chez les Orthodoxes. Simplement il me semble que, contrairement à l’attachement à la culture patriarcale de son Eglise mère, ce n’est pas une majorité de fidèles qui est à la source de l’œcuménisme, mais plutôt au contraire la volonté des instances dirigeantes du haut clergé de nos Eglises. Pour beaucoup de fidèles en dispersion sur les terres de l’ancien patriarcat romain, l’œcuménisme est devenu une évidence. Mais l’est-il tout autant pour les fidèles établis sur les terres patriarcales restées orthodoxes ? Voilà une question qui mériterait d’être posée, et elle pourrait être la cause d’un débat intéressant. Mais ce débat ne rentre pas dans l’appréciation de l’article écrit par le Père Grigorios Papathomas, article auquel je me suis efforcée d’apporter l’éclairage du sentiment de la simple fidèle que je suis.

Marie Genko

Rédigé par Marie GENKO le 8 Juillet 2011 à 11:30 | 21 commentaires | Permalien


Commentaires

1.Posté par vladimir le 11/07/2011 23:02
Je trouve particulièrement intéressant cet article de Marie Genko car il nous élève au-dessus de nos querelles subalternes pour traiter une question ecclésiologique de première importances, celle du rôle des "Eglises locales" dans l'Organisation de l'Eglise (je désigne par "Eglises locales" les patriarcats et autocéphalies); il élève ainsi le débat car je pense que la plupart des problèmes qui se posent actuellement à notre diaspora, et ces querelles qui nous agitent, proviennent justement de cette question là.

Je trouve d'ailleurs l'exposé de Marie, écrit dans un langage simple et claire, plus intéressant que l'article jargonnant du père Grigorios, qui n'écrit visiblement que pour les théologiens spécialisés. Marie explique et justifie l'attachement des fidèles à leur Eglise locale que le père Grigorios met en accusation. Il est pourtant clair que l'immense majorité des croyants se rattache d'abord à son Eglise locale, à travers laquelle il communie à toute l'Eglise Une, Catholique et Apostolique, ce qui est à l'opposé de la "fonction de filtre dans la réception de l’Église" dont parle le père Grigorios …

UN COURANT PARTICULIER

Le fait que presque tous les Orthodoxes tiennent ainsi à leur Eglise locale devrait être la pierre de touche qui justifie cette doctrine, puisque c'est le Peuple de Dieu qui est pour nous le Gardien de la Vérité. Mais il y a quelques théologiens occidentaux, dont fait partie le père Grigorios, qui minimisent le rôle de l'Eglise locale dans l'Orthodoxie et cherchent à promouvoir simultanément le rôle de Constantinople ("papisme oriental") et l'importance des évêques et des fidèles directement unis à l'Eglise dans «l’ecclésiologie eucharistique» (influence protestante évidente). L'Eglise locale est alors transformée en un simple échelon organisationnel…

Les tenants de ce courant de pensée utilisent des arguments similaires:
- TERMINOLOGIE DEVALORISANTE: les différents auteurs utilisent des mots différents pour désigner le rôle des Eglises locales: "culturalisme ecclésiastique" pour le père Grigorios, "autocéphalisme" pour Olivier Clément(1), voire "phylétisme" pour les moins compétents (2); mais ces termes ont en commun de prendre une connotation péjorative dans leurs écrits (phylétisme désignant carrément une hérésie).
- ORIGINE RECENTE: si le père Grigorios ne le dit pas clairement, parlant de "manifestations nouvelles"… "Après la chute soudaine du mur de Berlin (1989) et au terme des années 90" et de "certains aspects du culturalisme ecclésiastique au sein des Églises chrétiennes, manifestés déjà à travers notamment le 2e millénaire", Olivier Clément écrit "Au 19ème siècle, (…) l'autocéphalie traditionnelle tend à se transformer en autocéphalisme à la fois absolu et homogène."

DIVERSITE DANS L'UNITE:
En fait cette approche apparait largement erronée:
- LES EGLISES LOCALES AUX PREMIERS TEMPS DE L'EGLISE: c'est en effet le premier concile œcuménique (Nicée 1, 325) qui a codifié l'existence des Eglises locales (patriarcats) qui existaient déjà, saint Grégoire l'Illuminateur (+331) est le premier Catholicos d'Arménie, l'Église orthodoxe de Chypre est autocéphale depuis 431, celle de Géorgie depuis 484… Puis ce furent les autonomies des Eglises des Balkans jusqu'au Xe siècle et celle de l'Eglise de Russie au XVIe. Nos auteurs semblent oublier cela car le principe d'autocéphalie a connu une éclipse du XVe au XIXe: sous l'empire ottoman les Eglises du Moyen-Orient deviennent des subdivisions du "millet des Roumis" ("nation" chrétienne, au sens musulman, pour lequel le civil et le religieux sont inséparables) dirigé par le patriarche de Constantinople nommé "ethnarque" par le sultan et, de son côté, l'Eglise russe absorbe l'Église géorgienne en 1811 (après l'annexion de la Géorgie par l'Empire de Russie…). Les anciennes Eglises recouvrent leur autocéphalie dès les premières indépendances dans les Balkans, en commençant d'ailleurs par l'Eglise de Grèce qui s'émancipe de Constantinople (1833/1850), et c'est ce mouvement de retour au statut ancien que nos auteurs tiennent pour innovation.

