L’amour véritable  consiste à aimer la vérité
Par le père Jean Valentin Istrati (prêtre roumain)

Un nombre toujours plus grand de gouvernements européens, les études sociologiques récentes le prouvent, cherchent à prouver coûte que coûte leur tolérance, leur bon sens, leur fidélité aux principes du pluralisme et au politiquement correct et ceci alors qu’ils soumettent à de cruelles discriminations les communautés chrétiennes (qui représentent la majorité démographique dans leurs pays).

La foi chrétienne naguère valeur suprême aux yeux de l’humanité qui est appelée à être divinisée est maintenant devenue une religion que l’on veut reléguer le plus loin possible. Une religion qui reste tolérée par endroits ce qui n’empêche pas la meute européenne du politiquement correct de soigneusement la vilipender. Les sociétés occidentales se sont retrouvées face à face avec des civilisations importées d’ailleurs. Ces cultures véhiculent une intolérance extrême, une discipline très rigide et ont la faculté de se répandre d’une manière épidémique. Notre vieux continent n’a pas été pris de court, comme si un tsunami y avait soudain déferlé, par cette crise des valeurs chrétiennes.

Le système éducatif, l’état d’esprit de l’opinion, la pratique judiciaire et la religion même ont pris part à la préparation de ce déferlement. Aujourd’hui, alors que les communautés chrétiennes les plus actives sont plongées dans une sorte de coma elles ont commencé à prendre conscience que la source même de la tolérance et de la morale a été foulée aux pieds pour un misérable brouet de valeurs atones mais qui ont évincé la vérité.

Je me souviens d’un débat animé que j’ai eu avec un professeur de théologie néerlandais.

Son motto était « tolérance maximale ». Il disait qu’il ne convenait pas d’affirmer que le Christ est Dieu car ce faisant nous portons atteinte à la dignité des bouddhistes, des musulmans, etc. Raisonnement fallacieux car confondant l’acceptation du pluralisme avec la proclamation de la Vérité. Le Christ nous appelle à aimer tous les hommes, ceci sans distinction selon l’appartenance ethnique, religieuse ou sociale. Mais, et ceci jusqu’à accepter de mourir, il nous faut témoigner de la Vérité devant tous ceux là. Il nous faut sans cesse témoigner de l’incarnation de Dieu, qui est mort et qui est ressuscité dans la chair avant de monter au Ciel et qui demeure dans l’Eglise pour l’éternité.

Toute prudence dictée par le désir d’éviter à autrui des désagréments en professant la Vérité salvatrice signifie tout simplement un déficit d’amour à l’égard des incroyants. Toute dilution de la vérité au nom de la coexistence pacifique est non seulement une grave erreur intellectuelle mais aussi une source de mal-être social. Selon ces critères les martyrs qui ont sacrifié leurs vies pour la Vérité ne sont pas le moins du monde tolérants. Les Conciles oecuméniques qui avaient stigmatisé les hérésies n’étaient de ce point de vue qu’une réunion de radicaux. Pourquoi, alors, ne pas dire que les ascètes qui avaient passé leurs vies à prier Dieu et la Trinité dans des grottes pêchaient par étroitesse de vues…

Tout ce que nous disons témoigne de nous-mêmes: vérité ou mensonge.

Tertium non datur. La Vérité est source de vie, elle est personnalité et non addition de notions. Dire qu’aujourd’hui tout est bon pourvu que nous ne vexions pas ceux qui résident dans l’erreur est une préfiguration de l’erreur éternelle, c’est-à-dire de l’enfer. De là il n’y a qu’un pas jusqu’à la doctrine des penseurs allemands « au-delà du bien et du mal » justifiant les crimes de masse. L’addition de la vérité et du mensonge a pour résultat le mensonge absolu.