- ICONE TRINITAIRE: les Eglises locales sont de fait une part essentielle du mystère de l'Eglise. Si chez les Protestants le croyant est quasiment en contact direct et personnel avec le Sauveur (chez les Pentecôtistes les fidèles peuvent recevoir directement "le baptême du Saint Esprit" comme les Apôtres l'ont reçu à la Pentecôte) et chez les Catholiques l'intercession se fait par l'intermédiaire du Pape, vicaire du Christ, tous les évêques étant en prise directe avec lui, chez nous Orthodoxes, chaque Église autocéphale a un charisme propre qui participe au charisme trinitaire de l'Église pour présenter ensemble le Corps du Christ dans sa plénitude. Comme l'écrit Mgr Kallistos Ware: "l'Église orthodoxe est une icône de la Trinité, (...) reproduisant sur terre le mystère de l'unité dans la diversité (...) De même que chaque personne de la Trinité est autonome, de même l'Église est faite de beaucoup d'Églises autocéphales indépendantes" (3).
Et cet aspect théologique a des applications très concrètes dès le premier millénaire: si l'on regarde par exemple le Typikon qui règle notre vie liturgique, on y voit les apports successifs des différentes Églises autocéphales (4); de même, si la date du 25 décembre pour Noël vient de l'Église de Rome, le calcul de la date de Pâques vient de l'Église d'Alexandrie(5)… etc. Et de nos jours, malgré l'unification des calendriers (sauf problèmes de réforme!) et unification des offices, les différentes Eglises cultivent des spécificités devenues inséparables de l’identité religieuse des Orthodoxes comme l'écrit bien Marie.

CONCLUSION
Ainsi l'Unité dans la diversité de l'Église, comme la vit l'Orthodoxie par ses Eglises locales, fait partie intégrante de notre connaissance de Dieu (théologie), de notre Voie du Salut (eschatologie) et de notre témoignage du Règne. Je trouve donc particulièrement regrettable que des théologiens émérites paraissent le négliger cela (pour des raisons strictement politiques?) et ce d'autant plus que leur opinion est si largement répandue autour de nous, que bien des fidèles finissent par penser que c'est LA doctrine orthodoxe en la matière.

Encore Merci à Marie de remettre les pendules à l'heure.


Sources:
(1) Cf. http://www.orthodoxa.org/FR/patriarcat/documents/constantinople.htm
(2) http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/LE-PHYLETISME-une-reflexion-de-Seraphin-Rehbinder_a1556.html
(3) "L'orthodoxie. L'Eglise des sept Conciles", p.311
(4) cf. Job Getcha, «Le Typikon décrypté. Manuel de liturgie byzantine» http://www.orthodoxie.com/2009/11/recension-job-getcha-le-typikon-d%C3%A9crypt%C3%A9-manuel-de-liturgie-byzantine.html
(5) http://www.henk-reints.nl/cal/audette/calgreg.html#contro

2.Posté par Marie Genko le 13/07/2011 10:46

Cher Vladimir,

Merci de tout cœur de vous être donné la peine de commenter mes réflexions à propos de l'article du Père Grigorios Papathomas.

Je sais bien que nous ne sommes ni vous, ni moi, théologiens, mais comme vous, je suis convaincue que notre doctrine orthodoxe doit impérativement être accessible aux fidèles.

Et je vous suis infiniment gré d'avoir pris le temps, et fait le travail nécessaire, pour comprendre l'article du Père Grigorios Papathomas.

Je suis heureuse de voir que vous partagez mon avis concernant notre attachement à notre culture ecclésiale d'origine.
Je ne peux que répéter, qu'elle est pour moi, la plus sûre des protections contre l'agression de l'athéisme militant qui nous entoure.

C'est certainement un grande bénédiction d'avoir en Orthodoxie des moines extrêmement savants, et nous devons remercier le Seigneur pour leur intercession et leurs prières.

Mais il ne faut pas que cet immense savoir reste en vase clos, inaccessible aux fidèles!

Dans notre siècle de ténèbres, plus que jamais, nous avons besoin d'être mis en garde et d'être éclairés.
Nos moines doivent en être conscients et prendre la peine de venir parfois enseigner parmi nous.

A propos de l’Église de Géorgie, que vous mentionnez ci-dessus, j'aimerais simplement rappeler, que la Géorgie s'intégrant à l'empire de Russie sous le règne d'Alexandre Ier (1801) il était difficile que son Église garde un patriarche alors que l’Église russe était de son côté dirigée par un synode.
Mais il me semble vraisemblable, que l’Église géorgienne avait conservée de fait son autonomie et son propre clergé.
Avec toute ma gratitude et mon amitié Marie



3.Posté par T. Schakhovskoy le 13/07/2011 19:32
Et merci à tous les deux de continuer à nous proposer d'aussi intéressantes réflexions

4.Posté par vladimir le 13/07/2011 20:26
Bien chère Marie,
Dans mon commentaire 1 je me suis surtout attaché à recadrer le texte du père Grigorios, que vous contredisez avec raison. Mais vôtre commentaire va bien au delà, en particulier en ce qui concerne la situation de la diaspora. Votre analyse du 28ème Canon de Chalcédoine est totalement conforme à la doctrine de l'Eglise russe: "Ainsi les commentateurs anciens et faisant autorité confirment que le Concile de Chalcédoine n'a donné à l’évêque de Constantinople un droit sur les territoires "barbares" que dans les limites de trois diocèses, dont seul le diocèse de Thrace se situe en Europe. Aristène et Zonaras, par exemple, indiquent clairement qu'en Europe le droit pour l’évêque de Constantinople d'envoyer des évêques pour les barbares s'étend seulement au diocèse de Trace, car les autres diocèses sont soumis à l’évêque de Rome." écrivait le patriarche Alexis II, de bienheureuse mémoire en réponse aux prétentions formulées par Sa Sainteté Bartholomée I après un long développement justifiant cette position (cf. lien ).

Toutefois je ne vous suivrai pas quand vous parlez de "territoires canoniques tombés en hérésie". La position de l'Orthodoxie à propos des catholiques n'est pas unifiée et ce point est à l'ordre du jour du prochain concile, mais les représentants qualifiés de toutes les Eglises orthodoxes à la commission théologique mixte ont convenu de ne pas utiliser le terme d'hérésie vis-à-vis du catholicisme. De plus, l'Eglise russe a clarifié sa position par le document "Déclaration de l'Eglise orthodoxe russe sur son attitude envers l'hétérodoxie" (cf http://orthodoxeurope.org/page/14/1.aspx, Annexe), adopté par le concile épiscopal de 2002 et confirmé par le dernier concile local. Il y est écrit: "Le dialogue avec l'Église catholique romaine est fondé et doit rester fondé à l'avenir sur le maintien de la succession apostolique des ordinations. En même temps il apparaît indispensable de prendre en considération le caractère du développement des bases doctrinales et de l'ethos de l'Église catholique romaine qui va assez souvent à l'encontre de la Tradition et de l'expérience spirituelle de l'Église Ancienne." On ne saurait donc parler d'hérésie. Une position similaire est d'ailleurs défendue par Sa Sainteté Bartholomé 1: "les contacts avec les hétérodoxes, comprenant des dialogues théologiques avec eux, ne constituent pas des actes de certaines Églises ou personnalités, mais, comme nous l’avons dit, des décisions de toutes les Églises orthodoxes sans exception, y compris la très sainte Église d’Hellade, comme l’est la décision de la IIIe consultation pan-orthodoxe préparatoire au concile (1986) ainsi que les accords portant sur le contenu de notre dialogue théologique avec l’Église catholique-romaine…" (lettre du 2 octobre 209 à S .B. Hiéronymos, archevêque d’Athènes et primat de toute la Grèce, http://www.orthodoxie.com/2009/10/importants-remous-au-sein-des-%C3%A9glises-orthodoxes-%C3%A0-propos-de-la-prochaine-r%C3%A9union-de-la-commission-i.html )

La position de l'Eglise russe vis-à-vis de l'œcuménisme est aussi largement expliquée dans la "Déclaration" citée plus haut (Annexe).

Pour ce qui concerne l'absorbtion de l'Eglise de Géorgie après l'annexion de cet état par l'empire (votre commentaire 2 in fine), je l'explique plutôt par une immixtion néfaste de la politique séculière dans l'ecclésiologie (Constantinople avait déjà fait de même avec le patriarcat d'Ohrid, en 1020, sans parler des querelles entre Rome et Constantinople à propos de l'Illyrie et de Ravenne…). Il est heureux que l'Eglise russe ne suive plus cette pratique, comme le montre son refus d'absorber les diocèses d'Abkhazie et d'Ossétie du sud.