Oprah Winfrey la célèbre animatrice américaine de télé a récemment conclu son émission « Oprah show » en disant qu’elle s’apprêtait à méditer sur les abîmes insondables de la nature humaine. Lors de l’émission suivante elle a déclaré avoir découvert que la religiosité n’est qu’une complaisance narcissique. Dieu ne serait que l’âme de l’homme. Elle se figurait la vie à la lumière du panthéisme moral à l’américaine. Ce type de religiosité si merveilleusement bien présentée dans les studios de la télévision n’est en réalité qu’une manifestation de tentation luciférienne, d’egolatrie collective et de retour au paganisme. Si nous sommes, de par notre nature, une personnification de Dieu il s’en suit que notre comportement, fût-il criminel, reste d’ordre divin. A voir les choses largement un tueur en série et un sincère philanthrope ne se distinguent en rien l’un de l’autre. Il s’agit en réalité de la mort de la morale fourvoyée dans les voies du moralisme !

Toujours à propos de tolérance et d’amour de la vérité rappelons que la théologie chrétienne a au cours des siècles élaboré toute une « Science de Dieu », c’est-à-dire de recherche de Dieu et d’amour pour Lui. Jamais le chrétien ne justifie la violence car il croit au paradis et à la vie éternelle. Jamais il ne dira du mal que c’est le bien, ou le contraire. La vérité de l’amour consiste à aimer la Vérité.

Mais l’ironie de la situation est que le christianisme s’affaiblit en promulguant le respect qu’il éprouve à l’égard du pluralisme. Ceci alors que les autres religions se font de plus en plus intolérantes et pratiquent largement le prosélytisme, la violence, voir les meurtres.

En 2002 j’ai effectué un stage de doctorat en Grande-Bretagne, au collège de la Résurrection à Mearfield.

Grâce aux enseignants j’ai pu rencontrer la communauté orthodoxe de Nottingham. J’y ai trouvé tant de joie, de paix, de cordialité orientale, de foi ! Mais les visages des orthodoxes réunis dans cette petite église exprimaient une douleur que l’on sentait difficile à verbaliser. Quelle en était la nature ? L’éloignement du pays, l’amertume de l’aliénation ?

Et voilà qu’à minuit une trentaine de chrétiens orthodoxes sont sortis de l’église en procession, tenant des cierges allumés pour entonner l’hymne « Le Christ est ressuscité ! ». Le prêtre a dressé vers le ciel le crucifix et le cierge annonçant « Par la mort Il a vaincu la mort! ». Subitement, à une centaine de mètres de l’église, nous entendîmes des hurlements et des cris poussés par des hommes totalement ivres. Ils ramassaient des pavés et les jetaient dans notre direction. Les pubs venaient sans doute de fermer. J’ai entendu des jurons et le mot « bouddhistes ». Le petit troupeau orthodoxe a couru s’abriter derrière l’église, des pierres volaient dans notre direction. J’ai cru comprendre ce que pouvaient éprouver les chrétiens aux époques des persécutions. Il leur fallait, saisis par la peur, chuchoter « Le Christ est ressuscité ! ».
Les bêtes féroces qui nous attaquaient n’étaient pas des fidèles d’autres religions, c’étaient certainement des chrétiens baptisés au nom de la Sainte Trinité. Mais ils avaient oublié leur baptême. Et ils avaient reçu en échange l’immunité par rapport à l’éternité car ils niaient frénétiquement toute lueur venant d’en haut et s’étouffaient d’alcool dans leur désespéré désir d’oublier leurs origines édéniques et leur vocation céleste.

La chrétienté doit devenir à nouveau la foi des martyrs qui acceptaient la mort. Ce n’est que grâce à la liturgie et par la liturgie, cette éternelle réalité eucharistique, que nous pourrons comprendre et mettre en œuvre les paroles de Dieu à propos de Son Eglise : « Les portes de l'enfer ne prévaudront pas contre l'Eglise »

Traduction Nikita KRIVOCHEINE

Pavoslavie.ru

Rédigé par Nikita Krivocheine le 18 Septembre 2013 à 07:00 | 13 commentaires | Permalien



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