5.Posté par Marie Genko le 13/07/2011 21:46

Cher Vladimir,

Absorber les diocèses d'Abkhasie et d'Ossétie du sud, aurait été nier la réalité de l'attachement à l'identité patriarcale!

Cette identité patriarcale qui est justement de toute première importance.

C'est notre attachement à notre identité patriarcale qui nous permet de ne pas tomber dans le phylétisme et de ne pas changer de patriarcat au gré de l'évolution politique des États et de leurs frontières.

Par ailleurs, vous avez raison le terme "hérétique" est bien trop fort en ce qui concerne les Catholiques.
Ils sont nos frères chrétiens séparés.
Et je vois là une raison supplémentaire pour nous, Orthodoxes, de respecter le territoire canonique du Patriarcat de Rome.

Merci aussi pour tous les liens que vous vous donnez la peine de mettre en ligne, je vais les lire avec beaucoup d'intérêt.

6.Posté par vladimir le 13/07/2011 23:00
Nous sommes d'accord... mais c'est bien cela qui avait été fait pour l'Eglise de Géorgie et le patriarcat d'Ohrid!

7.Posté par Marie Genko le 14/07/2011 10:06

J'espère que cette question de l'attachement à "l'identité patriarcale" sera une des questions évoquées lors de la réunion du prochain grand concile orthodoxe.

Car il ne faut pas que l'erreur de l’absorption de diocèses ou même d'une Église entière soit possible dans l'histoire à venir de l'Orthodoxie.

8.Posté par Daniel le 14/07/2011 12:18
@ Marie Genko

Comme je suis vieux jeu, je ne connais que 3 types de noms pour les entités qui ont quitté l'église : les schismes, les hérésies et les parasynagogues (conventicule) suivant la terminologie de Saint Basile, tous étant sans succession apostolique par le simple fait de sortir de l'église. Le "Frères séparés", qui est hors de l'église tout en conservant une succession apostolique, je ne connais pas et je ne sais même pas quelle est sa définition exacte car on met ce nom à toutes les sauces...

Pour mémoire, le canon 1 de Saint Basile les définit ainsi :

"d'hérésies, pour ceux qui ont rompu totalement avec l'Église et ont adopté une foi étrangère à la sienne; de schismes, pour ceux qui se sont mis en désaccord avec les autres pour des raisons d'administration ecclésiastique ou sur des questions faciles à régler; de conventicules, aux assemblées réunies en des prêtres ou faveur des évêques insoumis par des gens ignares, Ainsi, si quelqu'un, jugé pour une faute et suspendu de ses fonctions, ne s'est pas soumis aux peines canoniques, mais a revendiqué le pontificat et ses fonctions et entraîna avec lui quelques-uns qui quittèrent l'Église catholique, un tel fait c'est un conventicule; un schisme, c'est de penser autrement que l'église sur la pénitence à imposer; une hérésie, comme celle des manichéens, des valentiniens et des marcionites et enfin celle des pépuziens eux-mêmes, car la différence porte tout droit sur la foi même en Dieu. [...]"




9.Posté par vladimir le 14/07/2011 15:18
@Daniel,
Vous voulez dire que le concile local de l'Eglise russe a défini une nouvelle catégorie de séparation, "fondé(e)... sur le maintien de la succession apostolique des ordinations /mais avec.../ un développement des bases doctrinales et de l'ethos... qui va assez souvent à l'encontre de la Tradition et de l'expérience spirituelle de l'Église Ancienne." ?

10.Posté par Marie Genko le 14/07/2011 19:14
Cher Daniel,

Merci pour votre mise au point.
Il me semble que là aussi, il est de toute première importance que tous les patriarcats orthodoxes se mettent d'accord.

Merci aussi de nous rappeler le Canon de Saint Basile.
En le lisant attentivement il me semble que les Catholiques pourraient vous rétorquer que ce Canon ne peut s'appliquer à leur cas particulier.

Oui, il se sont séparés de nous, mais ils n'ont pas adopté une foi étrangère à la notre.
Oui, ils sont administrativement organisés autrement que nous le sommes, mais toujours selon la lecture de ce Canon cela les met dans la catégorie des schismatiques et non des hérétiques.

A cela vous me répondrez qu'ils ont ajouté le "filioque" au symbole de Nicé! et qu'ils ont adopté le dogme de l'infaillibilité papale, sans oublier celui de l'Immaculée Conception....

Cependant pour rester dans une volonté de réconciliation de notre Église avec ceux qui l'ont malheureusement quittée, je pense que nous devons penser positifs.

Qu'en serait-il si nous pouvions envisager une union sur les bases de la foi qui nous est commune?
Qu'en serait-il si les Catholiques acceptaient de reconnaître que seul un concile universel peut promulguer de nouveaux dogmes de foi?

Ne croyez-vous pas qu'une telle démarche nous permettrait de voir l'union de chrétiens se réaliser rapidement?


11.Posté par Daniel le 14/07/2011 19:35
@ Vladimir (message 9)

Non, le concile local n'a rien défini, il a juste innové en inventant une succession apostolique hors de l'Eglise. Mais quand il le veut, ses souvenirs de cours de théologie lui reviennent et il se rappelle du canon 1 de Saint Basile que je cite. Ainsi pour rédiger le document sur la réadmission de ceux qui renient le schisme, il se souvient de l'ecclésiologie orthodoxe traditionnelle... Je cite notamment :

"L’expérience séculaire de combat contre les schismes montre que l’Eglise du Christ, seule à recevoir la grâce divine dans sa plénitude, ne reconnaît pas comme ayant la grâce et opérants « les sacrements » accomplis par les communautés schismatiques. Cela concerne entre autre le sacrement du baptême. " et plus loin "« La hiérarchie schismatique » perd la possibilité de procéder à des sacrements marqués par la grâce en se séparant de l’Eglise et ne disposant donc plus de la bénédiction de la continuité apostolique." Dommage que ces souvenirs s'estompent dès qu'il s'agit de porter une appréciation sur le catholicisme...

Source :
http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/L-acceptation-dans-l-Eglise-de-ceux-qui-renient-le-schisme-Projet-de-la-Commission-interconciliaire_a1329.html

12.Posté par vladimir le 14/07/2011 23:14
Pour moi cela signifie bien que l'Eglise catholique n'est pas schismatique. Simplement "il apparaît indispensable de prendre en considération le caractère du développement des bases doctrinales et de l'ethos de l'Église catholique romaine qui va assez souvent à l'encontre de la Tradition et de l'expérience spirituelle de l'Église Ancienne." Je suppose qu'il faut mettre cela au niveau du théologoumène ...

Encore une fois, je ne prétend pas connaitre la vérité: je cherche à comprendre, le concile étant justement la référence pour proclamer la vérité.

NB: précisons tout de même que le document que vous citez là n'est qu'un projet préparatoire que la Commission interconciliaire a validé en première lecture, il peut donc être modifié avant adoption par le concile, alors que la "Déclaration" est un document définitif dûment validé par le Concile épiscopal et confirmé par le Concile local.

13.Posté par Daniel le 15/07/2011 21:23
@ Marie (message 10)

L'union que vous proposez est celle du plus petit dénominateur commun. Chacun choisit ses croyances et on conserve un socle commun... Ce n'est pas une vraie unité de foi. Par ailleurs, aucun concile orthodoxe n'a jamais promulgué de nouveaux dogmes. La notion de développement dogmatique est catholique et étrangère à l'orthodoxie.

@ Vladimir

je me permets de rappeler que tout concile ne proclame pas forcément la vérité. Que certains conciles errent; à ce sujet, que dit le concile de 1666 et celui le précédent sur le statut des catholiques?



L'église catholique n'est donc ni hérétique, ni schismatique ni une parasynagogue. Ils sont orthodoxes en somme, non?

14.Posté par Marie Genko le 15/07/2011 22:03
Cher Daniel,

Merci pour votre message.
Je pense que vous avez raison sur toute la ligne du PRINCIPE!

Mais, à titre personnel, je distingue deux choses:

1/L’Église Catholique, sa structure, sa doctrine etc etc

2/ les fidèles appartenant à cette Église Catholique!

Ce qui est douloureux, voire insupportable est de porter un jugement sur nos frères chrétiens catholiques!
Combien d'entre eux ont une foi et une piété exemplaire...!
Combien d'entre eux sont un exemple de Charité et de dévouement à autrui...!

Je pense que les Orthodoxes, notre clergé, nos fidèles, ont eu eux aussi des tords envers les Catholiques!
Car dans un divorce les tords sont en général partagés!

Cher Daniel, il n'est pas question de choisir ses croyances!
Il est question de s'en remettre à de futurs conciles pour parvenir à une unité de foi dans l'ensemble du monde chrétien.
Je sais bien que cela ne sera pas facile! Mais avec l'aide de l'Esprit Saint rien n'est impossible.
Amitiés Marie

15.Posté par vladimir le 16/07/2011 10:16
Si on suit bien le concile, effectivement peu de choses nous séparent... Juste assez pour empêcher la communion!

16.Posté par Marie Genko le 22/07/2011 11:10

Il me semble que les points de vue concernant le futur des diocèses américains n'est pas très clair dans l'esprit de beaucoup d'entre nous, pas plus d'ailleurs que celui de l'Archevêché russe d'Europe occidentale!

Je serai heureuse si les lecteurs de Parlons d'Orthodoxie voulaient bien donner leur avis sur le futur de l'Orthodoxie en Amérique.
J'ai abordé cette question ci-dessus dans le paragraphe intitulé:

COMMENT ETABLIR LOCALEMENT UNE ASSEMBLEE DE FIDELES AUTOUR D'UN SEUL EVEQUE

au point b/

En effet, l'archevêché des Eglises russes d'Europe occidentale, prend volontiers pour modèle le chemin suivi par l'OCA.
Et il me semble important d'envisager aussi par ce biais le futur de mon archevêché.

Il y a actuellement en Amérique deux métropolites en charge des fidèles issus de l'évangélisation des moines russes en Amérique et de la diaspora descendante des émigrés de l'ancien empire russe.
Il s'agit du métropolite Jonas pour l'OCA et du métropolite Hilarion pour l'Eglise russe Hors Frontières.

Toujours dans le souci de respecter les Canons orthodoxes:

Est-il concevable de fusionnner ces deux entités en une seule métropole ?
Et serait-il concevable d'agir de même sur le sol d'Europe occidentale?

Serait-il possible de faire fusionnner les paroisses de l'archevêché avec celles de l'Eglise russe Hors Frontières, en LES FAISANT DEPENDRE D'UN METROPOLITE AMERICAIN, comme cela est le cas de Mgr Michel de Genève qui dépend du métropolite Hilarion aux USA?

Peut-être serait-ce une façon de créer déjà une certaine unité et de nous approcher du respect de nos Canons orthodoxes?
Et cela tout en apaisant les craintes de certains fidèles de l'archevêché de passer sous la tutelle directe du patriarcat de Moscou??????

17.Posté par vladimir le 22/07/2011 12:23
Bien chère Marie,

Votre article abordait tellement de sujets importants qu'il était difficile de les commenter tous et vous avez bien raison de rappeler celui-ci: cet exemple semble en effet porteur d'avenir non seulement pour notre Archevêché, que vous citez, mais aussi pour l'Eglise russe comme l'a écrit Mgr Hilarion de Volokolamsk (1).

Dans votre résumé vous oubliez Mgr Justinian de Naro-Fominsk, responsables des paroisses du patriarcat de Moscou aux USA, vice-président de l'Assemblée épiscopale des Amériques du Nord et du centre (2) et Mgr Job de Kachira, responsable des paroisses du patriarcat de Moscou au Canada. Or il me semble qu'ils tiennent l'une des clé de réponse à votre question: Mgr Justinian préside déjà la délégation de l'Eglise russe à l'Assemblée épiscopale, qui inclut aussi les évêques de l'EORHF aux USA et Canada et Mgr Job. Cela semble dessiner les contours de l'une des "grandes métropoles continentale" qu'avaient évoqué Mgr Marc de Berlin il y a quelques mois. Ce serait probablement une première étape, dans l'idée de la lettre de 2003 du patriarche Alexis de bienheureuse mémoire (3) et la suite, toujours suivant le plan proposé par cette lettre programmatique, pourrait être "que la Nouvelle Métropole autonome, qui réunira tous les fidèles de tradition orthodoxe russe des pays d’Europe Occidentale, servira au moment choisi par Dieu, de creuset à l’organisation de la future Eglise orthodoxe Locale multiethnique en Europe Occidentale, construite dans un esprit de conciliarité par tous les fidèles orthodoxes se trouvant dans ces pays." Cette métropole viendrait renforcer la vocation unificatrice de l'OCA et la restauration de la communion entre OCA et EORHF peut être un premier pas en ce sens (4), de même que la participation de tous les évêques à l'Assemblée épiscopale (rappelons que l'EORHF ne participait pas à la SCOBA).

Et l'appel qui concluait cette lettre me semble plus actuel que jamais: "Avec amour je vous appelle tous, très chers Archipasteurs, pères, frères et sœurs, à œuvrer à la grande tâche de la guérison des douloureuses plaies qui divisent la diaspora d’origine russe. Que le Seigneur d’amour et de paix bénisse vos efforts."
Rlférences:
(1) cf. http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/Le-fait-de-donner-l-autocephalie-a-l-O-C-A-etait-un-acte-prophetique-de-la-part-de-l-Eglise-russe-orthodoxe_a1677.html
(2) http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/Assemblee-episcopale-des-Ameriques-du-Nord-et-Centrale_a986.html
(3) http://oltr.france-orthodoxe.net/html/appelfr.html
(4) http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/OCA-et-EHF-Un-pas-concret-vers-l-organisation-de-la-diaspora_a1198.html
(5) http://www.scoba.us/jurisdictions.html

18.Posté par Marie Genko le 22/07/2011 21:06
Cher Vladimir,

Un immense merci pour tous les détails que vous donnez.
Vous pensez donc qu'il ne serait pas utopique de penser qu'une fusion de l'OCA et de l'EORHF serait possible en Amérique?
Et qu'en Europe occidentale nous pourrions envisager de nous attacher avec l'EORHF à cette nouvelle grande métropole américaine autocéphale?


19.Posté par vladimir le 23/07/2011 12:06

Bien chère Marie,

Non, je ne crois pas que ce serait une bonne idée de réunir Europe occidentale et Amériques...

Je pars de l'idée émise par Mgr Marc de Berlin il y a quelques de réorganiser les diocèses de l'Eglises russe en dehors de son territoire canonique traditionnel en "3 ou 4 grandes métropoles continentales autonomes" (j'espère que ma mémoire ne me trompe pas, car je ne retrouve plus la source). La délégation du patriarcat de Moscou à l'Assemblée épiscopale des Amériques du Nord et du centre me semble bien dessiner une possible métropole, en regroupant prés de dix évêques de l'EHF et "des paroisses du patriarcat de Moscou aux USA et Canada", et cela me semble bien correspondre à l'esprit de l'appel de 2003 que je citais...

La situation de l'OCA est différente: c'est "la première/et la seule à ma connaissance/ Eglise orthodoxe sur le continent américain à s’être déclarée elle-même américaine. Ce qui signifie qu’elle n’est pas une des Eglises ethniques de la «diaspora», mais l’Eglise orthodoxe des Etats-Unis, du Canada et du Mexique." (cf. 1 ci dessus). Mais ses évêques, qui constituent le deuxième groupe d'évêques par leur nombre (après Constantinople), siègent pratiquement comme des "évêques indépendants" puisque l'OCA n'est pas reconnue comme Eglise par les autres. J'espère quand même que, avec l'appuy de la métropole russe réunifiée, elle pourra servir de modèle pour une unification générale en une véritable Eglise locale qui puisse préserver les liens avec les Eglises-mères à l'exemple de l'OCA.

Pour l'Europe, je pense que nous allons vers une grande métropole russe autonome; elle réunira prés d'une dizaine d'évêques et plus de cent paroisses et pourra "servir de creuset, si Dieu le veut" à l'unification ultérieure des Orthodoxes en Europe, sur un modèle rappelant l'OCA par la conservation des liens avec les Eglises-mères. Ceci est mon rêve…mais il faut souligner que ce modèle n'est pas celui des petites assemblées épiscopales nationales mises en place, et en fait calquées sur l'organisation des métropoles grecques. Ces "métropoles" ne sont pourtant que de petits diocèses, avec un seul évêque et quelques paroisses (une vingtaine en France) et cela conduit à un émiettement des assemblées, qui comptent chacune à peine une demi-douzaine d'évêques (certains se partageant entre plusieurs assemblées); elles ne peuvent, à mon sens, conduire qu'à des Eglises inconsistantes accentuant encore l'émiettement de l'Orthodoxie au lieu de l'unifier. Pourtant c'est une tendance forte actuellement puisque même les évêques du Canada ont tenu à constituer une petite assemblée spécifique de 9 évêques (http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/Premiere-reunion-de-l-Assemblee-des-eveques-orthodoxes-canoniques-du-Canada_a1557.html) alors que celle d'Amériques du Nord et du Centre en compte 55, ce qui la met au rang des grandes Eglises.

20.Posté par Marie Genko le 25/07/2011 12:57
Cher Vladimir,

Louons le Seigneur, notre Orthodoxie est faite de diversité d'identités patriarcales!
Chacun d'entre nous a le droit d'exprimer sa piété selon son identité cultuelle et même selon ce qui lui semble conforme à l'enseignement qu'il a reçu.
Et, cela va sans dire, nous avons aussi la possibilité d'avoir des divergences d'opinions.
Parce que nous sommes sur ce blog pour essayer de réfléchir ensemble à notre foi, je vais me permettre d'exprimer quelques doutes quant à votre message 19

Il me semble qu'il y a en ce moment plusieurs pôles de pensée dans notre monde orthodoxe.

Ce qui est important à mes yeux, est que ces différentes compréhensions de l'organisation de l'Orthodoxie convergent vers un accord total.

Pour cela, il convient d'examiner la situation actuelle et essayer de dégager les grandes lignes, qui semblent nous tirer à hue et à dia, au lieu de nous rassembler.

Je ne prétends pas ici faire une étude complète de cette question, je n'en ai pas le temps ni probablement la stature. Je vais me contenter d'émettre quelques observations.

L'Eglise russe a accordé une autocéphalie à son diocèse américain l'OCA.
Ceci a été fait contre la volonté de Constantinople et sans l'accord de 10 Patriarcats sur 15.

Actuellement se dessine d'une part un mouvement de renforcement des liens des églises mères avec leur diaspora.
D'autre part, à ma connaissance, l'Eglise de Russie n'a nullement l'intention de revenir en arrière en ce qui concerne le statut de l'OCA.

Il y a donc bien là une divergence dans l'approche de l'ecclésiologie entre les patriarcats des pays de l'Est et les autres patriarcats...

D'autre part, je suis toujours gênée, lorsque je lis les commentaires qui vont dans le sens d'une troisième Rome.
Dans ma compréhension des choses, chaque patriarcat a le droit, et le devoir, d'un témoignage et d'une mission.
Cela n'est pas l'exclusivité ni de la première, ni de la seconde, ni de la troisième Rome...!
Alors pourquoi voulez-vous que l'OCA soit le dénominateur commun des orthodoxes américains?

Si nous partons du fait que chaque patriarcat a ce devoir de mission en terre non orthodoxe, nous comprenons mieux les diocèces qui se créent les uns à côté des autres, autant en Chine qu'aux USA.

Par ailleurs, si Mgr Michel de Genève relève d'un métropolite en Amérique, cela ne semble pas poser un problème à son troupeau?

Peut-être en serait-il de même pour l'archevêché, qui est après tout le frère de l'EORHF!

La seule raison qui empêche l'archevêché de s'unir àson église mère est l'intensive propagande anti russe et anti Eglise russe dans les médias français et même certains médias orthodoxes!

C'est la raison pour laquelle un métropolite américain me semble moins susceptible de prêter le flancs à des accusations aussi ridicules que constantes, dont est hélas agressée l'Eglise de Russie.

Je sais bien que le Père Alexandre Schmemann a beaucoup insisté sur la nécessité d'une Eglise Locale en Amérique.
Vous savez que j'ai un profond respect pour l'immense oeuvre de vulgarisation en langue locale du Père Alexandre, pour l'imense travail qu'il a accompli.
Mais permettez-moi de ne pas le croire infaillible.

Il me semble important que tous les théologiens orthodoxes se mettent d'accord sur l'établissement des orthodoxes sur les nouveaux territoire.
Et si nous sommes conscients et profondément reconnnaissants à l'Eglise russe pour son messianisme actuel, nous ne devons pas encourager ceux de ses clercs, qui voudraient se croire investis d'une mission mondiale particulière.
Ce serait aller contre la conciliarité chère aux orthodoxes







21.Posté par vladimir le 25/07/2011 18:35
Bien cher Marie,

Je trouve que l'OCA représente un modèle parce que c'est la seule Eglise locale de plein exercice qui comporte en son sein des diocèses qui gardent des liens particuliers avec leurs Eglises-mères tout en étant soumis au primat et au synode de l'OCA. Je que cela correspond parfaitement à ce dont parle Mgr Hilarion, "ce modèle ne correspondait pas à l’ecclésiologie de l’Eglise ancienne mais il convenait à la nouvelle réalité qui existait à la suite de l’émigration en Europe et en Amérique", et que c'est bien cela qu'il faut tant en Amériques qu'en Europe.

Mais je ne vois personne proposant de réunir Europe et Amériques alors que le schéma esquissé par Mgr Marc de "métropoles continentales autonomes" de l'Eglise russe, réunissant les diocèses de l'EHF et du patriarcat respectivement en Europe, en Amériques et en Extrême-Orient, me parait pertinent. Daru aurait donc sa place en Europe: cela lui a bien été proposé en 2003 et je pense que la porte reste ouverte…

Toutefois ce n'est qu'un premier pas car ces métropoles restent dépendante da la seule Eglise russe et, pour aller plus loin dans l'unité, il faut se réunir avec les autres tout en conservant ces liens avec les Eglises-mères dont vous connaissez la force. C'est, pour moi, le concept du creuset dont parle le patriarche Alexis et c'est là que le modèle OCA devient un bon exemple. Mais je ne pense pas que nous devions tous entrer dans l'OCA, ni même que tous les diocèses des Amériques doivent le faire. C'est simplement "un modèle qui convient à la nouvelle réalité" et je note que ce modèle est très concrètement attractif: le diocèse roumain l'a rejoint en 1960, l'albanais en 1971 et le bulgare en 1976… Quelle autre structure orthodoxe peut s'y comparer sur ce plan là?

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